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La Révolution française (1789 - 1799)

 

CHAPITRE PREMIER : Les causes de la Révolution

 

I : Louis XVI, du sacre aux Etats Généraux (avril 1774 à mai 1789)

           

            1° La constitution du nouveau gouvernement – Comme nous l’avons vu lors du chapitre précédent, Louis XVI monta sur le trône en août 1774. Le nouveau roi de France, bien que n’étant pas à l’origine destiné à régner[1], reçut toutefois une bonne éducation, apprenant plusieurs langues (anglais, espagnol, latin, etc.), l’économie, l’histoire et la géographie. L’héritier du trône, au fil des années, afficha un goût prononcé pour la mécanique, la marine et la chasse.

Louis Auguste de France, par Louis Michel VAN LOO, 1769, château de Versailles, Versailles.

 

Marié à Marie Antoinette, fille de l’Empereur germanique François et de l’archiduchesse d’Autriche Marie Thérèse (le mariage avait été célébré à la mi-mai 1770.), Louis XVI confia la charge de premier ministre à Jean Frédéric Phélypeaux, comte de Maurepas (ce dernier avait été secrétaire d’Etat à la marine sous le règne de Louis XV.).

Marie Antoinette d'Autriche, reine de France, par Elisabeth Louise VIGEE-LE BRUN, 1784, château de Versailles, Versailles.

 

S’entourant de ministres compétents (en juin 1774, Charles Gravier, comte de Vergennes, fut nommé secrétaire d’Etat aux affaires étrangères ; en août, Anne Robert Jacques Turgot, baron de l’Aulne, fut nommé contrôleur général des finances.), Louis XVI fit toutefois l’erreur de reconstituer le Parlement de Paris, qui avait été dissous en 1771 par le garde des sceaux René Nicolas de Maupéou, marquis de Morangles et de Bully (ce dernier fut alors renvoyé.).

Charles Gravier, comte de Vergennes (à gauche.) ; et Anne Robert Jacques Turgot, baron de l'aulne (à droite.).

Les parlementaires, loin d’être reconnaissants envers le nouveau souverain, ne tardèrent pas à s’opposer au roi. Par la suite, ils firent tout leur possible pour de s’opposer aux nouvelles réformes portant atteinte aux privilèges de la noblesse.

 

Turgot fut le premier à faire les frais de l’hostilité du Parlement de Paris et de la noblesse. Ne souhaitant pas mettre en place des emprunts, ce qui ruinerait davantage le pays, Turgot préférait réduire les dépenses de l’Etat. Ainsi, les corvées[2] furent abolies, remplacées par une compensation financière. En outre, afin de développer le commerce, le contrôleur général des finances décida de s’attaquer aux corporations[3], permettant à quiconque d’exercer le métier de son choix.  

Louis XVI fut toutefois contraint de renvoyer Turgot en mai 1776.

 

            2° La révolution américaine creuse le déficit – Son successeur, Jacques Necker (ce dernier était un banquier protestant, originaire de Genève.), prit ses fonctions au cours d’une période particulièrement difficile (en effet, la France avait décidé de participer à la guerre d’indépendance américaine[4] en février 1778.).

Jacques Necker.

Necker refusa de lever de nouveaux impôts, préférant mettre en place d’importants emprunts. Ce dernier décida d’abolir le servage, puis supprima la question préalable (torture qui était infligée aux accusés, avant leur procès, avant de leur soutirer des aveux.). 

Attaqué lui aussi par les parlementaires et l’aristocratie, Necker fut contraint de démissionner en mai 1781 (à noter que Maurepas mourut en novembre, et Louis XVI déclara ne plus vouloir de premier ministre.).

 

Les successeurs de Necker mirent fin aux emprunts, mais en contrepartie furent contraints d’augmenter les impôts. En novembre 1783, ce fut donc Charles Alexandre de Calonne qui reçut le poste de contrôleur général des finances.

Charles Alexandre Calonne.

A son arrivée au pouvoir, les finances de l’Etat étaient dans une situation dramatique : les recettes étaient évaluées à 190 millions de livres pour l’année 1784, mais 180 millions avaient déjà été dépensés ; la dette, quant à elle, s’élevait à 650 millions.

Calonne, refusant de diminuer les dépenses de l’Etat, décida de mettre en place un plan de relance d’inspiration keynésienne avant l’heure. Son objectif était de mettre en place de grands chantiers (aménagement des ports, création de routes, canaux[5], etc.), visant à développer l’économie.

Calonne, en juillet 1786, constata toutefois que sa politique s’était soldée sur un échec. Il décida alors de mettre en place des réformes en profondeur, souhaitant mettre en place une libre circulation des grains, abolir les corvées, diminuer la taille[6] et la gabelle[7], imposer le clergé, et supprimer les douanes intérieures.

En avril 1787, face à l’opposition quasi-unanime de la noblesse, Louis XVI fut contraint de renvoyer Calonne.

