I.
Lorsque Sylla eut rétabli l’ordre dans la république, il
s’alluma, sous le consulat de Marcus Emilius Lepidus et de Q. Catulus, de
nouvelles guerres: une en Espagne; une autre en Macédoine; une troisième en
Pamphylie et en Cilicie; une quatrième chez les Dalmates. En effet, Sertorius,
ancien partisan de Marius, redoutant le sort des autres chefs qui avaient été
tués, souleva les Espagnes. On envoya contre lui, comme généraux, Q. Cecilius
Metellus, fils du vainqueur de Jugurtha, et le préteur L; Domitius. Ce dernier
fut tué par Hirtuleius, lieutenant de Sertorius: Metellus combattit Sertorius
avec des chances diverses; comme on le crut ensuite incapable de conduire seul
cette expédition, on envoya Cn. Pompée dans les Espagnes. Sertorius, seul contre
deux gé-néraux, lutta longtemps avec une alternative de succès et de revers.
Enfin il fut assassiné par les siens, la huitième année de cette guerre, qui fut
terminée par le Jeune Cn. Pompée et Q. Metellus Pius; presque toutes les
Espagnes rentrèrent alors sous la domination romaine.
II.
Envoyé en Macédoine après son consulat, Appius Claudius
engagea quelques escarmouches contre différentes nations de la province de
Rhodope, et y mourut de maladie. On lui donna pour successeur le consulaire C.
Scribonius Curion, qui défit les Dardaniens, et pénétra jusqu’au Danube; il
termina la guerre en trois années, et obtint le triomphe.
III.
On fit partir pour la Cnide et la Pamphylie le consulaire P.
Servilius, intrépide guerrier. Il dompta la Cilicie, assiégea et prit les plus
célèbres villes de la Lycie, entre autres Phasélis, Olympe et Corycum en
Cilicie. Puis il attaqua les Isauriens, les soumit, et acheva la guerre en trois
ans. Il fut le premier de tous les Romains qui franchit le mont Taurus. De
retour à Rome, il obtint le triomphe, et l’honneur du surnom d’Isaurique.
IV.
On envoya en Illyrie le proconsul Cn. Cosconius. Il soumit
une grande partie de la Dalmatie, prit Salone, et revint à Rome, après avoir
terminé la guerre en deux ans. A la même époque, le consul M. Emilius Lepidus,
collègue de Catulus, voulut exciter une guerre civile; mais une seule campagne
suffit pour comprimer ce mouvement. Ainsi l’on célébra en même temps plusieurs
triomphes à la fois: celui de Metellus sur l’Espagne; le se-cond triomphe de
Pompée sur la même, province; celui de Curion sur la Macédoine; celui de
Servilius sur l’Isaurie.
V.
L’an de Rome six cent soixante seize, sous le consulat de L.
Licinius Lucullus et de M. Aurelius Cotta, mourut Nicomède, roi de Bithynie, qui
fit par testament le peuple romain son héritier. Mithridate rompit la paix, et
voulut envahir de nouveau la Bithynie et l’Asie. Les deux consuls, envoyés
contre lui, eurent des chances diverses. Cotta, vaincu en bataille rangée près
de Chalcédon, et repoussé jusque dans cette ville, y fut assiégé. Mais comme
Mithridate était passé de Chalcédon à Cyzique, pour envahir toute l’Asie après
la prise de cette place, Lucullus, l’autre consul, vint à sa rencontre; et
tandis que Mithridate était arrêté par le siège de Cyzique, il l’attaqua sur ses
derrières, le prit par famine et le battit en plusieurs rencontres; enfin il le
força de s’enfuir à Byzance, aujourd’hui Constantinople; il défit aussi sur mer
les généraux de Mithridate. Ainsi, dans le seul espace d’un hiver et d’un été,
Lucullus tua au roi près de cent mille hommes.
VI.
