1° La lente progression française –
Suite à la mort
de sa mère Catherine de Valois en janvier 1437, Henri VI s’empara finalement
des rênes du pouvoir.
Henri VI, gravure issue de l'ouvrage
Cassell's history of England, Angleterre, 1902.
Le jeune homme se
retrouvait néanmoins dans une situation délicate. En effet, les Français ne
cessaient de prendre du terrain, et, en outre, les dettes de guerre
anglaises étaient extrêmement élevées. Enfin, les barons anglais se
déchiraient entre partisans de la guerre (comme Richard Plantagenêt et
Humphrey de Lancastre.) et défenseurs de la paix (tels Guillaume de la
Pole, duc de Suffolk, et Henri Beaufort, évêque de Westminster.).
a) Les Anglais
ripostent, profitant de la Praguerie (1439 à 1440) : les Anglais,
maîtres de Pontoise, mirent cet avantage à profit pour lancer de nombreux
raids contre l’Ile de France. Richemont échoua à reprendre la cité au mois
d’avril 1438, et perdit Saint Germain en Laye en avril 1439.
La prise de Pontoise par les Anglais, par
Martial d'Auvergne, enluminure issue de l'ouvrage Vigiles de Charles
VII, Paris, France, XV°siècle.
Cependant,
recevant des troupes fraîches à la fin de l’été 1439, le connétable parvint
à s’emparer de Meaux.
La prise de Meaux, par Jean Chartier,
enluminure issue de l'ouvrage Chronique, Belgique, XV°siècle.
Suite à ces
nouvelles victoires françaises, Charles VII signa une première ordonnance
relative à la réorganisation de l’armée, interdisant aux seigneurs ayant des
garnisons dans leur château de lever des troupes, ce qui devint une
prérogative royale.
Cette réforme ne
fut guère acceptée par les grands du royaume, qui décidèrent de se révolter
contre le roi de France.
Cette révolte,
surnommée la
Praguerie,
réunit plusieurs seigneurs de haut rang, comme Charles I° de Bourbon,
Dunois, Jean II d’Alençon, ainsi que le dauphin Louis.
Les meneurs de la Praguerie, par Martial
d'Auvergne, enluminure issue de l'ouvrage Vigiles de Charles VII,
Paris, France, XV°siècle.
Les Anglais,
apprenant la nouvelle, décidèrent de profiter de cette crise. Menés par
Talbot, ils attaquèrent une fois de plus la Normandie, capturant Harfleur.
Cependant, Richemont parvint à s’emparer de Conches et de Louviers, coupant
ainsi les communications anglaises vers la Seine.
A noter que la
Praguerie fut rapidement matée par Arthur III de Bretagne, début 1440
(Charles VII décida d’être clément et pardonna aux nobles insurgés.).
b) Les
Français attaquent Pontoise et l’Aquitaine (1441 à 1443) : au printemps
1441, les Anglais faisaient toujours peser une lourde menace sur leurs
adversaires, grâce à leur forteresse de Pontoise.
Cependant,
Charles VII et Richemont décidèrent de marcher sur la cité. Equipés d’une
puissante artillerie, fruit du travail des frères Bureau,
les Français percèrent rapidement les murs de Pontoise, et la cité tomba en
septembre 1441.
La prise de Pontoise, par Jean Chartier,
enluminure issue de l'ouvrage Chronique, Belgique, XV°siècle.
Par la suite, au
cours de l’été 1442, Charles VII décida de frapper dans les régions
historiquement anglaises, c'est-à-dire en Guyenne et en Gascogne.
Accompagné de Richemont, le roi parvint à s’emparer de Tartas, une
forteresse entre les mains des Anglais, située non loin de Mont de Marsan.
Le siège de Tartas, par Martial
d'Auvergne, enluminure issue de l'ouvrage Vigiles de Charles VII,
Paris, France, XV°siècle.
