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Mythologie
 
 

 

 

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Histoire Romaine - traduction M. Nisard (1864)

Livre XXVI - Rome, 210 à 207

 

2. Reprise de la guerre d'Espagne - 209 ([XXVII, 17] à [XXVII, 20])

 

Nouvelles alliances contractées avec les peuples d'Espagne (printemps)

[XXVII, 17]

(1) Au début de l'été où se passaient ces événements, Publius Scipion ayant, en Espagne, passé l'hiver entier à gagner les barbares partie par des présents, partie par le renvoi des otages et des prisonniers, Edesco, célèbre parmi les chefs espagnols, vint le voir. (2) Sa femme et ses enfants étaient chez les Romains; mais, outre cette raison, le penchant, fortuit, en quelque sorte, et général qui avait porté toute l'Espagne de la domination Carthaginoise vers la domination Romaine, l'entraîna. (3) Pour la même raison, Indibilis et Mandonius, les chefs les plus importants, sans aucun doute, de toute l'Espagne, abandonnant Hasdrubal, se replièrent, avec tout le contingent de leurs compatriotes, sur des hauteurs dominant son camp, et d'où, par une crête continue, ils pouvaient se retirer sans danger auprès des Romains.

(4) Hasdrubal, voyant les forces de l'ennemi s'augmenter de renforts si importants, les siennes diminuer et être près, s'il n'entreprenait quelque coup d'audace, de s'échapper comme elles avaient commencé à le faire, décida de livrer bataille le plus tôt possible. (5) Scipion désirait encore plus le combat, et par suite de ses espoirs, qu'augmentait la tournure des événements, et parce qu'il aimait mieux, sans attendre la jonction des armées ennemies, combattre un seul général, une seule armée que tous ses ennemis à la fois. (6) D'ailleurs, pour le cas même où il lui faudrait lutter contre plusieurs en même temps, il avait augmenté ses troupes par un moyen particulier: voyant qu'il n'avait nul besoin de ses vaisseaux (car toute la côte d'Espagne était libre de flottes puniques), il les fit mettre au sec à Tarragone, et ajouta leurs équipages à ses troupes de terre; (7) il avait assez d'armes pour cela avec celles qu'il avait prises à Carthagène, et celles qu'après la prise de cette ville, il avait fait faire par la foule d'ouvriers enfermés dans les ateliers.

(8) Sorti de Tarragone avec ses troupes au début du printemps - après le retour de Rome de Laelius, sans qui il ne voulait entreprendre rien d'important - Scipion commence sa marche vers l'ennemi. (9) Il ne traversait que pays pacifiés, où, aux frontières de chaque peuple, des alliés l'escortaient, d'autres le recevaient. Indibilis et Mandonius vinrent à sa rencontre avec leurs troupes. (10) Indibilis parla pour tous deux, non pas du tout en barbare, avec sottise ou imprudence, mais plutôt avec réserve, avec gravité, en homme plus porté à excuser son passage au parti romain comme nécessaire, qu'à s'en glorifier comme s'il avait, pour cela, saisi la première occasion: (11) il savait en effet, dit-il, que le nom de transfuge est exécré des anciens alliés, suspect aux nouveaux; et il ne blâmait pas cet usage, quand toutefois cette double haine venait d'une cause sérieuse, et non simplement du nom de transfuge. (12) Il rappela alors les services rendus par Mandonius et lui aux généraux carthaginois, et, par contre, leur avidité, leur hauteur, leurs outrages de toute sorte envers eux deux et leurs concitoyens. (13) Aussi, ajouta-t-il, leurs corps seuls étaient, jusqu'ici, restés chez les Carthaginois; leurs coeurs, depuis longtemps, se trouvaient là où ils croyaient qu'on respectait le droit humain et divin: on voit de même recourir aux dieux des suppliants qui ne peuvent supporter la violence et les injustices des hommes; (14) pour eux, ils priaient Scipion de ne leur faire de leur désertion ni une faute, ni un titre de gloire, mais, selon la façon dont, à partir de ce jour, il les connaîtrait à l'épreuve, d'estimer la valeur de leurs services.

