1° La
campagne de Norvège (avril à juin 1940) – Malgré la fin de
la guerre d’Hiver, la France et l’Angleterre n’avaient pas abandonné leurs
projets concernant les pays nordiques. En effet, ces deux pays étaient d’une
grande importance stratégique, la Suède étant productrice de grandes
quantités de fer, qui transitaient par la Norvège (alors que la mer Baltique
était prise par les glaces en hiver, les matières premières étaient
exportées via le port de Narvik, sur la façade atlantique.). Par ailleurs,
le gouvernement britannique considérait qu’un débarquement dans les pays
nordiques inciterait ces derniers à rejoindre le second conflit mondial,
tout en évitant que la frontière franco-germanique ne soit une fois encore
ravagée.
Côté allemand, le pays était dépendant des importations de fer suédois ; par
ailleurs, la Norvège était considérée par les théoriciens du régime nazi
comme le pays d’origine de la race
aryenne[1].
Pendant l’hiver 1939-1940, l’OKW[2]
reçut l’ordre d’Hitler d’élaborer un plan d’invasion de la Norvège
(l’objectif n’était pas d’envahir le pays dans l’immédiat, mais de pouvoir
réagir rapidement en cas de débarquement allié dans les eaux norvégiennes.).
a)
L’incident de l’Altmark (février 1940) : à la mi-février 1940, le
pétrolier allemand Altmark, détenant à son bord 300 prisonniers de
guerre britanniques, reçut l’autorisation du gouvernement norvégien de
naviguer dans les eaux du pays (les règlements internationaux stipulant
qu’un navire belligérant peut s’abriter temporairement en eaux neutres, s’il
en a reçu l’autorisation.).
Toutefois, faisant fi du droit international, le navire britannique
HMS Cossack[3]décida de pénétrer dans le fjord,
aborda l’Altmark, et libéra les prisonniers de guerre.
Le pétrolier Altmark.
Cet incident ne plut guère à la Norvège, qui craignait que ce viol de leur
neutralité ne soit perçu comme un signe de faiblesse ; côté allemand, Hitler
décida d’accélérer les plans d’invasions du pays, craignant un débarquement
allié imminent (à noter qu’il fut aussi décidé de s’emparer du Danemark, en
vue d’y installer une base arrière, même si ce pays n’était pas visé par les
projets alliés.).
Propagande allemande présentant les
soldats britanniques comme des bouchers violant les lois de la guerre.
b)
Le déclenchement de l’opération Weserübung (avril 1940) : l’opération
Weserübung[4]fut déclenchée début avril 1940 (la
propagande allemande présenta cette dernière comme une protection militaire
de la neutralité norvégienne.).
Apprenant que la flotte allemande faisait route vers le nord, l’Etat-major
britannique crut dans un premier temps qu’Hitler tentait de forcer le blocus[5].
Ce n’est que dans la soirée, lorsque de nouveaux rapports arrivèrent à
Londres, faisant état d’une concentration de navires ennemis au sud de la
Norvège, que l’Etat-major commença à douter de l’hypothèse d’une tentative
de rupture du blocus.
Côté norvégien, plusieurs rapports signalèrent au gouvernement que des
combats avaient eu lieu contre des navires allemands, et que ces derniers
s’étaient emparés de plusieurs fortifications de côte.
Il
fut donc décidé de procéder à une mobilisation partielle, le gouvernement
norvégien donnant l’instruction de ne pas attaquer les navires
franco-britanniques.
Le
9 avril, l’ordre fut donné aux troupes allemandes de débarquer. C’est ainsi
que plusieurs villes côtières furent prises en l’espace de quelques heures.
L'invasion de la Norvège.
Le
débarquement ne fut guère problématique à Narvik (deux navires norvégiens
qui défendaient le port furent coulés.), Trondheim, Egersund et Bergen (même
si la défense côtière parvint à endommager deux croiseurs allemand[6],
elle fut toutefois contrainte de déposer les armes suite à l’arrivée de la
Luftwaffe.).
Cependant, la résistance fut vive à Kristiansand (les Allemands trompèrent
l’ennemi grâce à l’utilisation d’un code norvégien, profitant de la
confusion pour débarquer.) et à Drobak, port protégeant l’entrée du fjord
d’Oslo : deux croiseurs allemands furent endommagés (le Blücher coula
avec l’essentiel du personnel administratif chargé de superviser
l’occupation de la Norvège.), et la flotte fut contrainte de faire demi-tour
afin de débarquer à quelques kilomètres au sud.
Cependant, si Oslo fut prise dès le lendemain par les troupes de la
Luftwaffe, ce court laps de temps fut mis à profit pour évacuer le roi
Haakon VII[7],
le Parlement norvégien et le trésor national.
Haakon VII de Norvège.
c)
L’invasion du Danemark (avril 1940) : alors que les troupes
allemandes s’emparaient des ports norvégiens, le Danemark était envahi par
la Wehrmacht.
L’armée danoise, de taille modeste et mal équipée, ne fut pas en mesure de
résister, même si des accrochages plus sérieux eurent lieu autour du palais
royal de Copenhague.
Le
lendemain de l’invasion allemande, le roi
Christian X[8]décida de capituler (à noter que
l’essentiel de la flotte marchande danoise décida de rallier des ports
alliés ou neutres ; quelques jours plus tard, les britanniques s’emparèrent
des îles Féroé.).
Christian X du Danemark.
d)
La première bataille de Narvik (10 avril 1940) : alors que les
allemands s’étaient emparés d’une série de ports norvégiens dans la journée
du 9 avril, l’Etat-major britannique décida dans l’après midi de débarquer
ses troupes à Bergen. Cependant, des patrouilles de reconnaissance de la
Royal Air Force[9]rapportèrent que les troupes allemandes
étaient plus nombreuses que prévu, et disposaient vraisemblablement des
batteries de défense côtière.
Cette information contraignit la flotte britannique à se replier plus au
nord, d’autant plus qu’elle fut la cible des bombardiers de la Luftwaffe,
qui coulèrent un destroyer.
La
flotte britannique, comptant dix destroyers, décida de se diriger plus au
nord, en direction de Narvik, plutôt que d’attaquer Bergen à nouveau. En
effet, l’Etat-major avait appris par un officier posé à terre à 80
kilomètres de là, que le port était gardé par cinq destroyers et un sous
marin.
A
l’aube du 10 avril, les navires britanniques attaquèrent la flotte ennemie,
profitant du brouillard pour bénéficier de l’effet de surprise.
Cette première bataille de Narvik permit aux Anglais de couler deux
destroyers, et à endommager sévèrement un troisième. Cependant, n’ayant pas
de troupes de débarquement, les navires britanniques furent contraints de
faire demi-tour deux heures après le début de l’affrontement.
Diorama de la bataille de Narvik.
Cependant, en quittant le port de Narvik, la flotte britannique fut prise
entre deux feux, et subit d’importants dégâts. Les Allemands, quant à eux,
ne purent procéder à une poursuite plus efficace de l’ennemi, se trouvant à
court de carburant.
Jusqu’à la mi-avril 1940, plusieurs opérations aériennes furent lancées par
la Royal Air Force contre les ports norvégiens, parvenant à couler ou à
endommager plusieurs navires de la Kriegsmarine.
e)
La seconde bataille de Narvik (13 avril 1940) : le 12 avril,
l’Etat-major britannique décida de lancer une nouvelle offensive contre
Narvik, envoyant cette fois-ci une flotte composée d’un cuirassier et de
huit destroyers.
Le
13 avril, un avion de reconnaissance fut envoyé dans la baie de Narvik (où
il parvint à couler un sous-marin ennemi.), puis la flotte britannique passa
à l’attaque.
Maquette de sous-marin allemand U-Boot 995, musée de la
Marine, Paris.
Au
cours de cette seconde bataille de Narvik, trois destroyers allemands
furent détruits, cinq furent sabordés par leur équipage (qui se réfugia dans
les montagnes avoisinantes.), et trois parvinrent à s’enfuir, déplorant un
manque de munitions. Par ailleurs, les batteries côtières furent sévèrement
endommagées.
Dans la soirée du 13 avril, la flotte britannique décida de se retirer,
ayant éliminé toute présence allemande dans Narvik. Cependant, le port fut
repris peu de temps après par la Wehrmacht, les alliés n’ayant pas débarqué
de troupes à Narvik.
f)
L’échec de l’opération Hammer (avril à mai 1940) : à la mi-avril, le
gouvernement norvégien ayant fui Oslo, le pouvoir fut récupéré par Vidkun
Quisling, ancien ministre de la Guerre, qui avait fondé en 1933 le parti
fasciste Nasjonal Samling[10]
(Quisling, s’inspirant du parti nazi, n’obtint que des résultats modestes :
2% aux élections législatives de 1933.).
Quisling, annonça sa nomination au poste de premier ministre lors d’une
allocution radiophonique, annula l’ordre de mobilisation décrété par le
gouvernement en exil.
Vidkun Quisling.
Toutefois, le colonel Otto Ruge[11],
nommé à la hâte général par Haakon VII, refusa de céder face à l’armée
allemande. Ainsi, ce dernier décida de s’établir sur une ligne
Oslo-Trondheim, se lançant dans des opérations de guérilla.
Toutefois, les Allemands continuaient leur progression vers le nord, prenant
Elverum le 20 avril.
Le général Otto Ruge.
Côté britannique, l’Etat-major prépara un plan d’attaque sur trois fronts,
l’opération Hammer : un débarquement à Namsos, au nord (baptisé
Force Maurice.) ; un débarquement à Andalsnes, au sud (Force
Faucille.) ; et un débarquement à Trondheim, au centre (Force Marteau.).
Cependant, le plan initial fut remanié, et le débarquement sur Trondheim fut
annulé (l’Etat-major britannique considérait qu’un assaut frontal sur cette
position serait trop coûteux en vies humaines.).
A
la mi-avril, la Force Maurice fut débarquée à Namsos. Cependant, privée de
soutien aérien, elle fut la cible de la Luftwaffe, qui détruisit le petit
port. Parvenant néanmoins à progresser jusqu’à Steinkjer, où les
Britanniques firent jonctions avec une division norvégienne, ces derniers
furent repoussés par les troupes allemandes.
Occupant Steinkjer, la Wehrmacht parvint à empêcher la jonction de la Force
Maurice et de la Force Faucille, perturbant ainsi le bon déroulement de
l’opération Hammer.
Troupes allemandes en Norvège.
Ayant débarqué à Andalsnes, les Britanniques se dirigèrent vers le village
de Dombas, soucieux de rejoindre Trondheim au plus tôt. Cependant, en
faisant jonction avec les forces du général Ruge, ce dernier indiqua que
l’armée norvégienne n’était plus en mesure de stopper la progression
allemande vers Trondheim.
Ainsi, la Force Faucille décida de marcher vers Lillehammer, au sud.
Cependant, repoussés par la Wehrmacht, les Britanniques furent contraints de
reculer vers Dombas, puis se réfugièrent à Andalsnes avec l’appui des
troupes du général Ruge.
Les deux forces expéditionnaires ayant échoué dans l’accomplissement de
leurs missions, elles furent rapatriées en Angleterre au début du mois de
mai 1940.
g)
La troisième bataille de Narvik et l’opération Alphabet (avril à mai
1940) : alors qu’au cours de l’opération Hammer, la capture de Narvik
n’était plus une priorité, l’échec des Forces Faucille et Maurice
contraignit l’Etat-major britannique à s’intéresser davantage à la Norvège
septentrionale[12].
Comme nous l’avons vu précédemment, la deuxième bataille de Narvik avait
permit à la flotte anglaise de débarrasser ce port de toute présence
allemande ; cependant, la Wehrmacht s’était rapidement emparé de Narvik
quelques jours après l’affrontement, les alliés n’ayant procédé à aucun
débarquement.
C’est ainsi qu’un contingent franco-britannique débarqua à Harstad à la
mi-avril 1940, à une centaine de kilomètres de Narvik. Bientôt rejoint par
plusieurs bataillons norvégiens, les alliés ne parvinrent toutefois pas à
s’entendre sur la marche à suivre pendant plusieurs semaines, ce qui
entraîna un retard dans la mise en place des opérations militaires.
A
la mi-mai, les alliés, renforcés par cinq chars français, descendirent vers
le sud, capturant Bjerkvik. Après quelques affrontements, les Allemands, se
sachant entourés par l’ennemi, décidèrent d’évacuer Narvik à la fin du mois.
Cependant, l’opération Alphabet, prévoyant le rapatriement des toutes
les troupes alliées stationnées en Norvège, avait été programmée peu de
temps avant la prise de Narvik.
En
effet, à la fin du mois de mai 1940, l’armée allemande avait lancé une
grande offensive contre la France et la Belgique, et les Etats-majors
français et britanniques avaient préféré rapatrier leurs troupes pour
défendre la frontière.
Le
rapatriement des soldats installés en Norvège s’effectua au cours de la
première semaine de juin 1940.
Suite au départ des franco-britanniques, la Wehrmacht bombarda Narvik en
représailles, entrainant la destruction d’une grande partie de la cité.
h)
Bilan de la campagne de Norvège : l’invasion de la Norvège fut un
franc succès pour Hitler, permettant à l’Allemagne nazie de sécuriser son
approvisionnement en fer suédois, et offrant à la Luftwaffe un base avancée
en Norvège. Par ailleurs, le blocus britannique destiné à étouffer
l’économie allemande fut levé (ce qui handicapait la stratégie de défense
française, qui comptait sur ce blocus pour épuiser l’Allemagne, comme cela
avait été le cas en 1918.)
Toutefois, si les victimes du conflit restaient peu nombreuses (4 000
soldats tués et 1 500 blessés.), la flotte allemande déplorait de sérieuses
pertes : trois croiseurs, dix destroyers et six sous-marins.
La
Kriegsmarine, déjà inférieure à la Royal
Navy[13],
sortait donc très affaiblie de ce conflit. A noter néanmoins que la flotte
anglaise avait elle aussi subi des dégâts (un porte-avions, deux croiseurs,
sept destroyers et un sous-marin.), mais restait bien supérieure à celle de
l’ennemi (d’autant plus que la Royal Navy fut renforcée par une partie des
marines marchandes norvégienne et danoise.).
La
grande majorité de la Norvège, contrairement à la France de Vichy, n’avait
aucune estime pour Vidkun Quisling, qui profita des évènements pour établir
une dictature dans le pays. Ainsi, la Norvège fut un des plus importants
foyers de résistance en Europe, profitant de la neutralité de la Suède pour
y entrainer ses troupes.
Le
Danemark, bien qu’ayant été envahi par le troisième Reich, conserva une
certaine autonomie ; la Suède, toujours neutre mais plus que jamais isolée,
consentit à mettre en place une coopération économique avec l’Allemagne.
En
Angleterre, l’échec des opérations norvégiennes furent très mal acceptées au
Parlement. Ainsi, Chamberlain, premier ministre britannique, fut renversé au
profit de Winston Leonard
Spencer-Churchill[14](plus connu sous le nom de Winston
Churchill.) en mai 1940.
Winston Churchill.
2° La bataille de France (mai à
juin 1940) – Alors que la guerre faisait rage en Norvège,
la drôle de guerre se poursuivait en France, le général Gamelin ayant refusé
de lancer une offensive contre l’Allemagne.
a)
Le ministère Reynaud (mars 1940) : En début d’année 1940, c’est une
bataille politique qui se jouait à Paris, opposant les partisans de la
poursuite de la guerre à ceux réclamant un armistice.
Daladier ayant présenté sa démission, Lebrun décida de céder la charge de
président du conseil à Paul Reynaud (22 mars 1940.).
Membre de l’AD, le nouveau venu confirma Chautemps à la vice-présidence du
conseil, confiant à Sarraut le portefeuille de l’Education nationale, et
confirmant Daladier au ministère de la Guerre. Par ailleurs, le colonel
Charles de Gaulle[15]fut nommé secrétaire d’Etat à la
Défense.
Le colonel de Gaulle (à droite) aux côté
du président Lebrun (à gauche).
