1°
Tibère le mal aimé (14 à 37) – Le nouvel Empereur (de son vrai nom
Tiberius Claudius Nero.) avait déjà 56 ans lorsqu’il monta sur le trône.
Né le 17 décembre 42 avant Jésus Christ, il était le fruit de l’union de
Tiberius Claudius Nero et Livie.
Buste de Tibère, entre 4 et 14 après
Jésus Christ, British Museum, Londres.
a)
La jeunesse de Tibère : le père de Tibère avait fait une brillante
carrière sous les ordres de César. Cependant, suite à la mort du dictateur,
il décida de rejoindre successivement Sextus Pompée puis Marc Antoine.
Auguste fit payer cher ce comportement au père de Tibère, réclamant de lui
son épouse Livie, alors enceinte.
Buste de Livie, entre 25 et 1 avant Jésus
Christ, British Museum, Londres.
Ce dernier dut s’exécuter la mort dans
l’âme, et mourut peu de temps après, en 33 avant Jésus Christ.
Tibère s’engagea très tôt dans le cursus honorum : questeur en 24
avant Jésus Christ, il fut nommé gouverneur de Gaule en 15 avant Jésus
Christ, il parvint à accéder à la charge de consul deux ans plus tard.
Il
épousa en première noce Vipsania Agrippina, une des filles d’Agrippa, le gendre
d’Auguste. Cependant, Agrippa mourut en 12 avant Jésus Christ, et Auguste
ordonna à son beau fils Tibère de se remarier avec Julia, sa fille unique et
épouse du défunt. Vipsania était alors enceinte, mais Tibère dut
néanmoins obéir à l’Empereur. Peu de temps après, Julia eut un fils, mais ce
dernier mourut jeune. Julia accumula alors les infidélités, et le couple
décida de se séparer.
Par la suite, il mena plusieurs campagnes en Germanie, sur les traces de son
frère Drusus (décédé lors d’une expédition dans la région en 9 avant Jésus
Christ.). Remportant quelques victoires, il fut félicité par Auguste
lorsqu’il rentra à Rome. Cependant, l’Empereur n’aimait guère Tibère. Ce
dernier décida de partir pour Rhodes en 6 avant Jésus Christ, attristé par
ce peu de reconnaissance. Tibère ne revint à Rome que sept ans plus tard,
suite à la mort de Caius et Lucius Caesar, les petits fils
d’Auguste.
Buste de Caius Caesar, 17 avant Jésus
Christ, musée du Louvre, Paris.
Ce dernier décida alors d’adopter Tibère (ce dernier prit alors
le nom de Tiberius Julius Caesar.). Il devint alors Empereur à la
mort de son père adoptif, en 14 après Jésus Christ.
b)
Le règne de Tibère : dès son accès au pouvoir suprême (il prit le nom de
Tiberius Caesar Augustus.), Tibère commença par éliminer Agrippa
Postumus (fils posthume d’Agrippa, et donc petit fils d’Auguste.), qui
aurait pu un jour revendiquer le trône.
Buste d'Agrippa Postumus.
Il fit aussi tuer son ex-femme
Julia, qui continuait à commettre ses infidélités. Enfin, il rappela son
neveu Germanicus de Germanie : en effet, ce dernier y avait mené
entre 14 et 16 une campagne victorieuse (il avait battu Arminius,
responsable du massacre de Teutobourg, et avait ramené les aigles dérobés à
Varus.), et ses légions voulaient le proclamer Empereur.
Restes humains trouvés sur le lieu de la bataille de Teutobourg, I° siècle
après Jésus Christ, Deutsches historisches museum, Berlin.
Buste de Germanicus, 4 après Jésus
Christ, musée du Louvre, Paris.
Tibère, jaloux de
la popularité de Germanicus (qui était son fils adoptif.), décida d’écourter
sa campagne et l’envoya en Syrie. Il y mourut en 19, et les soupçons se
portèrent alors sur l’Empereur.
A
partir de 17, Tibère commença à être influencé par Séjan (de son vrai
nom Lucius Aelius Sejanus.), le préfet de la garde prétorienne.
Ce dernier devint peu à peu le bras droit de l’Empereur, mais n’eut pas le
rôle bénéfique qu’avait eut Agrippa auprès d’Auguste par le passé : en
effet, Séjan fit en sorte d’éliminer ceux qui s’opposaient à lui, et fit en
sorte d’isoler Tibère.
Le
préfet commença par augmenter les pouvoirs de la garde prétorienne, qui
devint un véritable contre pouvoir au fil des siècles : autrefois, la garde
prétorienne était divisée dans plusieurs quartiers de Rome. Séjan fit
construire le Castra Praetoria, où furent réunis tous les prétoriens.
