Les Mérovingiens
CHAPITRE CINQUIÈME : Clotaire II et Dagobert
(613 à 638)
II : Dagobert (628 à 638) |
1°
Avant-propos concernant le règne de Dagobert – A l’instar de tous les
Mérovingiens s’étant succédés depuis Clovis, l’étude du règne de Dagobert
pose la question des sources.
Dagobert, par
Émile SIGNOL, 1842, conservé au Musée National du château et des Trianons de
Versailles.
Pour la période qui nous
intéresse, elles sont au nombre de trois :
La chronique de Frédégaire,
reprenant les travaux de Saint Grégoire de Tours,
et poursuivant l’histoire des Mérovingiens jusqu’en 660 ; le Livre de
l’histoire des Francs, rédigé par un auteur inconnu, reprenant les écrits de
Frédégaire (et de Saint Grégoire pour les périodes antérieures), poursuivant
l’histoire des Mérovingiens jusqu’en 727 ; et les Gesta dagoberti,
ouvrage consacré à Dagobert et rédigé vers le milieu du IX° siècle.
A noter cependant que si
Grégoire de Tours, bien que présentant une histoire quelque peu simplifiée et
romancée, restait reste globalement fidèle à l’Histoire, les ouvrages rédigés
après sa mort sont au contraire plus politisés et moins neutres.
Par ailleurs, il convient de
préciser que Dagobert fut à postériori élevé au rang de souverain le plus digne
depuis Clovis .
Ainsi, nombreux sont les textes qui glorifient le règne de ce roi, rendant
difficile la tâche de l’historien cherchant à différencier le vrai et le faux.
Cuve dite "de Dagobert", musée du Louvre, Paris (cette cuve fut, selon la
légende, rapportée à Paris par Dagobert. Cet objet étant fait de porphyre,
un matériau précieux et à l'époque réservé à une élite, peut être Dagobert
s'en servit il comme baignoire ? Toutefois, les poignées n'étant pas
fonctionnelles, certains historiens pensent au contraire que cette cuve fut
peut être utilisée comme sarcophage provisoire par l'Empereur Charles le
Chauve, au IX° siècle après Jésus Christ.).
2° Le partage de
628 – A la mort de Clotaire II, Dagobert accourut d’Austrasie. Arrivant à
Paris, il rencontra Brodulf, frère de Sichilde, qui annonça au jeune homme que
Clotaire II avait nommé Charibert II comme seul héritier.
Toutefois, confondu par
Landri, le maire du palais de Neustrie, Brodulf fut exilé, puis Dagobert fut
reconnu comme roi des Francs par les leudes de Neustrie.
Son frère, Charibert II, fut
écarté sous prétexte d’imbécillité. Mais Ega, qui avait succédé à
Landri, mort peu après le sacre, annonça à Dagobert que des troubles avaient
éclaté en Aquitaine. Ainsi, l’on céda cette région à Charibert II, qui installa
sa capitale à Toulouse (son territoire s’étendait des Pyrénées à aux rives de la
Dordogne).
Suite à l’envoi de troupes dans
la région, l’insurrection fut rapidement matée.
2° Les premiers
mois de règne de Dagobert – En 629, quelques mois après son couronnement,
Dagobert entreprit une grande tournée en Austrasie et en Burgondie, afin
d’assoir son autorité sur les leudes ; à Losne, il fit tuer Brodulf ; puis il
répudia Gomatrude, considérant que son mariage avait été célébré sous la
contrainte.
En janvier 631, il participa au
baptême de son neveu Chilpéric, étant choisi comme parrain ; la même
année, il signa un accord de « paix perpétuelle » avec Héraclius,
l’Empereur byzantin .
Dagobert, par DUSEIGNEUR, château de Versailles, Versailles.
a) Guerre contre les Wendes
(630 à 631) : un Franc nommé Samo, ancien marchand, se mit à la tête
de la tribu slave des Wendes. Puis, luttant contre la domination des
Avars, il parvint à fédérer autour de lui de nombreuses tribus slaves. La
réunion de ces peuplades formait un vaste Empire, s’étendant de la république
tchèque à la Slovénie.
Des marchands francs qui
traversèrent les Etats de Samo furent molestés, et Dagobert exigea immédiatement
réparation. Toutefois, Samo refusa, et le roi des Francs lui déclara la guerre.
En 631, les troupes
austrasiennes avancèrent vers la capitale des Wendes (peut être près de Gratz,
en Autriche ?), mais elles subirent une défaite (peut être due aux désaccords
entre les leudes d’Austrasie et le roi des Francs).
Vaincu, Dagobert ne tenta pas
ultérieurement une autre offensive contre Samo.
b) Dagobert et la guerre de
succession wisigothique (631 à 633) : en 631, une insurrection éclata contre
Swinthila, roi des Wisigoths, qui avait pourtant réussi à chasser les
Byzantins d’Hispanie.
