1° La
campagne de Pologne (septembre à octobre 1939) – Comme
nous l’avons vu plus tôt, l’attaque se fit le long de la frontière
polonaise, mais fut plus concentrée à Dantzig, cité qui avait valeur de
symbole[1].
La
Heer ayant enfoncé les lignes ennemies à au cours de la première semaine de
septembre, l’OKH[2]
ordonna une attaque en deux temps : un groupe au nord devait marcher vers
Varsovie, la capitale ; pendant qu’un groupe au sud s’attaquerait à
Cracovie, avant de descendre vers Lvov où se trouvait une dernière poche de
résistance.
Cependant, la résistance polonaise à Varsovie empêcha les Allemands de
prendre la ville rapidement ; en outre, une armée polonaise partie de Lodz
tenta en vain de prendre l’armée allemande à revers.
A
la mi-septembre, la situation était pour le moins confuse : ainsi, Varsovie
résistait toujours à l’envahisseur ; en outre, plusieurs points de
résistance polonais harcelaient les troupes allemandes.
S’étant emparés de Brest-Litovsk, de Cracovie et de Lvov, les Allemands
apprirent à compter du 17 septembre la participation de l’URSS au conflit
(rappelons qu’une clause secrète du pacte germano-soviétique prévoyait un
morcellement de la Pologne.), dont les troupes s’établirent sur une ligne de
front Grodno-Lvov[3]
(à cette occasion, Staline réclama la ville de Brest-Litovsk, qui lui fut
remise à la fin septembre.).
Voyant l’armée prise en étau (il ne restait que 18 bataillons en état de
combattre à la mi-septembre.), le gouvernement polonais décida de s’exiler
en France.
Quant à Varsovie, qui avait refusé d’ouvrir ses portes à l’ennemi, ses
défenseurs furent contraints de capituler le 28 septembre 1939, ne disposant
plus suffisamment de vivres et de munitions.
A
noter toutefois que les derniers coups de feu furent tirés au cours de la
première semaine d’octobre aux environs de Lublin.
Au
final, si la campagne de Pologne ne présenta pas une réelle difficulté pour
la Wehrmacht, les pertes allemandes déplorées au cours de l’invasion (16 000
tués et 30 000 blessés.) démontrent que la Heer n’était pas exempte de
défauts à cette époque.
Côté polonais, les pertes étaient bien plus importantes : 66 00 tués,
130 000 blessés et 700 000 prisonniers[4].
2° La guerre d’Hiver (novembre
1939 à mars 1940) – La Finlande, autrefois possession
suédoise, avait été conquise par la Russie en 1809. Elle devint alors un
Etat-tampon autonome, destinée à protéger Saint-Pétersbourg, qui était
autrefois la capitale russe.
Cependant, la Finlande avait obtenu son indépendance suite à la révolution
de novembre 1917, au cours de laquelle les
bolcheviks[5]
avaient pris le pouvoir[6].
Saint-Pétersbourg, rebaptisée entretemps Petrograd puis Léningrad, se
retrouvait donc exposée en raison de sa position frontalière (si la capitale
avait été transférée à Moscou au début des années 1920, Léningrad restait
toutefois la seconde ville du pays.).
Enfin, la menace était d’autant plus grande pour l’URSS que la Finlande,
depuis sa proclamation d’indépendance, avait tissé des liens avec
l’Allemagne[7]
(ces derniers n’ayant pas décru suite à l’arrivée au pouvoir d’Hitler.).
Staline, qui s’était emparé de la moitié est de la Pologne en septembre
1939, entama donc des négociations avec le gouvernement finlandais courant
octobre[8].
Ainsi, les soviétiques réclamèrent la location pour trente ans du port de
Hanko, à l’entrée du golfe de Finlande ; la cession de la moitié sud de
l’isthme de Carélie ; et la région de Petsamo, à l’extrême nord du pays,
unique accès finlandais à la mer de Barents (l’objectif des soviétiques
était de mieux protéger le port de Mourmansk.).
Contre ces 2 750 km² de terres, Staline acceptait en échange de céder à la
Finlande les régions de Repola et Porajarvi, en Carélie, une zone d’environ
5 500 km² (cependant, il s’agissait de territoires peu peuplés,
majoritairement ruraux, et sans ressources particulières.).
La Finlande en 1939.
Dans un premier temps, le gouvernement finlandais accepta de transiger,
refusant néanmoins de céder le port de Hanko à l’URSS.
Staline décida alors de rompre les négociations à la mi-novembre 1939,
mettant en scène le bombardement de Mainila deux semaines plus tard (il
s’agissait d’une cité russe proche de la frontière.). Utilisant ce prétexte
pour réclamer des comptes à la Finlande, Staline décida d’envahie la
Finlande le 30 novembre (à noter que l’URSS fut exclue de la
Société des Nations[9]
à cette occasion.).