Puis, il séduisit Livia Julia (sœur de Germanicus.), l’épouse du fils
de Tibère, Drusus II.
Buste de Drusus II, vers 21 après Jésus
Christ, musée du Louvre, Paris (à gauche) ; buste de Livia Julia, vers 20
après Jésus Christ, Altes museum, Berlin (à droite).
Ce dernier n’appréciait pas Séjan, s’étant
rendu compte de l’ambition malsaine de ce personnage (il l’avait d’ailleurs
giflé au cours d’un repas.). Mais le préfet du prétoire, grâce à l’aide de Livia Julia (elle était devenue sa maîtresse.), fit alors empoisonner Drusus
II (en 23.).
Suite à la mort du fils de l’Empereur, Séjan demanda à Tibère la main de
Livia Julia, mais ce dernier la lui refusa (s’il avait accepté, le préfet
aurait été de fait le successeur de Tibère.).
A
partir de 26, Tibère décida de se retirer à Capri, laissant de plus en plus
de pouvoir à Séjan. Ce dernier en profita pour s’attaquer à Agrippine
(la veuve de Germanicus.) et ses enfants.
Buste d'Agrippine.
Ce
n’est qu’en 31 que Tibère apprit que Séjan tramait un complot contre sa
personne. L’Empereur décida alors de nommer Macron préfet du prétoire
(de son vrai nom Quintus Naevius Cordius Sertorius Macro.). Ce
dernier se rendit ensuite à Rome, chargé de lire une lettre écrite par
l’Empereur au cours d’une séance du sénat. La lettre fut lue en présence des
sénateurs et de Séjan lui-même : Tibère ordonnait que l’on emprisonne
immédiatement l’ancien préfet du prétoire. Séjan fut alors arrêté, condamné
à mort et exécuté. Son corps fut livré pendant trois jours aux fureurs de la
foule, puis jeté dans le Tibre. Sa femme, Apicata, se suicida après
avoir avoué les complots de son défunt mari.
Dans les cinq dernières années de sa vie, Tibère, devenu méfiant à
l’extrême, multiplia les accusations de lèse-majesté. Encourageant la
délation, faisant régner la terreur à Rome, il élimina ainsi de nombreux
sénateurs. L’Empereur répétait souvent
Oderint dum probent (‘Qu’ils
me haïssent, pourvu qu’ils me craignent’.).
Finalement, Tibère mourut à Capri, en 37. Certaines sources affirment que
son petit neveu Caligula, le fils de Germanicus, l’étouffa sous des
couvertures. D’autres, par contre, affirment que l’Empereur aurait été tué
par Macron. Cependant, aujourd’hui, nous ne pouvons pas affirmer avec
certitude que Tibère fut assassiné. Peut être mourut il de mort naturelle
(il avait tout de même 78 ans.). Il reçut alors la titulature suivante :
Tiberius Caesar Divi Augusti Filius Augustus, Pontifex Maximus, Tribuniciae
Potestatis XXXVIII, Imperator VIII, Consul V. Il ne fut cependant pas
divinisé par le sénat, qui lui refusa cet honneur.
c)
La légende noire de Tibère : Tibère a laissé dans l’Histoire l’image
d’un Empereur tyrannique et cruel.
Tout d’abord, ce dernier était connu pour être un grand amateur de boisson.
Au cours des campagnes qu’il avait dirigé, ses soldats avaient transformé
son vrai nom, Tiberius Claudius Nero en Biberius Caldius Mero : en
effet, Biberius signifie ‘buveur de vin’, Caldius signifie
‘plus chaud’ (les Romains consommaient du vin chaud.), Mero est
l’ablatif de Merum, qui veut dire ‘vin pur’. Les auteurs antiques
affirment que lors de sa retraite à Capri, Tibère se livra à d’innombrables
orgies.
Cependant, il conviendrait néanmoins de nuancer les propos des auteurs
antiques, qui furent les premiers à attaquer Tibère. Car en effet,
l’Empereur ne devint véritablement tyrannique qu’au cours de ses cinq
dernières années de règne (approximativement de 33 à 37.)
Sous le règne du second Empereur, les finances furent bien administrées. En
outre, Tibère détestait vivre dans le luxe, et ne fit donc pas de grandes
dépenses. Au final, il laissa dans les caisses de Rome un excédent de
plusieurs millions de sesterces. De même, l’or provenant principalement des
provinces, les gouverneurs furent étroitement
surveillés, comme sous Auguste. Tibère répétait souvent boni pastori
tondere pecus, non deglubere (‘Un bon pasteur doit tondre son troupeau,
pas l’écorcher’.)