Le
27 mars, Reynaud signa un accord avec le gouvernement britannique,
s’engageant à ne pas conclure de paix séparée ou d’armistice avec
l’Allemagne.
b)
La percée de Sedan (10 au 13 mai 1940) : C’est dans ce contexte
politique tendu que la Wehrmacht passa à l’attaque le 10 mai 1940, mettant à
exécution le Fall Gelb[16].
A
noter toutefois que sur les 3 000 chars alignés par l’armée allemande en
septembre 1939, il n’en restait plus que 2 500 en mai 1940 ; toutefois, si à
l’origine la Heer était équipée d’une majorité d’anciens modèles de Panzers,
elle s’était équipé de nouveaux modèles : ainsi, au début de la bataille de
France, l’armée allemande comptait 500 Panzer I, 1 000 Panzer II, 350
Panzer III et 300 Panzer IV (plus 300 chars tchécoslovaques LT vz
35 et LT vz 38[17].).
Panzer III.
La
Belgique et les Pays-Bas[18]
ayant été envahis par l’armée allemande, Gamelin décida de procéder à la
manœuvre Dyle-Bréda, le généralissime étant convaincu que
l’Etat-major allemand mettait à exécution le plan Schlieffen (qui prévoyait
une invasion de la Belgique afin de contourner les lignes française.).
Cette manœuvre, vivement critiquée par de nombreux officiers, entraîna le
départ vers la frontière hollandaise de la VII° Armée du général
Henri Giraud[19],
qui était à l’origine une armée de réserve[20].
Décoration du général Giraud, musée de l'Infanterie, Montpellier.
Mais le même jour, d’autres divisions allemandes envahirent la moitié sud de
la Belgique ainsi que le Luxembourg, visant le massif des Ardennes, le point
faible de la ligne de défense française.
Cette zone, que l’Etat-major français jugeait infranchissable par les
troupes ennemies, était donc mal défendue (la ligne Maginot s’arrêtait
quelques kilomètres avant.) ; moins bien équipée en matériel moderne ;
enfin, les troupes de réserves chargées de protéger les Ardennes avaient été
envoyées en Belgique, conformément à l’application de la manœuvre
Dyle-Bréda.
La percée de Sedan.
Les troupes allemandes, progressant dans la moitié sud de la Belgique, se
dirigèrent vers Bouillon, au nord de la frontière française. L’objectif de
la Wehrmacht était de traverser la rivière Semois afin de se diriger vers
Sedan.
L’Etat-major français, averti de l’avancée allemande, ordonna la destruction
du pont de Bouillon. Cependant, malgré l’importance de leur objectif,
l’aviation militaire ne parvint pas à détruire le pont, laissant les Panzers
traverser la frontière le 12 mai.
L’armée allemande, se dirigeant désormais vers Sedan, fut toutefois
momentanément stoppée sur les rives de la Meuse, les ponts ayant été
détruits par l’artillerie française.
La
région de Sedan, visée par l’ennemi, était la charnière de deux secteurs,
les ouvrages de Montmédy (ces derniers faisaient partie intégrante de la
ligne Maginot.) et le massif des Ardennes.
Cette zone était défendue par la IX° Armée du général
André Georges Corap[21]
(installée sur la ligne Dinant-Sedan.) et la II° Armée du général
Charles Huntziger[22]
(Sedan-Longuyon.).
Les généraux André Georges Corap (à gauche) et Charles Huntziger (à droite).
Bien que constituant un point faible dans la ligne de défense française, la
zone était malgré tout mal défendue. Près de 80% des soldats étaient en
permission le 10 mai 1940 ; beaucoup de militaires étaient des réservistes
issus de classes anciennes ; peu de canons antichars et de mines antichars
avaient été distribués à la troupe ; enfin, les casemates en béton armé,
érigées depuis le commencement de la guerre, restaient inachevés (pas de
couleur camouflage, pas de portes blindées, pas de couverture mutuelle,
etc.).
Toutefois, si le secteur des Ardennes constituait un véritable point faible,
il faut savoir que l’Etat-major français s’était entêté à le laisser dans
cet état. En effet, Gamelin avait reçu à plusieurs reprises des informations
en provenance de Belgique, indiquant que l’offensive allemande viserait les
Ardennes ; cependant, le généralissime avait décidé de ne pas en tenir
compte.
Au
petit matin du 13 mai, alors que les troupes allemandes s’apprêtaient à
franchir la Meuse en direction de Sedan, la zone était pilonnée par la
Luftwaffe.
Ainsi, le point de jonction entre la IX° et la II° Armée fut bombardé
pendant plusieurs heures par près de 600 bombardiers HE-111 et 250 Stuka
JU-88, ces appareils étant protégés par plus de 500 chasseurs Me-110.
Junkers JU-87.
Toutefois, malgré un bombardement ininterrompu qui dura jusqu’en début
d’après midi, les casemates françaises étaient toujours intactes. Repoussant
plusieurs offensives allemandes, les Français ne parvinrent toutefois pas à
stopper l’avancée d’un bataillon allemand, qui s’infiltra dans une faille
entre Glaire et Torcy-Ecluse. Ce bataillon, neutralisant plusieurs bunkers
français en pris à revers, permit à de nombreux soldats de franchir la Meuse
(cette tactique allemande, consistant à appuyer les troupes au sol par un
renfort aérien, fut surnommée la
Blitzkrieg[23]par la presse britannique.).
Avancée des troupes allemandes dans les Ardennes.
Côté français, la confusion était à son comble, les soldats subissant
l’assaut allemand de plein fouet, les liaisons téléphoniques étant coupées,
les tirs d’artillerie incertains, et les tranchées hors d’usage.
En
fin d’après midi, une unité de DCA[24]se débanda, plongeant dans la panique
les régiments alentours. Craignant que l’ennemi ne soit déjà à Bulson, au
sud de Sedan, plusieurs milliers de soldats se débandèrent dans la panique.
Dans la confusion, plusieurs batteries d’artillerie lourde furent
abandonnées, par ailleurs, plusieurs soldats continuèrent à se battre sur le
front, ignorant ce qui se passait à l’arrière.
Les Allemands, restant maitres du terrain à la tombée de la nuit,
commencèrent à construire des ponts flottants près de Floing à compter du 13
mai au soir, permettant aux Panzers et aux unités motorisées de traverser la
Meuse à l’aube du 14.
Les suites de la percée de Sedan.
c)
Tentatives de contre-attaque (14 au 17 mai 1940) : dans un premier
temps, l’Etat-major français considéra l’offensive menée contre Sedan comme
un simple « incident local. » Ce n’est que dans la soirée du 13 mai, ayant
appris que la position avait subi un intensif bombardement aérien, que le
général Gamelin se rendit compte de la situation.
La percée de Sedan.
Dans un premier temps, l’Etat-major français donna l’ordre à l’aviation de
bombarder les ponts flottants installés par les Allemands sur la Meuse.
C’est ainsi qu’une dizaine de LEO-451 et d’Amiot 143 tentèrent de détruire
les installations ennemies, en vain (plusieurs appareils furent abattus le
14 mai par la DCA allemande.).
Lioré et Olivier LEO-451 (en haut) et Amiot 143 (en bas).
Cependant, les troupes françaises regroupées autour de Chéhéry, au sud de
Sedan, tentèrent une contre-attaque, équipées de chars FCM 36. Les blindés
allemands étant en train de traverser la Meuse, un premier bataillon de
Panzers fut envoyé contre la position française, mais les FCM 36 firent
beaucoup de dégâts.
Lieutenant de char français, uniforme modèle 1935, musée des Invalides,
Paris.
Ce
n’est qu’en début d’après-midi que les Français, encerclés, décidèrent de
reculer.
A
noter que d’autres combats se déroulèrent à Stonne, à une dizaine de
kilomètres au sud de Bulson, du à compter du 15 mai 1940.
Les troupes françaises, équipés de chars lourds B1, firent face pendant
plusieurs jours à une armée allemande dotée d’une forte supériorité
numérique (40 000 Français et 130 chars contre 90 000 Allemands et 300
Panzers.).
Tank Renault B1.
Changeant de mains à plusieurs reprises, Stonne fut définitivement prise par
la Wehrmacht le 17 mai, au prix de fortes pertes : 3 000 tués et 23 000
blessés côté allemand contre 1 000 tués et 6 500 blessés côté français (à
noter que plusieurs poches de résistances continuèrent la lutte jusqu’à la
fin du mois.).
d)
L’opération Dynamo (17 mai au 4 juin 1940) : la percée de Sedan, loin
d’être un simple « incident local », contribua à déstabiliser complètement
la ligne de front. En effet, le général Corap n’ayant plus de liaison avec
Sedan, ce dernier décida de se replier sur la frontière franco-belge ; cette
décision contraignit la I° Armée qui combattait en Belgique à se
replier sur les rives de l’Escaut.
Côté hollandais, la reine Wilhelmine avait quitté les Pays-Bas le 14
mai pour se rendre en Angleterre, laissant l’armée déposer les armes le même
jour. Quant au général Giraud, à la tête de la VII° Armée (qui devait porter
assistance aux Hollandais en application de la manœuvre Dyle-Breda.), il
arriva après la reddition. Giraud reçut alors l’ordre du général Gamelin de
se retirer vers la Somme, ce qui ne fit qu’ajouter à la confusion ambiante
(d’autant qu’il fut capturé par les Allemands le 19 mai.).
Côté belge, la défection des hollandais menaçait désormais le flanc gauche
de la ligne de front, d’autant plus que les munitions commençaient à manquer
(principalement pour l’artillerie.).
Le
19 mai, Reynaud décida de limoger Gamelin, qui fut remplacé par le général
Maxime Weygand[25].
Le même jour, le président du conseil procéda à un remaniement ministériel :
Reynaud récupéra le ministère de la Guerre ; Daladier reçut le portefeuille
des Affaires étrangères ; enfin, le maréchal Philippe Pétain[26]fut nommé à la vice-présidence du conseil.
Le général Maxime Weygand (à gauche) et
le maréchal Philippe Pétain (à droite).
Reynaud, faisant face à une situation dramatique, envisagea la formation
d’un « réduit breton », ce qui permettrait à l’armée française de poursuivre
la lutte (cependant, ce projet fut rapidement annulé.).
Cependant, ce changement à la hâte au sein de l’Etat-major français ne fit
que retarder la mise en place d’une contre-offensive, d’autant que Weygand
demanda à rencontrer les généraux belges et britanniques avant d’adopter une
stratégie.
Cette immobilité française eut d’importantes répercussions : ainsi, alors
que la Wehrmacht s’avançait vers la Somme depuis les Ardennes (20 mai.),
l’Etat-major britannique ordonna un repli via Dunkerque (25 mai.) ; les
Belges, contraints d’étendre leur ligne de front pour remplacer les Anglais,
furent contraints de déposer les armes,
Léopold III[27]décidant de faire reddition le 26 mai[28].
Allocution radiophonique de Léopold III.
Weygand, mis devant le fait accompli, décida de participer à l’opération
Dynamo, destinée à rapatrier en Angleterre un maximum de soldats
britanniques et français (toujours dans l’optique du « réduit breton ».).
En
cette dernière semaine du mois de mai 1940, la situation était
catastrophique. En effet, la Wehrmacht avait percé dans les Ardennes et sur
la Somme : désormais, non seulement l’armée française était coupée en deux ;
en outre, le million de soldats franco-britanniques, réfugié à Dunkerque,
était pris en étau par l’ennemi.
Les Allemands ne perdirent pas de temps, atteignant Bourbourg le 24, cité se
trouvant à seulement à vingt kilomètres de Dunkerque. Cependant, Hitler
ordonna à ses troupes de marquer un coup d’arrêt le 27, sans que l’on en
connaisse la raison aujourd’hui. Peut être voulait t’il faire reposer ses
troupes avant de marcher sur Paris ; ou bien décida t’il de ménager
l’Angleterre, espérant que les Britanniques acceptent de participer à la
future expédition contre l’URSS ?
Quoi qu’il en soit, ce court laps de temps fut mis à profit par les troupes
franco-britanniques, qui en profitèrent pour sécuriser leurs positions.
L'opération Dynamo.
Dans un premier temps, Weygand tenta d’organiser une contre-attaque, mais en
fut toutefois dissuadé par le général
John Gort[29],
chef du corps expéditionnaire britannique. Ce dernier considérait que
l’évacuation par voie de mer était la seule option viable à long terme.
Ainsi, alors que le 26 la ligne de défense était établie sur une ligne
Gravelines-Douai-Audenarde-Terneuzen, à la fin du mois le réduit français ne
comptait plus qu’un corridor reliant Dunkerque à Nieuport (la garnison de
Calais, isolée, avait déposé les armes le 27.).
Début juin, la Wehrmacht reprit l’offensive, bombardant Dunkerque. En proie
à la panique, les Britanniques firent leur possible pour rapatrier un
maximum d’hommes et de matériel. L’opération Dynamo fut toutefois une
réussite, 235 000 Britanniques et 115 000 Français ayant été évacués en
l’espace d’une semaine.
Evacuation des hommes et du matériel lors
de l'opération Dynamo, mai 1940, Mémorial
Leclerc, Paris.
Le
4 juin, le dernier navire évacuait la cité, laissant cette dernière entre
les mains de l’armée française (35 000 hommes au total, plus quelques
centaines de Britanniques.). Le même jour, Dunkerque ouvrit ses portes aux
troupes allemandes.
Soldats britanniques faits prisonniers à
Dunkerque, juin 1940.
e)
L’exode (juin 1940) : au début du mois de juin 1940, l’armée
allemande approchait à grands pas de la capitale. C’est dans ce contexte que
l’Etat-major allemand déclencha l’opération Paula le 3 juin, destinée
à bombarder les aérodromes de la région parisienne. Toutefois, si
l’offensive de la Luftwaffe se solda sur un échec[30], les Français perdirent 35
avions et eurent 900 tués et 250 blessés.
Puis, le 10 juin 1940, faisant face à la progression irrésistible de la
Wehrmacht, le gouvernement français décida de se replier vers Tours. A cette
occasion, Paris fut déclarée ville ouverte (c'est-à-dire qu’elle
ouvrirait ses portes à l’ennemi sans combattre.) afin d’éviter un siège qui
pourrait être destructeur.
Hitler pris en photo devant la tour
Eiffel depuis le palais du Trocadéro, été 1940.
Le
même jour, Mussolini décida de déclarer la guerre à la France, à une époque
où la victoire de l’Allemagne semblait imminente. En effet, l’objectif de
Mussolini était de mettre la main sur les
terres irrédentes[31]
appartenant à la France, tels que la Savoie, la région de Nice et la Corse[32]
(Hitler avait indiqué à Mussolini qu’il pourrait annexer les territoires
dont il réussirait à s’emparer.). Mais les Français, bien retranchés
derrière la ligne Maginot, faisant face à une armée italienne désuète,
parvinrent à repousser l’ennemi sur la frontière des Alpes.
Par ailleurs, le dictateur espagnol Francisco Franco[33],
sommé par l’Allemagne de déclarer la guerre à la France, préféra ne pas
intervenir.
A
noter qu’au même moment, Staline profitait du chaos ambiant pour envahir les
pays Baltes[34].
La débâcle.
Cependant, alors que le gouvernement fuyait à Tours, l’annonce de l’arrivée
imminente des troupes allemandes à Paris provoqua un mouvement de Panique en
île de France.
Défilé des troupes allemandes sous l'arc
de Triomphe.
Ainsi, alors que déjà quatre millions de Belges, Hollandais et Français des
régions frontalières avaient quitté leurs habitations en mai 1940, plus de 6
millions de franciliens (dont les deux tiers de la population parisienne.)
prirent à leur tour le chemin du sud.
Ces réfugiés, se déplaçant en voiture, en charriot et parfois à pied,
n’arrivèrent toutefois pas tous à destination. Ainsi, les Français ayant
quitté trop tard les régions du nord de la France furent pris en tenaille
par l’armée allemande ; en outre, près de 100 000 civils furent victimes des
attaques des stukas de la Luftwaffe.
Au
final, l’on estime que près de 10 millions de Français (soit le quart de la
population française.) participèrent à l’exode du printemps 1940.