Sisenand, duc de
Septimanie (actuel Languedoc), demanda alors l’aide de Dagobert, lui offrant
200 000 pièces d’or. Ce dernier, soutenu par les Francs, parvint à chasser
Swithila du trône en 633.
c) La mort de Charibert
(632) : Charibert II mourut peu de temps après, en 632, ce qui permit à
Dagobert de récupérer l’Aquitaine. Le défunt avait eut un fils, Chilpéric, qui
mourut en 633 (l’on ne sait pas s’il mourut naturellement ou à l’instigation de
Dagobert).
3° Les réformes
de Dagobert – Devenu unique roi des Francs, Dagobert eut à cœur de
poursuivre la politique de son père, tenant de rétablir l’autorité royale au
sein du royaume.
a) Le rétablissement de
l’autorité royale : ainsi, il commença par disgracier Pépin de Landen et
Arnould, devenus trop puissants ; sur les conseils d’Eloi (ancien orfèvre
devenu trésorier), la frappe des monnaies fut centralisée à Paris, afin de
mettre fin aux fraudes ; il interdit aux leudes de partager leurs terres entre
leurs héritiers, les contraignant d’adopter le principe de la primogéniture ;
enfin, il fit agrandir la basilique Saint Denis ,
qui fut embellie sous la direction d’Eloi (y fut inhumé Saint Denis,
premier évêque de Paris).
b) Dagobert et les Bretons
(632 à 636) : en 632, le roi de Bretagne mourut (son nom est aujourd’hui
méconnu ; par ailleurs, les Francs ne lui reconnaissaient qu’un titre de comte).
Ce dernier n’ayant pas
d’héritiers mâles, la couronne revenait à son frère Judicaël, qui avait
épousé la vie monastique à compter de 605.
Soutenu par Dagobert, qui fit un
voyage vers le Poitou afin d’être mieux renseigné sur la situation en Bretagne,
Judicaël accepta de monter sur le trône. Ce dernier devait gouverner jusqu’à la
majorité de son fils (ou neveu) Winoc.
Comme le roi des Francs
demandait réparation pour les préjudices commis à Nantes et Rennes par le défunt
souverain, Judicaël se rendit à Clichy en 636, afin d’entamer des pourparlers.
Le roi de Bretagne s’engagea
alors à dédommager les leudes qui avaient été spoliés, tout en reconnaissant la
suzeraineté de Dagobert sur la Bretagne.
c) Dagobert et les Basques
(637) : l’année suivante, les Basques (ou Gascons) se
révoltèrent. Ces derniers étaient à la tête d’un territoire indépendant, menacés
à la fois par les Francs et par les Wisigoths.
Dagobert envoya alors une armée
burgonde afin de mater l’insurrection. Franchissant les Pyrénées, les Francs
obtinrent la soumission des Basques. Mais au retour, la troupe d’un des leudes
tomba dans une embuscade, aux alentours de Mauléon.
4° Une noblesse
toujours remuante – En 634, les leudes d’Austrasie se révoltèrent,
n’appréciant guère une union des trois provinces qui menaçait leur indépendance.
Ainsi, Dagobert fut contraint de
leur envoyer son fils, Sigebert III (né en 630), qu’il avait eu avec sa
maitresse Ragnétrude.
Le roi des Francs parvint
toutefois à écarter Pépin de Landen.
L’année suivante, les leudes de
Neustrie affichèrent à leur tour leur insatisfaction, réclamant que Dagobert
unisse les royaumes de Neustrie et de Burgondie (l’objectif était
vraisemblablement de se préparer à un futur conflit contre l’Austrasie).
Le roi des Francs y consentit,
plaçant à la tête de ce royaume son fils Clovis II (né en 635), qu’il
avait eu avec Nantilde, sa seconde épouse.
5° La mort de
Dagobert (638 ou 639) – En décembre 638, Dagobert mourut. Agé d’une
trentaine d’années, il n’avait régné que dix ans (il fut le dernier Mérovingien
à régner aussi longtemps sur un royaume unifié).
A sa mort, il fut inhumé dans la
basilique Saint Denis, qui devint plus tard la nécropole des rois de France.
Photographie des tombes des rois Mérovingiens
inhumés à St Denis (la grande majorité des sépultures est située derrière la
grille, une zone interdite au public.).
De ces nombreux mariages, le
défunt n’avait eu que deux fils, Sigebert III et Clovis II. Les deux enfants
étant encore jeunes, le pouvoir fut accaparé par les maires du palais, qui
profitèrent de la situation pour obtenir encore plus de pouvoir. Commençait dès
lors l’ère des rois fainéants…
Tombeau de Dagobert, en forme de portail d'église, XIII° siècle, église
Saint Denis, Paris (la fresque raconte le voyage de Dagobert aux Enfers.
Naviguant sur une barque entourée de démons, le roi ne doit son salut qu'à
l'intervention des évêques).
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