1° Les ascendants d’Œdipe –
A Thèbes régnait alors Labdacos,
père de Laïos. Lorsque le roi vint à mourir, son fils, encore fort
jeune, fut mit sous la tutelle de son grand oncle Lycos.
Laïos, en grandissant, comptait un jour monter sur le trône de Thèbes. Mais
le jeune homme dut fuir, car la ville fut attaquée par les frères jumeaux
Amphion et Zéthos, qui prirent le pouvoir
Fils de Zeus et d’Antiope,
ils furent abandonnés étant enfants sur le mont Cithéron, sur les ordres de
leur oncle Lycos, roi de Thèbes. Là, ils avaient été recueillis par des
bergers.
Amphion, en grandissant, devint un exceptionnel
musicien, au même titre qu’Orphée. Si ce dernier pouvait envoûter les
humains et les animaux grâce à sa musique, Amphion, lui, pouvait déplacer
des pierres.
Zéthos, quant à lui, devint berger, avant de
s’attaquer à Thèbes.
Les deux jumeaux rentrèrent donc dans la ville.
Zéthos poursuivit Lycos qui s’était enfui et le tua ; Amphion, quant à lui,
s’attaqua à Dircé, l’épouse du roi, qui avait maltraité et emprisonné
Antiope, mère des deux jumeaux. Il l’attacha à la queue d’un cheval
indompté, et Dircé fut ainsi mise en pièces.
Par la suite, Amphion bâtit les remparts de
Thèbes grâce à sa lyre ; Zéthos épousa Thébé, qui donna son nom à la
ville.
Laïos, pendant ce temps, s’était
réfugié à la cour de Pélops, en Elide (une région située à l’ouest du
Péloponnèse.). Mais, pris de passion pour Chrysippos, le fils de son
hôte, il l’enleva et s’enfuit. Le jeune homme se suicida peu après (Certains
récits racontent une autre version des faits : Hippodamie, la femme
de Pélops, aurait envoyé ses fils tuer leur demi-frère : Chrysippos étant en
effet le fruit des amours de Pélops et d’une nymphe.). Apollon, indigné, jeta alors une terrible malédiction sur Laïos : s’il
engendrait un fils, ce dernier tuerait son père et épouserait sa mère.
A la mort des jumeaux, Amphion et Zéthos, Laïos
revint à Thèbes et épousa Jocaste. A la suite d’une nuit d’ivresse,
la reine tomba enceinte. Apprenant d’un oracle quelle était la malédiction
d’Apollon, il s’empara de son fils dès sa naissance, ordonnant qu’on lui
perce le pied d’une pointe et qu’on l’abandonne sur le mont Cithéron.
Seulement, le bébé fut retrouvé par un berger
nommé Phorbas.
Oedipe enfant rappelé à la vie par le berger
Phorbas qui l'a détaché de l'arbre, sculpture réalisée par Denis
Antoine CHAUDET, fin XVIII, musée du Louvre.
Ce dernier
décida d’apporter le nouveau né auprès du roi de Corinthe, Polybe.
Lui et sa femme, Mérope, n’avaient pas d’enfants ; ils élevèrent donc
le bébé comme s’il était leur propre fils. Ils le nommèrent Œdipe, ce
qui veut dire ‘pied enflé’.
2° Œdipe et le Sphinx –
Devenu grand, Œdipe se rendit compte qu’il n’était pas le vrai fils de
Polybe, et décida de se rendre à Delphes afin de savoir qui étaient ses
véritables parents.
Apprenant de la bouche des prêtres de Delphes
qu’il tuerait son père et épouserait sa mère, ces derniers le chassèrent de
la ville. Œdipe ne voulant pas faire de mal à ses parents adoptifs, ne
retourna pas à Corinthe, et se dirigea plutôt vers la Béotie. Sur la route
étroite, il rencontra le conducteur d’un char, qui lui ordonna de lui céder
le passage. Il s’agissait en fait de Laïos, qui se rendait à Delphes afin de
connaître la raison de la présence du Sphinx, qui saccageait son
royaume. Laïos, tentant de passer, écrasa le pied d’Œdipe sous une roue de
son char. Ce dernier répliqua en lui enfonçant son javelot dans le ventre
(il tua aussi tous les serviteurs du roi.).
En arrivant à Thèbes, Œdipe fut surpris de voir
dans quel état était plongé la population de la ville. Le roi avait disparu,
et le Sphinx ravageait le pays. Ce monstre ailé, pourvu d’une tête de femme
et d’un corps de lion, fille du chien
Orthos
(certaines sources disent fille de Typhon.) et d’Echidna. Ce
monstre, dont le visage était celui d’une belle femme, et le corps celui
d’un serpent, était déjà mère de nombreuses autres créatures terrifiantes :
l’Hydre de Lerne, le lion de Némée, etc.
