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				Abrégé de l'histoire universelle depuis Charlemagne jusques à 
				Charlequint Chapitre V : État de l'Église en Orient avant Charlemagne. |  
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En Orient les Chefs de la Religion ne pouvant se faire une 
domination temporelle, y excitèrent d'autres troubles par ces querelles 
interminables, fruit de l'esprit sophistique des Grecs et de leurs Disciples. 
 Depuis que Constantin eut donné une liberté entière aux Chrétiens auxquels on ne 
pouvait plus l'ôter, et dont le parti l'avait mis sur le Trône, cette liberté 
était devenue une source intarissable de querelles; car le Fondateur de la 
Religion n'ayant rien écrit, et les hommes voulant tout savoir, chaque mystère 
fit naître des opinions, et chaque opinion coûta du sang.
 
 Fallut-il décider si le Fils était consubstantiel au Père? le Monde Chrétien fut 
partagé, et la moitié persécuta l'autre. Voulut-on savoir si la Mère de 
Jésus-Christ était la Mère de Dieu, ou de Jésus? si le Christ avait deux natures 
et deux volontés dans une même personne, ou deux personnes et une volonté, ou 
une volonté et une personne? Toutes ces disputes nées dans Constantinople, dans 
Antioche, dans Alexandrie, excitèrent des séditions. Un parti anathématisait 
l'autre, la faction dominante condamnait à l'exil, à la prison, à la mort, et 
aux peines éternelles après la mort l'autre faction qui se vengeait à son tour 
par les mêmes armes.
 
 De pareils troubles n'avaient point été connus dans le Paganisme, la raison en 
est que les Païens dans leurs erreurs grossières, n'avaient point de dogmes, et 
que les Prêtres des Idoles, encore moins les Séculiers, ne s'assemblèrent jamais 
juridiquement pour disputer.
 
 Dans le VIIIe Siècle on agita dans les Églises d'Orient s'il fallait rendre un 
culte aux Images. La Loi de Moïse les avait expressément défendues, cette Loi 
n'avait jamais été révoquée, et les premiers Chrétiens pendant plus de 200 ans 
n'en avaient jamais souffert dans leurs assemblées.
 
 Peu à peu la coutume s'introduisit partout d'avoir chez soi des Crucifix. 
Ensuite on eut les portraits vrais ou faux des Martyrs ou des Confesseurs. Il 
n'y avait point encore d'Autels érigés pour les Saints, point de Messes 
célébrées en leur nom seulement à la vue d'un Crucifix et de l'image d'un homme 
de bien. Le coeur qui surtout dans ces climats a besoin d'objets sensibles, 
s'excitait à la vertu.
 
 Cet usage s'introduisit dans les Églises. Quelques Évêques ne l'adoptèrent pas. 
On voit qu'en 393 St. Épiphane arracha d'une Église de Syrie une Image devant 
laquelle on priait. Il déclara que la Religion Chrétienne ne permettait pas ce 
culte, et la sévérité ne causa point de Schisme.
 
 Enfin cette pratique pieuse dégénéra en abus, comme toutes les choses humaines. 
Le Peuple toujours grossier ne distingua point Dieu et les Images. Bientôt on en 
vint jusqu'à leur attribuer des vertus et des miracles. Chaque Image guérissait 
une maladie. On les mêla même aux Sortilèges, qui ont presque toujours séduit la 
crédulité du Vulgaire. Je dis non seulement le vulgaire du Peuple, mais celui 
des Princes et des Savants.
 
 En 727 l'Empereur Léon l'Isaurien voulut, à la persuasion de quelques Évêques, 
déraciner l'abus; mais par un abus encore plus grand, il fit effacer toutes les 
peintures. Il abattit les statues et les représentations de Jésus Christ et des 
Saints, en ôtant ainsi tout d'un coup aux Peuples les objets de leur culte; il 
les révolta, on désobéit, il persécuta, il devint Tyran, parce qu'il avait été 
imprudent.
 
 Son Fils Constantin Copronime fit passer en Loi Civile et Ecclésiastique 
l'abolition des Images. Il tint à Constantinople un Concile de 338 Évêques; ils 
proscrivirent d'une commune voix ce culte reçu dans plusieurs Églises, et 
surtout à Rome.
 
 Cet Empereur eût voulu abolir aussi aisément les Moines, qu'il avait en horreur, 
et qu'il n'appelait que les abominables; mais il ne put y réussir: ces Moines 
déjà fort riches défendirent plus habilement leurs biens, que les Images de 
leurs Saints.
 
 Le Pape Grégoire III et ses successeurs, ennemis secrets des Empereurs, et 
opposés ouvertement à leur doctrine, ne lancèrent pourtant point ces sortes 
d'excommunications, depuis si fréquemment et si légèrement employées. Mais soit 
que ce vieux respect pour les successeurs des Césars contînt encore les 
Métropolitains de Rome, soit plutôt qu'ils vissent combien ces excommunications, 
ces interdits et dispenses du serment de fidélité seraient méprisés dans 
Constantinople, où l'Église Patriarcale s'égalait au moins à celle de Rome, les 
Papes se contentèrent d'un Concile en 732, où l'on décida que tout ennemi des 
Images serait excommunié, sans rien de plus, et sans parler de l'Empereur. Il 
paraît que les Papes songèrent plutôt à négocier qu'à disputer, et qu'en 
agissant aux dehors en Évêques fermes, mais modérés, ils se conduisirent en 
vrais politiques, et préparèrent la révolution d'Occident.
 
 
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