L’an de Rome six cent soixante-dix-huit, M. Licinius
Lucullus, cousin de celui qui combattait Mithridate, obtint le gouvernement de
la Macédoine. Mais tout à coup une guerre nouvelle éclata en Italie. En effet,
soixante-quatorze gladiateurs, sous la conduite de Spartacus, de Crixus et d’Énomaüs,
après avoir brisé les portes de la salle d’armes à Capoue, s’enfuirent et se
répandirent dans l’Italie, où ils excitèrent une guerre presque aussi sérieuse
que celle d’Annibal. Car, après avoir défait plusieurs généraux et les deux
consuls romains à la fois, ils réunirent une armée d’environ soixante mille
hommes; mais ils furent vaincus dans l’Apulie par le proconsul M. Licinius
Crassus; et cette guerre, après avoir pendant trois ans causé bien des malheurs
à l’Italie, fut enfin terminée.
VII.
L’an de Rome six cent quatre-vingt un, sous le consulat de P.
Cornelius Lentulus et de Cn. Aufidius Orestès, il n’y avait plus dans l’empire
que deux guerres importantes, celle de Mithridate et celle de Macé-doine,
dirigées l’une et l’autre par les deux Lucullus, Lucius et Marcus. Vainqueur de
Mithridate à Cyzique et de ses lieutenants dans un combat naval, L. Lucullus
poursuivit le roi, reprit la Paphlagonie et la Bithynie, envahit jusqu’au
royaume de Mithridate et prit même Sinope et Amise, les deux boulevards du
Pont-Euxin. Dans une seconde bataille près de la ville de Cabire, où Mithridate
avait fait venir des troupes considérables de tous les points de son royaume,
Lucullus, avec cinq mille Romains, lui tua trente mille hommes d’élite, le mit
en fuite, et pilla son camp. Il lui enleva aussi l’Arménie Mineure, dont ce
prince avait été maître. Cependant Mithridate fugitif rut accueilli par Tigrane,
roi d’Arménie, qui régnait alors avec beaucoup de gloire, qui avait souvent
vaincu les Perses, et s’était emparé de la Mésopotamie, de la Syrie et d’une
partie de la Phénicie. Lucullus, poursuivant l’ennemi dans sa fuite, pénétra
donc dans le royaume de Tigrane, qui commandait aux Arméniens, prit Tigranocerte,
capitale célèbre de l’Arménie, et, avec dix-huit mille hommes, vainquit le roi
lui-même qui était à la tête de six cent mille clibanaires [soldats bardés de
fer], de cent mille sagittaires [archers] et hommes de toutes armes; la déroute
de l’ennemi fut si complète, qu’une grande partie des Arméniens fut écrasée.
Marchant ensuite sur Nisibe, il prit aussi cette ville avec le frère du roi.
Mais les généraux que Lucullus avait laissés dans le Pont avec une partie de
l’armée, pour garder les nouvelles conquêtes romaines, fournirent à Mithridate,
par leur négligence et par leur cupidité, l’occasion de rentrer violemment dans
ses États, et alors la lutte recommença. Au moment où Lucullus, maître de Nisibe,
préparait une expédition contre les Perses, on lui envoya un successeur.
VIII.
Quant à l’autre Lucullus, qui gouvernait la Macédoine, il fut
le premier des Romains qui fit la guerre aux Besses; il les vainquit dans une
grande bataille sur le mont Hémus, assiégea et prit, le jour même de l’attaque,
Uscudama, qu’habitaient les Besses, s’empara ensuite de Cabyle, et pénétra
jusqu’au Danube. Puis il investit plusieurs villes situées sur le littoral du
Pont, renversa Apollonie, prit Calatis, Parthénopolis, Tomes, Histrum et
Burziaon, termina cette guerre, et revint à Rome. Les deux Lucullus obtinrent le
triomphe, mais le vain-queur de Mithridate et de tant de royaumes, triompha avec
plus de gloire que l’autre Lucullus.
IX.
La guerre de Macédoine terminée, restait encore celle de
Mithridate; car ce prince profita du départ de Lucullus pour réunir de nouvelles
forces et reprendre les armes: alors éclata la guerre de Crète. On en confia le
soin à Cecilius Metellus, qui livra de grandes batailles, soumit en trois ans
toute la province, obtint le surnom de Crétique et triompha de l’île de Crète. A
cette époque, la Libye fut aussi ajoutée à l’empire romain par le testament
d’Apion, son ancien roi: là, se trouvaient les villes célèbres de Bérénice, de
Ptolémaïs et de Cyrène.
