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Mythologie
 
 

 

 

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Abrégé de l'histoire universelle depuis Charlemagne jusques à Charlequint

Chapitre XIV : De l'Espagne et des Musulmans aux VIIIe et IXe Siècles.

 

Je vois dans l'Espagne des malheurs et des révolutions d'un autre genre, qui méritent une attention particulière. Il faut remonter en peu de mots à la source, et se souvenir que les Goths usurpateurs de ce Royaume, devenus Chrétiens et toujours barbares, furent chassés au VIIIe Siècle par les Musulmans d'Afrique. Je crois que l'imbécillité du Roi Vamba qu'on enferma dans un Cloître, fut l'origine de la décadence de ce Royaume. C'est à sa faiblesse qu'on doit les fureurs de ses successeurs. Vitiza, Prince plus insensé encore que Vamba, puisqu'il était cruel, fit désarmer ses sujets qu'il craignait, mais par-là il se priva de leur secours.

Rodrigue dont il avait assassiné le père, l'assassina à son tour, et fut encore plus méchant que lui. Il ne faut pas chercher ailleurs la cause de la supériorité des Musulmans en Espagne. Je ne sais s'il est bien vrai que Rodrigue eût violé Florinde, nommée la "Cava" ou la "Méchante", fille malheureusement célèbre du Comte Julien, et si ce fut pour venger son honneur que ce Comte appela les Maures. Peut-être l'aventure de la Cava est copiée en partie sur celle de Lucrèce, et ni l'une ni l'autre ne paraît appuyée sur des monuments bien authentiques. Il paraît que pour
appeler les Africains on n'avait pas besoin du prétexte d'un viol, qui est d'ordinaire aussi difficile à prouver qu'à faire. Déjà sous le Roi Vamba, le Comte Hervig, depuis Roi, avait fait venir une armée de Maures. Opas Archevêque de Séville, qui fut le principal instrument de la grande révolution, avait des intérêts plus chers à soutenir que ceux de la pudeur d'une fille. Cet Évêque, fils de l'usurpateur Vitiza détrôné et assassiné par l'usurpateur Rodrigue, fut celui dont l'ambition fit venir les Maures pour la seconde fois. Le Comte Julien, gendre de Vitiza, trouvait dans cette seule alliance assez de raisons pour se soulever contre le tyran. Un autre Évêque nommé Torizo, entra dans la conspiration d'Opas et du Comte. Y a-t-il apparence que deux Évêques se fussent ligués ainsi avec les ennemis du Nom Chrétien, s'il ne s'était agi que d'une fille?

Quoi qu'il en soit, les Mahométans étaient maîtres comme ils le sont encore, de toute cette partie de l'Afrique qui avait appartenu aux Romains, ils venaient d'y fonder la Ville de Maroc près du Mont Atlas. Le Calife Valid Almanzor, maître de cette belle partie de la Terre, résidait à Damas en Syrie. Son Vice-roi Muzza, qui gouvernait l'Afrique, fit par un de ses Lieutenants la conquête de toute l'Espagne. Il y envoya d'abord son Général Tarif, qui gagna en 714 cette célèbre bataille où Rodrigue perdit la vie. On prétend que les Sarrasins ne tinrent pas leurs promesses à Julien, dont ils se défiaient sans-doute. L'Archevêque Opas fut plus satisfait d'eux. Il prêta serment de fidélité aux Mahométans, et conserva sous eux beaucoup d'autorité sur les Églises Chrétiennes, que les vainqueurs toléraient.

Pour le Roi Rodrigue, il fut si peu regretté que sa veuve Egilone épousa publiquement le jeune Abdalis, fils du Sultan Muzza, dont les armes avaient fait périr son mari, et réduit en servitude son Pays et sa Religion.

L'Espagne avait été soumise en quatorze mois à l'Empire des Califes, à la réserve des cavernes et des rochers de l'Asturie. Pélage Teudomer, parent du dernier Roi Rodrigue, caché dans ces retraites, y conserva sa liberté. Je ne sais comment on a pu donner le nom de Roi à ce Prince, qui en était en effet digne, mais dont toute la Royauté se borna à n'être point captif. Les Historiens Espagnols et ceux qui les ont suivis, lui font remporter de grandes victoires, imaginent des miracles en sa faveur, lui établissent une Cour, lui donnent son fils Favilla et son gendre Alphonse pour successeurs tranquilles dans ce prétendu Royaume. Mais comment dans ce temps-là même les Mahométans, qui sous Abdérame vers l'an 734 subjuguèrent la moitié de la France, auraient-ils laissé subsister derrière les Pyrénées ce Royaume des Asturies? C'était beaucoup pour les Chrétiens de pouvoir se réfugier dans ces montagnes et d'y vivre de leurs courses, en payant tribut aux Mahométans. Ce ne fut que vers l'an 759 que les Chrétiens commencèrent à tenir tête à leurs vainqueurs affaiblis par les victoires de Charles Martel et par leurs divisions; mais eux-mêmes plus divisés entre eux que les Mahométans, retombèrent bientôt sous le joug.