En
l’espace de quelques jours, l’armée rouge, comptabilisant près de 450 000
soldats, parvint à progresser jusqu’à la ligne Mannerheim, série de
fortifications coupant en deux l’isthme de Carélie[10].
L’armée finlandaise ne comptant que 180 000 hommes, le maréchal Carl
Gustave Emil Mannerheim, se sachant en position d’infériorité, décida
d’employer une stratégie de guérilla (attaque contre des éléments isolés,
destruction des convois de ravitaillement, etc.).
A
noter qu’au cours de l’hiver 1939-1940, l’armée rouge éprouva de nombreuses
difficultés, déplorant d’importantes pertes. Ainsi, alors que Moscou
s’attendait à un ralliement des communistes de Finlande, ces derniers
refusèrent de fraterniser avec l’ennemi ; les véhicules n’étaient pas
adaptés aux grands froids de Finlande (les moteurs gelaient par -40°.) ; les
soldats soviétiques ne provenaient pas des régions frontalières mais du sud
de l’URSS (ils n’étaient donc pas habitués au climat glacial finlandais.) ;
enfin, rappelons que Staline avait procédé à d’importantes purges au sein de
l’armée au cours des années 1930 (80% des officiers ayant été éliminés, ne
restaient que les généraux les plus loyaux envers le régime, non pas les
plus compétents.).
Soldats finlandais participant à la
guerre d'Hiver.
En
début d’année 1940, les réactions internationales vis-à-vis de la guerre
d’Hiver furent majoritairement favorables à la Finlande, l’agression
soviétique étant jugée comme injustifiée.
Alors que plusieurs milliers de volontaires, issus majoritairement des pays
voisins (Danemark, Norvège, Suède, etc.), rejoignaient les zones de combats,
France et Angleterre décidèrent de participer au conflit.
L’objectif des alliés était de faire débarquer une centaine de milliers
d’hommes dans le port norvégien de Narvik, afin de porter assistance à la
Finlande tout en sécurisant les régions métallifères de la région (une
petite partie du contingent rejoindrait la Carélie, le gros de troupes
devant d’établir sur une ligne Oslo-Stockholm.).
Soldats à skis finlandais.
Toutefois, la Suède refusa de laisser les troupes franco-britanniques
traverser le territoire, craignant une invasion allemande.
Côté soviétique, l’annonce de l’arrivée des renforts venus de Londres et
Paris fit vive impression. Ainsi, alors que le gouvernent finlandais
souhaitait mettre un terme au conflit (Mannerheim avait ordonné à ses
troupes de reculer en raison d’un manque de munitions.), Moscou décida de se
rapprocher d’Helsinki à compter de février 1940.
Cependant, alors que les pourparlers avaient débuté, l’armée rouge continua
sa progression jusqu’à la signature du traité de paix, soucieuse d’être en
position de force lors des négociations.
Caricature britannique représentant Staline en train d'écraser la Finlande
(à noter que ce dessin repose sur un jeu de mot, finnish ("finir" en
français) devenant finish ("finlandais") avec un "n" en moins).
Le
traité de Moscou, signé à la mi-mars 1940, consacrait la défaite
finlandaise. Ainsi, l’URSS récupérait la Carélie finlandaise (dont Viipuri,
seconde ville du pays[11].) ;
la région de Salla ; la péninsule de Kalastajansaarento, sur la mer de
Barents ; ainsi que quatre îles du golfe de Finlande. Par ailleurs, le port
de Hanko était loué à l’URSS pour une période de trente ans.
La Finlande suite au traité de Moscou.
Mais au final, si l’URSS avait réussi à obtenir toutes les territoires
convoités, l’affrontement avait été particulièrement sanglant : 390 000 tués
et 265 000 tués côté soviétique, pour 22 000 tués et 40 000 blessés côté
finlandais.
Les énormes difficultés éprouvées par l’armée rouge entraînèrent une nette
diminution du prestige de l’URSS. Par ailleurs, Hitler ne tarda guère à
remettre en question les capacités combattives des soviétiques, ce qui ne
fit que précipiter les plans d’invasion de l’URSS par l’Allemagne nazie.
3° La drôle de guerre (septembre
1939 à mai 1940) – Côté français, la mobilisation se
déroula dans des conditions correctes, plusieurs manifestations
d’enthousiasme étant constatées, comme en 1914.
Les premières troupes britanniques débarquèrent dans les ports de la Manche
au cours de la première semaine de septembre 1939.
Ordre de mobilisation générale, septembre 1939, Mémorial Leclerc, Paris.