En
ce qui concerne la diplomatie, Tibère se montra toujours résolument ferme :
il combattit l’insurrection de Tacfarinas en Numidie ; de
Sacrovir en Gaule (ce dernier était un aristocrate Eduen, qui souleva
les auxiliaires romains qu’il commandait. Vaincu, il incendia sa maison et
se jeta dans le brasier.) ; et veilla toujours à ne pas laisser entamer les
frontières de l’Empire. L’Empereur dut néanmoins renoncer à annexer la
Germanie, ramenant la frontière sur le Rhin, et non plus sur l’Elbe (malgré
les victoires de Germanicus qui avaient permis d’effacer la défaite de Varus
en 9.).
Médaille militaire romaine, I° siècle après Jésus Christ, Deutsches
historisches museum, Berlin.
Au
final, Tibère parvint tant bien que mal à maintenir l’édifice qui fut élevé
par Auguste.
Obélisque de la Trinité-des-Monts, Rome
(cette oeuvre est en fait une copie des obélisques ramenés à Rome par
Auguste au cours des décennies précédentes. Toutefois, nous ne savons pas
aujourd'hui à quelle date précise cet édifice fut érigé. En 1789; afin de
plaire à la France, l'obélisque fut déplacé devant une église française, et
son sommet fut orné d'une fleur de lys.).
2° Caligula, l’Empereur fou (37 à 41) - Caligula (de son
vrai nom Caius Julius Caesar Germanicus.), né en 12 après Jésus
Christ, était le petit neveu de Tibère (il était le fils de Germanicus,
neveu de Tibère, et d’Agrippine l’ancienne, fille d’Agrippa.).
Son surnom Caligula signifie ‘petite caliga’ (les caligae
étant les sandales que portaient les militaires romains.). En effet, alors
que Caligula était enfant, il suivait son père Germanicus au cours de ses
campagnes militaires. Cependant, bien qu’étant petit, il s’habillait à la
mode militaire, et les soldats lui donnèrent ce surnom affectueux.
Soldats romains, I° siècle après Jésus
Christ, Altes museum, Berlin.
Séjan avait fait tuer les frères de Caligula et Drusus II, mais pas le fils de
ce dernier, Tiberius Gemellus.
Buste de Tiberius Gemellus.
Cependant, Tibère n’aimait guère son
propre petit fils, car il avait peur que ce dernier ne soit pas en réalité
le fils de Drusus II mais de Séjan (Rapellons que Livia Julia, l’épouse de
Drusus II, avait été la maîtresse de Séjan.). Caligula fut donc désigné par
les sénateurs comme l’héritier de Tibère. Accédant donc au trône, le jeune
homme reçut le nom de Caius Caesar Augustus Germanicus.
Buste de Caligula, vers 39 après Jésus Christ, musée
national de Rome, Rome.
Au
cours des six premiers mois de règne, le nouvel Empereur reçut les faveurs
de ses sujets : les soldats appréciaient Caligula, qui avait participé à de
nombreuses campagnes depuis son plus jeune âge, et il rappelait aux
Romains le regretté Germanicus. On le voyait comme un rescapé, sa famille
ayant été persécutée par Séjan (et peut être aussi à cause de Tibère.).
Caligula commença par faire rentrer à Rome les cendres de ses parents,
interdit les accusations de lèse-majesté, refusa d’écouter les délateurs, et
se concilia les bonnes grâces du peuple en organisant de nombreux jeux au
cirque.
Vestiges du Circus Maximus, Rome, été
2013.
Cependant, au bout de huit mois de règne, Caligula tomba gravement malade
(il avait eu des crises d’épilepsie étant jeune.), et après s’être remis sur
pied, son comportement changea (les auteurs antiques affirment qu’il sombra
dans la folie suite à sa maladie. Cependant, nombreux sont ceux qui
remettent cette thèse en cause aujourd’hui, sachant que Caligula n’était
déjà pas sain d’esprit alors qu’il vivait à Capri, auprès de Tibère.).
Maître d’un Empire immense à l’âge de 26 ans, il commença à accumuler les
extravagances et toutes sortes de cruautés, rêvant sans doute de mettre en
place un despotisme à l’orientale, ou le roi possédait ses sujets comme des
esclaves (d’ailleurs, les auteurs antiques ont tant épanché sur la folie de
Caligula, que l’on se sait trop aujourd’hui faire la différence entre le
vrai et le faux.).