(15) Le Romain répond qu'il agira tout à fait ainsi, et ne tiendra pas pour transfuges des hommes qui ont jugé qu'il n'y avait point d'alliance ratifiée, là où rien de divin, rien d'humain n'était considéré comme sacré. (16) Puis leurs femmes, leurs enfants, amenés sous leurs yeux, leur sont rendus, tandis qu'ils pleurent de joie. (17) On les emmena, ce jour-là, recevoir l'hospitalité de Scipion; le lendemain, par la conclusion d'un traité, on reçut leur parole, et on les renvoya chercher leurs troupes. Ils eurent ensuite leurs tentes dans le même camp que les Romains, jusqu'à ce que sous leur conduite on fût arrivé à l'ennemi.

Scipion attaque l'armée d'Hasdrubal près de Baecula

[XXVII, 18]

(1) L'armée carthaginoise la moins éloignée, celle d'Hasdrubal, était prés de Baecula; elle avait devant son camp des postes de cavaliers. (2) Les vélites, les troupes légères et celles de l'avant-garde, dès leur arrivée, sans prendre le temps de choisir un emplacement pour camper, les attaquèrent avec tant de dédain, qu'on vit facilement quels sentiments animaient l'un et l'autre parti. (3) Les cavaliers, fuyant éperdument, furent refoulés dans leur camp, et les enseignes romaines arrivèrent presque à ses portes. (4) Ce jour-là, les Romains, après avoir excité seulement leur ardeur au combat, installèrent leur camp; (5) pendant la nuit, Hasdrubal fit replier ses troupes sur une hauteur dont le sommet s'étendait en plateau; par derrière, une rivière, devant et sur les côtés, une sorte de bord escarpé en délimitaient le contour. (6) Il y avait au-dessous un second plateau, un plateau inférieur, s'étendant plus bas que le sommet, lui aussi, un rebord, non moins difficile à gravir que celui du premier, l'entourait. (7) C'est sur ce plateau inférieur que, le lendemain, Hasdrubal, voyant l'armée ennemie immobile devant son camp, fit descendre les cavaliers Numides, les Baléares et les Africains armés à la légère. (8) Scipion, passant en revue les rangs et les enseignes, montrait à ses soldats l'ennemi qui, renonçant d'avance à l'espoir de combattre avec succès en plaine, allant occuper les hauteurs, ne soutenait leurs regards que par confiance dans sa position, non dans sa valeur et dans ses armes; mais Carthagène, ajoutait-il, avait eu des murailles plus hautes, que pourtant le soldat romain avait franchies; (8) ni collines, ni citadelle, ni la mer même n'avaient arrêté ses armes. Les hauteurs qu'avait occupées l'ennemi, elles lui serviraient à sauter, dans sa fuite, des précipices et des escarpements! Et encore, cette fuite, les Romains la lui barreraient.

(10) Prenant donc deux cohortes, Scipion ordonne à l'une d'occuper l'entrée de la vallée par où descendait la rivière, à l'autre de s'installer sur la route qui, de la ville, descendait en lacets de la colline et conduisait dans la campagne. Lui-même conduit les soldats alertes qui, la veille, avaient chassé les postes ennemis, contre les troupes légères carthaginoises rangées là où le rebord du plateau était le plus bas. (11) Ils marchèrent d'abord par un terrain raboteux, sans autre difficulté que celles de la route. Puis, quand ils arrivèrent à portée, d'abord une foule de traits de tous genres fut jetée sur eux; (12) eux, en revanche, prennent les pierres que le sol leur fournit partout, presque toutes commodes à lancer, et tous les lancent, non seulement les soldats, mais la foule des valets mêlés aux hommes d'armes. (13) Quoique la montée soit difficile et qu'ils soient presque accablés de traits et de pierres, grâce à leur habitude de gravir des remparts et à leur ténacité, les premiers montent sur le plateau. (14) Dès qu'ils ont occupé un peu de terrain plat où se tenir serrés de pied ferme, ils délogent l'ennemi, troupe légère, propre aux escarmouches, ne craignant rien à distance, quand, de loin, à coups de projectiles, on évite le véritable combat, mais aussi peu solide dans le corps à corps; et, en faisant un grand carnage, ils la rejettent vers l'armée qui se tient sur le plateau le plus élevé. (15) Alors Scipion, ordonnant aux soldats déjà vainqueurs de marcher contre le centre de cette armée, partage avec Laelius le reste de ses troupes, lui dit de faire un détour par la droite de la colline, jusqu'à ce qu'il trouve un passage en pente plus douce, et, allant lui-même vers la gauche, après un mouvement tournant assez court, charge les ennemis de flanc. (16) Ainsi leurs lignes se troublent d'abord, en voulant infléchir leurs ailes et tourner leurs rangs pour faire face aux cris qui résonnent de tous côtés. (17) Grâce à leur désordre, Laelius, lui aussi, prend pied sur le plateau; et, tandis qu'ils reculent pour ne pas être frappés par derrière, leurs premières lignes se relâchent et laissent surgir les assaillants du centre, (18) qui, sur un terrain si escarpé, si les rangs carthaginois étaient restés intacts et les éléphants devant les enseignes, n'auraient jamais débouché. (19) Alors qu'on massacre de tous côtés, Scipion, qui avec son aile gauche a chargé la droite des ennemis, attaque surtout leur flanc dégarni. (20) Et il ne leur restait même plus de passage pour fuir; car de deux côtés, à droite et à gauche, des postes romains avaient occupé les chemins, et la porte du camp avait été fermée par suite de la fuite du général et des chefs; en outre, les éléphants étaient affolés, et, quand ces animaux étaient furieux, les Carthaginois les craignaient autant que des ennemis. Il y eut ainsi huit mille tués environ.

