1° Le comportement de Louis XVI
alimente le feu de la révolte – Au début du mois de juillet 1789, les
Parisiens étaient inquiets. En effet, non seulement Louis XVI avait convoqué
des troupes sous les murs de la capitale ; en outre, il avait décidé de
renvoyer Necker et plusieurs ministres le 11 juillet.
L’éviction du contrôleur général des finances, particulièrement apprécié du
peuple,
entraîna le déclenchement de plusieurs émeutes.
Camille Desmoulins, jeune avocat parisien,
haranguant la foule se trouvant dans les jardins du Palais Royal, appela à
la révolte, craignant que le roi ne lance une Saint Barthelemy contre
les Parisiens.
Il invita ses interlocuteurs à arracher les feuilles des marronniers afin de
les arborer en guise de cocarde.
Buste de Camille Desmoulins, par François MARTIN, fin du XVIII° siècle, musée Carnavalet, Paris.
Le
13 juillet, les émeutiers s’attaquèrent aux Tuileries. Repoussés par le
régiment Royal-Allemand, prêté à la France par l’Autriche, les insurgés
reçurent alors de l’aide des gardes-françaises
mutinés. Plusieurs dragons
du Royal-Allemand furent alors tués.
La charge du Royal-Allemand dans le jardin des Tuileries, par
Jean Baptiste LALLEMAND, fin du XVIII° siècle, musée Carnavalet, Paris.
Pendant la nuit, 40 postes de douane sur 54 furent attaqués et incendiés.
2° La prise de la Bastille (14 juillet 1789) – Jacques
de Flesselles, prévôt des marchands,
décida alors de mettre en place une milice urbaine de 48 000 hommes afin de
réduire les troubles. Au matin du 14 juillet, après avoir pillé les
boutiques des armuriers, les émeutiers décidèrent de marcher vers l’Hôtel de
ville afin de récupérer des armes.
Jacques de Flesselles, dernier prévôt des marchands, par Donat
NONOTTE, fin du XVIII° siècle, musée Carnavalet, Paris.
Après s’être emparé de 360 fusils, les insurgés décidèrent alors de marcher
vers les Invalides. Les soldats qui assuraient la protection de l’édifice
décidèrent alors de ne pas intervenir.
Pillage des armes aux
Invalides, le matin du 14 juillet 1789, par Jean Baptiste LALLEMAND,
fin du XVIII° siècle, musée Carnavalet, Paris.
Après avoir récupéré des fusils et des canons, les
émeutiers décidèrent alors de marcher vers la Bastille, qui abritait 250 barils de poudre.
Maquette de la Bastille,
fin du XVIII° siècle, musée des Invalides, Paris.
A noter toutefois que cette forteresse, en 1789,
n'était pas une prison royale (il y passait en moyenne moins de 40
prisonniers par an.), que les lettres de
cachet
devaient comporter un motif et une durée de peine (depuis 1786 et l'action
du baron Louis Auguste Le Tonnelier de Breteuil, ministre du roi, ces
lettres étaient moins utilisées qu'au cours des décennies précédentes.),
et que l'Etat souhaitait détruire cette forteresse médiévale depuis
maintenant bien des années (les coûts d'entretien de l'édifice étaient trop
importants par rapport au nombre de prisonniers.).
Les miliciens, arrivés devant la Bastille,
demandèrent à rencontrer le gouverneur de la forteresse, le marquis
Bernard René Jordan de Launay. Ce dernier était à la tête d'une centaine
d'hommes, soit 95 vétérans et 32 gardes suisses.
Habit d'officier, régiment suisse de
Salis-Grison, vers 1780, musée des Invalides, Paris.
La délégation fut accueillie avec respect, mais
repartit néanmoins bredouille. Peu avant midi, une seconde délégation se
présenta sous les murs de la Bastille, mais n'obtint rien non plus.
Ce fut en début d'après midi que les esprits
commencèrent à s'échauffer. En effet, quelques miliciens, armés de haches,
parvinrent à couper les chaînes du pont levis. Le gouverneur de la Bastille,
s'apercevant de la situation, ordonna alors à ses hommes de tirer sur les
insurgés qui avaient pénétré dans la cour.
Afin de calmer le jeu, deux nouvelles délégations
se présentèrent devant le marquis de Launay, mais ce dernier refusa de céder
à leurs exigences.
Vers 16 heures, une soixantaine de militaires
appartenant aux Gardes Françaisesse présentèrent devant la Bastille, rejoignant les émeutiers. Les
nouveaux venus apportaient avec eux plusieurs canons (vraisemblablement
récupérés aux Invalides.), qu'ils mirent en batterie face à la porte
principale de la forteresse.
La prise de la Bastille, le 14
juillet 1789, par Jean
Baptiste LALLEMAND, fin du XVIII° siècle, musée Carnavalet, Paris.
Peu de temps après, les défenseurs de la Bastille
décidèrent de capituler. Launay songea un temps à faire sauter les barils de
poudre, avant d’en être empêché par deux vétérans. Launay accepta alors de
capituler, contre la promesse qu'il ne serait fait aucun mal à ses hommes.