Il
condamna à la mort ou à l’exil de nombreuses personnes de sa famille (il fit
tuer Tiberius Gemellus.), eut des relations incestueuses avec ses sœurs,
principalement Drusilla (il leur conféra néanmoins les mêmes
privilèges que l’on conférait aux vestales.), enleva
la femme de
Caius Calpurnius Piso
le jour de leur mariage (imitant ainsi Romulus et Auguste, selon les
mots de Caligula.).
Autres folies, moins dangereuses pour son
entourage, il interdit les œuvres d’Homère et de Tite Live dans les
bibliothèques de Rome, et fit bâtir une maison à Incitatus, le
meilleur cheval de son écurie. Caligula lui faisait donner à manger dans une
mangeoire en ivoire, et annonça même son intention de le faire consul (sans
doute voulait il humilier le sénat, rabaissant ainsi les institutions de la
vieille république.).
Enfin, Caligula voulut lui aussi connaître ce qu’était la gloire militaire.
En 39, il fit une expédition en Germanie, d’où il en revint accompagné de
centaines de prisonniers : il s’agissait en réalité de ses propres soldats,
à qui il avait demandé de tenir le rôle. En 40, Caligula souhaita s’attaquer à la
Bretagne, mais, arrivé devant la côte, il ne voulut pas embarquer. Restant sur le bord de la mer, il
ordonna à ses soldats de ramasser des coquillages, puis rentra à Rome.
Le
24 janvier 41, à l’âge de 29 ans, Caligula fut percé de 30 coups d’épée par
deux prétoriens, Cassius Chaereas et Cornelius Sabinus, alors
qu’il quittait son palais pour se rendre au forum. Peu après, sa femme et sa
fille, âgée de trois ans, connurent le même sort. L’assassinat avait sans
doute été commandité par le sénat.
Complots et assassinat de Caligula, par
Flavius Josèphe (traduction
anonyme), enluminure issue de l'ouvrage
Antiquités judaïques,
Bruges, Belgique, XV° siècle.
A
sa mort, il reçut la titulature suivante : Caius Caesar Augustus
Germanicus, Pontifex Maximus, Tribuniciae Potestatis, Consul IV, Pater
Patriae. Caligula ne fut évidemment pas divinisé suite à son décès.
3° Claude, Empereur malgré lui (41 à 54) –
Claude (de son vrai nom Tiberius Claudius Drusus.) était né en
10 avant Jésus Christ, à Lugdunum (il était le premier Empereur romain à
naître en dehors de Rome.). Il était le frère de Germanicus et l’oncle de
Caligula, donc un candidat naturel à la succession de ce dernier.
Buste de Claude, 37-54 après Jésus Christ, Altes museum.
a)
La jeunesse de Claude : Claude souffrit de nombreuses infirmités dès
son plus jeune âge (faiblesse physique, bégayement, etc.). Cependant, bien
qu’étant instruit et cultivé, il n’était apprécié ni par Auguste (son grand
père par alliance.), ni même par sa mère Antonia, qui le repoussait à
cause de son handicap.
L'Empereur Claude, I° siècle après Jésus Christ, musée du Louvre, Paris (à
gauche) ; Antonia en costume de Cérès,
I° siècle après Jésus Christ, musée du Louvre, Paris (à droite).
S’intéressant à l’Histoire, Claude écrivit un ouvrage
sur les guerres civiles, qui ne plut pas à Auguste. Ce dernier se souvint
que Claude était le petit fils de Marc Antoine, et fit en sorte de le
maintenir en retrait de la vie politique.
A
la mort d’Auguste, en 14 après Jésus Christ, Claude, alors âgé d’une
vingtaine d’années, demanda à son oncle Tibère de lui permettre de se lancer
dans le cursus honorum. Cepedant, l'Empereur rejeta la demande de
Claude.
Le
jeune homme renonça donc à la politique, mais gagna néanmoins la sympathie de la
classe des chevaliers (en effet, ces derniers considérèrent que Claude avait
été évincé pour des raison politiques.). En outre, à la mort de Drusus II, les
equites virent en Claude un successeur potentiel de Tibère.).