Dax capitula
devant le roi de France peu de temps après mais l’hiver venant, la campagne
prit fin.
A noter qu’au
mois d’avril, les Anglais profitèrent du décès de Yolande d’Anjou, belle
mère de Charles VII (décédée en novembre 1442.), pour lancer un raid raté
contre Angers, capitale du duché d’Anjou.
2° La trêve de
Tours (avril 1444) –
En Angleterre,
les partisans de la paix parvinrent à gagner la confiance d’Henri VI, qui
décida de négocier une paix, ou du moins une trêve avec Charles VII (à noter
que le roi d’Angleterre, né d’une mère française, était loin d’avoir le même
état d’esprit guerrier que son père Henri V.).
Des négociations
entre Français et Anglais commencèrent donc à avoir lieu en avril 1444 à
Tours. Charles VII, représenté par Pierre de Brézé (un protégé
d’Agnès Sorel, la maîtresse du roi de France.), proposa aux Anglais de
leur céder l’Aquitaine et une partie de la Normandie ; en échange, Henri VI
s’engageait à prêter hommage au roi de France pour ses possessions sur le
continent. Le souverain anglais, représenté par Guillaume de la Pole,
désirait obtenir la suzeraineté sur la Normandie et l’Aquitaine.
Ne parvenant à
trouver un accord, les deux adversaires décidèrent de signer une trêve,
consolidée par le mariage de
Marguerite d’Anjou
au jeune roi d’Angleterre (la noce ne fut cependant célébrée qu’en mars
1445.).
Le mariage d'Henri VI et de
Marguerite d'Anjou, par Martial d'Auvergne, enluminure issue de l'ouvrage
Vigiles de Charles VII, Paris, France, XV°siècle.
Les deux
belligérants s’engagèrent ainsi à ne pas prendre les armes l’un contre
l’autre jusqu’en avril 1446.
Tournoi célébré en
l'honneur des noces d'Henri VI, par Martial d'Auvergne, enluminure issue de
l'ouvrage Vigiles de Charles VII, Paris, France, XV°siècle.
En outre, les
Anglais s’engagèrent à quitter le Maine (cet accord fut tenu secret, car les
barons anglais partisans de la paix savaient que cela ferait un tollé si le
Parlement était mis au courant.).
Finalement, la
nouvelle de la cession du Maine fut rendue publique au cours de l’année
1446. Le comte de Suffolk, qui avait signé le traité de Tours, fut hué par
les partisans de la guerre comme Humphrey de Lancastre et aussi par le
peuple.
Conspués, Henri
VI et Marguerite décidèrent alors de répliquer l’année suivante : Humphrey
de Lancastre fut accusé de haute trahison et fut alors emprisonné (il mourut
peu de temps après, en février 1447.).
Richard
Plantagenêt, duc d’York, se retrouva alors sur la sellette et fut envoyé en
Irlande. Guillaume de La Pole, comte de Suffolk, fut fait duc de Suffolk ;
Edmond Beaufort, le neveu d’Henri Beaufort, fut fait duc de Somerset
et reçut la tâche de poursuivre la guerre sur le continent.
3° Le Grand
Schisme d’Occident et ses persistances (1378 à 1438) –
L’Europe, alors agitée par le conflit entre la France et l’Angleterre, était
en outre confrontée au Grand Schisme d’Occident, qui s’était déclenché dans
le courant du XIV° siècle.
a) Le grand
Schisme d’Occident (1378 à 1415) : depuis 1305, les papes avaient quitté
Rome et vivaient en Avignon. Le premier à avoir fait ce choix, le Français
Clément V, était un proche du roi de France Philippe le Bel.
Depuis cette
date, tous les papes qui s’étaient succédés étaient d’origine française, et
avaient nommé de nombreux cardinaux, d’origine française eux aussi. En 1377,
Grégoire XI mourut, et l’année d’après fut élu Urbain VI à Rome.