En 783, Maurégat, à qui il a plû aux Historiens de donner le titre de Roi, eut la permission de gouverner les Asturies et quelques Terres voisines, en rendant hommage et en payant tribut. Il se soumit surtout de fournir cent belles filles tous les ans pour le sérail d'Abdérame.

On donne pour successeur à ce Maurégat un Diacre nommé Vérémon, Chef de ces Montagnards réfugiés, faisant le même hommage et payant le même nombre de filles qu'il était obligé de payer souvent. Est-ce-là un Royaume, et sont-ce-là des Rois?

Après la mort de cet Abdérame, les Émirs des Provinces d'Espagne voulurent être indépendants. On a vu dans l'article de Charlemagne, qu'un d'eux, nommé Ibna Larabi, eut l'imprudence d'appeler ce conquérant à son secours. S'il y avait eu alors un véritable Royaume Chrétien en Espagne, Charles n'eût-il pas protégé ce Royaume par ses armes, plutôt que de se joindre à des Mahométans? Il prit cet Émir sous sa protection, et se fit rendre hommage des Terres qui sont entre l'Ebre et les Pyrénées, que les Musulmans gardèrent. On voit en 794 le Maure Abutar rendre hommage à Louis le Débonnaire, qui gouvernait l'Aquitaine sous son père avec le titre de
Roi.

Quelque temps après, les divisions augmentèrent chez les Maures d'Espagne. Le Conseil de Louis le Débonnaire en profita, ses troupes assiégèrent deux ans Barcelone, et Louis y entra en triomphe en 796. Voilà l'époque de la décadence des Maures. Ces vainqueurs n'étaient plus soutenus par les Africains et par les Califes dont ils avaient secoué le joug. Les successeurs d'Abdérame ayant établi le siège de leur Royaume à Cordoue, étaient mal obéis des Gouverneurs des autres Provinces.

Alfonse de la race de Pélage commença dans ces conjonctures heureuses à rendre considérables les Chrétiens Espagnols retirés dans les Asturies. Il refusa le tribut ordinaire à des Maîtres contre lesquels il pouvait combattre; et après quelques victoires il se vit maître paisible des Asturies et de Léon au commencement du IXe Siècle.

C'est par lui qu'il faut commencer de retrouver en Espagne des Rois Chrétiens. Cet Alfonse était artificieux et cruel. On l'appelle le Chaste, parce qu'il fut le premier qui refusa les cent filles aux Maures. On ne songe pas qu'il ne soutint point la guerre pour avoir refusé ce tribut, mais que voulant se soustraire à la domination des Maures et ne plus être tributaire, il fallait bien qu'il refusât les cent filles ainsi que le
reste.

Les succès d'Alfonse qui, malgré beaucoup de traverses, enhardit les Chrétiens de Navarre à se donner un Roi. Les Aragonais levèrent l'étendard sous un Comte: ainsi sur la fin de Louis le Débonnaire, ni les Maures, ni les Français n'eurent plus rien dans ces Contrées stériles, mais le reste de l'Espagne obéissait aux Rois Musulmans. Ce fut alors que les Normands ravagèrent les côtes de l'Espagne, mais étant repoussés, ils retournèrent piller la France et l'Angleterre.

On ne doit point être surpris que les Espagnols des Asturies, de Léon, d'Aragon, aient été alors des barbares. La guerre qui avait succédé à la servitude, ne les avait pas polis. Ils étaient dans une si profonde ignorance, qu'Alfonse Roi de Léon et des Asturies, surnommé le Grand, fut obligé de donner à son fils des Précepteurs Mahométans.

Je ne cesse d'être étonné, quand je vois quels titres les Historiens prodiguent aux Rois. Cet Alfonse qu'ils appellent le Grand, fit crever les yeux à ses quatre frères; sa vie n'est qu'un tissu de cruautés et de perfidies. Ce Roi finit par faire révolter contre lui ses Sujets, et fut obligé de céder son petit Royaume à son fils vers l'an 910.

Cependant les Mahométans qui perdaient cette partie de l'Espagne qui confine à la France, s'étendaient partout ailleurs. Si j'envisage leur Religion, je la vois embrassée par toutes les Indes, et par les côtes orientales de l'Afrique où ils trafiquaient. Si je regarde leurs conquêtes, d'abord le Calife Aaron Rachild impose un tribut de soixante et dix mille écus d'or par an à l'Impératrice Irène. L'Empereur Nicéphore ayant ensuite refusé de payer le tribut, Aaron prend l'Île de Chypre et vient ravager la Grèce. Almamon son petit-fils, Prince d'ailleurs si recommandable par son amour pour les Sciences et par son savoir, s'empare par ses Lieutenants de l'Île de Crète en 825. Les Musulmans y firent bâtir la Ville de Candie.