Lors de la terreur orchestrée par Séjan, Claude parvint à survivre, sans
doute grâce à ses infirmités (le préfet de la garde prétorienne ne le
considéra sans doute pas comme une menace.). Par la suite, au cours du règne
de Caligula, Claude fut fait consul, afin de ranimer le mouvement de
sympathie que les Romains avaient pour Germanicus. Cependant, le jeune
Empereur perdant rapidement la raison, il commença à se servir de son oncle
comme d’un souffre douleur.
b)
Le règne de Claude : en 41 avant Jésus Christ, suite à la mort de
Caligula, les prétoriens, qui avaient été payés par Claude, décidèrent de
soutenir sa candidature devant les sénateurs. Ces derniers durent obéir, la
mort dans l’âme, car il songeait à remettre en place la république. Agé de
près de 50 ans, Claude reçut alors le nom de Tiberius Claudius Caesar
Augustus Germanicus.
Buste de Claude, musée du Louvre, Paris
(à noter que le style de cette sculpture indique une conception tardive,
bien postérieure au règne de Claude).
Claude, malgré son manque d’expérience, parvint néanmoins à affermir et
agrandir l’Empire.
Il
continua la politique de grands travaux instaurée par ses prédécesseurs
(construction d’aqueducs, construction d’un phare à Ostie.), permit au
Gaulois de siéger au sénat (ce qui fit scandale.), étendit la citoyenneté
romaine à beaucoup de provinces, et fit publier de nombreuses lois (le
meurtre d’un esclave fut dès lors assimilé à un homicide, amélioration du
statut de la femme au foyer, etc.).
Discours de l'Empereur Claude au Sénat,
vers 41-54, Neues museum, Berlin.
Mais Claude fit en outre d’importantes conquêtes militaires : en 43, Claude
s’empara de la partie sud est de la Bretagne (lui et son fils reçurent alors
le surnom de Britannicus.). En 51, l’impératrice Agrippine la
Jeune fonda en Germanie une colonie militaire baptisée en son nom,
Colonia Agrippina (il s’agit de l’actuelle Cologne.). En Orient, la
Thrace fut rattachée à l’Empire ; en Afrique les provinces de Maurétanie
césarienne et de Maurétanie Tingitane virent le jour. Les Romains
conquirent aussi la Lycie (une région du sud de l’Asie mineure.) et la
Norique (correspondant approximativement à la moitié est de l’Autriche
actuelle.).
Cependant, Claude, timide et gauche, fut toute sa vie influencé par ses
femmes et par ses affranchis. Quelques uns eurent véritablement des rôles de
ministres : Pallas (chargé des finances.), Narcisse (chargé
des affaires étrangères et de l’intérieur.), Calliste (gestion des
doléances et des requêtes.), Polybe (direction des archives
impériales.) Posidès et Felix (missions militaires.),
Harpocras (justice.), etc. A noter que les trois premiers avaient une
certaine prépondérance vis-à-vis des autres (l’Empereur avait aussi une
admiration particulière pour Polybe.). Claude décida de les honora en leur
donnant les insignes de la questure et de la préture, au grand dam de
l’aristocratie romaine (c’est pour cette raison que les auteurs antiques,
issus de familles aristocratiques, brossent souvent un portrait bien noir de
Claude.).
Par contre, l’influence qu’eurent les femmes sur Claude fut bien plus
funeste, car cela causa sa mort. Marié avec Messaline (une arrière petite
fille de Marc Antoine.), il eut avec elle deux enfants (Britannicus et
Octavie.).
Statue de Messaline, vers 45 après Jésus
Christ, musée du Louvre, Paris.
Cependant, son épouse se rendit célèbre par ses orgies, et
Claude souffrit beaucoup du comportement impudique de cette dernière.
Narcisse fut alors chargé de l’assassiner, en 48. Il se remaria l’année
suivante avec sa nièce Agrippine la Jeune, la sœur de Caligula.
A gauche, buste présumé d'Agrippine la Jeune, vers
44 après Jésus Christ, musée du Louvre, Paris ; à droite, buste d'Agrippine
la Jeune, I° siècle après Jésus Christ, musée de l'Acropole, Athènes.
Cette
dernière, mariée une première fois avec Cneius Domitius Ahenobarbus,
avait eu un fils, Néron. Agrippine parvint à faire adopter Néron par
Claude, puis à le faire désigner comme seul héritier (Claude écarta son
propre fils Britannicus, mais maria sa fille Octavie avec Néron.). Une fois
que l’Empereur eut exaucé tous les vœux de sa nouvelle épouse, cette
dernière le fit empoisonner. Claude mourut en octobre 54, après avoir
consommé un plat de champignons empoisonnés.
A
sa mort, Claude fut divinisé et reçut la titulature suivante : Tiberius
Claudius Caesar Augustus Germanicus, Pontifex Maximus, Tribuniciae Potestate
XIV, Consul V, Imperator XXVII, Pater Patriae.
