Abrégé de l'histoire universelle depuis Charlemagne jusques à
Charlequint
Chapitre
III : État de
l'Italie et de l'Église Chrétienne.
Plus l'Empire de Mahomet fleurissait, plus Constantinople et Rome
étaient avilies, Rome ne s'était jamais relevée du coup fatal que lui porta
Constantin en transférant le Siège de l'Empire. La gloire, l'amour de la Patrie
n'animèrent plus les Romains. Il n'y eut plus de fortune à espérer pour les
habitants de l'ancienne Capitale; le courage s'énerva, les Arts tombèrent; on ne
connut plus dans le séjour des Scipions et des Césars que des contestations
entre les Juges Séculiers et l'Évêque. Prise et reprise, saccagée tant de fois
par les Barbares, elle obéissait encore aux Empereurs. Depuis Justinien un
Vice-Roi sous le nom d'Exarque, la gouvernait, mais ne daignait plus la regarder
comme la Capitale de l'Italie. Il demeurait à Ravenne, et delà il envoyait ses
ordres aux Romains. L'évêque dans ces temps de Barbarie augmentait de jour en
jour son autorité par l'avilissement même de la Ville. Les richesses de son
église se multipliaient. Le Préfet de Rome ne pouvait pas s'opposer sans-cesse
aux prétentions de l'Évêque, toujours appuyées de la sainteté du Ministère. En
vain l'Église de Ravenne contestait mille droits à celle de Rome. On
reconnaissait l'Église de Rome dans tout l'Occident Chrétien comme la Mère
commune. On la consultait, on lui demandait des Millionnaires, et dans la
servitude de la Ville l'Évêque dominait au dehors.
Le reste de l'Italie citérieure obéissait aux Rois Lombards, qui régnaient dans
Pavie, ils se frayaient toujours le chemin à la conquête de Rome, et le Peuple
Romain aurait voulu n'être fourni ni aux Lombards, ni aux Empereurs Grecs. Les
Papes conçurent dans ce VIIIe Siècle le dessein de se rendre eux-mêmes maîtres
de Rome; ils virent avec prudence, que ce qui dans d'autres temps n'eût été
qu'une révolte et une sédition impuissante, pouvait devenir une révolution
excusable par la nécessité, et illustre par le succès.