Prise du camp carthaginois. Libération de Massiva

[XXVII, 19]

(1) Hasdrubal, qui, sans attendre le combat, avait fait enlever son trésor et envoyé en avant des éléphants, recueillant le plus possible de fuyards, passe le Tage et se dirige vers les Pyrénées. (2) Scipion, maître du camp ennemi, ayant, à l'exception des hommes libres, abandonné tout le butin aux soldats, trouva, au recensement des prisonniers, dix mille fantassins et deux mille cavaliers. Tous ceux d'entre eux qui étaient Espagnols, il les renvoya chez eux sans rançon; les Africains, il les fit vendre par le questeur. (3) En conséquence, il se vit entouré d'une foule d'Espagnols - hommes qui s'étaient rendus auparavant et prisonniers de la veille - qui, d'une voix unanime, lui donnèrent le titre de roi. (4) Alors Scipion, faisant faire le silence par le héraut, dit que, pour lui, le titre le plus haut était celui d'Imperator, que lui avaient donné ses soldats; le titre de roi, ailleurs élevé, était, à Rome, intolérable; (5) qu'il eût une âme de roi - si c'était là ce qu'ils jugeaient le plus grand dans le caractère d'un homme, - ils pouvaient le penser à part eux, mais ils devaient s'abstenir d'employer le mot. (6) Les barbares mêmes sentirent la grandeur de l'âme qui, pour un titre dont le merveilleux prestige étonnait les autres mortels, n'avait, de la hauteur où elle se trouvait, que du mépris. (7) Puis on fit des présents aux roitelets et aux princes espagnols, et, parmi les chevaux, très nombreux, que l'on avait pris, Scipion dit à Indibilis d'en choisir trois cents, ceux qu'il voulait.

(8) Alors que le questeur, sur l'ordre du général en chef, vendait les Africains, entendant dire qu'un adolescent d'une rare beauté, qui se trouvait parmi eux, était de naissance royale, il l'envoya à Scipion. (9) Celui-ci lui demandant qui il était, de quel pays, et pourquoi, à un tel âge, il s'était trouvé dans un camp, il répondit qu'il était Numide, que ses compatriotes l'appelaient Massiva; resté orphelin de père, élevé chez son grand-père maternel Gala, roi des Numides, il était passé en Espagne avec son oncle Masinissa, qui, récemment, avait amené aux Carthaginois un renfort de cavalerie. (10) Jusqu'ici, Masinissa lui avait toujours défendu, à cause de son âge, de prendre part à un combat; le jour où l'on avait livré bataille aux Romains, prenant secrètement, à l'insu de son oncle, des armes et un cheval, il était allé en ligne; là, son cheval, en s'abattant, l'ayant précipité à terre, il avait été pris par les Romains. (11) Scipion, après avoir ordonné de mettre à part ce Numide, achève ce qu'il devait accomplir à son tribunal; puis, s'étant retiré à son quartier général, il fait appeler l'adolescent et lui demande s'il veut retourner auprès de Masinissa. (12) À la réponse, accompagnée de larmes de joie, que certes, il le désirait, Scipion donne à l'enfant un anneau d'or, une tunique laticlave, avec un sayon espagnol et une agrafe d'or, un cheval tout harnaché, et, disant à des cavaliers de l'accompagner jusqu'où il voudrait, il le renvoya.