4° Néron, le dernier des Julio-claudiens (54 à 68) –
Néron (de son vrai nom Lucius Domitius Ahenobarbus.) naquit en
décembre 37, fruit de l’union de Cneius Domitius Ahenobarbus et d’Agrippine
la Jeune.
Buste de Néron jeune, vers 56 après Jésus
Christ, musée du Louvre, Paris.
Son père mourut en 40, alors qu’il était âgé de trois ans seulement. Sa
mère, quant à elle, avait été exilée par Caligula, son propre frère. A cette
époque, Néron ne s’imaginait pas pouvoir un jour monter sur le trône,
d’autant que les maris des sœurs de Caligula étaient particulièrement
ambitieux (néanmoins, Caligula élimina ses beaux frères les uns après les
autres.).
Ce
n’est qu’à la mort de son frère qu’Agrippine revint à Rome, à la demande de
Claude. Par la suite, elle épousa le riche Gaius Sallustius Crispus
Passienus, qui ne tarda pas à mourir (Agrippine fut suspectée de meurtre,
mais ne fut pas condamnée.). Dotée d’une petite fortune, Agrippine épousa
alors Claude, faisant en sorte que ce dernier adopte Néron (ce dernier prit
alors le nom de Nero Claudius Caesar Drusus Germanicus.) et en fasse
son héritier. Une fois ceci fait, elle l’empoisonna, en octobre 54.
a)
Le quinquennium Neronis : acclamé par les prétoriens, Néron fut
ensuite reconnu par le sénat. Il monta alors sur le trône, à l’âge de 17
ans.
Les cinq premières années du règne de Néron (le quinquennium Neronis.)
furent considérées comme des années prospères, par les auteurs anciens.
Sesterce à l'effigie de Néron, I° siècle après Jésus Christ, Deutsches
historisches museum, Berlin.
En
effet, au début de son règne, le jeune Empereur fut efficacement secondé par
ses proches : son tuteur Sénèque (de son vrai nom Lucius Annaeus Seneca.),
le préfet du prétoire Sextus Afranius Burrus, et sa mère Agrippine.
Il
proposa la suppression des impôts indirects, fit en sorte que les esclaves
purent se plaindre de mauvais traitements auprès des gouverneurs de
provinces, interdit les longs plaidoyers dans les tribunaux, etc.
En
ce qui concerne la politique extérieure, Néron remporta quelques succès. En
58 et 59, le général Gnaeus Domitius Corbulo (francisé en Corbulon.)
parvint à s’emparer de l’Arménie, et fit la paix avec les Parthes. En
Germanie, les Romains parvinrent à jouer des divisions entre tribus
germaines pour mieux s’implanter dans la région. En Bretagne, le général
Suetonius Paullinus réprima une insurrection, remontant jusqu'au
sanctuaire druidique de Mona (au nord ouest du Pays de Galles
actuel.).
Cependant, le quinquennium Neronis ne fut pas exempt de crimes. Déjà
à cette époque, les rivalités intestines commençaient à poindre. Agrippine,
qui désirait agir en tant qu’impératrice, commença à s’opposer à Sénèque et
Burrus, puis finit par s’opposer à Néron lui-même (afin d’assujettir son
fils, certains auteurs antiques affirmèrent qu’elle eut des relations
incestueuses avec lui.). Un sujet important de discorde fut la relation
entre Octavie et le jeune Empereur. En effet, ce dernier n’appréciait pas
son épouse, et commença à la tromper. Agrippine décida de soutenir sa belle
fille, alors que Burrus et Sénèque défendirent leur protégé.
Le
premier évènement grave fut la mort de Britannicus, en février 55.
Aujourd’hui, nous ne savons pas si le décès du jeune homme fut naturel ou
bien s’il s’agit d’un meurtre. Le fait est que les auteurs antiques
soupçonnèrent Néron pour plusieurs raisons : à cette époque, Agrippine avait
de moins en moins d’influence sur son fils, et commençait à se rapprocher de
Britannicus. En outre, ce dernier allait bientôt accéder à la majorité, et
pouvait être une menace pour Néron, vu qu’il était du fils du précédent
Empereur. Cependant, cette thèse n’est qu’une explication parmi tant
d’autres, et nous ne connaîtrons à priori jamais ce qui se passa en
réalité…
En
outre, Néron, qui laissait ses conseillers s’occuper des affaires d’État,
s’entoura d’un certains nombres de favoris, aussi débauchés que l’Empereur.
