1° Funérailles de Charles VII et
sacre de Louis XI (été 1461) – Apprenant le décès de Charles VII, Louis
XI décida de ne pas se rendre aux funérailles de son père, qui se
déroulèrent au cours du mois de juillet 1461.
Les funérailles de Charles VII, par
Martial d'Auvergne, enluminure issue de l'ouvrage Vigiles de Charles
VII,
Paris, France, XV°siècle.
Par la suite, le nouveau souverain demanda à son oncle le duc de Bourgogne
de l’accompagner jusqu’à Reims, la ville du sacre. Le cortège de Louis XI,
plutôt discret, contrastait beaucoup avec la magnificence de celui de
Philippe le Bon.
Portrait de Louis XI (on peut apercevoir
un médaillon accrochée au chapeau du roi. En effet, ce souverain, très
superstitieux, accrochait toujours de nombreuses breloques sur son couvre
chef).
Une fois couronné roi, le nouveau souverain fit son entrée à Paris début
septembre, toujours accompagné par son oncle bourguignon.
Les premières mesures de Louis XI furent de destituer tous les anciens
conseillers de feu Charles VII. Nombre d’entre eux, dont Dunois et Pierre de
Brézé, furent remplacés par des compagnons du nouveau souverain, qui avaient
suivi ce dernier dans l’exil. A noter que la plupart des serviteurs de Louis
XI furent des hommes de naissance modeste, parfois d’origine
étrangère.
Cependant, Louis XI se rendit rapidement compte que les conseillers de son
père étaient loin d’être des incompétents. Conscient de son erreur, le roi
rappela alors certains de ces exilés, dont les frères Bureau, maîtres
de l'artillerie de Charles VII.
A
la fin du mois de septembre 1461, le roi consentit à accorder quelques
allègements fiscaux aux Parisiens, puis quitta la capitale. Il se rendit
alors à en Touraine, s’installant au château du Plessis.
A
noter toutefois que Louis XI fut un souverain voyageur, se rendant souvent
sur place afin de voir personnellement de quelle manière ses ordres avaient
été exécutés.
2° Crise en Aragon (septembre 1462 à été 1464) – Peu de
temps après son accession au pouvoir, Louis XI décida d’intervenir dans la
crise de succession aragonaise.
En
effet, suite à la mort du roi d’Aragon Alphonse V le Magnanime, en
1458, un important conflit avait éclaté entre le frère du défunt, Jean II,
et le fils de ce dernier, Charles d’Aragon.
En
1460, le père et le fils avaient fini par s’entendre, mais la mort de
Charles l’année suivant raviva les tensions (le jeune homme fut peut être
empoisonné par sa belle mère Jeanne Enriquez, que Jean II avait
épousé en secondes noces.).
Dans un premier temps, Louis XI se rapprocha des villes de Catalogne,
partisanes du défunt. Cependant, les cités refusèrent l’aide du roi de France,
lui préférant Ferdinand, un enfant de dix ans, frère de Charles
d’Aragon.
Louis XI décida alors de se tourner vers Jean II, lui proposant son aide.
En
avril 1462, les deux hommes se rencontrèrent à Sauveterre de Béarn,
négociant les termes de l’alliance entre la France et l’Aragon.
Le
mois suivant, le traité de Bayonne entérina cet accord : Louis XI
s’engageait à fournir 300 000 écus d’or, infanterie et artillerie, à Jean
II. Ce dernier, en attendant de rembourser sa dette vis-à-vis du roi de
France, lui cédait en gage le Roussillon et la Cerdagne, ainsi que les
forteresses de Perpignan et de Collioure.
En
outre, Jean II accepta de reconnaitre à Gaston IV, comte de Foix, la
possession de la Navarre.
Incapable de rembourser, Louis XI se hâta d’occuper militairement ces deux
provinces (ce qui fut chose faite au cours de l’été 1463.).