 

            3° Le Parlement de Paris de plus en plus contestataire – Ce fut alors Etienne Charles Loménie de Brienne, archevêque de Toulouse, qui reçut la gestion des finances du royaume, ainsi que la charge officieuse de principal ministre.

Le Cardinal Lomenie de Brienne admirant les bas reliefs des ponts jumeaux, par Edouard DEBAT-PONSAN, 1896.

Le nouveau venu, bien qu’ayant été hostile aux projets de Calonne, dut toutefois les défendre face au Parlement de Paris. Les parlementaires répondirent à Loménie de Brienne qu’il ne leur était pas possible de voter la mise en place d’un nouvel impôt, seul les Etats Généraux en ayant le pouvoir.

A partir de cette date, les relations entre la couronne et le Parlement de Paris ne cessèrent de s’envenimer. En mai 1788, alors que Loménie de Brienne songeait à se débarrasser des parlementaires, ces derniers s’autoproclamèrent défenseurs des lois fondamentales, réclamant une fois la tenue des Etats Généraux (à noter que Louis Philippe II, duc d’Orléans[8], faisait partie des insurgés.).

Buste de Louis Philippe II, duc d'Orléans, anonyme, musée Carnavalet, Paris.

Louis XVI décida alors de riposter, ordonnant aux gardes-françaises[9] d’assiéger le Parlement. Finalement, les meneurs acceptèrent de se rendre, et furent alors emprisonnés.

 

Au début de l’été 1788, alors que le mouvement de contestation commençait à s’étendre à plusieurs régions de France, Louis XVI annonça finalement son intention de convoquer les Etats Généraux le 1er mai 1789[10], bien que craignant les dérives auxquelles pouvait mener une telle assemblée[11].
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[1] Louis XVI était le petit fils de Louis XV. Son père, Louis Ferdinand, était mort prématurément en décembre 1765. Ce dernier avait eu deux fils, Louis et Xavier, respectivement décédés en 1761 et 1754.

[2] Au Moyen âge, le seigneur pouvait réquisitionner ses sujets afin de les faire travailler sans les rémunérer. En règle générale, la corvée ne concernait qu’une ou deux journées par an, exception faites des pauvres et des serfs, qui restaient taillables et corvéables à merci. La corvée royale, par contre, ne fut instaurée que sous le règne de Louis XV. L’objectif était de réquisitionner des travailleurs pendant quelques jours par an, afin de leur faire construire ou restaurer des routes. Dans certaines régions de France, il était possible de racheter ces jours de corvées contre une petite somme d’argent.

[3] Les corporations, apparues au Moyen âge, étaient en situation de monopole au XVIII° siècle. Elles déterminaient les salaires, la qualité de la production, les prix à la vente, etc.

[4] Pour en savoir plus sur la guerre d’indépendance américaine, cliquez ici.

[5] En juillet 1784, trois grands canaux furent achevés : le canal de Bourgogne, reliant la Seine à la Saône ; le canal du centre, reliant la Saône à la Loire ; et le canal reliant le Rhône au Rhin.

[6] La taille était en quelque sorte l’ancêtre de l’impôt sur le revenu. Cette taxe existait depuis le Moyen âge, mais elle n’était qu’exceptionnelle. Ce n’est qu’à partir du XV° siècle, lors de la guerre de Cent Ans, que la taille devint un impôt annuel.

[7] La gabelle était un impôt sur le sel.

[8] Orléans était une branche cadette des Bourbons, issue de Philippe d’Orléans, frère de Louis XIV.

[9] Les Gardes Françaises furent créées en 1563, afin d'assurer la protection du roi de France Charles IX. Ce régiment, ayant comme objectif de protéger le souverain, résidait à l'intérieur des murs de la capitale.

[10] Les Etats Généraux avaient été convoqués pour la dernière fois en 1615.

[11] Louis XVI et la Cour se souvenaient de la crise qui avait éclaté au XIV° siècle, suite à la réunion des Etats Généraux : en 1356, en pleine guerre de Cent Ans, le roi de France Jean II était retenu captif en Angleterre. Son fils, le dauphin Charles V, décida alors de convoquer les Etats Généraux. Les députés, menés par Etienne Marcel, prévôt des marchands de Paris (ce dernier avait comme tâche de contrôler le commerce dans la capitale.), ne tardèrent guère à se révolter contre l’autorité royale. Les députés voulurent ainsi supprimer les privilèges de la noblesse et  affaiblir le pouvoir de la couronne, transformant la monarchie française un régime parlementaire (imitant le modèle anglais.).Des troubles eurent alors lieu dans Paris, des proches du roi furent massacrés, et Charles V fut contraint de porter une cocarde aux couleurs de Paris en présence des émeutiers. On ne peut que noter la ressemblance frappante rapprochant ces évènements de ceux qui survinrent au cours de la Révolution… Pour en savoir plus a ce sujet, voir le 3, section II, chapitre premier, les Valois.

 
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