Les auteurs antiques affirment qu’ensemble, ils se rendaient dans des
tavernes, buvaient et molestaient les gens qui se trouvaient là. Le
principal compagnon de Néron était Marcus Salvius Otho (françaisé en
Othon.), issu d’une famille de patriciens. Les deux hommes fréquentaient en
outre une jeune femme d’une grande beauté, Poppée (de son vrai nom
Poppea Sabina.). Les sources indiquent qu’il y aurait eu un triangle
amoureux entre les trois personnages.
Buste de Poppée.
Un
premier tournant eu lieu avec l’assassinat d’Agrippine, en 59. Othon, qui
avait épousé Poppée, fut sommé par Néron de divorcer. Celui-ci refusa, et
l’Empereur l’envoya en Lusitanie comme questeur.
Néron voulut alors épouser la jeune femme, mais pour cela il devait répudier
Octavie, ce à quoi Agrippine était opposée. L’Empereur, exaspéré par
l’influence de sa mère et par sa soif de pouvoir, décida alors de s’en
débarrasser. Il tenta tout d’abord de la noyer (ayant saboté le navire sur
lequel elle se trouvait.), mais Agrippine réussit à survivre, gagnant la
rive à la nage. Puis, par la suite, il la fit assassiner par un de ses
soldats. Sénèque tentant de couvrir le meurtre au sénat, prétexta que la
défunte préparait une conspiration, mais la réputation de Néron fut néanmoins
entachée.
b)
Néron, un second Caligula : un second tournant eu lieu en 62. Au
cours de cette année, Burrus mourut, et Sénèque décida de se retirer de la
vie politique. Ces derniers furent alors remplacés par Faenius Rufus
et Caius Ofonius Tigelinus (francisé en Tigellin.). Le premier
se révéla être un incompétent notoire ; le second, accusé par le passé
d’adultère avec Agrippine la Jeune, avait été exilé par Caligula. Rappelé
par Claude, il s’installa comme éleveur de chevaux de course, un sport qui
passionnait Néron.
Tigellin remplaça Othon, que Néron avait exilé, et il eut sur l’Empereur une
influence supérieure à celle que Sénèque avait pu avoir par le passé.
Peu de temps après, Poppée tomba enceinte, et Néron décida de légaliser leur
union en l’épousant. Cependant, il devait pour cela répudier Octavie. Il
commença par l’accuser d’adultère, mais tout le monde savait à Rome que
c’était Néron qui trompait sa femme, et non l’inverse. Finalement, il
parvint à s’en débarrasser en l’accusant d’infertilité, et put épouser
Poppée. Mais en juin 62, Octavie fut retrouvée morte, ce qui provoqua des
émeutes dans la ville (évidemment, Néron fut le premier suspect, bien que
l’on ne sache pas aujourd’hui quel est sa responsabilité dans ce décès.).
Début 63, Poppée accoucha d’une fille, Claudia Augusta, mais cette
dernière ne vécut que quelques mois.
Cette même année 62, Néron fit assassiner Pallas (un des affranchis de
Claude.), ainsi que les hommes de sa famille qui auraient pu prétendre au
titre impérial.
Buste de Néron.
Néron s’attira encore les foudres des Romains en juillet 64. En effet, c’est
à cette date qu’éclata le Grand incendie de Rome, qui fit rage pendant six
jours. Sur les quatorze quartiers de la ville, trois furent entièrement
détruits, sept autres furent endommagés. Les habitations des généraux
d’autrefois, de nombreux temples et monuments disparurent. Certains
historiens antiques racontent que Néron, juché en haut d’une tour, lyre à la
main, récitait des vers sur la chute de Troie, admirant le spectacle.
Suite à l’incendie, Néron proposa immédiatement des projets de
reconstruction de la ville, dans un style plus monumental. A tort ou à
raison, les Romains (et la plupart des auteurs antiques.) virent en lui un
incendiaire, et commencèrent à l’accuser.
Néron, ne voulant pas être un bouc émissaire, décida de retourner la fureur
du peuple contre les chrétiens (ces derniers pratiquaient une religion qui
prenait de plus en plus d’ampleur à Rome.). Ainsi commencèrent les premières
persécutions de grande ampleur contre les chrétiens :
selon les sources antiques, un grand nombre d’entre eux furent crucifiés, jetés aux lions, brûlés vifs,
etc.
Néron put alors reconstruire la ville comme il lui plaisait : il se fit
construire un palais monumental (la Domus Aurea.), érigea une
colossale statue de bronze le représentant (c’est devant cette dernière que
fut construit le Colisée, plusieurs années après.), etc.
Néron, contrairement à son ancêtre Tibère, dépensa une fortune en frais
somptuaires. Certains auteurs affirment que l’Empereur fit mettre à mort de
riches Romains afin de s’emparer de leur fortune, et qu’il vida les temples
de leurs richesses.