Le nouveau
pontife ne tarda guère à s’opposer aux cardinaux français, qui élurent
Clément VII en Avignon.
Pendant plusieurs
années, deux papes coexistèrent, l’un résidant en Italie, l’autre en France.
Afin de sortir de la crise, les cardinaux se réunirent au cours du
concile de Pise, déposant les deux papes et en élisant un nouveau,
Alexandre V. Cependant, Grégoire XII, à Rome, et Benoît XIII,
en Avignon, excommunièrent les conclavistes et ne reconnurent pas leur
décision. De ce fait, il n’y avait plus deux, mais trois papes à la tête de
l’Eglise.
En 1415, les
cardinaux décidèrent de réunir un nouveau concile, après s’être rapprochés
des souverains pontifes. Grégoire XII accepta d’abdiquer, et Jean XXIII
(qui avait succédé à Alexandre V.) fut déposé. C’est ainsi que fut élu
Martin V.
Cependant, Benoît
XIII, réfugié en Aragon, refusa de quitter sa tiare. Il mourut antipape en
1423 et fut remplacé par Clément VIII (à noter que ce dernier abdiqua
de son plein gré, après que le roi d’Aragon Alphonse V se soit rallié
à Martin V.).
b) Persistances
du Grand Schisme (1415 à 1438) : le Grand Schisme, bien qu’ayant pris
fin en 1415, avait été lourd de conséquences. Papes et antipapes
s’excommuniant l’un l’autre, quelle était la valeur des sacrements qu’ils
prodiguaient ? En outre, ces luttes de pouvoir étaient bien loin de
respecter les enseignements du christ. Les ordres mendiants, qui
contestaient la richesse de l’Eglise, recevaient de nombreux soutiens à
travers l’Europe. Enfin, de nombreux prédicateurs ne cessaient que contester
la corruption de l’Eglise, comme Jan Hus en Bohême (ce dernier,
condamné à périr sur le bûcher en 1415, est aujourd’hui considéré comme un
précurseur du protestantisme.).
Cependant, bien
que le Grand Schisme ait prit fin, l’Eglise se retrouva à nouveau plongée
dans la crise, sous le règne du pape Eugène IV, qui avait succédé à
Martin V en 1431.
Eugène IV, par Jean fouquet, gravure
issue de l'ouvrage d'Onofrio Panvinio, Onuphrii Panvinii Veronensis
Fratris Eremitæ Augustiniani XXVII Pontificum maximorum Elogia et imagines
accuratissime ad vivum æneis typis.
Les cardinaux
réunis à Bâle profitèrent alors de l’absence du souverain pontife pour
proclamer la proéminence du concile sur la volonté du pape.
Les cardinaux
prirent alors une série de mesures, qui ne furent guères appréciées par
Eugène IV. Le pape, qui était à cette époque en contact avec l’Eglise
d’Orient, décida alors de transférer le concile de Bâle vers Ferrare, puis
vers Florence (les Byzantins souhaitaient que la réunion se tienne près de
Constantinople, afin d’être plus proches de leur cité, alors menacée par les
Turcs.).
Les cardinaux
restés à Bâle, qui avaient déjà suspendu les pouvoirs du pape en janvier
1438, décidèrent de le déposer en juin, élisant l’antipape, Félix V
(ce dernier ne parvint cependant pas à recueillir les suffrages des
monarques européens, et finit par se soumettre devant Nicolas V, le
successeur d’Eugène IV.).
Félix V faisant allégeance
à Nicolas V, par Martial d'Auvergne, enluminure issue de l'ouvrage
Vigiles de Charles VII, Paris, France, XV°siècle.
A noter que lors
du concile de Florence, réuni en 1439, l’Eglise byzantine proclama l’acte
d’union avec Rome, Constantinople étant désireuse de recevoir l’aide des
Européens contre la menace turque. Cependant, cette union ne dura guère
longtemps.
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