Quant à Gaston de Foix, il fut chargé par Louis XI de franchir les Pyrénées
et de mettre le siège devant Barcelone. Cependant, les Catalans firent appel
à Henri IV, roi de Castille (qui était lui aussi un allié du roi de
France.), et le comte de Foix fut finalement contraint de quitter la
Catalogne en décembre 1462.
Louis XI jouant un rôle de médiateur entre Henri IV et Jean II, les villes
de Catalogne décidèrent de faire appel à Don Pedro, connétable du
Portugal.
Cependant, Jean II s’étant allié avec Naples, Milan et Gênes, et s’étant
réconcilié avec la Castille, ne tarda guère à écraser son rival portugais
(été 1464.).
Suite à la mort de Don Pedro, les villes de Catalogne refusaient toujours de
reconnaître Jean II comme roi d’Aragon. En octobre 1466, les Catalans firent
alors appel à René d’Anjou. Cependant, ce dernier étant âgé, il préféra
céder ses droits sur l’Aragon à son fils Jean de Calabre (tout en
recevant le soutien de Louis XI.).
Cependant, ce dernier ne tarda pas à mourir dans des conditions
mystérieuses, en décembre 1470. Ce fut alors un bâtard de Jean de Calabre
qui fut chargé de lutter en Catalogne (le fils légitime du défunt,
Nicolas II, avait été chargé de gouverner la Lorraine.).
3° La ligue du Bien Public (mars à octobre 1465) –
Cependant, les premières années de règne de Louis XI ne furent pas
applaudies des deux mains par les grands vassaux.
Ces derniers étaient excédés par la politique autoritaire du roi, qui
souhaitait contrôler la féodalité et mettre un terme à son indépendance. En
outre, comme nous l’avons vu précédemment, Louis XI préférait s’entourer de
roturiers, ce qui ne plaisait guère aux nobles, qui voyaient là une perte
d’influence.
En
septembre 1463, le rachat des villes de la Somme par Louis XI (qui avaient
été cédées par Charles VII au duc de Bourgogne lors du traité d’Arras.)
provoqua la fureur de Charles, duc de Charolais, fils aîné de
Philippe le Bon (le jeune homme, né en novembre 1433, fut plus tard surnommé
le Téméraire.).
Charles le Téméraire, par NANTEUIL, château de Versailles, Versailles..
En
mars 1465 se constitua alors la ligue du Bien Public, rassemblant de
nombreuses personnalités de premier plan : Charles de France, duc de
Berry (le frère cadet de Louis XI, né en 1446.) ; Charles le Téméraire ;
Jean II de Bourbon ; François II, duc de Bretagne ; Jean II d’Anjou,
duc de Lorraine (fils de René d’Anjou, beau frère de Charles VII.) ; Jean V,
comte d’Armagnac ; Dunois (surnommé le bâtard d’Orléans, compagnon de Jeanne
d’Arc.) ; etc.
C’est ainsi que les grands du royaume publièrent un manifeste contre Louis
XI, déclarant vouloir faire la guerre contre le roi de France afin de
défendre leurs prérogatives, et annonçant leur volonté de nommer régent le
jeune Charles de France.
Louis XI ne tarda pas à riposter en publiant un contre manifeste, puis
décida de chercher des alliés disposés à l’aider à lutter contre les
ligueurs.
Entre mars et juin 1465, le roi de France reçut ainsi l’appui de François
Sforza (duc de Milan et allié de longue date de la couronne de
France.) ; de Gaston IV, comte de Foix ; ainsi que celui de la ville de
Liège (les Liégeois étaient alors hostiles au duché de Bourgogne.).
Louis XI commença par s’attaquer au duc de Bourbon, qui avait été un des
premiers à se révolter. Au cours du mois d’avril 1465, les armées du roi ne
mirent que quelques semaines à faire main basse sur le Bourbonnais et le
Berry.
Ayant réuni son armée, Charles le Téméraire décida de marcher sur Paris.