La créature avait été envoyée à Athènes par
Héra, afin de venger l’enlèvement de Chrysippos par Laïos. Le Sphinx, assis
sur un mur ou un rocher, proposait à ses victimes inlassablement la même
énigme :
- «Quel être, pourvu d’une seule voix, a
d’abord quatre jambes, puis deux jambes, et trois jambes ensuite ? »
Ceux qui ne pouvaient répondre étaient dévorés.
Créon, frère de Jocaste et régent de Thèbes, dont le Sphinx avait tué
un de ses fils, offrit le royaume et la main de Jocaste à quiconque pourrait
anéantir ce monstre.
Œdipe vint trouver la créature qui lui proposa
son énigme. Le jeune homme donna la bonne réponse :
- « il s’agit de l’homme. De fait, lorsqu’il
est enfant, il a quatre jambes, car il se déplace à quatre pattes ; adulte,
il marche sur deux jambes ; quand il est vieux, il a trois jambes, lorsqu’il
s’appuie sur son bâton. »
Oedipe et le Sphinx,
représentation figurant sur un vase grec du V°
siècle avant Jésus Christ, Altes museum, Berlin.
Oedipe et le Sphinx, enluminure issue de l'ouvrage Roman de Thèbes,
Paris, France, XIV°siècle.
Le Sphinx, rentrant dans une colère noire, se
jeta du haut des rochers (certaines sources disent du haut des murailles de
Thèbes.) et se tua.
Après avoir tué son père sans le savoir, Œdipe
accomplit la seconde partie de la malédiction en épousant sa mère, Jocaste.
3° Les malheurs d’Œdipe –
Œdipe, devenu roi de Thèbes, eut quatre enfants avec Jocaste : deux fils,
Etéocle et Polynice ; ainsi que deux filles, Antigone et Ismène.
Selon Homère, Jocaste ne découvrit la vérité
que bien des années après, et se pendit pour expier son crime. Sophocle
ajoute qu’Œdipe se creva les yeux en prenant conscience de l’inceste duquel
il s’était rendu coupable.
Œdipe resta malgré les évènements sur le trône
de Thèbes, mais il fut plus tard destitué par ses deux fils, Etéocle et
Polynice, qui souhaitaient obtenir le pouvoir.
Tout d'abord enfermé à Thèbes, Œdipe partit
ensuite en exil, errant, accompagné par sa fille Antigone. Ensemble, ils
marchèrent jusqu'au temple de Poséidon à Colonne, en Attique, où Œdipe fut
placé sous la protection de Thésée et mourut.
Oedipe à Colone, par Jean Hugues, 1885, musée
d'Orsay, Paris.
Avant de rendre l’âme, il
lança une malédiction sur ses fils qui se déchiraient : dans leur folle
lutte pour le trône de Thèbes, ils se donneraient mutuellement la mort.
4° La malédiction se poursuit –
Les mythes diffèrent, suite au décès d’Œdipe. En effet, de nombreux
auteurs grecs de l’antiquité relatèrent ces évènements, chacun apportant une
version différente des faits (Sophocle, Euripide, Eschyle, etc.).
Sans rentrer dans les détails, il est
communément admis qu’Antigone, la fille d’Œdipe, rentra à Thèbes suite à la
mort de son père. Elle apprit alors que ses deux frères étaient morts, suite
à une lutte fratricide, et que Créon, son oncle, était de retour au pouvoir.
Polynice contre Etéocle, enluminure issue de l'ouvrage Roman de Thèbes,
Paris, France, XIV°siècle.
Seulement, le roi de Thèbes, suite au décès des
fils d’Œdipe, accorda des funérailles à Etéocle, mais les refusa à Polynice
(selon certaines versions, ce dernier aurait tué Mégarée, un des fils
de Créon.). Antigone, outrée que l’on refuse de rendre à son défunt frère
les hommages qui lui étaient dus, brava l’interdit du roi et offrit à
Polynice un simulacre de culte funèbre.
Elle se fit cependant arrêter par les gardes du roi et fut amenée devant lui.
Antigone, bien qu’elle soit la fiancée d’Hémon,
un des fils de Créon, n’en fut pas moins condamnée à être emmurée vivante.
Puis, pris de remords, le roi voulut faire sortir Antigone de sa prison,
mais cette dernière s’était pendue. Hémon, fou de douleur, se suicida en
s’ouvrant le ventre de son épée ; Eurydicé, sa mère, apprenant la
mort de son fils, se trancha la gorge.
Créon, par la suite, donna la main de sa
fille Mégara au demi dieu Héraclès.
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