Scènes de l'exode de l'été 1940
présentées par la propagande allemande, Mémorial Leclerc, Paris (la légende
indique :"des millions de réfugiés fuyaient les combats sur les routes de
France").
A
noter toutefois que ce mouvement de masse, déclenché à une époque où la
guerre battait son plein, gêna considérablement les déplacements de l’armée
française.
f)
L’armistice (22 juin 1940) : le général Weygand, après avoir
participé à l’opération Dynamo, décida de constituer une ligne de défense
reliant la Somme à l’Aisne, baptisée la ligne Weygand.
Toutefois, privée du soutien belge et britannique, et souffrant d’un rapport
de force devenu trop inégal, l’armée française ne parvint pas à tenir ses
positions.
Ainsi, Weygand décida de faire reculer son armée sur le Cher, dans le
courant du mois de juin.
La fin de la campagne de France.
A
Tours, le gouvernement était dans une situation catastrophique, alors que
les Allemands marchaient sur Paris (ils s’emparèrent de Rouen le 9 juin, de
Compiègne le 12, et de la capitale le 14.).
Lors de la conférence de Briare[35],
réunissant les 11 et 12 juin 1940 les dirigeants français et britanniques,
de nombreuses divergences concernant la poursuite des opérations refirent
surface : ainsi, alors que Churchill demandait la mise en place d’opération
de guérilla afin de retarder l’avancée de l’ennemi, Weygand lui rétorqua que
les lignes de défense étaient trop fragiles pour poursuivre la lutte. Par
ailleurs, ce dernier éluda la stratégie du « réduit breton », ce qui
contraignit Reynaud à se prononcer en faveur de la poursuite de la guerre en
Afrique du nord.
A
noter que Churchill s’inquiétait principalement du sort réservé à la marine
française, alors la quatrième mondiale (derrière les Etats-Unis,
l’Angleterre et le Japon.). Toutefois, l’amiral François Darlan[36] lui affirma qu’elle ne
tomberait jamais entre les mains de l’Allemagne.
Le
lendemain, une nouvelle réunion fut organisée, qui cristallisa encore plus
les divergences. Désormais, les partisans de l’armistice étaient
majoritaires (Pétain, Weygand, Pierre
Laval[37],
l’amiral Darlan.).
Pierre Laval et François Darlan.
Reynaud, malgré le soutien du chef de l’Etat et du général de Gaulle, décida
alors de présenter sa démission dans la nuit du 16 au 17 juin 1940. Lebrun
décida alors de confier la charge de président du conseil au maréchal
Pétain.
Ce
dernier, rejoignant Bordeaux, constitua donc un nouveau gouvernement.
Confirmant Chautemps à la vice-présidence du conseil, Pétain confia le
ministère de la Défense nationale à Weygand ; l’amiral Darlan eut le
portefeuille de la Marine marchande et militaire.
Ce
gouvernement sans couleur politique particulière (la plupart des ministres
étaient des militaires.) reçut toutefois le soutien des radicaux et des
socialistes.
A
noter que Laval, sollicité pour le ministère de la Justice, réclama le
portefeuille des Affaires étrangères (qu’il avait longtemps occupé au cours
des années 1930.). Toutefois, Pétain refusa de transiger, et comme Laval
était un politique de premier rang, il fut décidé de lui céder la
vice-présidence du conseil.
Le 17 juin à midi, le nouveau président du conseil
s’adressa à la population française lors d’une allocution radiophonique :
Français! A l'appel de M. le président de la République, j'assume à partir
d'aujourd'hui la direction du gouvernement de la France. Sûr de l'affection
de notre admirable armée, qui lutte avec un héroïsme digne de ses longues
traditions militaires contre un ennemi supérieur en nombre et en armes […], sûr de la confiance du peuple tout entier, je fais à la France le
don de ma personne pour atténuer son malheur. En ces heures douloureuses, je
pense aux malheureux réfugiés, qui dans un dénuement extrême, sillonnent nos
routes. Je leur exprime ma compassion et ma sollicitude. C'est le cœur serré
que je vous dis aujourd'hui qu'il faut cesser le combat. Je me suis adressé
cette nuit à l'adversaire pour lui demander s'il est prêt à rechercher avec
moi, entre soldats, après la lutte et dans l'honneur, les moyens de mettre
un terme aux hostilités. Que tous les Français se groupent autour du
gouvernement que je préside pendant ces […] dures épreuves et fassent
taire leur angoisse pour n'obéir qu’à leur foi dans le destin de la patrie.
Le maréchal Pétain, réclamant la fin des combats,
ne fit qu’accentuer la confusion au sein de l’armée, à une époque où de
nombreuses unités combattaient encore.
Le général de Gaulle, évincé du gouvernement par
les pacifistes, avait rejoint Londres le 16 juin, muni d’un ordre de mission
de Reynaud et d’une somme de 100 000 francs, afin de constituer une force
française de résistance. Hostile à la décision du maréchal Pétain, de Gaulle
prononça, le 18 juin 1940, un discours resté célèbre, mais passé quasiment
inaperçu à l’époque :Le
gouvernement français a demandé à l’ennemi à quelles conditions honorables
pourrait cesser le combat. […] Nous avons été surpris et submergés
par la force mécanique, la tactique de l'ennemi. Mais il y a, malgré tout,
des raisons d’espérer. Croyez-moi, rien n'est perdu pour la France. Les
mêmes moyens qui nous ont vaincus peuvent nous apporter la victoire. La
France n'est pas seule ! La France n'est pas seule ! La France n'est pas
seule ! Elle peut faire bloc avec la Grande-Bretagne et disposer d’immenses
réserves. La guerre n'est pas tranchée par la bataille de France. Toutes les
fautes qui ont été commises n’empêcheront pas qu’un jour l’ennemi sera
écrasé. Cela pourra se faire grâce à une force mécanique supérieure encore.
Moi, Général de Gaulle, actuellement à Londres, j'invite les officiers et
les soldats français qui se trouvent actuellement en Grande-Bretagne ou qui
viendraient à s'y trouver, à se mettre en rapport avec moi. […] Quoi
qu’il arrive, la force intérieure de la résistance des Français ne doit pas
faiblir.
Au cours
des mois qui suivirent, de Gaulle donna naissance à la France libre,
une organisation de résistance extérieure destinée à poursuivre la lutte
contre l’Allemagne.
Affiche résumant les discours du 18 et 22 juin 1940, baptisée à tort "appel
du 18 juin", musée des Invalides, Paris.
Le gouvernement français ayant fait le choix
d’entamer des pourparlers avec l’Allemagne, Hitler exigea que ces
négociations s’effectuent dans la forêt de Compiègne, non loin de la commune
de Rethondes, à bord de ce même wagon où la délégation allemande avait signé
l’armistice du 11 novembre 1918[38].).
En tant que ministre de la Défense, Weygand posa
trois vétos à la délégation française chargée de négocier les clauses de
l’armistice (la guerre continuerait en cas de refus des autorités
allemandes.) : occupation de tout le territoire métropolitain, livraison de
la flotte française, installation de troupes allemandes dans les colonies
françaises.
Côté allemand, Hitler avait fait le déplacement en
personne, présidant la réunion inaugurale, le 21 juin 1940. Il était
accompagné de Rudolf Hess[39]
(il s’agissait d’un proche du Führer.), de
Joachim von Ribbentrop[40]
(ministre des Affaires étrangères du troisième Reich.), ainsi que de
plusieurs officiers (le général Wilhelm
Keitel[41],
chef de la Wehrmacht, Hermann Goering[42],
commandant de la Luftwaffe, et l’amiral Erich Raeder[43],
commandant de la Kriegsmarine.).
De gauche à droite : Rudolf Hess, Joachim
von Ribbentrop, Wilhelm Keitel, Hermann Goering et Erich Raeder.
Si la délégation allemande comptait des
personnalités de premier rang, côté français l’on retrouvait une majorité
d’officiers de second ordre, tels que le général Huntziger (représentant
l’armée de terre.), le général Jean Bergeret (aviation.), le
vice-amiral Maurice le Luc (Marine.), et le diplomate
Léon Noël[44].
Après deux jours de discussions, l’armistice fut
finalement signé dans la soirée du 22 juin 1940.
Les clauses étaient les suivantes : l’Alsace et la
Lorraine étaient annexées par le troisième Reich ; la moitié nord de la
France (ainsi que la côte atlantique.), passait sous domination allemande
(la zone occupée.), le reste constituant la zone libre ;
l’Empire colonial restait sous le contrôle du gouvernement français ; la
France était chargée de pourvoir à l’entretien des forces d’occupations
(soit plus de cent millions de francs par jour.) ; l’armée de la zone libre
était limitée à 100 000 hommes ; la flotte française était épargnée, mais
devait rejoindre ses ports d’attache de temps de paix (à savoir Cherbourg,
Brest et Lorient, en zone occupée.) ; les prisonniers de guerre français
(1.5 millions d’hommes.) resteraient en détention jusqu’à la signature d’un
traité de paix définitif ; le gouvernement devait livrer au troisième Reich
les réfugiés politiques allemands et autrichiens réfugiés en France ; enfin,
les clauses de cet accord n’entreraient en application qu’après la signature
d’un armistice avec l’Italie.
La signature de l'armistice du 10 juin 1940 présentée par la propagande
allemande, Mémorial Leclerc, Paris (la légende indique : "la honte [de 1918] fut
effacée par la plus grande victoire de notre histoire").
A noter qu’Hitler avait préféré laisser à la
France sa souveraineté et son Empire colonial, car la Wehrmacht n’était pas
en mesure de conquérir un territoire africain aussi vaste. Par ailleurs, le
Führer souhaitait pouvoir s’attaquer au plus tôt à l’URSS, la conquête de
l’Empire colonial français n’entrant pas dans ses plans.
A noter qu’à l’issue des pourparlers, le wagon de
l’armistice fut envoyé en Allemagne, Hitler souhaitant effacer la défaite
allemande de 1918[45].
Affiche de propagande allemande (la légende indique :
"populations abandonnées, faites confiance au soldat allemand").
g) L’armistice franco-italien (24 juin 1940)
: deux jours après la signature de l’armistice avec l’Allemagne, un
second rendez vous fut mis en place, cette fois-ci avec l’Italie (l’objectif
était de mettre un terme à la guerre franco-italienne qui s’était conclu sur
un échec côté italien.).
La délégation française, présidée une fois encore
par le général Huntziger, fut invitée à la villa Incisa, dans un village
près de Rome. Côté italien, Mussolini étant absent, l’on retrouvait
Gian Galeazzo Ciano[46],
ministre des Affaires étrangères, et le maréchal
Pietro Badoglio[47].
Après quelques heures de négociations, l’armistice
fut signé dans la soirée du 24 juin 1940.
Alors que Mussolini avait affirmer sa volonté
d’annexer la Provence, Nice, la Savoie, la Corse, ainsi que la Tunisie, la
Somalie française, Alger, Oran et Casablanca, Hitler lui avait fait
remarquer que ses prétentions étaient démesurées. Ainsi, le
Duce[48]
fut contraint de se contenter d’une petite zone d’occupation en Savoie et
sur la côte d’Azur (soit 800 km² au total.).
Par ailleurs, une zone démilitarisée, d’une
largeur de 50 kilomètres, reliait la frontière suisse à la Méditerranée (une
autre zone démilitarisée fut mise en place en Algérie et en Tunisie le long
de la frontière libyenne.).
La signature de l’armistice italien permit aux
deux accords d’entrer en vigueur le 25 juin à minuit trente.
A noter toutefois que malgré la signature de ces
armistices, plusieurs régiments de la ligne Maginot refusèrent de déposer
les armes, certaines unités poursuivant la lutte jusqu’à la mi-juillet 1940.
La France suite à l'armistice du 22 juin 1940.
h) Le bilan de la campagne de France :
malgré une légende tenace qui affirme que les soldats français se rendirent
sans combattre, lors de l’offensive allemande, les chiffres nous donnent un
éclairage bien différent.
Ainsi, en l’espace de six semaines, près de 85 000
soldats furent tués, pour près de 120 000 blessés et 1.8 millions de
prisonnier.
Les pertes françaises étaient bien supérieures à
celles des pays voisins : 6 000 tués et blessés pour la Pologne ; 12 000
morts, 15 000 blessés et 300 000 prisonniers pour la Belgique ; 3 000 tués
et 7 000 blessés côté hollandais ; 3 500 morts, 13 000 blessés et 48 000
prisonnier pour la Grande-Bretagne ; enfin, côté allemand, l’on dénombrait
27 000 tués, 110 000 blessés et 18 000 prisonniers et disparus.
Caricature britannique critiquant la signature de l'armistice (Marianne,
enchainée et aveuglée, signe le document sous la pression d'Hitler et de
Mussolini).
3° La
création du régime de Vichy (juillet 1940) – Bordeaux
ayant été rétrocédée à l’Allemagne en vertu de l’armistice du 22 juin, le
maréchal Pétain, le gouvernement et le Parlement décidèrent de s’installer à
Vichy, cité thermale située à quelques dizaines de kilomètres de la zone de
démarcation.
a) La révision constitutionnelle (10 juillet
1940) : depuis la mi-juin 1940, date de la nomination du maréchal Pétain
au poste de président du conseil, de nombreux parlementaires évoquaient une
possible réforme des actes
constitutionnels de 1875[49],
afin de donner plus d’autorité au pouvoir exécutif.
Toutefois, si les décrets de l’époque conféraient
au chef de l’Etat de fortes responsabilités (dissolution de la Chambre des
députés, initiative des lois, chef des armées, etc.), le rôle de ce dernier
avait été réduit à sa portion congrue suite à l’adoption de la
constitution Grévy[50],
qui avait consacré l’effacement présidentiel.
Ainsi, alors que Laval était favorable à
l’adoption d’une nouvelle constitution, plusieurs députés, tels que
Pierre Etienne Flandin[51],
proposèrent que le maréchal Pétain soit nommé président de la république, en
remplacement de Lebrun[52]
(ce qui permettait de revenir aux actes de 1875 stricto sensu, sans
procéder à aucun remaniement constitutionnel.).
Cette proposition fut toutefois écartée par le
chef de l’Etat, qui refusait d’abandonner sa charge au profit du maréchal
qu’il n’appréciait guère.
A la fin juin, Laval proposa donc aux députés un
projet de nouvelle constitution, conférant les pleins pouvoirs au
gouvernement, sous l’autorité du maréchal Pétain.
De nombreux députés y furent favorables, à une
époque où un renforcement des pouvoirs exécutifs était vivement souhaité
(l’effacement présidentiel ayant montré ses limites lors de la bataille de
France.).
Le projet de Laval, accepté le 4 par le
gouvernement, fut présenté le 8 aux députés.
Le 9 juillet, les deux chambres s’étant prononcées
à la quasi-unanimité sur une révision constitutionnelle, la Chambre des
députés et le Sénat se réunirent le lendemain en assemblée nationale au sein
de la salle d’Opéra du casino de Vichy.
Députés et sénateurs réunis au sein de la salle d'Opéra du
casino de Vichy, 9 juillet 1940.
Laval, soucieux que la réforme constitutionnelle
soit adoptée, multiplia les promesses quant à l’avenir du régime, tentant de
rassurer les députés et les sénateurs du bien fondé de la révision. Ainsi,
ce dernier en appela à l’aura du maréchal Pétain, le vainqueur de Verdun[53] ;
affirma que les chambres continueraient à fonctionner ; que la future
constitution, ratifiée par la nation, entraînerait la mise en place d’un
régime plus solide ; etc.
Dans l’après-midi du 10 juillet, les
parlementaires se préparèrent à voter la réforme constitutionnelle. A noter
toutefois que Laval décida de voter le texte à la majorité des suffrages
exprimés, et non à la majorité des membres de l’assemblée nationale[54].
Au final, la réforme constitutionnelle fut adoptée
à 569 voix contre 80[55].
Caricature britannique critiquant la réforme constitutionnelle de juillet
1940 (Marianne, enchainée, arbore une robe parsemée de croix gammées,
élaborée par le "tailleur Laval". Hitler, quant à lui, assiste à la scène
d'un air satisfait).
b) Les premiers actes constitutionnels du
maréchal Pétain (juillet 1940) : le maréchal Pétain ayant désormais les
mains libres, il promulgua dès le 11 juillet les trois premiers actes
constitutionnels.
