Contrairement à la mythologie grecque, romaine ou scandinave, il y
a
plusieurs mythes de la genèse dans la mythologie égyptienne.
En effet, bien
qu’attachées à la croyance d’une unique divinité créatrice, les
principales cités de l’Egypte antique confiaient ce rôle de démiurge[1]
à leur divinité tutélaire.
Pour plus de cohérence
dans notre récit, nous nous baserons sur le mythe héliopolitain, qui est
la cosmogonie
A noter en outre que les
pharaons se succédèrent en Egypte pendant plus de 3 000 ans. Le pays
ayant connu une très grande longévité, cela explique le fait que les
mythes diffèrent d’une époque à l’autre, ou d’une région à l’autre.
1° Le mythe héliopolitain – A
l’origine, il n’existait rien d’autre que l’océan primordial, le Noun
(à noter que Noun peut être considéré comme un concept plutôt que comme
un dieu
Issu de Noun, le dieu
Atoum fut selon la cosmogonie héliopolitainne la divinité à
l’origine de la création de l’univers. Dieu solaire, il était Khépri
le soleil levant, Râ (ou Rê.) le soleil à son zénith,
Atoum le soleil couchant.
Atoum donna ensuite
naissance au dieu Shou, l’air, et à la déesse Tefnou,
l’humidité
Ces deux divinités
s’accouplèrent et donnèrent alors naissance au dieu Geb, la
terre, et à la déesse Nout, le ciel.
Cependant, Geb et Nout
étant enlacés, ni l’air ni l’humidité ne pouvait circuler et Râ ordonna
à Shou de les séparer. Râ, furieux, interdit alors à Nout d’accoucher au
cours des douze mois de l’année.
L’ingénieux Thot,
décidant de porter assistance à Nout, se rendit alors auprès de la lune.
Perdant au jeu, cette dernière accorda à Thot cinq jours supplémentaire
dans l’année et Nout put enfin accoucher
[5].
Elle donna ainsi naissance à quatre enfants : Osiris, Isis,
Seth et Nephtys (parfois l’on parle d’un cinquième enfant,
Horsemsou (ou Haroëris.), ce qui signifie « Horus
l’Ancien[6]. »).
Shou, au centre de l'image, soutient sa fille Nout, alors que Geb est
étendu sur le sol.
Les neuf divinités
citées ci-dessus (Noun et Thot n’en faisant pas partie ; Atoum, Khépri
et Râ ne formant qu’un tout.) formaient l’Ennéade héliopolitaine,
une sorte de panthéon égyptien
2° Autres cosmogonies
– Comme nous l’avons évoqué précédemment, les mythes de la création
du monde variaient d’une cité à l’autre.
a) Cosmogonie
memphite : A Memphis, les prêtres de la cité érigèrent leur divinité
tutélaire, Ptah, en démiurge. Parvenant au cours de l’Antiquité à
rivaliser avec la mythologie héliopolitaine, il est intéressant de
remarquer que la cosmogonie memphite est sans doute la genèse la plus
simple à comprendre de nos jours.
Stèle dédiée au dieu Ptah, XX° dynastie, vers 1100 avant Jésus Christ,
musée du Vatican, Rome.
A l’origine des temps,
nous retrouvons Noun, qui donna naissance à Ptah. Ce dernier, se
représentant le monde par la pensée, donna vie à sa création en parlant,
énumérant chacune de ses créations.
C’est ainsi que Ptah
aurait donné naissance aux divinités composant l’Ennéade.
La cosmogonie memphite, papyrus rédigé en
démotique, I° siècle avant Jésus Christ, Neues museum, Berlin.
b) L’Ogdoade
d’Hermopolis : à Hermopolis, les prêtres de la cité voyaient la
genèse d’une manière sensiblement différente, même si le Noun était une
fois de plus à l’origine de la création.
C’est ainsi que huit
divinités jaillirent des flots, formant quatre couples : Heh et
Hehet, divinités de l’infinité spatiale ; Kekou (ou Ket.)
et Kekout (ou Keket.), divinités des ténèbres ; Noun et
Nounet, divinités de l’eau ; Amon et Amenet, divinités
de l’air.
Par la suite, les Huit
firent apparaitre un lotus d’où émergea Râ. Ce dernier, s’unissant à un
des bourgeons du lotus, donna naissance à Thot.
Thot, se représentant le
monde par la pensée, lui donna alors naissance par le verbe.
c) Cosmogonie
thébaine et éléphantine : dans la cosmogonie thébaine, c’est le dieu
Amon qui occupe la place de démiurge. Issu lui aussi de Noun, Amon se
transforma en oie afin de pondre l’œuf de la création, puis se
transforma en serpent pour le féconder.
A l’origine petite
divinité sans importance, le culte d’Amon ne cessa de prendre de
l’importance avec le temps, devenant la divinité créatrice Amon-Râ sous
le Nouvel Empire
Statue du dieu Amon, règne de Toutânkhamon (1336 à 1327 avant Jésus
Christ), XVIII° dynastie, musée du Louvre, Paris (à noter que le roi
était autrefois figuré en petite taille aux pieds du dieu.).
A noter que les prêtres
de la cité d’Eléphantine vénéraient le dieu Khnoum, à qui ils
avaient conféré un rôle de démiurge. Par la suite, Amon et Khnoum
fusionnèrent sous l’impulsion du clergé de Thèbes pour former le dieu
Khnoum-Rê.
[1]
Un démiurge est une divinité étant à l’origine de la création de
l’univers.
[2]
Une cosmogonie est un mythe de création du monde.
[3]
Le Noun représentait très certainement le Nil, fleuve qui
occupait une place prépondérante dans la vie des Egyptiens de
l’Antiquité.
[4]
Shou et Tefnou seraient issus du sperme d’Atoum, après que
celui-ci se serait masturbé ; ou peut être d’un de ses crachats.
[5]
C’est ainsi que les Egyptiens de l’Antiquité expliquaient
l’origine des jours épagomènes. En effet, le calendrier égyptien
était composé de douze mois de trente jours. A la fin de
l’année, il restait donc cinq jours (six les années
bisextiles.) : les jours épagomènes. A noter toutefois que ces
jours étaient considérés comme maléfiques.
[6]
Ne pas confondre Horus l’Ancien avec Horus, fils d’Osiris et
d’Isis.
[7]
A noter que le nombre de dieux composant l’Ennéade pouvait
varier. En effet, les Egyptiens de l’Antiquité y préféraient y
placer les dieux principaux (parfois près d’une vingtaine.)
plutôt que les neuf divinités d’origine.
[8]
Le Nouvel Empire couvre une période allant de 1500 à 1000 avant
Jésus Christ.