X.
Tandis que ces événements avaient lieu, les pirates
infestaient toutes les mers, en sorte que les Romains, vainqueurs du monde
entier, n’étaient plus entravés que dans leur navigation. Un décret confia la
conduite de cette guerre à Cn. Pompée, qui la termina en peu de mois avec un
bonheur et une célérité sans exemple. Bientôt on lui remit aussi le soin de
combattre Mithridate et Tigrane: il marcha contre eux, vainquit Mithridate dans
un combat nocturne qu’il lui livra dans l’Arménie Mineure, pilla son camp, lui
tua quarante mille hommes, et ne perdit de son côté que vingt soldats et deux
centurions. Mithridate s’enfuit avec sa femme et deux de ses compagnons. Peu de
temps après, devenu pour les siens un tyran cruel, il vit son armée soulevée
contre lui par son fils Pharnace, et, contraint de mourir, il avala du poison.
Ainsi périt, près du Bosphore, Mithridate, prince d’un rare mérite et d’une
grande expérience. Il régna soixante ans, vécut soixante-douze ans, et fit
pendant quarante années la guerre aux Romains.
XI.
Pompée attaqua ensuite Tigrane, qui se rendit à lui, vint
faire sa soumission dans le camp romain, à seize milles d’Artaxate, se prosterna
aux genoux du vainqueur, et lui remit entre les mains son diadème Pompée le
replaça sur la tête de Tigrane, et le traita avec honneur; mais il lui enleva
une partie de son royaume, et lui fit payer une forte somme d’argent. Il lui
prit la Syrie, la Phénicie, la Sophène, et exigea de plus six mille talents
d’argent pour le peuple romain, parce que Tigrane avait fait sans motif la
guerre contre Rome. Bientôt Pompée marcha contre les Albaniens, et battit trois
fois leur roi Orode; fléchi enfin par ses lettres et par ses présents, il lui
accorda paix et pardon. Il vainquit aussi en bataille rangée Artace, roi des
Ibériens et reçut sa sou-mission. Il donna l’Arménie Mineure au roi des Galates,
Dejotarus, en récompense de ce qu’il s’était joint à lui dans la guerre de
Mithridate, il rendit la Paphlagonie à Attale et à Pylémène, et mit Aristarchus
sur le trône de Colchos. Bientôt il défit les Ituréens et les Arabes, et, arrivé
en Syrie, il fit don de la liberté à Séleucie, ville voisine d’Antioche, parce
qu’elle n’avait point donné asile au roi Tigrane. Il rendit aux habitants
d’Antioche leurs otages, et accorda à ceux de Daphné quelque terrain pour donner
à leur bois sacré plus d’étendue, tant il fut charmé de la beauté du site et de
l’abondance des eaux ! De là il passa en Judée, et prit en trois mois Jérusalem,
la capitale du pays, après avoir tué douze mille Juifs, et reçu la soumission
des autres. Après ces conquêtes, il revint en Asie, et termina une guerre qui
avait duré très longtemps.
XII.
Sous le consulat de l’orateur M. Tullius Cicéron et de C.
Antonius, l’an de Rome six cent quatre-vingt-neuf, L. Sergius Catilina, de la
famille la plus illustre, mais du génie le plus pervers, conjura la ruine de sa
pa-trie avec certains hommes de haute naissance, il est vrai, mais d’une rare
audace. Il fut chassé de Rome par Cicéron, et ses complices furent saisis et
étranglés en prison. Antonius, l’autre consul, défit et tua Catilina lui-même
dans une bataille.
XIII.
L’an de Rome six cent quatre-vingt-dix, sous le consulat de
D. Junius Silanus et de L. Murena, Metellus triompha de la Crète, et Pompée des
pirates et de Mithridate. Jamais triomphe ne fut plus magnifique: devant le char
de Pompée marchèrent les fils de Mithridate, le fils de Tigrane, et le roi des
Juifs, Aristobule; on porta devant le vainqueur des sommes considérables, des
monceaux d’or et d’argent. Il n’y avait plus alors dans l’univers de guerre bien
sérieuse.