Pétain, désormais « chef de l’Etat », abrogeait
de facto l’amendement wallon[56],
qui stipulait que le président de la république était élu pour sept ans par
le peuple français.
Le second acte conférait au chef de l’Etat les
pouvoirs exécutifs et législatifs, le troisième acte ajournait les chambres
jusqu’à convocation ultérieure[57].
C’est dans ces conditions que le terme de
république française fut remplacé dans tous les documents officiels par
Etat français.
En parallèle de ces actes constitutionnels (neuf
autres furent adoptés d’ici novembre 1942.), Pétain décida de dissoudre la
franc-maçonnerie et les sociétés secrètes. Tous les fonctionnaires
d’obédience maçonnique (plus de 2 000.) furent alors limogés (13 août
1940.) ; puis, pendant l’été, furent arrêtés les anciens ministres et hommes
politiques jugés responsables de la défaite (leur procès s’offrit en février
1942[58].).
A noter enfin que le 16 juillet 1940, Laval
procéda à un remaniement ministériel[59],
confirmant Weygand et Darlan respectivement à la Guerre et à la Marine (le
vice-président du conseil récupéra le portefeuille des Affaires étrangères à
la fin octobre 1940.).
c)
Les réactions internationales (été 1940) : si à l’origine, le général
de Gaulle n’était entouré que de 7 000 hommes, plusieurs colonies décidèrent
de se rallier à la France libre pendant l’été 1940, notamment après la
promulgation des actes constitutionnels du régime de Vichy : le Tchad, le
Cameroun, le Congo, l’Oubangui et Chari[60],
les comptoirs d’Inde, la Nouvelle-Calédonie, etc.
De Gaulle, présent à Brazzaville en octobre 1940,
prononça le discours suivant : La France traverse la plus terrible crise
de son Histoire. Ses frontières, son Empire, son indépendance et jusqu'à son
âme sont menacés de destruction. Cédant à une panique inexcusable, des
dirigeants […] ont accepté et subissent la loi de l'ennemi.
Cependant, d'innombrables preuves montrent que le peuple et l'Empire
n'acceptent pas l'horrible servitude. Des milliers de Français ou de sujets
français ont décidé de continuer la guerre jusqu'à la libération. Des
millions et des millions d'autres n'attendent, pour le faire, que de trouver
des chefs dignes de ce nom. Or, il n'existe plus de gouvernement proprement
français. En effet, l'organisme sis à Vichy et qui prétend porter ce nom est
inconstitutionnel et soumis à l'envahisseur. Dans son état de servitude, cet
organisme ne peut être et n'est, en effet, qu'un instrument utilisé par les
ennemis de la France contre l'honneur et l'intérêt du pays. Il faut donc
qu'un pouvoir nouveau assume la charge de diriger l'effort français dans la
guerre. Les événements m'imposent ce devoir sacré, je n'y faillirai pas.
J'exercerai mes pouvoirs au nom de la France et uniquement pour la défendre,
et je prends l'engagement solennel de rendre compte de mes actes aux
représentants du peuple français dès qu'il lui aura été possible d'en
désigner librement. […] J'appelle à la guerre, c'est-à-dire au combat
ou au sacrifice, tous les hommes et toutes les femmes des terres françaises
qui sont ralliées à moi. En union étroite avec nos Alliés, qui proclament
leur volonté de contribuer à restaurer l'indépendance et la grandeur de la
France, il s'agit de défendre contre l'ennemi ou contre ses auxiliaires la
partie du patrimoine national que nous détenons, d'attaquer l'ennemi partout
où cela sera possible, et de mettre en œuvre toutes nos ressources
militaires, économiques, morales, de maintenir l'ordre public et de faire
régner la justice. Cette grande tâche, nous l'accomplirons pour la France,
dans la conscience de la bien servir et dans la certitude de vaincre.
Billets de l'Afrique française libre de
5, 25 et 100 francs , 1940, Mémorial Leclerc, Paris.
Le
général de Gaulle instaurait ainsi le conseil de défense de l’Empire,
organe gouvernemental de la France libre (à noter que ce dernier était
constitué d’officiers.).
Plaque de la place Carlton Gardens, siège
de la France libre à Londres, musée des Invalides, Paris.
A
l’étranger, les réactions furent diverses. Côté britannique, le gouvernement
Churchill confirma son soutien au général de Gaulle ; par contre, le
président américain Franklin Delano Roosevelt préféra préserver des
relations diplomatiques avec Vichy (de Gaulle étant considéré comme un
« apprenti-dictateur » par Washington[61],
même si la presse était majoritairement favorable à la France libre.)
d) Politique intérieure du régime de Vichy
: Pétain, qui avait annoncé sa volonté de se sacrifier pour le bien être de
la nation dans son discours du 17 juin, faisait encore bonne figure malgré
ses 85 ans. Toujours auréolé par le rôle qu’il avait joué pendant la
première guerre mondiale, et particulièrement à Verdun, le maréchal reçut à
l’été 1940 l’approbation d’une majorité de Français.
Pétain personnifiant le régime de Vichy, une intense propagande fut
rapidement mise en place, présentant le maréchal comme l’homme-providence du
nouvel Etat.
C’est ainsi que la
francisque[62],
emblème du maréchal, fut frappée sur les pièces de monnaie ; la devise «
travail, famille, patrie[63] »
remplaça le traditionnel « liberté, égalité, fraternité » hérité de la
Révolution française ; enfin, si la Marseillaise demeurait hymne national de
l’Etat français, la chanson « maréchal, nous voilà ! » fut abondamment
utilisé par la propagande.
La francisque pétainiste accompagnée de la devise du régime
de Vichy : "travail, famille, patrie".
L’idéologie du régime de Vichy fut exposée plus en
détail par Pétain lui-même dans son long discours du 11 octobre 1940 :
Français, la France a connu, il y a quatre mois, l'une des plus grandes
défaites de son histoire. […] Le désastre n'est […] que le
reflet, sur le plan militaire, des faiblesses et des tares de l'ancien
régime politique. Ce régime, pourtant, beaucoup d'entre vous l'aimaient.
Votant tous les quatre ans, vous vous donniez l'impression d'être les
citoyens libres d'un État libre, aussi vous étonnerai-je en vous disant que
jamais, dans l'histoire de la France, l'État n'a été plus asservi qu'au
cours des vingt dernières années. […] Par des coalitions d’intérêts
économiques et par des équipes politiques ou syndicales prétendant […]
représenter la classe ouvrière. […] Des majorités se succédaient au
pouvoir, animées trop souvent du souci d'abattre la minorité rivale. Ces
luttes provoquaient des désastres. […] Tout criait l'impuissance d'un
régime [qui] s'acheminait ainsi, à grands pas, vers une révolution politique
que la guerre et la défaite ont seulement hâtée. […] Un jour de
septembre 1939, […] une guerre presque perdue d'avance, fut déclarée.
Nous n'avions su ni l'éviter, ni la préparer. C'est sur cet amas de ruines
qu'il faut, aujourd'hui, reconstruire la France. L'ordre nouveau ne peut, en
aucune manière, impliquer un retour […] aux erreurs qui nous ont
coûté si cher. […] L'ordre nouveau ne peut être une imitation servile
d'expériences étrangères. […] Chaque peuple doit concevoir un régime
adapté à son climat et à son génie. L'ordre nouveau est une nécessité
française. Nous devrons […] réaliser dans la défaite la révolution que, dans
la victoire, dans la paix […] nous n'avons même pas su concevoir. Le
régime nouveau […] doit se libérer de ces amitiés ou de ces
inimitiés, dites traditionnelles. […] Il remettra en honneur le
véritable nationalisme, celui qui, renonçant à se concentrer sur lui-même,
se dépasse pour atteindre la collaboration internationale. Cette
collaboration, la France est prête à la rechercher. […] L'Allemagne
peut […] choisir entre une paix traditionnelle d'oppression et une
paix toute nouvelle de collaboration. […] L'Allemagne peut préférer
une paix vivante pour le vainqueur, une paix génératrice de bien-être pour
tous. Le régime nouveau sera une hiérarchie sociale. Il ne reposera plus sur
l'idée fausse de l'égalité naturelle des hommes, […] seuls le travail
et le talent deviendront le fondement de la hiérarchie française. […]
Ainsi renaîtront les élites véritables que le régime passé a mis des années
à détruire. […] Devant la faillite universelle de l'économie
libérale, presque tous les peuples se sont engagés dans la voie d'une
économie nouvelle. Nous devons nous y engager à notre tour. […] Deux
principes essentiels nous guideront : l'économie doit être organisée et
contrôlée. […] Une monnaie saine est […] une monnaie qui
permet de satisfaire aux besoins des hommes. Notre nouveau système monétaire
[…] implique un double contrôle : sur le plan international, contrôle
du commerce extérieur […] ; sur le plan intérieur, contrôle vigilant
de la consommation et des prix, afin de maîtriser le pouvoir d'achat.
[…] Ce système […] n'est conçu qu'en fonction de l'intérêt
national. Que la classe ouvrière et la bourgeoisie fassent, ensemble, un
immense effort pour échapper aux routines de paresse et prennent conscience
de leur intérêt commun de citoyen, dans une nation désormais unie. Telle
est, aujourd'hui, Français, la tâche à laquelle je vous convie. Il faut
reconstruire. Cette reconstruction, c'est avec vous que je veux la faire.
[…] Une révolution ne se fait pas seulement à coups de lois et de
décrets. Elle ne s'accomplit que si la nation la comprend et l'appelle, que
si le peuple accompagne le gouvernement dans la voie de la rénovation
nécessaire. Bientôt, je vous demanderai de vous grouper pour qu'ensemble
réunis autour de moi, […] vous meniez cette révolution jusqu'à son
terme, […] en faisant régner, dans la France nouvelle, la véritable
fraternité nationale.
Ce discours, prononcé dix jours avant l’entrevue
de Montoire[64],
permettait au maréchal d’exposer ses idées directrices. Ainsi, ce dernier
fustigeait la politique pacifiste menée par le gouvernement français depuis
les années 1920, ainsi que les luttes de pouvoirs générées par la
république, qui avaient entraîné la France sur le chemin de la guerre.
Pétain, affirmant sa volonté de faire table rase
du passé, proclamait donc la mise en place d’un « ordre nouveau », premier
pas vers la « révolution nationale. » Afin d’atteindre son objectif, Pétain
annonçait l’adoption de mesures protectionnistes, afin de lutter contre la
hausse des prix, tout en réclamant l’adhésion de toute la nation au nouvel
Etat français.
Enfin, le maréchal annonçait la mise en place
d’une politique de collaboration avec l’Allemagne, volonté n’émanant pas
d’Hitler mais de Pétain lui-même. A l’été 1940, la victoire de l’Allemagne
nazie semblait inéluctable. Le maréchal souhaitait donc que la France ne
soit pas traitée en vaincue mais en alliée de l’Allemagne. Son objectif
était donc de collaborer avec l’occupant afin de lui prouver sa bonne foi.
Toutefois, chose dont Pétain ne prit jamais réellement conscience, Hitler
était résolument francophobe, et en cas de victoire ne comptait réserver
aucun régime de faveur envers la France.
Affiche de propagande vichyste, glorifiant la révolution
nationale (l'illustration présente deux maisons d'aspects très différents. A
gauche, une masure délabrée "France et compagnie", surmontée d'un drapeau
rouge et d'une étoile de David, dont les fondations effondrées sont
représentées par le communisme, le capitalisme, le radicalisme, le
parlement, l'antimilitarisme, les juifs, la paresse, la démagogie et
l'internationalisme. A Droite, la maison "France", installée sur des bases
solides : travail, famille, patrie, discipline, ordre, épargne, paysannerie,
école, artisanat, etc.)
Afin d’asseoir son autorité, Pétain n’hésita pas à
faire appel à l’Eglise catholique, qui avait été la cible des gouvernements
anticléricaux depuis le début du XX° siècle[65].
Ainsi, les religieux reçurent l’autorisation
d’enseigner dans les établissements publics (septembre 1940.) ; en outre,
l’enseignement privé reçut d’importantes subventions.
A noter toutefois que de nombreux membres du
clergé prirent leurs distances envers le régime de Vichy au cours des
années, principalement en raison de la politique antisémite menée par l’Etat
français.
Enfin, les associations d’anciens combattants
(déjà acquises à la cause pétainiste à cette date.) furent fusionnées en
août 1940 au sein de la Légion française des combattants.
L’un des principaux buts de cette organisation
était de propager la Révolution nationale, la Légion étant divisée en
section départementales.
Par ailleurs, afin d’inclure au sein de
l’organisation les jeunes n’ayant pu participer à la première au à la
deuxième guerre mondiale, la légion fut rebaptisée Légion française des
combattants et des volontaires de la Révolution nationale en novembre
1941.
A son apogée, cette organisation comptait près de
1.5 millions de membres (en métropole et dans les colonies.). Ses effectifs
déclinèrent rapidement à compter de l’hiver 1942 et de la fascisation du
régime de Vichy.
Affiche de propagande vichyste en faveur de la Légion
française des combattants (la légende indique "la Légion française veut
faite la révolution pour la famille).
e) Les décrets antisémites du régime de Vichy
(été à hiver 1940) : se calquant sur les décrets promulgués par
l’Allemagne nazie, le régime de Vichy adopta à partir de l’été 1940 une
série de mesures ouvertement antisémites.
Ainsi, un premier Statut des Juifs,
promulgué le 3 octobre 1940, interdit aux Français de confession juive
d’exercer un certain nombre de professions (fonctionnaire, journaliste, chef
d’entreprise, etc.), tout prévoyant l’internement de tous les juifs
étrangers installés sur le sol français.
Au
même moment fut aboli le décret Crémieux de 1870, qui accordait la
nationalité française à tous les juifs d’Algérie.
Une du quotidien collaborationniste "Le Matin", annonçant la
promulgation du statut des juifs.
A
noter que les mesures antisémites ne firent que s’aggraver au fil des années[66].
f) L’entrevue de Montoire (24 octobre 1940)
: le régime de Vichy ayant été instauré depuis maintenant plusieurs mois,
une rencontre entre Hitler et Pétain fut organisée à Montoire-sur-le-Loir,
le 24 octobre 1940 (à noter que le Führer rentrait d’Hendaye, non loin de la
frontière espagnole, où il avait en vain tenté de convaincre le général
Franco de participer à la guerre.).
Après avoir échangé une poignée de main sur le
quai de la gare, Hitler et Pétain prirent place dans le Führersonderzug,
le train spécial du Führer.
L'entrevue de Montoire.
Le maréchal, qui comme nous l’avons vu était prêt
à démontrer sa bonne foi pour faire de la France une alliée de l’Allemagne,
n’obtint que des vagues promesses de la part du Führer.
En effet, Hitler ne souhaitait pas faire de la
France une nation alliée, bien au contraire. Ainsi, ce dernier accepta le
principe de la collaboration franco-allemande, sans pour autant conclure
d’accords concrets avec le maréchal.
Exploitant ce désir français de s’ériger en allié
de l’Allemagne via la collaboration, le Führer ne fit que durcir les
conditions d’occupation, sans jamais concéder de contreparties en retour.
Affiche de propagande vichyste (la légende indique :
"Français ! Vous n'êtes ni vendus, ni trahis, ni abandonnés. Venez à moi
avec confiance").
g) L’éviction de Laval (décembre 1940) :
les seul gestes du troisième Reich, suite à l’entrevue de Montoire, furent
la rétrocession à la France des cendres du duc de Reichstadt[67],
fils de Napoléon I°, à la mi-décembre 1940 ; mais aussi la libération de
quelques prisonniers de guerre français (anciens combattants de la première
guerre mondiale, agriculteurs, fils aînés de familles de quatre enfants,
etc.). Toutefois, 1.5 millions de soldats restaient en détention en
Allemagne.
Le retour des cendres du duc de Reichstadt, décembre 1940.
