1° La société au XVIII° siècle –
A la fin du XVIII° siècle, la France vivait sous une monarchie absolue de
droit divin. Selon la tradition, la royauté ne s’obtenait pas par la force,
elle était conférée par Dieu dès la naissance. Devenu roi suite à la mort de
son prédécesseur, le nouveau souverain devait ensuite être couronné dans la
cathédrale de Reims.
Héritière du Moyen âge, la société était alors divisée en trois ordres : le
clergé (les Oratores, ‘ceux qui prient.’), la noblesse (les
Bellatores, ‘ce qui combattent.’), et le tiers état (les Laboratores,
‘ceux qui travaillent.’).
Toutefois, si cette division était pertinente au Moyen âge, elle ne l’était
plus à la fin de l’époque moderne. En effet, l’apparition des fusils, des
canons et de la poudre, avait mit fin à la chevalerie ;
en outre, la noblesse de robe, bien éloignée des champs de bataille, avait
fait son apparition au début du XVII° siècle. Les nobles n’étant guère
nombreux à faire la guerre, ce fut donc le tiers état qui fut alors chargé
de se battre.
A faut espérer q'eu jeu la finira ben tôt (le tiers état est
ici présenté en vieillard, croulant sous le poids du clergé et de la
noblesse. On peut remarquer un heaume, en bas de l'image, représentant
l'abandon de la vocation guerrière des aristocrates), caricature anonyme,
1789, musée Carnavalet, Paris.
En
1789, la France n’avait pas des lois uniformes comme aujourd’hui. En effet,
il existait d’importantes disparités d’une région à l’autre, voire même
d’une ville à l’autre. La raison de ces disparités s’explique par les
conquêtes effectuées par les rois de France depuis l’an mil : à chaque
nouvelle annexion, le souverain acceptait que le territoire conquis conserve
ses us et coutumes, aboutissant au XVIII° siècle à cette gigantesque
mosaïque.
A
noter en outre le français n’était pas encore la langue nationale, chaque
région parlant le patois local.
Les philosophes des lumières, dans leurs ouvrages, avaient condamné
cette société figée et inégalitaire. Toutefois, si Jean Jacques Rousseau
souhaitait que le pouvoir revienne au peuple, Voltaire était plus
favorable à un despotisme éclairé.
Cependant, à l’instar d’un Charles Louis de Secondat, baron de
Montesquieu, nombreux étaient ceux qui étaient favorables à une séparation
des pouvoirs (Au XVIII° siècle, les pouvoirs exécutifs, législatifs et
judiciaires étaient entre les mains du roi.).
Buste de Voltaire, école française, XVIII° siècle, musée
Carnavalet, Paris (à gauche) ; Montesquieu, par Benoît Louis
HENRIQUEZ, 1777, Deutsches historisches museum, Berlin
(à droite).
Toutefois, les philosophes des lumières étaient morts trop tôt (Montesquieu
en 1755, Voltaire et Rousseau en 1778, Denis Diderot en 1784, etc.)
et aucun ne put assister à la Révolution française…
Denis Diderot, par Louis Michel VAN LOO, 1767, musée du
Louvre, Paris.
2° Les revendications des trois ordres – En préalable à
la réunion des Etats Généraux, il fut décidé que la population rédigerait
des cahiers de doléances. Chaque ordre, partout en France, devait y
écrire ses attentes et ses souhaits les plus importants.
Ces cahiers, contrairement à ce que l’on pourrait penser, ne révèlent pas
une remise en cause de la monarchie, par plus qu’une attaque contre la
propriété individuelle ou la religion.
Il
est toutefois important de noter que les trois ordres de la société étaient
particulièrement divisés.
Le
tiers état, en règle générale, souhaitait jouer un rôle plus important que
par le passé, égaliser la carte des impôts en France, et diminuer les
privilèges de la noblesse. Toutefois, cet ordre rassemblait une population
disparate, allant du modeste paysan au riche bourgeois. Les avocats,
écrivains et ingénieurs, les plus instruits de cet ordre, furent les
artisans de la Révolution française.
Le
clergé, à l’instar du tiers état, était lui aussi divisé. Le haut clergé,
composé d’aristocrates, se rapprochait de la noblesse
; toutefois, le bas clergé, destiné à des missions d’enseignement et de
charité, était plus proche du peuple.
La
noblesse enfin, n’occupait qu’un maigre rôle dans la vie économique du pays
(travailler dans le commerce ou l’industrie était considéré comme indigne.).
Toutefois, cet ordre connaissait des dissensions, principalement entre
noblesse de Cour et noblesse de province. Les nobles de province, considérés
comme des minus habens par les aristocrates de Versailles, avaient
parfois des revenus inférieurs à ceux de la bourgeoisie. Mais la noblesse,
bien que divisée, savait toutefois s’unir afin d’exiger le maintient de ses
privilèges.
3° Le second ministère Necker – A la fin du mois d’août
1789, Louis XVI décida de se séparer de Loménie de Brienne, qui n’avait pas
réussi à sortir le pays de la crise. A la grande joie du peuple, Louis XVI
décida alors de rappeler Necker, qui avait été contrôleur général des
finances de 1776 à 1781.
La France reçoit des trois ordres les vœux de toute la nation et les
présente au roi et à Necker, par DUBOIS, fin du XVIII° siècle, musée
Carnavalet, Paris.
En
septembre 1788, le Parlement de Paris décida de fixer les modalités de la
réunion des Etats Généraux. Il fut décidé qu’ils seraient assemblés selon la
coutume ancienne, soit le même nombre de députés pour les trois ordres.
Les gens du peuple accueillirent très mal cette décision, comprenant que les
parlementaires n’étaient pas dans leur camp.
Au
contraire, Necker s’attira les faveurs des Parisiens en annonça que les
effectifs du tiers état seraient doublés, malgré un système de vote par
ordre et non par tête (les élections des députés des Etats Généraux eurent
lieu en début d’année 1789.).
Au
printemps 1789, les premières émeutes frumentaires firent leur apparition.
Rappelons qu’en juillet 1788, une tempête de grêle avait frappé tout l’ouest
du royaume (plus d’un quart de la récolte fut détruite, et le grain fut de
mauvaise qualité.) ; puis, en septembre 1788, des trombes d’eaux s’étaient
abattues sur la France, compromettant la récolte de 1789.
Une échauffourée fit 200 morts au faubourg Saint Antoine, des ouvriers au
chômage s’étant attaqués à la maison d’un marchand de papiers peints (ce
dernier aurait déclaré que les salaires de ses employés étaient trop
élevés.). Finalement incarcérés, les coupables furent retrouvés avec des
écus dans leurs poches, ce qui laisse à penser qu’ils auraient été payés
pour alimenter des troubles dans Paris…
Fusillade au Faubourg Saint Antoine, le 28 avril 1789, par
Jean PELICIER et Claude NIQUET, musée Carnavalet, Paris.
Malgré les
troubles, les Etats Généraux se réunirent finalement, et la séance
d’ouverture eut lieu le 5 mai 1789. L’ancien régime vivait ses derniers
instants…
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