XIV.
L’an de Rome six cent quatre-vingt-treize, C. Jules César,
qui plus tard devint maître absolu, fut nommé consul avec L. Bibulus. On lui
décerna le gouvernement de la Gaule et de l’Illyrie avec dix légions. Il
vainquit d’abord les Helvétiens, appelés aujourd’hui Séquanes; ensuite, toujours
vainqueur dans les expéditions les plus importantes, il s’avança jusqu’à l’océan
Britannique. Dans l’espace d’environ neuf années, il dompta toute la Gaule,
située entre les Alpes, le fleuve du Rhône, le Rhin et l’Océan, et qui a un
circuit et une étendue de trois millions deux cent mille pas. Bientôt il porta
la guerre chez les Bretons, qui, avant lui, ne connaissaient même pas le nom
romain: il les vainquit comme les autres ennemis, en reçut des otages et les fit
tributaires de Rome. Quant à la Gaule, il lui imposa un tribut annuel de
quarante millions de sesterces; puis, ayant attaqué les Ger-mains au delà du
Rhin, il les écrasa dans les plus sanglantes batailles. Au milieu de tant de
succès, il n’éprouva que trois échecs: l’un, par lui-même, chez les Arvernes, et
les deux autres, pendant son absence, en Germanie, où ses deux lieutenants,
Titurius et Arunculeius, furent surpris et tués dans une embuscade.
XV.
Vers la même époque, l’an de Rome six cent quatre-vingt
dix-sept, M. Licinius Crassus, collègue de Cn. Pompée le Grand dans son second
consulat, fut envoyé contre les Parthes leur ayant livré bataille près de
Carres, malgré les présages et les auspices, il fut vaincu par Suréna, général
du roi Orode, puis tué avec son fils, jeune homme du plus brillant mérite. Les
restes de l’armée furent sauvés par le questeur C. Cassius, qui, à force de
courage, rétablit avec tant de supériorité les affaires si malheureusement
perdues, qu’à son retour il défit les Perses dans de fréquents combats au delà
de l’Euphrate.
XVI.
A ces événements succéda bientôt une guerre civile, odieuse
et déplorable, qui, sans compter les disgrâces des batailles, changea jusqu’à la
fortune du nom romain, En effet, César revenant vainqueur de la Gaule. Commença
par demander un second consulat qu’il eut sans doute obtenu sans l’opposition du
consul Marcellus, de Bibulus, de Pompée et de Caton; de plus, on lui ordonna de
ne rentrer à Rome qu’après avoir licencié ses troupes. Indigné d’un tel outrage,
il partit d’Ariminum, où il avait rassemblé ses soldats, et marcha avec eux
contre sa patrie. Les consuls et Pompée, tout le sénat, toute la noblesse
s’enfuirent de Rome et gagnèrent la Grèce: le sénat, en Épire, en Macédoine, en
Achaïe, leva contre César une armée dont il confia le commandement à Pompée.