En fin d’année 1940, Laval multiplia les
attentions à l’égard de l’Allemagne. Partisan d’une offensive commune contre
la Grande-Bretagne, il céda aux Allemands la majorité des actions des mines
de Bor, en Serbie (6 novembre.) ; fit livrer au troisième Reich l’or que le
gouvernement belge avait confié à la France au printemps 1940 (29
novembre.) ; enfin, il se rapprocha de l’Etat-major allemand en vue d’une
action commune contre l’AEF (2 décembre.).
Cette politique, outrepassant largement les
conditions de l’armistice, fut vivement critiquée par Pétain, qui décida de
procéder à un remaniement ministériel le 13 décembre 1940.
Ainsi, Pierre Etienne Flandin fut nommé
vice-président du conseil et ministre des Affaires étrangères ; l’amiral
Darlan conservait le ministère de la Marine ; Weygand fut nommé délégué
général en Afrique du nord et commandant en chef des forces françaises en
Afrique du nord ; enfin, le général Huntziger reçut le portefeuille de la
Guerre.
Cette décision d’évincer Laval ne plut guère aux
Allemands, qui demandèrent des comptes au maréchal (ce dernier répondit que
l’ancien vice-président du conseil n’avait plus sa confiance.).
En représailles, Berlin fit strictement fermer la
ligne de démarcation, à compter du 18 décembre 1940 ; le 30 janvier 1941,
les Allemands réclamèrent 400 millions de francs par jour pour les frais
d’occupation (contre 100 à l’origine.).
Uniforme de Feldgendarme (la Feldgendarmerie,
unité policière au sein de l'armée allemande, avait une fonction de maintien
de l'ordre. En France, elle participa entre autres à la surveillance de la
ligne de démarcation).
4° La bataille d’Angleterre
(juillet 1940 à mai 1941) – Depuis la signature de
l’armistice franco-allemand, la Grande-Bretagne se retrouvait isolée, privée
d’alliés sur le continent.
Côté allemand, l’invasion de l’Angleterre n’était pas à l’ordre du jour,
Hitler souhaitant se lancer au plus tôt dans sa conquête de l’URSS. En
effet, le Führer considérait que le gouvernement Churchill ne tarderait pas
à son tour à demander un armistice, voire même qu’il accepterait de
rejoindre la guerre contre les soviétiques[68].
Toutefois, Churchill ayant annoncé son intention de refuser toute
négociation avec l’Allemagne, Hitler se rapprocha de la Kriegsmarine en vue
d’élaborer un plan d’invasion de l’Angleterre.
L’amiral Raeder lui affirma alors que pour qu’un débarquement s’effectue
dans de bonnes conditions, l’Allemagne devait avant tout s’assurer de la
supériorité aérienne du ciel britannique (à noter que la flotte allemande,
déjà inférieure à la Royal Navy lors du déclenchement de la guerre, avait
perdu plusieurs navires au cours de la campagne de Norvège.).
C’est ainsi que fut élaboré l’opération
Lion de Mer[69],
dont la mise en œuvre
était prévue pour la mi-septembre
1940. Mais encore une fois, Hitler espérait
que l’annonce de ses projets d’invasion
de l’Angleterre provoque une panique à Londres
et contraigne le gouvernement
à transiger.
L'opération Lion de Mer.
a)
L’opération Catapult : alors que le gouvernement Reynaud avait
affirmé à Churchill que la marine française ne passerait jamais sous
contrôle allemand, les conditions d’armistices stipulaient que la flotte
restait à disposition du gouvernement français, mais devait rejoindre ses
ports d’attache de temps de paix (à savoir Cherbourg, Brest et Lorient, en
zone occupée.). Ainsi, l’objectif d’Hitler était de placer la flotte
française sous surveillance, voire de s’en emparer au besoin.
Maquette du porte-avions français le Béarn, dérouté vers les Antilles suite
à l'armistice, musée de la Marine, Paris.
Le 22 juin, le gros de la flotte française se trouvait
dans les ports de Dakar, Mers-el-Kébir et Alexandrie ; les navires français
les plus anciens ayant été sabordés dans les ports de Cherbourg, Brest et
Lorient. Enfin, l’on retrouvait une centaine de navires dans les ports
britanniques de Plymouth et Portsmouth, s’étant réfugiés là suite à
l’opération Dynamo.
C’est dans ces conditions que fut élaborée l’opération Catapult,
visant à s’emparer ou à couler la flotte française sous contrôle du régime
de Vichy. A noter toutefois que cette opération souhaitée par Churchill ne
fit pas l’unanimité au sein de l’amirauté britannique, de nombreux officiers
craignant d’entrainer une radicalisation du régime de Vichy.
La
capture des navires français mouillant dans les ports britanniques se fit
sans difficultés le 2 juillet 1940.
Le
lendemain, une escadre britannique commandée par l’amiral James Fownes
Somerville se présenta à Mers-el-Kébir, sommant la flotte française de
rejoindre les ports anglais afin de poursuivre la guerre, de partir pour les
Etats-Unis[70],
ou bien de se saborder.
Toutefois, après plusieurs heures de négociations, Somerville capta un
message selon lequel l’escadre de Mers-el-Kébir allait bientôt recevoir des
renforts. Ainsi, ce dernier ordonna d’ouvrir le feu. En l’espace d’une
dizaine de minutes, la flotte française subit d’importants dégâts, causant
la mort de plus d’un millier d’hommes.
La bataille de Mers-el-Kébir.
Le
4 juillet, une escadre britannique commandée par l’amiral Andrew Browne
Cunningham se rendit à Alexandrie, autre port d’attache de la marine
française. L’officier anglais entra alors en contact avec l’amiral
René-Emile Godfroy, qu’il connaissait bien.
Après plusieurs heures de négociations, les deux hommes conclurent un
accord : la flotte française devait vider ses soutes à mazout, retirer les
mécanismes de tir des canons, et débarquer une partie des équipages[71].
Enfin, une dernière escadre britannique envoya un ultimatum à la flotte
française réfugiée à Dakar, le 7 juillet 1940. Les officiers français,
indigné par les évènements de Mers-el-Kébir, refusèrent d’y répondre. Dès le
lendemain, le cuirassier Richelieu, fleuron de la marine française,
fut torpillé par des avions Fairey
Swordfish[72]
lancés depuis un porte-avion britannique, et gravement endommagé.
Maquettes de navires français de la seconde guerre mondiale, le haut en bas,
le cuirassier Richelieu, le cuirassier Jean Bart, le cuirassier Dunkerque et
le croiseur l'Algérie, musée de la Marine, Paris.
Au
final, l’opération Catapult fut un franc succès pour la flotte britannique,
qui s’assurait ainsi du contrôle des mers ; cependant, l’attaque provoqua
une vive émotion en France, ce qui contribua à accroitre un sentiment
d’anglophobie en sommeil depuis le premier conflit mondial. A l’annonce de
ce coup de force, Laval et Darlan réclamèrent l’entrée en guerre de la
France contre l’Angleterre, mais en furent dissuadés par Pétain.
Affiche de propagande du régime de Vichy, fustigeant les offensives
britanniques en Afrique du nord, 1940, musée des Invalides, Paris.
A
noter par ailleurs que Churchill décida d’établir un blocus des côtes
françaises (31 juillet 1940.), bloquant le trafic maritime entre la France
et l’Afrique du nord.
b)
L’opération Ambassador (mi-juillet 1940): alors que les îles
anglo-normandes étaient tombées sous domination allemande en juin 1940,
Churchill décida de lancer l’opération Ambassador à la mi-juillet
1940.
C’est ainsi qu’un commando de 140 soldats débarqua à Guernesey dans la nuit
du 14 juillet, chargé de rentrer en contact avec la garnison allemande
installée sur l’île.
Cependant, comme les Allemands restèrent introuvables, les Britanniques
furent contraints de rembarquer.
c)
Les forces en présence à l’aube de la bataille d’Angleterre : Hitler
ne parvenant pas à contraindre le gouvernement britannique de déposer les
armes, ce dernier décida de déclencher la bataille d’Angleterre à
compter de juillet 1940.
Nous avons vu précédemment que la flotte aérienne allemande était composée
d’engins modernes, qui avaient profité de cette supériorité pour vaincre les
avions français lors de la bataille de France.
Ainsi, l’on retrouvait principalement le chasseur BF-109, fleuron de la
Luftwaffe, ainsi que le chasseur-bombardier ME-110 (ce dernier était équipé
de deux canons de 20 et deux mitrailleuses.) ; ainsi que trois différents
bombardiers : le bombardier lourd HE-111, les stukas[73]
JU-87 et JU-88, ainsi que le Dornier DO-17 (ce dernier, fabriqué en
plus petite quantité, était équipé de six mitrailleuses.).
A
noter que fit son appariation courant 1941 le chasseur-bombardier
Focke-Wulf FW-190, en tout point supérieur au ME-110 (équipé de quatre
canons de 20 et de deux mitrailleuses, il disposait néanmoins d’une vitesse
de pointe atteignant les 650 kilomètres heure.).
Focke-Wulf FW-190, Imperial war
museum, Londres.
Si
du côté de la flotte britannique, l’on comptait, tout comme en France, des
modèles obsolètes (tels que le bombardier-torpilleur Fairey Swordfish, le
chasseur biplan Gloster Gladiator, mis en service en 1934, ou le
bombardier Boulton-Paul P-75 Overstrand, datant de 1933.).
Globster Gladiator.
Toutefois, le gouvernement avait fait un important effort de modernisation
de la flotte aérienne à la fin des années 1930, donnant naissance à de
nouveaux véhicules.
Pendant la bataille d’Angleterre, les avions les plus utilisés furent les
chasseurs Hawker Hurricane (ce dernier était équipé de huit
mitrailleuses.) et Supermarine Spitfire (équipé de quatre
mitrailleuses et deux canons de 20.).
Supermarine Spitfire, Imperial war
museum, Londres.
Les Hurricanes, moins puissants, furent utilisés pour attaquer les
bombardiers allemands, contrairement aux Spitfires qui furent affectés au
combat contre les chasseurs ennemis.
Malgré les renforts en provenance de pays envahis par le troisième Reich[74],
les avions britanniques étaient moins nombreux au début de la bataille (600
engins pour la RAF contre 2 500 pour la Luftwaffe.). Cependant, ces derniers
étaient toutefois plus maniables que les chasseurs allemands.
d)
Le Kanalkampf, première phase de la bataille d’Angleterre (juillet à août
1940) : la première phase de la bataille d’Angleterre, fut surnommée le
kanalkampf[75].
Les appareils de la Luftwaffe, décollant du nord de la France ou de la côte
norvégienne[76],
furent chargés de bombarder la marine marchande britannique. L’objectif
d’Hitler était ainsi d’isoler la Grande-Bretagne et de contraindre le
gouvernement Churchill à déposer les armes.
Toutefois, au début du mois d’août, les résultats n’étaient pas
satisfaisants. En effet, seul 1% du tonnage sous pavillon britannique avait
été coulé. Hitler décida donc de s’attaquer directement à la RAF, en
bombardant les bases aériennes britanniques.
e)
L’Adlerangriff, seconde phase de la bataille d’Angleterre (août 1940)
: le déclenchement de l’Adlerangriff[77]
fut programmé pour le 15 août 1940. Les officiers de la Luftwaffe, persuadés
que la RAF avait déjà perdu la moitié de ses effectifs et s’était installée
aux environs de Londres, lancèrent donc une vaste offensive sur l’Ecosse.
Cependant, les estimations allemandes étaient erronées, les avions
britanniques parvenant à infliger d’importantes pertes à l’ennemi.
En
raison des pertes subies ce jour là, le 15 août 1940 fut surnommé
Schwarzer Donnerstag
par les Allemands (jeudi noir en français.). En effet, la Luftwaffe
perdit ce jour là près de 70 appareils, contre 30 pour la RAF.
La bataille d'Angleterre.
Les opérations contre les équipements de la RAF se poursuivirent jusqu’à
début septembre 1940, causant d’importantes pertes dans les deux cas.
A
noter toutefois que le rapport de force entre l’Angleterre et l’Allemagne
évoluait au fil des semaines, et pas en faveur du troisième Reich. En effet,
non seulement les usines d’aviation britanniques tournaient à plein régime ;
en outre, la lutte se déroulant dans le ciel du Royaume-Uni, les pilotes
britanniques dont l’appareil avait été abattu pouvaient atterrir puis
repartir au combat (au contraire des pilotes de la Luftwaffe qui étaient
capturés à l’atterrissage[78].).
Un
grave évènement vint mettre un terme à la seconde de la bataille
d’Angleterre. A la fin août, un bombardier HE-111, chargé de bombarder une
raffinerie, lança par erreur ses bombes sur Londres.
En
représailles, le gouvernement Churchill organisa un raid sur Berlin,
parvenant à lancer quelques bombes sur la capitale allemande. Hitler,
rentrant dans une colère noire, décida alors de modifier sa stratégie et de
bombarder Londres massivement (à noter qu’il n’y eut plus de bombardements
sur Berlin jusqu’en fin d’année 1943[79].).
f)
Le Blitz, troisième phase de la bataille d’Angleterre (septembre 1940 à
mars 1941) : Hitler programma les premières offensives du blitz
(« l’éclair. ») pour la première semaine de septembre.
Un
second raid fut lancé le 15, auquel participèrent près de 100 bombardiers
lourds et 400 chasseurs de la Luftwaffe. Cette bataille aérienne fut
baptisée côté britannique battle of
Britain day[80],
les 350 avions de la RAF parvenant à abattre près de 60 appareils ennemis.
A
noter toutefois que les bombardements sur Londres ne correspondaient à aucun
impératif stratégique. Ainsi, alors que la Luftwaffe s’échinait à détruire
des habitations, les usines britanniques fonctionnaient à plein régime,
approvisionnant la RAF en appareils nouveaux.
Reconstituion des bombardements sur
Londres, Imperial war museum, Londres.
A
compter du mois d’octobre, les bombardements intensifs cessèrent, même s’ils
ne disparurent pas complètement (ils se poursuivirent de façon sporadique
jusqu’au printemps 1941.), et l’opération Lion de Mer, reportée sine die,
n’eut finalement jamais lieu.
Enfin, les forces aériennes italiennes furent mises à contribution à compter
de novembre 1940. Cependant, le Corpo
Aero Italiano[81]
ne comptait que 200 appareils, ces derniers étant des modèles désuets : le
chasseur Fiat CR-42 (il s’agissait d’un biplan.)et le
bombardier Fiat BR-20. A noter toutefois que Mussolini, qui demandait
à pouvoir intervenir depuis l’été, fut déçu que constater que le CAI fut
utilisé par les Allemands comme une force de « dépannage » (l’armée de l’air
italienne se retira en début d’année 1941.).
Fiat CR-42.
g)
Le bilan de la bataille d’Angleterre : la bataille d’Angleterre fut
le premier échec militaire d’Hitler, cette victoire britannique commençant à
mettre à mal le mythe de l’invincibilité de l’armée allemande.
La
première raison de cet échec fut la volatilité des impératifs stratégiques.
Comme nous venons de le voir, la Luftwaffe changea trois fois d’objectifs en
l’espace de trois mois (marine marchande, aéroports de la RAF, Londres.). Si
les installations de la Royal Air Force avaient été bombardées
méthodiquement tout au long du conflit, gageons que la bataille d’Angleterre
n’aurait pas eu la même issue.
Par ailleurs, comme nous l’avons noté plus tôt, les bombardements sur
Londres ne correspondaient à aucun impératifs stratégique (sinon la volonté
personnelle d’Hitler de voir la capitale britannique réduite à néant.).
C’est au cours de cette période que la bataille d’Angleterre que la balance
commença à peser en faveur de la RAF (la Luftwaffe ne détruisait que des
habitations, alors que les usines britanniques tournaient à plein régime.).
A
l’issue de la bataille d’Angleterre, les Britanniques comptaient 375 pilotes
tués et 900 appareils détruits, 14 000 civils ayant trouvé la mort lors des
bombardements. Par ailleurs, Londres subit de très importants dégâts
(destruction de deux millions d’habitations.), les plus importants de son
histoire depuis le grand incendie de 1666 qui avait ravagé toute la ville.