En 826 les mêmes Africains qui avaient subjugué l'Espagne et fait des incursions dans cette Île fertile, encouragés par un Sicilien nommé Euphémiris, qui ayant, à l'exemple de son Empereur Michel, épousé une Religieuse, et poursuivi par les lois que l'Empereur s'était rendu favorables, fit à peu près en Sicile ce que le Comte Julien avait fait en Espagne.

Ni les Empereurs Grecs, ni ceux d'Occident ne purent alors chasser de Sicile les Musulmans, tant l'Orient et l'Occident étaient mal gouvernés. Ces Conquérants allaient se rendre maîtres de l'Italie, s'ils avaient été unis; mais leurs fautes sauvèrent Rome, comme celle des Carthaginois la sauvèrent autrefois. Ils partent de Sicile en 846 avec une flotte nombreuse. Ils entrent par l'embouchure du Tibre, et ne trouvant qu'un Pays, presque désert, ils vont assiéger Rome. Ils prirent les dehors, et ayant pillé la riche Église de Saint Pierre hors des murs, ils levèrent le siège pour aller combattre une armée de Français, qui venait secourir Rome sous un Général de l'Empereur Lothaire. L'armée Française fut battue, mais la Ville rafraîchie fut manquée; et cette expédition qui devait être une conquête, ne devint par leur mésintelligence qu'une incursion de Barbares. Ils revinrent bientôt après avec une armée formidable, qui semblait devoir détruire l'Italie et faire une Bourgade Mahométane de la Capitale du Christianisme. Le Pape Léon IV prenant dans ce danger une autorité que les Généraux de l'Empereur Lothaire semblaient abandonner, se montra digne en défendant Rome, d'y commander en Souverain. Il avait employé les richesses de l'Église à réparer les murailles, à élever des tours, à tendre des chaînes sur le Tibre. Il arma les milices à ses dépens, engagea les habitants de Naples et de Gayette à venir défendre les côtes et le port d'Ostie, sans manquer à la sage précaution de prendre d'eux des otages, sachant bien que ceux qui sont assez puissants pour nous secourir, le sont assez pour nous nuire. Il visita lui-même tous les postes et reçut les Sarrasins à leur descente, non pas en équipage de guerrier, ainsi qu'en avait usé Goflin Évêque de Paris dans une occasion encore plus pressante, mais comme un Pontife qui exhortait un Peuple Chrétien, et comme un Roi qui veillait à la sûreté de ses Sujets. Il était né Romain. Le courage des premiers âges de la République revivait en lui dans un temps de lâcheté et de corruption, tel qu'un des beaux monuments de l'ancienne Rome qu'on trouve quelquefois dans les ruines de la nouvelle. Son courage et ses soins furent secondés.

En 849, on reçut les Sarrasins courageusement à leur descente, et la tempête ayant dissipé la moitié de leurs vaisseaux, une partie de ces conquérants échappés au naufrage fut mise à la chaîne. Le Pape rendit sa victoire utile, en faisant travailler aux fortifications de Rome et à ses embellissements les mêmes mains qui devaient les détruire. Les Mahométans restèrent cependant maîtres du Garillan entre Capoue et Gayette, mais plutôt comme une Colonie de Corsaires indépendants, que comme des
Conquérants disciplinés.

Je vois donc au IXe Siècle les Musulmans redoutables à la fois à Rome et à Constantinople, maîtres de la Perse, de la Syrie, de l'Arabie, et de toutes les Côtes d'Afrique jusqu'au Mont Atlas, et des trois quarts de l'Espagne. Mais ces Conquérants ne forment pas une Nation, comme les Romains étendus presqu'autant qu'eux, n'avaient fait qu'un seul Peuple.

Sous le fameux Calife Almamon vers l'an 815, un peu après la mort de Charlemagne, l'Égypte devint indépendante, et le Grand-Caire fut la résidence d'un Soudan. Le Prince de la Mauritanie Tangitane, sous le titre de Misamolin, était maître absolu de l'Empire de Maroc. La Nubie et la Lybie obéissaient à un autre Soudan. Les Abdérames qui avaient fondé le Royaume de Cordoue, ne purent empêcher d'autres Mahométans de fonder celui de Tolède. Toutes ces nouvelles Dynasties révéraient dans le Calife le successeur de leur Prophète. Ainsi que les Chrétiens allaient en foule en pèlerinage à Rome, les Mahométans de toutes les parties du Monde allaient à la Mecque, gouvernée par un Shérif que nommait le Calife; et c'était principalement par ce pèlerinage que le Calife maître de la Mecque était vénérable à tous les Princes de sa croyance. Mais ces Princes distinguant la Religion de leurs intérêts, dépouillaient le Calife en lui rendant hommage.



 

 
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