Toute personne qui
découvre le double dossier archéologique d’Alise-Sainte-Reine et de Chaux,
Crans et Syam ne peut échapper à un moment de grand étonnement. Ce qui
surprend le plus ce n’est pas que soit apparu un site jusque là totalement
inconnu. Ce qui surprend c’est que le site officiel connu de tous puisse
être à ce point fragile. Il est pourtant présenté comme mettant fin à toute
controverse et le site du Jura est de son côté tout aussi officiellement
réfuté. Douter de ces affirmations semblait impossible.
De loin l’édifice est
solide et même harmonieux. Rien ne manque, ni les moyens financiers (six ans
de fouilles intensives), ni l’autorité des savants, ni l’érudition, ni le
soutien des institutions et de livres innombrables, histoires,
encyclopédies, guides touristiques... Tous les arguments possibles se
croisent et se répondent. Leur masse est impressionnante.
Cet enchaînement fatal
provient de l’absence avant toute localisation d’une analyse objective et
complète des données disponibles. C’est la maladie congénitale
d’Alise-Sainte-Reine. Elle est sans remède.
Il faut rappeler un
manquement supplémentaire à cette autre règle qui s’impose en toute priorité
à l’archéologie : la protection des sites. Sur celui du Jura rien n’est
fait. Que le passage d’une conduite révèle en plein champ des pièges romains
n’entraîne aucune réaction ; qu’un chenil s’installe dans un fort en y
commettant des dégâts irréversibles et c’est le maire, seul, qui doit user
de son influence pour l’arrêter ; que des chemins extrêmement anciens et
liés au site militaire disparaissent peu à peu du terrain et des cartes
n’émeut aucune autorité ; que des travaux qui arasent des vestiges divers
soient parfaitement possibles et autorisés en l’absence de toute protection,
c’est normal. Aucune mesure de protection n’a jamais été prise, sinon sur
place l’intervention des défenseurs du site sans autre moyen que la
persuasion. Depuis des siècles, la sauvegarde du site n’est due qu’à son
isolement mais celui-ci est de moins en moins réel. Laisserait-on perdre ce
patrimoine sans l’étudier ?
Finalement la question
qui se pose n’est donc pas de savoir si des fouilles dans le Jura ou une
discussion ouverte à propos de ce site nuirait à Alise-Sainte-Reine, ni si
dans ce cas s’effondreraient des hypothèses mal assises, sans parler de la
justification des dépenses engagées à Alise-Sainte-Reine dans des travaux
réfutés alors sans appel. La question n’est pas non plus de prouver à tout
prix que l’Alésia antique soit dans le Jura.
La question est de
savoir si l’administration de l’archéologie agit dans l’intérêt de la
recherche et si, pour protéger les intérêts de toutes natures de ses
dirigeants, une découverte de cette ampleur, quelle qu’elle soit, peut être
soustraite à notre patrimoine historique.