Johannes Chrysostomus
Wolfgang Theophilus Mozart, plus connu sous le nom de
Wolfgang Amadeus Mozart, naquit à Salzbourg en janvier 1756.
L'enfant prodige, qui fut présenté aux plus grandes cours d'Europe, devint
rapidement un musicien de génie, rencontrant d'importants succès à Vienne.
Toutefois, Mozart ne tarda guère à susciter la jalousie de ses confrères
musicien, dont celle d'Antonio Salieri, compositeur de la Cour de
Vienne. Par ailleurs, sa mort mystérieuse en décembre 1791, continue encore
aujourd'hui d'alimenter la controverse.
Mozart fut-il donc victime des ambitions dévorantes de Salieri ? Quant à
cette légende noire, entourant la mort de ce compositeur de génie, est-elle
basée sur des sources fiables, ou ne relève-t-elle que du mythe ?
Salieri and Mozart, par Mikhail VRUBEL 1885.
Le jeune Mozart, après avoir passé son adolescence à Salzbourg, sa ville
natale, s'installa à Vienne en 1781. Il y rencontra rapidement Joseph
II, archiduc d'Autriche et souverain du Saint Empire romain
germanique, qui lui commanda un opéra l'année suivante. A noter qu'à
cette époque, les pièces étaient jouées en italien, car la langue
germanique, considérée comme trop
« brutale », était jugée inadaptée pour l'opéra. Ainsi, la plupart
des musiciens de la Cour de Vienne étaient d'origine italienne, dont
Antonio Salieri,
kapellmeister
de Joseph II.
Wolfgang Amadeus Mozart, par Barbara KRAFFT, 1819 (à gauche)
; Antonio Salieri, vers 1802 (à droite).
Malgré les réticences de ses pairs, Mozart composa
L'enlèvement au sérail
(ou
Entführung aus dem Serail),
qui fut joué à l'opéra de Vienne pendant l'été 1782. La pièce,
connaissant un vif succès (même si Joseph II aurait estimé qu'elle
comportait
« trop de notes »), fut un des plus grands succès de Mozart,
lui permettant d'établir sa réputation à Vienne.
Rejoignant la franc-maçonnerie en
fin d'année 1784, Mozart commença à travailler sur un nouvel opéra en
langue italienne, Le s
noces de Figaro
(Le nocce di Figaro).
Toutefois, cette pièce s'inspirait de
La folle journée, ou le mariage de Figaro,
de l'écrivain français
Pierre Augustin de Beaumarchais,
ouvrage qui avait été interdit par Joseph II. En effet, cette œuvre
jugée subversive, critiquait les privilèges de la noblesse, jugés
archaïques par l'auteur.
Malgré tout, Mozart reçut l'autorisation de faire jouer sa pièce,
expurgée de toute référence politique, en mai 1786. Cependant, si le
succès fut une nouvelle fois au rendez-vous, cet opéra fut rapidement
retiré de l'affiche, en raison de l'hostilité de la noblesse viennoise.
L'année suivante, Mozart présenta un nouvel opéra en langue
italienne au théâtre de Prague, la ville ayant fait un bon accueil
aux Noces de Figaro.
Don Juan (Don Giovanni),
joué pour la première fois en octobre
1787, reçut un accueil très favorable. Par la suite, cette œuvre fut
présentée au public viennois dans une version quelque peu modifiée, au
printemps 1788, mais n'eut pas le succès escompté.
Les noces de Figaro (à gauche) et Don Juan (à droite).
Comme nous pouvons le constater, si
la musique de Mozart rencontra toujours un succès d'estime, elle se
heurta à plusieurs reprises au public viennois, majoritairement composé
d'aristocrates. Toutefois, Mozart avait une réelle aversion pour la
noblesse, n'appréciant guère d'être traité avec condescendance, alors
qu'il donnait des cours de musique à l'aristocratie viennoise.
Par ailleurs, si la légende noire
qui entoure les dernières années de la vie de Mozart présente
généralement ce compositeur comme un homme ruiné et vivant dans la
misère, la réalité est plus nuancée. En effet, Mozart gagnait bien sa
vie, et percevait en outre une pension de 800 florins par an depuis
décembre 1787
; toutefois, il dépensait beaucoup d'argent et vivait au-dessus de ses
moyens. Mozart, comme beaucoup de surdoués, eut toujours un comportement
excentrique, se comportant comme un enfant jusqu'à sa mort.
Mozart, malade et affaibli (devenu
obèse, il était contraint de rester alité), fut par ailleurs confronté à
une surcharge de travail pendant les dernières années de sa vie. En
janvier 1790, son nouvel opéra en langue italienne, Ainsi
font-elles toutes (Cosi
fan tutte), présenté à Vienne, fut bien accueilli ; toutefois, la
mort de Joseph II, en février, entraîna la fermeture des théâtres pour
deuil, mettant un terme prématuré à l'existence de cette pièce. A
l'occasion du sacre impérial de Léopold II (ce dernier était le
frère cadet de Joseph II, qui n'avait pas eu d'héritiers), Mozart
composa le Concerto du couronnement (ou Concerto pour piano
N°26 en ré majeur, une œuvre appréciée à l'époque mais considérée
aujourd'hui comme bâclée par les musicologues) ; puis, à l'occasion du
couronnement de Léopold II comme roi de Bohême,
en septembre 1791, il présenta à Prague un nouvel opéra en langue
italienne, La clémence de Titus (La clemenza
di Tito). La pièce fut bien accueillie, mais reste aujourd'hui
considérée comme mineure dans le répertoire de Mozart.