L’objectif des ligueurs était de réunir leurs armées et de s’emparer de la
capitale, au nez et à la barbe de Louis XI.
Le
comte de Charolais arrivant sous les murs de la ville, eut cependant la
surprise de trouver les portes closes. En effet, les Parisiens n’ayant rien
à gagner d’une nouvelle guerre civile, décidèrent de rester fidèles au roi de
France.
Le
comte de Charolais décida alors de se rentre à Etampes, afin de rejoindre
l’armée de François II de Bretagne.
En
juillet 1465, Louis XI apprit le plan des coalisés, et décida de marcher sur
la capitale.
C’est ainsi que les deux armées rivales s’affrontèrent au cours de la
bataille de Monthléry, à une soixantaine de kilomètres au sud de Paris.
La bataille de Monthléry, par Paul Lehugeur, XIX° siècle.
L’affrontement, bien que violent, ne donna l’avantage à aucun des deux camps
(à noter que Pierre de Brézé fut tué au cours de la bataille.).
Le
soir venu, le roi de France quitta le champ de bataille avec ses hommes.
Charles le Téméraire, quant à lui, resta sur place, pensant que le combat
reprendrait le lendemain. Cependant, le matin venu, le Bourguignon se rendit
compte que son adversaire était parti.
De
ce fait, bien qu’ayant subi de plus lourdes pertes que le roi de France, le
comte de Charolais proclama haut et fort qu’il était victorieux.
Louis XI décida alors de rejoindre Paris, accordant quelques baisses
d’impôts et privilèges aux habitants de la cité afin de s’assurer de leur
fidélité.
Puis, courant août, le roi de France quitta la capitale et se rendit en
Normandie, afin de s’approvisionner en hommes et en vivres.
Retournant à Paris à la tête d’une armée de 12 000 hommes, le conflit de
tarda guère à s’enliser.
Finalement, voyant le conflit ne menait à rien, le roi de France décida de
négocier séparément avec les insurgés. Selon l’expression de Philippe de Commynes, le
biographe de Louis XI, le bien public fut converti en bien particulier.
Copie du tombeau de Philippe de Commynes, musée du Louvre, Paris.
Le
5 octobre 1465, le traité de Conflans fut signé avec Charles de
France et Charles le Téméraire. Le frère du roi récupéra de ce fait le duché
de Normandie, et Louis XI rendit au jeune Bourguignon les villes de la
Somme, ainsi que Boulogne, Guînes, Péronne et Montdidier (à noter que les
Liégeois, abandonnés par le roi de France, furent rapidement punis par les
Bourguignons.).
Le
29 octobre 1465, Louis XI s’entendit avec les principaux nobles révoltés
contre lui, signant le traité de Saint Maur. Jean II d’Anjou récupéra
les villes de Mouzon, Sainte Menehould et Neufchâteau ; le duc de Bourbon
obtint plusieurs seigneuries d’Auvergne ; le comte d’Armagnac eut droit à
plusieurs cités de Rouergue ; et Dunois, à la tête d’une commission de 36
membres, fut chargé de préparer des réformes administratives et financières.
Enfin, le 28 décembre 1465, le traité de Caen fut signé entre Louis
XI et François II de Bretagne, ce dernier recevant Etampes et Montfort.
Cependant, Louis XI ne respecta pas longtemps les traités signés. Ayant
séparé les ligueurs, le roi de France ne tarda guère à se retourner contre
chacun d’entre eux.
En
janvier 1466, Louis XI s’empara de la Normandie, donnant en échange à son
frère le Roussillon ; en juillet 1466, la commission présidée par Dunois fut
un échec et n’aboutit à rien.
Cependant, s’il sut pardonner à certains des nobles insurgés, le combat que
Louis XI livra à son rival Charles le Téméraire (devenu duc de Bourgogne
suite à la mort de son père en juin 1466.), dura près de dix ans.
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