Toutefois, la Luftwaffe accusait d’importantes pertes, 2 300 appareils ayant
été détruits ; en outre, l’invasion de l’Angleterre n’eut jamais lieu.
5° La
bataille de Tarente (novembre 1940) – En décembre 1940, le
gouvernement britannique décida de lancer l’opération Royal Judgement,
prévoyant une offensive contre la base navale de Tarente, en Italie.
En effet, cette dernière avait comme fonction de
réparer les navires endommagés, mais ses défenses portuaires étaient
insuffisantes.
Au cours de la première semaine de novembre 1940,
une escadre britannique partie d’Alexandrie se dirigea vers Tarente. Dans la
nuit du 11 au 12 novembre, une série de bombardiers-torpilleurs Fairey
Swordfish décollèrent du porte-avion HMS Illustrious.
En moins de deux heures, l’aviation britannique
causa d’importants dégâts, endommageant gravement la moitié de la flotte
italienne basée à Tarente.
Malgré son succès, la bataille de Tarente fut une
des dernières opérations militaires menée sur le front ouest avant 1942.
6° Les
deux premières phases de la guerre italo-grecque (octobre 1940 à janvier
1941) – Comme nous l’avons vu précédemment, Mussolini
s’était emparé de l’Albanie en avril 1939, déposant le roi Zog I°.
Toutefois, le Duce ne souhaitait pas s’en arrêter la, afin de montrer à
l’Allemagne que l’Italie était un allié important.
Ainsi, plutôt que de s’attaquer à un royaume de
Yougoslavie jugé trop puissant, Mussolini lança le 28 octobre 1940 une
offensive contre la Grèce, pays considéré comme divisé par ses querelles
internes[82]
(à noter par ailleurs que la souveraineté de l’Italie sur les îles du
Dodécanèse avait été reconnue en 1919.).
a) La Grèce en 1940 : lors du déclenchement
de la seconde guerre mondiale, la Grèce vivait sous la dictature du général
Ioannis Metaxas[83],
qui, suite à sa nomination au poste de premier ministre (avril 1936.) par le
roi George II, avait établi un régime fasciste (suspension du
Parlement et de plusieurs articles de la constitution, interdiction des
partis politiques en août 1936.).
Georges II (à gauche) et Ioannis Metaxas
(à droite), musée historique d'Héraklion, Crète.
Toutefois, malgré sa sympathie pour les régimes
fascistes[84],
Metaxas restait allié avec les démocraties occidentales, la Grèce étant
proche de Paris et Londres depuis le XIX° siècle.
Du côté des frontières, l’Albanie n’était pas une
menace, et la Yougoslavie était un allié de longue date. Par contre, la
Bulgarie faisait office d’ennemi naturel de la Grèce depuis le début du XX°
siècle[85].
C’est ainsi que fut érigée la
ligne Metaxas[86]
à la frontière bulgare ; par ailleurs, l’armée grecque fut modernisée et la
marine militaire agrandie.
b) L’offensive italienne, première phase de la
guerre italo-grecque (octobre à novembre 1940) : alors que l’Italie
s’était emparée de l’Albanie, les incidents frontaliers avec la Grèce se
multiplièrent, jusqu’au torpillage du croiseur grec Elli, coulé par
un sous-marin italien (août 1940). Puis, à la fin octobre, Mussolini fit
parvenir un ultimatum à Metaxas, enjoignant ce dernier à accorder un libre
passage à l’armée italienne afin que cette dernière occupe une série de
points stratégiques.
Pour toute réponse, Metaxas envoya la missive
suivante : Okhi (ce qui signifie « non » en français.), faisant dès
lors entrer la Grèce dans le second conflit mondial (à noter que Metaxas,
peu populaire, fut largement soutenu par la population grâce à son attitude
ferme.).
En représailles, Mussolini déclara la guerre à la
Grèce le 28 octobre 1940.
L’armée italienne (soit 85 000 hommes au total.)
lança une offensive depuis le sud de l’Albanie, l’objectif de l’Etat-major
étant d’occuper l’Epire avant de marcher vers le nome[87]
de Thessalonique.
Combattant en terrain montagneux, les unités
italiennes éprouvèrent de grosses difficultés pour avancer, les mines
anti-char grecques détruisant de nombreux blindés. L’offensive italienne,
mal organisée, fut finalement annulée pendant la première semaine de
novembre.
A noter toutefois qu’une seule division italienne
parvint à franchir la frontière, progressant d’une centaine de kilomètres
dans le nome d’Ioannina. Cependant, cette unité fut finalement stoppée et en
grande partie détruite par l’armée grecque.
c) La contre-attaque grecque, seconde phase de
la guerre italo-grecque (novembre 1940 à mars 1941) : alors que l’armée
grecque se trouvait en infériorité numérique (35 000 soldats au total.), le
général Alexandro Papagos[88],
recevant en renfort des troupes de Macédoine et bénéficiant de l’arrivée de
réservistes, décida de lancer une contre-offensive générale à compter du 14
novembre 1940.
Après plusieurs jours de combats sur la pointe est
de la frontière albanaise, les Grecs parvinrent à opérer une percée,
s’emparant de Korçë et Moscopole à la fin novembre.
Les autres offensives menées le long de la
frontière furent elles aussi couronnées de succès, l’armée grecque
progressant d’une cinquantaine de kilomètres en territoire ennemi (Saranda,
Gjirokastre, Himara et Këlcyrë furent prises entre décembre 1940 et janvier
1941.).
A noter que cette région (surnommée « l’Epire du
nord. ») avait été rétrocédée à l’Albanie en 1913, au grand dam du
gouvernement grec. L’occupation de ce territoire, outre un impératif
militaire, répondait à un impératif politique.
Toutefois, la situation grecque se dégrada au
cours de l’hiver. En effet, l’agrandissement des lignes logistiques et
l’abandon des positions défensives frontalières mirent l’armée grecque dans
une situation difficile.
7° La première phase de la guerre
du désert (septembre à décembre 1940) – Comme nous l’avons
vu précédemment, Mussolini avait décidé de participer à la seconde guerre
mondiale à compter du 10 juin 1940.
A
cette date, l’Empire colonial italien était composé de plusieurs pays
d’Afrique : la Lybie, l’Erythrée, l’Ethiopie[89]
et la Somalie italienne.
C’est ainsi que les troupes britanniques installées en Egypte reçurent
l’ordre de traverser la frontière libyenne afin de sécuriser plusieurs
positions sous contrôle italien.
L'Afrique du nord en 1940.
a) L’invasion italienne de l’Egypte (septembre
1940) : alors que la bataille d’Angleterre battait son plein,
l’Italie décida de lancer une grande offensive depuis la Lybie en direction
de l’Egypte britannique. L’objectif des troupes italiennes était de
progresser dans le nord du pays, afin de capturer le canal de Suez[90].
Au
cours de la seconde semaine de septembre, la
Regia aeronautica[91]
initia les hostilités en s’attaquant aux appareils de la RAF basées à la
frontière libyenne. Rapidement, les Britanniques ripostèrent en bombardant
Tobrouk et plusieurs cités sous contrôle italien.
Quant à l’avancée des troupes italiennes, elle s’acheva sur un échec, les
chars italiens Fiat-Ansaldo M-11/39 et M-13/40 étant lents et
souffrant de problèmes mécaniques.
Fiat M-13/40.
Toutefois, les troupes italiennes parvinrent à prendre le Fort Capuzzo
à la mi-septembre, fortification frontalière dont les Britanniques
s’étaient emparés en juin 1940.
Les Anglais étant en nette infériorité numérique, ils décidèrent de se
retirer, prenant soin toutefois de miner la route vers l’est, ce qui
provoqua de nombreuses pertes aux italiens.
Le Fort Capuzzo.
Trois jours après la prise du Fort Capuzzo, les Italiens pénétrèrent dans
Sidi Barrani, cité côtière située à une centaine de kilomètres de la
frontière. A cette date, le général Rodolfo Graziani[92]
décida de mettre un terme à l’invasion italienne, les blindés manquant de
ravitaillement[93].
La guerre du désert - première offensive italienne.
b) L’opération Compass (décembre 1940 à
février 1941) : comme nous venons de le voir, les Britanniques,
en nette infériorité numérique, avaient préféré reculer lors de l’invasion
italienne. Toutefois, souhaitant exploiter une fragilité dans le dispositif
italien, le général Archibald Wavell[94],
s’appuyant sur la Western Desert Force, lança l’opération Compass
au cours de la seconde semaine de décembre 1940.
Le général Archibald Wavell,
fin 1940, Mémorial Leclerc, Paris.
L’offensive débuta par un bombardement de Sidi Barrani par une escadre de la
Royal Navy et plusieurs bombardiers de la RAF. Par ailleurs, en prévision
d’une riposte aérienne italienne, Wavell avait fait installer dans le désert
une série de chars factices.
L’infanterie britannique, passant à l’offensive, était appuyée par les chars
Cruiser, des blindés légers, mais aussi par le tank lourd Mathilda.
En
l’espace de quelques heures, les Italiens subirent une défaite complète, les
Britanniques capturant près de 40 000 hommes, 70 chars légers, et 230 pièces
d’artillerie.
Tank Mathilda.
Wavell, fort de ce succès, décida de poursuivre l’offensive, parvenant à
reprendre Fort Capuzzo à la mi-décembre.
A
noter qu’à cette date, le général Wavell décida de mettre en pause
l’opération Compass, envoyant une division indienne en Erythrée, destinée à
participer à une offensive britannique dans la région[95].
Finalement renforcés par une division australienne, les combats reprirent à
la fin décembre 1940. En l’espace de quelques semaines, les Britanniques
s’emparèrent de Bardia (faisant 36 000 prisonniers.) ; Tobrouk, le 17
janvier 1941 (faisant 25 000 tués et 17 000 blessés.) ; Derna, début février
(10 000 prisonniers.) ; et Beda Fomm, au cours de la première semaine de
février.
La guerre du désert - l'opération Compass.
A
la mi-février 1941, la victoire des britanniques en Libye était patente. En
effet, ces derniers avaient fait 3 000 tués, 115 000 prisonniers, et
s’étaient emparés 400 chars, 1 300 pièces d’artillerie, 1 200 avions.
Toutefois, alors que les troupes britanniques s’étaient emparées d’El
Agheila, Churchill décida de mettre un terme à l’offensive. En effet, ce
dernier préféra envoyer plusieurs unités de la Western Desert Force
(rebaptisée XIII° Corps en début d’année 1941) en renfort en Grèce,
ce pays étant attaqué par l’Italie[96].
Côté allemand, Hitler n’appréciait guère l’échec des italiens en Libye.
C’est ainsi que fut déclenchée l’opération
Sonnenblume[97],
prévoyant le débarquement d’un contingent à Tripoli. C’est ainsi que le
Deutsches Afrikakorps[98],
parti de Naples, arriva dans la capitale libyenne à la mi-février 1941.
L’arrivée de cette nouvelle troupe en Afrique du nord fit entrer la guerre
du désert dans une nouvelle phase[99].
8° La campagne d’Afrique de l’est (été à hiver 1940) –
Alors que l’Italie avait lancé une offensive de grande ampleur en Afrique du
nord, plusieurs actions furent aussi menées contre les colonies britannique
dans la corne de l’Afrique.
a)
Les forces en présence à l’aube du conflit : pour le gouvernement
britannique, ces possessions italiennes, entourant l’Egypte et le Soudan
britannique, constituaient une menace. D’autant plus que le général Wavell,
commandant en chef au Moyen-Orient, ne disposant que de 85 000 hommes, se
trouvait en nette infériorité numérique face à l’ennemi.
En
effet, Amédée II[100],
duc d’Aoste, gouverneur de l’Afrique orientale italienne, disposait de
250 000 soldats (à noter que 70% de ces troupes étaient constituées
d’indigènes, qui désertèrent en grand nombre dès le début des combats.).
Par ailleurs, l’armée italienne était équipée d’environ 250 avions de
combat, principalement des chasseurs Fiat CR-42 et des bombardiers
Savoia-Marchetti SM-79 Sparviero. Mais ces appareils, tout comme les
soldats, souffrirent des difficultés d’approvisionnement (munitions,
essence, pièces de rechange, etc.).
Afin de s’assurer du soutien des Ethiopiens, Churchill permit à Hailé
Sélassié I°, roi d’Ethiopie en exil, de rentrer au pays. En effet, le
gouvernement britannique comptait recevoir le soutien des résistants
éthiopiens dans la lutte contre l’Italie.
Hailé Sélassié I°.
Hailé Sélassié, partant pour l’Afrique à l’été 1940, ne rentra toutefois en
Ethiopie qu’en janvier 1941.
b)
L’offensive italienne sur le Soudan et le Kenya (été 1940) : en
juillet 1940, l’Italie lança une première offensive depuis l’Erythrée, en
direction du Soudan britannique. C’est ainsi que les troupes italiennes
s’emparèrent de Kassala, du Fort Gallabat, puis du village de Kurmuk, le
long de la frontière soudanaise.
Toutefois, les Italiens préférèrent ne pas s’avancer plus profondément en
territoire ennemi, en raison d’un manque d’essence. Par ailleurs, soucieux
de se présenter en libérateurs, les Italiens constatèrent que la population
soudanaise n’était pas foncièrement antibritannique. Ils décidèrent donc de
fortifier Kassala, en vue d’une prochaine contre-attaque anglaise (à noter
qu’une nouvelle offensive italienne permit de prendre Port-Soudan au mois
d’août, offrant à l’Italie un nouveau débouché sur la mer rouge.).
D’autres opérations de ce genre eurent aussi lieu au Kenya, au cours de
l’été. C’est ainsi que les troupes italiennes s’emparèrent du Fort
Harrington, non loin de Moyale, puis s’emparèrent des villages de Dabel et
Buna en progressant vers le sud.
Toutefois, ayant parcouru plus d’une centaine de kilomètres depuis la
frontière kenyane, les italiens, souffrant d’un mauvais ravitaillement,
mirent fin à leur offensive.
c)
L’offensive italienne sur la Somalie britannique (août 1940) : outre
les offensives italiennes contre le Soudan et le Kenya, Mussolini ordonna
une nouvelle attaque, cette fois-ci dirigée contre la Somalie britannique.
Au
début du mois d’août 1940, les forces italiennes commandées par le général
Guglielmo Nasi[101],
soit 25 000 hommes, pénétrèrent en Somalie.
Face à l’ennemi, le général Arthur
Reginald Chater[102]
ne disposait que de 4 000 soldats (il fut renforcé par un bataillon écossais
et un bataillon indien à la fin de la première semaine d’août, soit un
millier d’hommes en tout.), n’étant pas équipé en blindés et en armes
antichar.
Partant de Jijiga, à la frontière éthiopienne, l’armée italienne divisa ses
forces en trois groupes : au nord, les Italiens devaient s’emparer de Zeila,
puis longer la côte jusqu’à Berbera, la capitale ; au centre, les troupes du
général Nasi devaient marcher ensemble jusqu’à Hargeysa, avant de se séparer
pour rejoindre Berbera, au nord, et Oodweyne, à l’est.
L'invasion de la Somalie britannique.
Le
5 août, Zeila et Hargeysa furent prises par les troupes italiennes, coupant
les Britanniques de la Somalie française. Le lendemain, les Italiens
s’emparèrent d’Oodweyne.
Alors que les trois colonnes ennemies marchaient désormais vers la capitale,
les Britanniques tentèrent de bloquer les Italiens non loin de Buur
Dhubbato, village situé sur la route reliant Hargeysa à Berbera.
Toutefois, conscient de son infériorité, le général Chater demanda à
l’Etat-major britannique au Proche-Orient l’autorisation d’évacuer la
Somalie.
Ayant reçu l’autorisation de se replier, Chater fit évacuer ses troupes à
Berbera à la mi-août 1940, rejoignant Aden (port situé à la pointe sud de
l’Arabie saoudite.).
Les Italiens, quant à eux, s’emparèrent de la ville le 19 août, puis
poursuivirent leur avancée le long de la côte, afin de parachever la
conquête de la Somalie.
d)
Bilan de l’offensive italienne sur la Somalie britannique : si les
Britanniques avaient été contraints de retirer leurs troupes de Somalie,
leurs pertes restaient légères : 40 tués, 100 blessés, plus une centaine de
capturés.