Outre les compositions à réaliser
en l'honneur de Léopold II, Mozart travaillait sur deux autres projets :
un Requiem, commandé par un commanditaire inconnu en juillet 1791 ; et
La flûte enchantée (Die Zauberflöte),
commandée par Emanuel Schikaneder, directeur d'un théâtre
populaire de la banlieue de Vienne. Cet opéra en langue allemande (qui
fut sans doute une œuvre collective, bien qu'attribuée à Mozart seul),
fut présentée au public en septembre 1791.
La flûte enchantée.
Mozart, qui avait composé un
Concerto pour clarinette en la majeur au début du mois d'octobre
1791 à l'attention d'un frère maçon, mourut dans la nuit du 4 au 5
décembre, sans avoir pu achever son Requiem. A l'issue d'un service
funéraire sans messe ni musique, Mozart fut inhumé dans un cimetière des
faubourgs de Vienne, dans une fosse commune pouvant contenir seize
corps. A noter toutefois que si cette méthode d'inhumation était
courante au sein de la petite bourgeoisie, d'autres musiciens renommés
avaient bénéficié d'un enterrement plus prestigieux. Ainsi, les amis du
défunt tentèrent plus tard de retrouver ses restes afin de lui accorder
un enterrement digne de ce nom, mais en vain.
La mort de Mozart.
Cependant, la mort soudaine de
Mozart (ce compositeur n'avait que 35 ans) ne tarda pas à attirer les
soupçons. Officiellement décédé d'une
« fièvre militaire »,
la disparition rapide de ses restes ne nous permet pas aujourd'hui de
connaître la maladie dont souffrait Mozart. En 2010, le psychiatre
allemand Lucien Karhausen présenta 140 causes qui auraient pu
entraîner la mort de ce compositeur : fièvre rhumatismale, grippe,
hémorragie cérébrale, insuffisance rénale, obésité, syndrome
maniaco-dépressif, etc.
A ces différents syndromes
s'ajoutent plusieurs théories, jugées peu crédibles par les historiens :
empoisonnement au mercure par Salieri ; assassinat par les
francs-maçons, furieux de voir leurs rites dévoilés dans la Flûte
enchantée ; ou absorption de potions médicinales dangereuses (liqueur
de Van Swieten).
En réalité, la légende de
l'assassinat de Mozart par Salieri relève de l'imagerie romantique,
ayant été présentée pour la première fois dans Mozart et Salieri,
pièce de théâtre de l'écrivain russe Alexandre Pouchkine, publiée
en 1830. Très populaire en Russie, elle fut adaptée à l'opéra à la fin
du XIX° siècle. Plus tard, en 1979, le Britannique Peter Schaffer
s'inspira de l'ouvrage de Pouchkine pour composer la pièce de théâtre
Amadeus, qui fut adaptée au cinéma dès 1984, sous le nom de Peter
Schaffer's Amadeus.
Dans ce film acclamé par la
critique, qui reçut 40 récompenses dont huit Oscars, Salieri est
présenté comme un compositeur talentueux, mais médiocre face au talent
inégalé de Mozart, qu'il déteste et admire à la fois. Dans cette œuvre,
c'est Salieri qui commande le fameux Requiem, que Mozart s'épuisa à
composer. A la fin du film, le kapellmeister n'est donc pas directement
responsable de la mort de son rival, mais en porte néanmoins une part de
responsabilité.
Toutefois, il convient de
préciser que la réalité est bien différente de cette légende noire.
Si Salieri éprouva sans doute de la jalousie à l'égard du jeune
prodige, suite à l'arrivée de ce dernier à Vienne, les deux hommes
entretinrent des relations rivales mais néanmoins amicales.
En effet, Salieri conserva
jusqu'à sa mort, en 1825, son poste de kapellmeister, restant
pendant longtemps un personnage puissant à Vienne. Par ailleurs, si
l'œuvre de Salieri est aujourd'hui largement méconnue du grand
public, ce compositeur remporta de bien plus grands succès que son
rival, jouant ses opéras dans les principales Cours d'Europe
(Milan, Paris, Rome, Venise, Versailles, Vienne, etc.).
Ainsi, contrairement à ce que
l'on pourrait penser, Salieri fit tout son possible pour faire
connaître la musique de Mozart, à une époque où le public viennois
avait une nette préférence pour les compositeurs italiens (c'est
ainsi qu'il proposa Mozart pour la composition de La clémence de
Titus, opéra à l'origine commandé à Salieri). Par ailleurs, il fit
partie des cinq personnes présentes lors de l'enterrement de Mozart,
et fut le professeur de musique du jeune Franz Xaver Wolfgang
Mozart, dernier fils du défunt.
Enfin, il ne fut pas le
commanditaire secret du fameux Requiem, ce dernier ayant été
commandé par le fils du maire de Vienne de l'époque, pour le compte
de Franz de Walsegg, un aristocrate autrichien .
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