-
Une étrange stratégie militaire : toutefois, alors que la guerre
faisait rage en Pologne et en Finlande, le général Gamelin refusa de marcher
en direction de l’Allemagne, conformément à sa stratégie de défense à
outrance (à noter que 300 000 Français de Moselle furent évacués par mesure
de précaution.).
Les troupes allemandes, quant à elles, étaient occupées en Pologne, et ne
lancèrent donc pas d’offensive contre les lignes françaises.
Cette période de la seconde guerre mondiale fut baptisée Sitzkrieg
par les Allemands (ce qui signifie « guerre assise.), et Phoney war
par les Britanniques (« fausse guerre. »). En français, le terme employé fut
Drôle de guerre (sans doute en raison d’une paronymie des termes
phoney, « faux », et funny « drôle. »).
D’un point de vue militaire, une expédition contre l’Allemagne fut organisée
au cours de la seconde semaine de septembre, neuf divisions recevant l’ordre
de marcher sur la Sarre. Cependant, le général Gamelin ordonna courant
octobre un repli de ses troupes sur la ligne Maginot, ayant appris la fin de
l’offensive contre la Pologne.
Ainsi, jusqu’en mai 1940, l’armée française ne mena aucune offensive de
grande ampleur, restant cantonnée dans ses retranchements de la ligne
Maginot.
Cette inaction, cette attente d’un conflit qui n’arrivait pas, fut
particulièrement mauvaise pour le moral des troupes françaises. Ainsi, afin
de distraire les troupes, de très nombreuses permissions furent accordées,
ce qui entraîna un véritable déficit de soldats en mai 1940, lors de
l’offensive allemande.
-
Une guerre contestée : contrairement à 1914, l’extrême-gauche refusa
de participer à l’effort de guerre. Le parti communiste, défendant le pacte
germano-soviétique, dénonça donc ce conflit « impérialiste » mené par la
France et l’Angleterre.
La
guerre semblait d’autant plus injustifiée aux communistes que la Pologne
avait été vaincue par l’Allemagne en l’espace de trois semaines.
En
représailles, Daladier fit interdire le parti communiste (26 septembre.), et
35 de ses membres furent arrêtés (début octobre.). Puis, le 21 janvier 1940,
tous les députés communistes furent déchus de leurs mandats.
A
noter toutefois que le gouvernement Daladier fut de plus en plus isolé à
mesure des victoires de l’Allemagne et de l’URSS, en Pologne, en Finlande,
en Norvège[12],
etc.
Ainsi, jusqu’au printemps 1940, d’importantes dissensions apparurent,
opposant partisans de la guerre et partisans de la paix.
[1]
Rappelons que Dantzig, autrefois allemande, était polonaise depuis
1919.
[2]
Rappelons qu’il s’agissait de l’Etat-major de la Heer, l’armée de
terre allemande.
[3]
Il s’agissait des territoires dont la Pologne s’était emparée suite
à la guerre russo-polonaise de 1920. Pour en savoir plus à ce sujet,
voir le g), 2, section I, chapitre cinquième, la troisième
république.
[4]
Certains prisonniers de guerre polonais furent exécutés par les
troupes soviétiques.
[5]
A l’origine, le terme bolchevik provient du russe большенство,
ce qui signifie « majorité. » En effet, les bolcheviks étaient au
début du XX° siècle la fraction majoritaire du parti ouvrier
social-démocrate de Russie, fondé en mars 1898.
[6]
Pour en savoir plus sur la prise de pouvoir des bolcheviks, voir le
10, section V, chapitre quatrième, la troisième république.
[7]
L’Allemagne, alors plongée dans le premier conflit mondial, avait
envoyé des troupes en Finlande en fin d’année 1917 afin de soutenir
le mouvement indépendantiste. Par ailleurs, l’hypothèse de céder la
couronne finlandaise à un souverain allemand fut un temps envisagée
(le projet fit long feu suite à la défaite allemande.).
[8]
A noter que de premières négociations, organisées en avril 1938,
s’était soldées sur un échec.
[9]
La SDN, ancêtre de l’ONU, était installée à Genève, en Suisse. Elle
avait été créée à l’initiative du président américain Thomas
Woodrow Wilson, suite à la signature du traité de Versailles,
mais les Etats-Unis refusèrent néanmoins de faire partie de cet
organisme.
[10]
La ligne Mannerheim (il s’agissait d’une ligne Maginot finlandaise)
était l’œuvre du maréchal Carl Gustav Emil Mannerheim.
[11]
A noter que les 420 000 Finlandais vivant en Carélie furent
contraint de quitter la région.
[12]
Nous reviendrons sur l’offensive allemande en Norvège en 1, section
III, chapitre sixième, la troisième république.