Au
contraire, les dégâts subis par les troupes italiennes étaient bien plus
importants : 500 tués et plus de 1 500 blessés (sans compter les indigènes
décédés durant leur lutte aux côtés des Italiens.).
Côté britannique, Churchill reprocha vivement à Wavell la retraite des
soldats de Somalie. Cependant, ce dernier rétorqua que le sacrifice n’était
pas forcément une bonne stratégie.
e)
Contre-attaques britanniques (automne 1940) : si les troupes
italiennes étaient parvenues à chasser les Britanniques de Somalie, la Royal
Navy conservait une nette supériorité navale dans la mer Rouge.
C’est ainsi qu’au cours de l’été 1940, plusieurs navires et sous-marins
italiens furent coulés par la marine britannique.
Plus tard, à la mi-octobre, l’Etat-major britannique donna naissance à la
Force Gazelle, commandée par le colonel
Frank Walter Messervy[103],
unité de reconnaissance destinée à opérer au Soudan.
Puis, pendant l’hiver 1940, les troupes britanniques furent approvisionnées
en avions de combat, ce qui ne tarda guère à leur conférer une nette
supériorité aérienne.
Ainsi, les bases italiennes situées dans la région de Kassala furent
bombardées jusqu’en décembre ; en outre, au cours de la première semaine de
novembre, le Fort Gallabat fut repris par une brigade indienne.
Du
côté de l’Italie, l’année 1940 s’était achevée sur un échec sur presque tous
les fronts : France, Grèce, Libye, Angleterre, etc.
Amédée II reçut donc l’ordre de l’Etat-major italien d’arrêter toute
offensive en direction du Soudan ou de l’Egypte britannique. Ainsi, Amédée
II ordonna à ses troupes d’évacuer Kassala afin de s’installer sur des
positions plus défensives.
Toutefois, le général
Luigi Frusci[104]
refusa d’abandonner ses positions, considérant qu’une retraite serait
humiliante pour l’armée italienne.
9°
L’opération Menace, ou bataille de Dakar (23 au 25 septembre 1940)
– Suite à la proclamation de la France libre par le général de Gaulle,
ce dernier, comme nous l’avons vu plus tôt, avait reçu l’adhésion de
nombreuses colonies de l’AEF[105].
C’est dans ce contexte que fut lancée l’opération
Menace, menée conjointement par la Grande-Bretagne et les
Forces françaises libres[106].
L’objectif était de lancer une offensive sur Dakar, espérant accélérer le
ralliement de l’AOF[107]
à la France libre.
A noter par ailleurs que d’importantes quantités
d’or étaient entreposées à Dakar (les réserves de la Banque de France et
celles du gouvernement polonais en exil.) ; en outre, Dakar était un port
bien plus moderne que celui de Freetown, au Sierra Leone, seul port allié
dans cette zone à cette époque.
Défilé des FFL à Londres, 1940, Mémorial
Leclerc, Paris.
Le 23 septembre 1940, une escadre britannique
composée d’une vingtaine de navires (un porte-avions, deux cuirassiers, cinq
croiseurs et dix destroyers, pour un total de 8 000 soldats.) se présenta
donc à l’entrée du port de Dakar, sommant les Français qui s’y trouvaient à
rallier la France libre.
Toutefois, le gouverneur général de l’AOF,
Pierre François Boisson, résolument vichyste, refusa de se soumettre. En
effet, les évènements de Mers-el-Kébir étaient encore récents, et à cette
date de nombreux Français considéraient les Britanniques comme des
« traitres. »
Dans un premier temps, trois avions des FFL
décolèrent du porte-avion HMS Ark Royal, lançant des tracs sur la
ville (appelant à rejoindre la France libre.), puis atterrirent à l’aéroport
de Dakar (les émissaires du général de Gaulle furent alors faits
prisonniers.) ; au même moment, un canot arborant le drapeau blanc fut
accueilli par une rafale de balles à l’entrée du port.
Tract du général de Gaulle invitant les
Français de Dakar à se rallier à la France libre, septembre 1940, Mémorial
Leclerc, Paris.
A partir de 10 heures du matin, les batteries de
défense côtière reçurent l’ordre de faire feu sur la flotte britannique, qui
en ripostant endommagea un destroyer français.
Puis, dans l’après-midi, les FFL tentèrent de
débarquer sur une plage de Dakar, mais furent violemment pris à partie par
les défenseurs de la cité. De Gaulle, ne souhaitant pas que des Français se
fassent tuer par des Français, décida alors de sonner la retraite.
Pendant deux jours, la flotte britannique continua
d’attaquer les batteries côtières, endommageant le cuirassé Richelieu,
coulant un destroyer et deux sous-marins.
Lançant un dernier ultimatum à Boisson, ce dernier
répliqua : La France m’a confié Dakar. Je défendrai Dakar jusqu’au
bout !
Finalement, les Britanniques furent contraints de
faire demi-tour le 25 septembre, le cuirassier HMS Resolution ayant
été sévèrement endommagé (ainsi que deux croiseurs.) ; en outre, les forces
vichystes avaient répliqué à l’opération Menace en bombardant Gibraltar[108].
Pour de Gaulle, l’opération était un échec patent,
l’AOF restant entre les mains de Vichy. Cependant, si le général ressortit
isolé de ce coup de force manqué, les Britanniques ne lui retirèrent pas
pour autant leur soutien.
Affiche de propagande vichyste détournant
les citations historiques de Victor Hugo, Mémorial Leclerc, Paris (la
légende indique : "La nouvelle Europe se fera dont seront exclues
l'Angleterre et la Russie. On chassera l'Angleterre dans les océans et la
Russie tartare dans les steppes").
10° L’invasion japonaise de
l’Indochine (septembre 1940) – Depuis 1937, le Japon était
en guerre contre la république de Chine. Après s’être emparés de la Corée et
du Mandchoukouo[109],
l’objectif des Japonais étaient d’étendre leur Empire jusqu’en Chine.
Toutefois, alors que Tokyo avait prévu un conflit rapide, à l’été 1940 la
lutte continuait toujours. C’est dans ce contexte que fut instauré le
gouvernement de Nankin[110],
en mars 1940, un Etat fantoche chinois chargé d’administrer le pays sous
tutelle japonaise.
Toutefois, la résistance chinoise continuait, armée par l’URSS, la
Grande-Bretagne et la France (même si le gouvernement français avait pris
l’engagement de ne pas ravitailler la résistance chinoise en septembre
1939).
Suite à la défaite française de juin 1940, le gouvernement japonais adressa
donc un ultimatum au gouverneur de l’Indochine,
Georges Catroux[111],
rassemblant trois divisions à la frontière tonkinoise. Ce dernier décida
alors à la mi-juin d’interdire le trafic d’essence en direction du Yunnan[112].
Le général Georges Catroux.
Mais le gouvernement de Vichy, mécontent de cet accord, décida de limoger
Catroux[113],
qui fut remplacé par l’amiral Jean
Decoux[114],
un vichyste proche de Darlan.
L'amiral Jean Decoux passant ses troupes
en revue.
Le
nouveau venu, prenant ses fonctions à la fin du mois d’août, accepta
toutefois de transiger, reconnaissant la position privilégiée du
gouvernement japonais en Extrême-Orient.
Cependant, cet accord devait être suivi d’une convention militaire
(autorisant le droit de passage à l’armée japonaise, cette dernière pouvant
stationner 6 000 hommes dans le pays.), dont Decoux retarda la signature. Le
gouvernement japonais lança alors un nouvel ultimatum à la fin septembre,
ordonnant au gouverneur français de signer l’accord avant le 22 à minuit,
sans quoi les forces japonaises traverseraient la frontière.
Finalement, le traité fut signé in extremis, mais le
kantogun[115]
(il s’agissait d’un groupe d’armées japonais.), n’ayant pas été informé de
l’accord, envahit le Tonkin[116]
dans la nuit du 22 septembre.
D’importants combats eurent lieu autour de Lang Son, les Français, en nette
infériorité numérique, ne pouvant opposer qu’une résistance de principe. La
ville étant prise par l’ennemi le 26, les Japonais marchèrent alors vers
Haiphong, cité côtière du Tonkin.
Le même jour,
l’Etat-major japonais ordonna un cessez-le-feu, puis s’engagea à respecter
la souveraineté française au Tonkin. De ce fait, si les troupes japonaises
occupèrent le Tonkin jusqu’à la fin du conflit, les prisonniers français
furent libérés, et Decoux put reprendre le contrôle de la province de Lang
Son.
[1]
Les Aryens étaient un ancien peuple d’origine indo-européenne. Ce
nom a ensuite été repris par les nazis, qui affirmaient la
supériorité des « races nordiques » sur les autres civilisations.
[2]
Rappelons qu’il s’agissait de l’Etat-major suprême de l’armée
allemande.
[3]
HMS signifiant « Her Majesty Ship » (en français, « le vaisseau de
sa majesté »).
[4]
Que l’on peut traduire par « exercice sur la Weser » (la Weser étant
une rivière allemande).
[5]
Comme nous l’avons vu plus tôt, la flotte britannique installée dans
la mer du nord soumettait l’Allemagne à un blocus économique depuis
le début du conflit.
[6]
L’on comptait quatre principaux types de navires au cours de la
seconde guerre mondiale : le cuirassier, navire de guerre doté du
plus épais blindage, mais aussi des canons du plus gros calibre ; le
croiseur, plus rapide que le cuirasser mais disposant d’un blindage
moindre ; le destroyer (ou frégate, en français), destiné à protéger
une flotte civile ou militaire (outre ses canons, il est donc équipé
d’armes aériennes et anti-sous-marines) ; et le porte-avion, destiné
à transporter des véhicules aériens afin de permettre au troupes
d’opérer à proximité de la zone de conflits.
[7]
Haakon VII, né en août 1872, était monté sur le trône de Norvège en
novembre 1905.
[8]
Christian X, né en septembre 1870, était roi du Danemark depuis mai
1912.
[9]
Il s’agissait de l’armée de l’air britannique.
[11]
Ruge, né en janvier 1882, avait reçu le commandement en chef de
l’armée norvégienne peu de temps avant l’offensive allemande, son
prédécesseur, jugé trop défaitiste, ayant été mis en retraite.
[14]
Churchill, né en novembre 1874, avait commencé sa carrière en tant
qu’officier de cavalerie. Considérant ses revenus comme insuffisant,
il décida de publier ses compte-rendu de guerre pour améliorer sa
situation financière. Quittant l’armée en 1899, Churchill décida de
se tourner vers la politique. Proche des conservateurs, il fut nommé
lord de l’amirauté (les lords formaient un collège, militaire
et politique, chargé de diriger la Royal Navy) pendant la première
guerre mondiale, puis fut plusieurs fois ministre pendant les années
1920. Au cours des années 1930, le parti conservateur étant en
retrait, Churchill profita de son isolement pour critiquer
l’inaction britannique face à la menace nazie (tout en saluant le
régime de Mussolini). Suite au déclenchement de la seconde guerre
mondiale, bénéficiant d’un retour en grâce, Chruchill fut à nouveau
nommé lord de l’amirauté.
[15]
De Gaulle, né en novembre 1890, sortit de Saint Cyr en 1912. Blessé
plusieurs fois en 1915, il fut capturé en 1916 au cours de la
bataille de Verdun (il ne fut libéré qu’à la fin de la première
guerre mondiale, malgré plusieurs tentatives d’évasion.). En 1937,
de Gaulle fut promu colonel et affecté à un régiment de chars.
[16]
Rappelons que le Fall Gelb, ou « plan jaune », prévoyait une attaque
massive sur le point le plus fragile de la ligne de front ennemie,
puis de profiter de l’effet de surprise pour attaquer en direction
de la Manche.
[17]
Leurs performances étaient similaires à celles d’un Panzer II.
[18]
A noter que si la Belgique et le Luxembourg avaient été envahis en
1914, les Pays-Bas avaient conservé leur neutralité jusqu’à la fin
du conflit.
[19]
Giraud, né en janvier 1879, sortit de Saint Cyr en 1900, fut affecté
en Afrique. Participant à la première guerre mondiale à la tête du
4° régiment de zouaves, il fut blessé et capturé par l’ennemi.
S’étant évadé, Giraud remonta au front en 1917. Envoyé après guerre
au Maroc, il participa à la guerre du Rif (voir à ce sujet le a),
13, section I, chapitre cinquième, la troisième république),
puis fut nommé commandant militaire de Metz en 1936.
[20]
C'est-à-dire qui devait rester en seconde ligne, au cas où les
armées placées au front seraient repoussées par l’ennemi.
[21]
Corap, né en janvier 1878, s’était rendu en Algérie à sa sortie de
Saint Cyr. Officier d’Etat-major pendant la première guerre
mondiale, il participa à la guerre contre Abd-el-Krim au Maroc (voir
à ce sujet le a), 13, section I, chapitre cinquième, la troisième
république), puis fut nommé général en janvier 1940.
[22]
Huntzinger, né en juin 1880, sortit de Saint Cyr en 1900. Combattant
sur le front d’Orient pendant le premier conflit mondial, il fut
après guerre envoyé en Syrie, alors sous mandat français (voir à ce
sujet le b), 13, section I, chapitre cinquième, la troisième
république).
[25]
Weygand naquit de parents inconnus à Bruxelles, en janvier 1867.
Reçu à Saint Cyr en 1885, à titre d’élève étranger, il fut adopté
quelques années plus tard par la famille Weygand, originaire
d’Alsace (le père adoptif de Weygand étant un ami de son tuteur
légal). Nommé capitaine en 1896, il s’afficha aux côtés des
antidreyfusards lors de l’affaire Dreyfus (pour en savoir plus sur
l’affaire Dreyfus,
cliquez ici). Nommé colonel en 1914, puis général en 1916,
Weygand participa à la première guerre mondiale au sein de
l’Etat-major (en novembre 1918, il participa à la signature de
l’armistice de Rethondes en compagnie du maréchal Foch). Pendant
l’entre-deux-guerres, il fut envoyé en Syrie, alors sous mandat
français (voir à ce sujet le b), 13, section I, chapitre cinquième,
la troisième république), puis prit sa retraite en 1938.
[26]
Pétain, né en avril 1856, rentra à Saint Cyr en 1876. Catholique, il
ne participa à aucune conquête coloniale, restant cantonné en
France. Très tôt, Pétain s’opposa à la théorie de l’offensive à
outrance, préconisant au contraire des bombardements ciblés afin
d’affaiblir les positions ennemies. A noter qu’il ne fut nommé
général qu’au début de la guerre, fin août 1914, alors qu’il
comptait prendre prochainement sa retraite. Vainqueur de Verdun en
1916, Pétain fut aussi chargé de mettre un terme aux mutineries
sévissant dans l’armée française au printemps 1917. En raison de ses
gestes envers les soldats (augmentation des permissions, meilleur
approvisionnements en nourriture, remplacement des lits de paille
par des sommiers, etc.), Pétain conserva une grande popularité
jusqu’à la seconde guerre mondiale. Pendant l’entre-deux-guerres, il
participa à la guerre contre Abd-el-Krim au Maroc (voir à ce sujet
le a), 13, section I, chapitre cinquième, la troisième république)..
[27]
Léopold III, né en novembre 1901, était roi de Belgique depuis 1934.
Il avait succédé à son père Albert I°, qui avait dirigé le
pays pendant la première guerre mondiale.
[28]
A noter que ne furent pas inclues dans la capitulation les armées du
Congo belge.
[29]
Gort, né en juillet 1886, participa à la première guerre mondiale
sur le front ouest, sortant du conflit avec le grade de
lieutenant-colonel. Nommé général en 1937, il entra la même année à
l’Etat-major de l’armée britannique.
[30]
Les Français furent avertis par Paris que la Luftwaffe approchait,
une heure environ avant le déclenchement de l’offensive.
[31]
La théorie de l’irrédentisme était apparue en Italie à partir
de 1870. Cette doctrine revendiquait l’annexion des territoires de
langue italienne, ainsi que certains territoires ayant appartenu à
des Etats italiens.