César entra dans Rome ainsi abandonnée, se nomma lui-même dictateur puis passa
en Espagne. Là, il défit les plus fortes et les plus vaillantes troupes de
Pompée et ses trois lieutenants, L. Afranius, M. Petreius et M. Varron, Ensuite,
il revint à Rome, se rendit en Grèse, et livra bataille à Pompée Vaincu d’abord
et mis en fuite, il parvint à s’échapper à la faveur de la nuit qui survint, et
parce qu’alors Pompée ne voulut point le poursuivre: « Pompée ne sait pas
vaincre, » dit alors César, « et je ne pouvais être défait que ce jour-là. » Ils
se battirent ensuite en Thessalie, à Paléopharsale, avec des forces
considérables de part et d’autre. L’armée de Pompée comptait quarante mille
fantassins; six cents cavaliers à son aile gauche, cinq cents à son aile droite;
de plus, les troupes auxiliaires de tout l’Orient, toute la noblesse, un grand
nombre de sénateurs, d’anciens préteurs, des consulaires et des généraux, qui
avaient déjà vaincu de grandes nations. L’armée de César ne réunissait pas tout
à fait trente mille hommes d’infanterie, et n’avait que mille chevaux. Jamais
jusqu’alors les troupes romaines ne s’étaient trouvées ni plus nombreuses ni
commandées par de meilleurs capitaines, et elle eussent facilement soumis tout
l’univers, si on les eût conduites contre les barbares. La lutte fut terrible et
acharnée, mais à la fin, Pompée fut vaincu, et son camp pillé; lui-même, réduit
à fuir, gagna Alexandrie, pour demander des secours au roi d’Égypte, dont le
sénat l’avait nommé tuteur, à cause de la jeunesse du pupille: mais ce prince,
plus fidèle à la fortune qu’à l’amitié, fit assassiner Pompée et envoya sa tête
et son anneau à César, qui, ému de ce spectacle, ne put, dit-on, retenir ses
larmes en voyant la tête d’un si grand homme, autrefois son gendre.
XVII.
César lui-même vint bientôt à Alexandrie. Ptolémée voulut
aussi lui tendre des embûches, alors César lui déclara la guerre; Ptolémée,
vaincu, périt dans le Nil, où l’on retrouva son cadavre et sa cuirasse d’or.
Maître d’Alexandrie César donna le royaume d’Égypte à Cléopâtre, sœur de
Ptolémée, avec laquelle il avait eu depuis longtemps une liaison illégitime. A
son retour, il attaqua le fils de Mithridate le Grand, Pharnace, qui, après
avoir secouru Pompée en Thessalie, venait de se révolter dais le Pont et
d’envahir plusieurs provinces romaines; César le vainquit en bataille rangé et
le força de se tuer.
XVIII.
Ensuite rentré à Rome, il se fit consul pour la troisième
fois avec M. Emilius Lepidus, qu’il avait eu pour maître de la cavalerie,
pendant sa dictature, l’année précédente. Il partit de là pour l’Afrique, où une
grande partie de la noblesse avait, à l’aide de Juba, roi de Mauritanie, rallumé
la guerre. A la tête des Romains était Cornelius Scipion, de l’antique famille
de Scipion l’Africain et, comme César, beau-père du grand Pompée, M. Petreius,
Q. Varron, M. Porcius Caton, L. Cernelius Faustus, fils du dictateur Sylla.
César, après plusieurs rencontres, les défit dans une dernière bataille. Caton,
Scipion, Petreius et Juba se suicidèrent: le fils de l’ancien dictateur Sylla,
Faustus, gendre de Pompée, fut tué par César.
XIX.
De retour à Rome, l’année suivante. César se fit consul pour
la quatrième fois et partit aussitôt pour l’Espagne, où les fils de Pompée,
Cneus et Sextus, avaient recommencé une guerre formidable. On se livra plusieurs
batailles; dans la dernière, près de la ville de Munda, César faillit être
vaincu, au point que, voyant fuir les siens, il voulut se tuer, pour ne pas,
après tant d’exploits glorieux, et à l’âge de cinquante-six ans, tomber au
pouvoir de deux jeunes gens. Enfin il rallia ses troupes et remporta la
victoire: le fils aîné de Pompée fut tué, le plus jeune prit la fuite.
XX.
Les guerres civiles une fois éteintes dans tout l’univers,
César revint à Rome, où il commença à se comporter avec une hauteur tout à fait
contraire aux usages de la liberté romaine. Ainsi il accordait à son gré les
honneurs déférés autrefois par le peuple, il ne se levait plus lorsque le sénat
venait à lui; en mainte occasion, il agissait en roi et presque en tyran: aussi
plus de soixante sénateurs et chevaliers romains conspirèrent-ils contre lui.
Les deux Brutus, issus de celui qui fut le premier consul de Rome et qui chassa
les rois, étaient les principaux auteurs du complot avec C. Cassius et Servilius
Casca. César s’était donc, un jour d’assemblée, rendu avec les autres sénateurs
à la curia, il y fut percé de vingt-trois coups de poignard.