Un
nouveau scandale éclata en 65. Néron, qui avait toujours apprécié la musique
et le théâtre, décida de faire profiter les Romains de ses talents
artistiques (concours de poésie, etc.). En outre, il commença à participer à
des courses de char. Évidemment, Néron remporta de nombreux prix, ses
adversaires n’ayant pas l’impudence de le vaincre.
Les Romains, pour qui la fonction d’Empereur était incompatible avec celle
d’amuseur public, trouvèrent scandaleuse la conduite de Néron.
La
même année, un complot l’Empereur fut mis à jour :
la conjuration
de Pison (du nom du consul Caius Calpurnius Piso, dont Caligula avait
enlevé l’épouse.). Pison, aidé de
quelques sénateurs et de Faenius Rufus (ancien préfet du prétoire.), devait
être conduit devant la garde prétorienne, et les charger de tuer Néron.
Cependant, le complot fut découvert, et de nombreux conspirateurs furent
faits prisonniers et exécutés. D’autres furent contraints de se suicider,
comme Sénèque, son neveu Lucain, ou Pétrone (accusé à tort par
Tigellin.).
Le suicide de Sénèque, par Boccace,
enluminure issue de l'ouvrage De mulieribus claris (traduction
anonyme), Paris, France, XV° siècle.
La mort de Sénèque,
par Jacques Louis DAVID, 1773, Petit palais, Paris.
Enfin, c’est au cours de cette année 65 que Poppée, alors enceinte, mourut.
Néron lui aurait donné un violent coup de pied dans le ventre car cette
dernière lui reprochait de passer trop de temps au cirque.
En
66, Néron décida d’organiser une grande tournée en Grèce. Il participa aux
jeux olympiques (où il remporta tous les prix.), proclama la liberté de la
Grèce, ordonna au général Corbulon de se suicider (sa trop grande popularité
contrariait Néron.), et s’empara de centaines de statues à Delphes.
c)
La fin de règne : Néron rentra à Rome en 67, et il se rendit alors
compte que son Empire était en train de s’écrouler. Nymphidius Sabinus,
préfet du prétoire, tentait de se concilier les faveurs du sénat et des
prétoriens ; Gaius Julius Vindex, gouverneur de Gaule lyonnaise, se
révolta ; Galba (de son vrai nom Lucius Livius Ocella Sulpicius
Galba.), gouverneur d’Hispanie, se révolta aussi.
Galba fut condamné à mort par Néron. Cependant, il se proclama modestement
légat du sénat et du peuple romain,
et refusa d’obéir à Néron. Peu après, Galba s’entendit avec Vindex et Othon,
gouverneur de Lusitanie.
C’est alors que Néron envoya Verginius Rufus, gouverneur de Germanie
inférieure, se battre contre Vindex. Ce dernier fut alors vaincu par son
adversaire.
Cependant, la situation de Néron ne s’améliora pas pour autant. En effet,
Lucius Claudius Macer, légat de la III° légion Auguste en
Afrique, cessa d’envoyer du blé à Rome. Cela provoqua une famine, et le
peuple se souleva contre Néron.
C’est alors que Nymphidius Sabinus épousa le parti de Galba, promettant au
prétoriens une récompense de 30 000 sesterces par personne s’ils le
soutenaient.
En
juin, le sénat proclama alors Néron ennemi public. Ce dernier dut s’enfuir
de Rome, déguisé, et courut se réfugier chez son affranchi Phaon.
Cependant, ses ennemis parvinrent à le retrouver. Néron, ne voulant pas
affronter la vindicte populaire, décida alors de se suicider. Cependant, ne
parvenant pas à enfoncer le fer dans sa gorge, il demanda l’aide d’un de ses
esclaves. En mourant, il prononça les mots Qualis artifex pereo
(‘quel grand artiste périt avec moi’.).
Ses restes furent brûlés, et placés dans le sépulcre des Domitii. De
leur côté, les sénateurs décidèrent de prononcer la damnatio memoriae
à l’encontre du défunt Empereur (cette mesure condamnait à l’oubli ceux qui
en étaient frappés. En outre, leur nom était effacé des inscriptions
publiques, les statues à leur image renversées, etc.).
Avec Néron s’éteignait la dynastie des Julio-claudiens. Sa titulature fut
Imperator Nero Claudius Caesar Augustus Germanicus, Pontifex Maximus,
Tribuniciae Potestatis XIV, Imperator XII, Consul V, Pater Patriae.
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