[32]
La Corse avait été vendue par Gênes en 1769 (voir à ce sujet le 3,
section VII, chapitre quatrième, les Bourbons) ; la Savoie et
le comté de Nice avaient été rétrocédées à la France suite à la
campagne d’Italie de 1859 (3, section II, chapitre premier, le
second Empire).
[33]
Franco, né en décembre 1892, participa à un coup d’Etat militaire à
l’été 1936. Bien que n’étant pas le chef des conspirateurs, Franco
devint leur leader en l’espace de quelques mois (les généraux à
l’initiative du putsch étant décédés). Remportant la victoire en
avril 1939, il établit une dictature militaire en Espagne.
[34]
A savoir l’Estonie, la Lettonie, et la Lituanie
[35]
Du nom de la commune de Briare, qui se trouvait non loin du château
du Muguet, où se tint la réunion.
[36]
Darlan, né en août 1881, fut envoyé en Extrême-Orient en 1902, à sa
sortie de l’école navale. Bénéficiant de nombreux appuis politiques
(son père fut député de 1889 à 1898), Darlan fut nommé amiral en
1939.
[37]
Laval était un avocat né en juin 1883. Elu député de la SFIO en
1914, il perdit toutefois son poste en 1919 en raison de son
pacifisme (à noter que Laval, réformé, n’avait pas participé à la
Grande guerre.). Il fut toutefois à nouveau élu député lors des
élections législatives de 1924, en tant que socialiste indépendant
(il n’appréciait pas le rapprochement de la SFIO avec les
communistes.). Laval joua un rôle prépondérant au cours des années
1930, nommé plusieurs fois ministre et deux fois président du
conseil.
[38]
Voir à ce sujet le 10, section VI, chapitre quatrième, la
troisième république.
[39]
Hess, né en avril 1894, participa à la première guerre mondiale dès
1914. Combattant sur le front ouest, il fut nommé caporal en 1915,
puis fut gravement blessé lors de la bataille de Verdun, en 1916.
Suite à sa convalescence, il fut envoyé sur le front est, où il fut
à nouveau grièvement blessé. Déclaré inapte au métier de fantassin,
il fut transféré dans l’armée de l’air. En 1920, il fut un des
premiers membres du NSDAP, participant avec Hitler au putsch de la
brasserie. Les deux hommes, emprisonnés ensemble, s’attelèrent à la
rédaction de Mein Kampf. Suite à l’accession d’Hitler au pouvoir,
Hess fut peu à peu écarté au profit d’autres dignitaires nazis, tels
qu’Heinrich Himmler, chef de la SS, ou Joseph Goebbels,
chargé de la propagande.
[40]
Von Ribbentrop, né en avril 1893, suivit les pérégrinations de son
père à travers la France et le Canada, un officier dégradé pour
avoir critiqué la politique de l’Empereur Guillaume II.
Rejoignant le NSDAP en 1932, il fut nommé Standartenführer-SS
(il s’agit d’un grade de colonel)l’année suivante.
Conseiller officieux d’Hitler pour les Affaires étrangères depuis
1935, il reçut la charge de ministre des Affaires étrangères en
1938.
[41]
Keitel, né en septembre 1882, s’enrôla dans l’armée en 1901.Servant
sur le front ouest pendant la première guerre mondiale, il travailla
pendant les années 1920 à l’organisation de la Reichsweir, l’armée
de la république de Weimar. Conservant son poste suite à l’arrivée
d’Hitler au pouvoir, il fut nommé général en 1937. A noter que
Keitel s’opposa à l’invasion de la Pologne et de la France.
[42]
Goering, né en janvier 1893, participa à la première guerre mondiale
en tant que jeune officier. Luttant dans les tranchées humides, sa
santé déclina rapidement et il fut hospitalisé quelques semaines.
Rejoignant l’armée de l’air suite à sa convalescence, il rejoignit
le NSDAP quelques années après la fin du conflit. Blessé suite au
putsch de la brasserie, il partit en convalescence en Autriche.
Rentrant au pays en 1927, il fut élu député l’année suivante, puis
nommé président du Reichstag en 1932. IL devint aussi ministre de
l’Air en 1933 et commandant en chef de la Luftwaffe en 1935.
[43]
Raeder, né en avril 1876, s’engagea dans la marine en 1894.
Participant à la première guerre mondiale, il fut nommé amiral en
1928. Ce dernier rejoignit Hitler, séduit par sa volonté de redonner
une marine à l’armée allemande.
[44]
Léon Noël, né en mars 1888, commença sa carrière en tant que chef de
cabinet de Maurice Colrat de Montrozier, ministre de la
Justice pendant les années 1920. Préfet du Haut-Rhin en 1930, puis
chef de cabinet de Pierre Etienne Flandin et Pierre Laval,
présidents du conseil entre 1934 et 1935. Par la suite, il fut nommé
ambassadeur de France à Varsovie jusqu’en 1939.
[45]
A noter que le wagon fut détruit sur ordre d’Hitler en 1945.
[46]
Ciano, né en mars 1903, avait épousé Edda en 1930, fille
aînée de Mussolini. Nommé consul à Shangaï, puis plusieurs fois
ministre au cours des années 1930, il conserva d’excellentes
relations avec la famille royale.
[47]
Badoglio, né en septembre 1871, avait participé à la première guerre
mondiale sur le front italien, où il fut nommé général en 1916.
Puis, en 1935, Badoglio mena la campagne contre l’Ethiopie,
rejoignant le parti fasciste en 1936. Il s’opposa par la suite au
pacte d’acier, ainsi qu’à la déclaration de guerre de l’Italie
contre la France.
[48]
Il s’agissait d’un titre honorifique porté par Mussolini.
[49]
Pour plus de renseignements sur les actes constitutionnels de 1875,
voir le b), 6, section I, chapitre deuxième, la troisième
république.
[50]
Voir à ce sujet le b), 9, section I, chapitre deuxième, la
troisième république.
[51]
Flandin était un avocat né en avril 1889. Participant à la première
guerre mondiale, il fut affecté à l’aéronautique ; en 1914, il fut
élu député de l’AD. Plusieurs fois ministre au cours des années
1930, il fut nomme président du conseil entre 1934 et 1935.
[52]
A noter que les actes de 1875 précisaient que le président de la
république était garant du pouvoir exécutif, pas le président du
conseil.
[53]
Pour en savoir plus sur la bataille de Verdun, voir le 1, section
IV, chapitre quatrième, la troisième république.
[54]
Il était interdit aux 72 députés communistes de siéger, leur parti
ayant été interdit en septembre 1939 en raison de son opposition à
la guerre ; l’on comptait en outre une centaine d’absents
(Alsaciens, Lorrains, exilés, etc.).
[55]
Ces 80 élus furent considérés plus tard comme les 80 premiers
résistants (l’on comptait parmi eux une moitié de socialistes, une
dizaine de radicaux, ainsi qu’une trentaine de députés issus de
petites formations politiques.).
[56]
Voir à ce sujet le b), 6, section I, chapitre deuxième, la
troisième république.
[57]
Les chambres ne furent jamais convoquées pendant toute la durée de
la guerre.
[58]
Nous y reviendrons en a), 1, section V, chapitre sixième, la
troisième république.
[59]
A noter que le régime de Vichy restait ambigu quant au détenteur du
pouvoir exécutif. Ainsi, ce dernier était partagé entre le chef de
l’Etat (qui le détenait officiellement) et le vice-président du
conseil, qui administrait le pays.
[61]
Ce n’est qu’à partir de 1942 que le Roosevelt rompit officiellement
avec Vichy, bien que se méfiant toujours du général.
[62]
La francisque était à l’origine une hache de lancer utilisée par les
Francs. Elle fut bien plus tard érigée comme symbole de la
France, au cours de la Révolution française ou sous le régime de
Vichy.
[63]
A noter que cette devise avait été empruntée arbitrairement aux
croix de feu, groupement d’anciens combattants.
[65]
Pour en savoir plus sur les conflits entre l’Etat et l’Eglise,
cliquez ici.
[66]
Voir à ce sujet le b), 1, section IV, chapitre sixième, la
troisième république.
[67]
Ce dernier, né en mars 1811, était décédé à Vienne en 1832. Pour en
savoir plus sur ce personnage, voir le 6, section III, chapitre
troisième, l’épopée napoléonienne ; et le 2, section VI,
chapitre premier, la monarchie de Juillet.
[68]
Rappelons que le gouvernement britannique s’était toujours méfié de
l’URSS.
[70]
Les Etats-Unis n’ayant pas encore déclaré la guerre à l’Allemagne.
[71]
Les navires, ainsi immobilisés, reprirent la lutte contre
l’Allemagne à compter de 1943.
[72]
Les Swordfish, datant de 1934, étaient désormais obsolètes.
Toutefois, ils équipaient encore les porte-avions de la Royal Navy.
[73]
Rappelons que les Sturzkampfflugzeug étaient des avions
chargés d’effectuer des attaques en piqué.
[74]
A savoir France, Pologne, Tchécoslovaquie, Belgique, etc.
[75]
C'est-à-dire « guerre de la Manche » en français.
[76]
Rappelons que la Norvège était sous contrôle allemand depuis avril
1940. Pour plus de renseignements à ce sujet, voir le 1, section
III, chapitre sixième, la troisième république.
[78]
A noter que si les pilotes étaient équipés de parachutes, les avions
n’étaient pas équipés de sièges éjectables. Les pilotes dont
l’appareil avait été touché devaient donc s’extirper du cockpit à
leurs risques et périls.
[79]
Pour en savoir plus sur la bataille aérienne de Berlin, voir le 6,
section VI, chapitre sixième, la troisième république.
[81]
En français « Corps aérien italien. » A ne pas confondre avec laRegia aeronautica, qui était l’armée de l’air italienne.
[82]
Depuis le XIX° siècle, le pays était divisé entre politiques et
militaires, les uns favorables à la démocratie, les autres à un
régime autoritaire.
[83]
Metaxas, né en avril 1871, sortit de l’école des Evelpides (la
principale école militaire grecque) en 1890 avec le grade de
sous-lieutenant. S’inspirant du militarisme prussien, il participa
aux guerres balkaniques (pour en savoir plus à ce sujet voir la
section III, chapitre troisième, la troisième république),
mais pendant le premier conflit mondial il soutint la neutralité du
roi Constantin I°. En 1917, Metaxas décida de suivre le roi
en exil, ce dernier ayant été chassé du trône par les alliés (voir à
ce sujet le b), 11, section V, chapitre quatrième, la troisième
république). Rentrant en Grèce, Metaxas démissiona de l’armée en
1920, fondant en 1923 le parti de la libre opinion, situé à
l’extrême-droite sur l’échiquier politique. Il fut nommé ministre de
la guerre par Georges II en mars 1936.
[84]
Metaxas, germanophile, entretenait de bonnes relations avec Hitler.
[85]
La Bulgarie avait déclenché la seconde guerre balkanique en
1913 (voir le b), 4, section III, chapitre troisième, la
troisième république), puis en 1914 avait rejoint la Triplice
(c'est-à-dire l’Allemagne et l’Autriche).
[87]
Le nome était une ancienne subdivision territoriale, équivalent à
nos actuels départements. Ils furent remplacés par treize
périphéries (ou régions.) en 2010.
[88]
Né en décembre 1883, Papagos avait fait ses études militaires en
Belgique. Ce dernier participa aux guerres balkaniques et à la
guerre gréco-turque (voir le b), 9, section I, chapitre cinquième,
la troisième république).
[89]
L’Italie s’était emparé de l’Ethiopie, alors pays neutre, en 1935.
Voir à ce sujet le d), 11, section II, chapitre cinquième, la
troisième république.
[90]
A noter qu’Hitler avait proposé à Mussolini d’envoyer des troupes
allemandes en Libye, mais le Duce avait refusé.
[91]
Rappelons qu’il s’agissait de l’armée de l’air italienne (« Régie
aéronautique. »).
[92]
Graziani, né en août 1882, était sorti de la première guerre
mondiale avec le grade de colonel. Envoyé en Lybie après guerre, il
fut nommé vice-gouverneur de Cyrénaïque en 1930. Participant à la
guerre contre italo-éthiopienne en 1935, il reçut la charge de
vice-roi d’Ethiopie suite à la conquête du pays.
[93]
A cette date, les italiens se trouvaient à 700 kilomètres du canal
de Suez.
[94]
Wavell, né en mai 1883, participa à la première guerre mondiale où
il perdit l’usage d’un œil. Nommé aide de camp du roi George V
en 1932, il reçut les galons de général l’année suivante. En
1938, il fut nommé commandant en chef au Moyen-Orient.
[95]
Pour en savoir plus sur la campagne d’Erythrée, voir le c), 6,
section IV, chapitre sixième, la troisième république.
[96]
Voir à ce sujet le a), section II, section IV, chapitre sixième,
la troisième république.
[98]
« Corps allemand d’Afrique » en français, souvent abrégé en
Afrikakorps.
[99]
Nous reviendrons sur cette nouvelle phase de la guerre du désert en
5, section IV, chapitre sixième, la troisième république.
[100]
Né en octobre 1898, était un descendant du roi d’Italie Victor
Emmanuel II. Nommé vice-roi d’Ethiopie en 1937, il reçut la
charge de gouverneur de l’Afrique orientale italienne en 1940.
[101]
Nasi, né en février 1879, combattit sur le front italien au cours de
la première guerre mondiale. Nommé vice-gouverneur de Cyrénaïque en
1934, il participa à la guerre contre l’Ethiopie l’année suivante.
En 1939, Nasi fut nommé vice-gouverneur de l’Afrique orientale
italienne.
[102]
Né en 1896, Chater avait participé à la bataille des Dardanelles
pendant la première guerre mondiale, puis fut envoyé sur le front
ouest. Suite au premier conflit mondial, il fut affecté au Soudan,
avant d’être nommé en 1940 commandant des forces britanniques en
Somalie.
[103]
Messervy, né en décembre 1893, avait participé à la première guerre
mondiale, combattant sur le front ouest ainsi qu’au Proche-Orient.
Promu capitaine, il servit en Inde jusqu’en 1938, puis fut nommé
colonel l’année suivante.
[104]
Frusci, né en 1879, participa à la guerre contre l’Ethiopie, puis
participa à la guerre d’Espagne en tant que volontaire. Promu
général, Frusci fut nommé gouverneur de l’Erythrée en 1939.
[105]
Voir à ce sujet le c), 3, section III, chapitre sixième, la
troisième république.
[106]
Les FFL formaient une force armée ralliée à la France libre. Leur
symbole était la croix de Lorraine, adoptée par le général de
Gaulle à compter de juillet 1940 (l’objectif à l’époque était de
contrebalancer la croix gammée allemande).
[108]
Rappelons que Gibraltar, à la pointe sud de l’Espagne, était sous
domination britannique depuis 1704. Voir à ce sujet le 6, section
VIII, chapitre troisième, les Bourbons.
[109]
Le Mandchoukouo, conquis en 1932, correspond à la pointe nord-est de
la Chine actuelle.
[110]
Ce dernier était le regroupement de plusieurs petites entités
collaboratrices. Son nom officiel était république de Chine
(à ne pas confondre donc avec la république de Chine indépendante).
[111]
Catroux, né en janvier 1877, intégra Saint Cyr en 1896. Fait
prisonnier en 1915, il fut envoyé après guerre en Afrique du nord.
Catroux fut nommé gouverneur de l’Indochine en 1939.
[112]
Le Yunnan étant une province chinoise à la frontière de l’Indochine.
[113]
A noter que Catroux, suite à son éviction, décida de gagner la
France libre. Il fut ainsi le premier haut gradé à rejoindre le
général de Gaulle.
[114]
Decoux, né en mai 1884, était entré à l’école navale en 1901.
Participant au premier conflit mondial avec le grade de lieutenant,
il fut nommé vice-amiral en 1939.
[115]
Le kantogun était originaire de la péninsule du Guandong, en
Chine.
[116]
Le Tonkin, région nord de l’Indochine, se trouvait sur la frontière
chinoise.