Les émeutiers acceptèrent, mais en pénétrant dans l'édifice, ils ne
tardèrent pas à massacrer les défenseurs de la Bastille (il semblerait alors
que les pillards se soient tirés les uns sur les autres, ce qui aurait
entrainé la mort de plusieurs d'entre eux.). Les barils de poudre et les
clefs des geôles furent alors présentés au peuple de Paris.
Insigne de vainqueur de la Bastille, fin
du XVIII° siècle, musée Carnavalet, Paris.
Ce n’est qu’au soir venu que l’on songea à
s’occuper des prisonniers. Ces derniers étaient au nombre de sept : quatre
faussaires qui avaient escroqué des banquiers parisiens (ils furent
ré-emprisonnés dès le lendemain.), deux fous (ils furent rapidement
transférés dans un asile, où ils furent vraisemblablement moins bien traités
qu'à la Bastille.) et un aristocrate enfermé là en raison de ses perversions
sexuelles notoires.
Toutefois, les clefs ayant été emportées avant que
les portes des cellules ne soient ouvertes, il fallut les défoncer afin de
libérer les prisonniers.
Menottes retirées à l'un des sept
prisonniers de la Bastille, le 14 juillet 1789, musée Carnavalet, Paris.
A noter que les archives de la police de Paris
furent pillées elles aussi, et les autorités eurent bien du mal, suite à
l'évènement, à récupérer tous les documents perdus le 14 juillet.
La garnison de la Bastille, prisonnière, fut alors
emmenée à l'Hôtel de Ville. Sur le chemin, le marquis de Launay fut roué de
coups puis assassiné,
et sa tête plantée au bout d'une pique.
M. de Launay, gouverneur de la
Bastille, capturé par les assaillants, le 14 juillet 1789,
par Charles THEVENIN, fin du XVIII° siècle, musée Carnavalet, Paris.
Plusieurs soldats ayant défendu la
Bastille furent exécutés, à l’instar de Jacques de Flesselles, le prévôt des
marchands, accusé de traîtrise.
Le massacre de Jacques de
Flesselles, le 14 juillet
1789, par Jean Baptiste LALLEMAND, musée Carnavalet, Paris.
Les insurgés, au soir du 14 juillet, avaient perdu
une centaine d'hommes, que ce soit lors des combats ou lors du pillage de la
Bastille.
Louis XVI, ignorant les évènements qui s'étaient
déroulés ce jour là, écrivit dans son journal intime :
14 juillet - Rien.
Dans la nuit, le souverain fut réveillé par
François Alexandre Frédéric de La Rochefoucault-Liancourt,
grand-maître de sa garde-robe. Le nouveau venu annonça alors au roi que la
Bastille était tombée.
Mais c’est une révolte ? lui demanda Louis
XVI.
Non, sire, c’est une révolution !
3° Les suites du 14 juillet 1789 –
Louis XVI, ayant appris que la Bastille avait été prise, accepta qu’elle
soit démolie. Par ailleurs, afin de calmer le jeu, le roi de France accepta
de rappeler Necker et plusieurs ministres, annonçant aussi le retrait des
troupes encerclant Paris.
A l’Hôtel de ville, l’administration avait fui
suite à l’assassinat de Jacques de Flesselles. Jean Sylvain Bailly,
président de l’Assemblée constituante, fut alors nommé maire de Paris,
en remplacement du défunt (à la fin juillet, les 60 districts de Paris
élurent les membres de la Commune de Paris ; il s’agissait de bourgeois
hostiles aux désordres.).
Jean Sylvain Bailly maire de Paris, par Jean Laurent MOSNIER,
1789, musée Carnavalet, Paris.
Enfin, le commandement de la Garde nationale
(c'est-à-dire la milice parisienne.) fut confié à Marie Joseph Paul Yves
Roch Gilbert du Motier, marquis de La Fayette
(ce dernier, vétéran de la guerre d’indépendance américaine, était
particulièrement renommé et apprécié par le peuple.).
Gilbert du Motier, marquis de La Fayette, d'après Jean Antoine
HOUDON, 1790, musée des Invalides, Paris.
Le 17 juillet 1789, Louis XVI se rendit en
personne à l’Hôtel de ville, recevant une cocarde de la part de Jean Sylvain
Bailly. Le bleu et rouge de Paris s’associait ainsi au blanc de la monarchie.
A noter qu’une
première vague d’émigration débuta dès cette époque, plusieurs nobles
décidant de quitter le pays (dont Charles, comte d’Artois, jeune frère de
Louis XVI ; Louis V Joseph de Bourbon, prince de Condé ; Louis VI
Henri Joseph de Bourbon, duc d’Enghien.).
Par ailleurs, un premier projet de fuite fut présenté à Louis XVI, mais
celui-ci s’y opposa.
Cocardes révolutionnaires, vers 1790, Deutsches historisches museum, Berlin.
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