Discussion d'état-major sur la poursuite de la guerre

[XXVII, 20]

(1) Puis on tint conseil sur la conduite de la guerre. Malgré l'avis, donné par certains, de poursuivre aussitôt Hasdrubal, (2) Scipion, jugeant le succès de ce projet douteux, car il craignait de voir Magon et l'autre Hasdrubal joindre leurs forces à celles du premier, envoya seulement des troupes s'installer dans les Pyrénées, et passa lui-même le reste de l'été à recevoir la soumission des peuples de l'Espagne. (3) Peu de jours après la bataille de Baecula, alors que Scipion, retournant déjà à Tarragone, était sorti des monts de Castulo, les généraux Hasdrubal fils de Gisgon et Magon arrivèrent, de l'Espagne ultérieure, auprès d'Hasdrubal: secours tardif après la défaite, mais conseillers fort opportuns pour l'exécution du reste de la campagne. (4) Là, comme ils conféraient sur les sentiments des Espagnols dans la zone d'opérations de chacun d'eux, seul Hasdrubal fils de Gisgon fut d'avis que la côte de l'Espagne la plus éloignée, celle qui donne sur l'Océan, vers Gadès, ignorait encore les Romains, et, pour cela, restait bien fidèle aux Carthaginois; (5) l'autre Hasdrubal et Magon considéraient tous deux comme certain que les bienfaits de Scipion avaient conquis le coeur de tous, peuples et particuliers; et que les défections n'auraient pas de fin avant que tous les soldats espagnols eussent été envoyés à l'extrémité de l'Espagne ou emmenés en Gaule. (6) C'est pourquoi, même si ce n'avait pas été l'avis du sénat de Carthage, Hasdrubal devait aller en Italie, et parce que là se trouvaient la tête de la guerre et la partie essentielle des affaires, et pour emmener tous les Espagnols loin du nom de Scipion, hors d'Espagne. (7) Son armée, diminuée par les défections, et surtout par la défaite, serait reconstituée avec des soldats espagnols. Magon, lui, laissant ses troupes à Hasdrubal fils de Gisgon, passerait avec une grosse somme d'argent dans les Baléares pour y enrôler des mercenaires; (8) Hasdrubal fils de Gisgon s'enfoncerait avec son armée en Lusitanie, sans en venir aux mains avec les Romains; à Masinissa, en prenant dans toute la cavalerie ce qu'elle avait de meilleur, on arriverait à donner trois mille cavaliers: circulant partout dans l'Espagne citérieure, il porterait secours aux alliés, ravagerait les villes et les champs des ennemis. Ces décisions prises, les généraux se séparèrent pour les exécuter. Voilà ce qu'on fit cette année-là en Espagne.

(9) À Rome, la réputation de Scipion grandissait chaque jour; pour Fabius, la prise de Tarente, quoique due à l'astuce plus qu'à la valeur, était cependant un titre de gloire; la renommée de Fulvius faiblissait; (10) quant à Marcellus, on en venait à dire du mal de lui, non seulement à cause de son premier échec, mais parce que, alors qu'Hannibal circulait en Italie, il avait, disait-on, au milieu de la campagne d'été, emmené ses soldats cantonner à Vénouse. (11) Il avait un ennemi personnel, Caius Publicius Bibulus, tribun de la plèbe. Celui-ci, dès le premier échec de Claudius, l'avait, par des harangues incessantes, fait mal juger et haïr de la plèbe, et maintenant il faisait campagne pour qu'on abrogeât son commandement; (12) les amis de Claudius obtinrent cependant que, laissant un lieutenant à Vénouse, il revînt à Rome pour se laver des accusations que ses adversaires portaient contre lui, et qu'on ne discutât pas de l'abrogation de son commandement en son absence. (13) Ce fut, par hasard, à peu près au même moment qu'arrivèrent à Rome Marcellus, pour s'efforcer d'écarter la honte dont on le menaçait, et le consul Quintus Fulvius, pour présider les élections.

 

 

 
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