Les
sources antiques ne tarissent pas d’éloges sur la dynastie des Antonins, qui
régna de 96 à 192 (il s’agit d’ailleurs de la plus longue dynastie
impériale.).
Les quatre premiers Empereurs de cette dynastie n’ayant pas eu d’héritiers
mâles, ils durent se résoudre à adopter leur successeur. Ainsi, le principe
de filiation disparut pendant un temps, mais en contrepartie, les souverains
s’assurèrent que leurs héritiers seraient des Empereurs compétents.
Sur les six Empereurs s’étant succédés, les cinq premiers furent surnommés
les Cinq bons Empereurs ; le siècle au cours duquel ils ont gouverné
fut appelé siècle des Antonins ou siècle d’or.
En
effet, l’on estime que l’Empire romain connut son apogée au cours du II°
siècle après Jésus Christ.
1° Nerva (96 à 98) – Suite à la mort de Domitien, les
sénateurs décidèrent de nommer Empereur un des leurs, Nerva.
Buste de Nerva.
Ce
dernier (de son vrai nom Marcus Cocceius Nerva.) était né en novembre
30, en Ombrie. Issu d’une famille de sénateurs, le jeune homme décida de
suivre le cursus honorum : il fut questeur et préteur sous Néron
(d’ailleurs, il participa en 65 à la répression de la conjuration de Pison[1].),
puis consul en 71 et 90 (sous Titus et Domitien.). En 93, il tomba en
disgrâce, et s’exila à Tarente.
Nerva était au courant du complot fomenté contre Domitien, mais n’y avait
pas participé. Le soir du crime, il était nommé Empereur par le sénat, qui
prononçait la damnatio memoriae à l’encontre de Domitien (Nerva prit
alors le nom d’Imperator Nerva Caesar Augustus.).
L’on peut néanmoins se demander pourquoi ce fut Nerva qui fut choisi ce jour
là. Ce dernier avait alors plus de 60 ans, était de constitution fragile,
n’avait pas d’expérience militaire, et n’avait jamais gouverné de provinces.
Sans doute s’imaginait t’on que Nerva serait un vieillard facile à
manipuler ?
a)
Le règne de Nerva : Nerva eut un des règnes les plus courts de
l’histoire de Rome, mais cet Empereur n’en fut pas moins un excellent
souverain.
Nerva commença par faire le serment de ne pas faire exécuter de sénateurs,
puis rappela les Romains qui avaient été bannis par Domitien (comme le
philosophe Dion Chrysostome.). En outre, il décida de punir les délateurs,
grâce auxquels Domitien avait pu faire exécuter de nombreux Romains.
Les premières mesures mises en places par le nouvel Empereur furent
favorablement accueillies par les Romains, mais pas par l’armée et la garde
prétorienne (comme nous l’avons vu précédemment, Domitien avait promulgué de
nombreuses lois en leur faveur.). Deux légions se soulevèrent, l’une en
Germanie et l’autre en Pannonie, mais le calme revint bientôt. Quant aux
prétoriens, Nerva leur donna une forte somme d’argent pour acheter leur
loyauté.
Nerva fit en sorte d’assainir les finances de la ville, mises à mal par les
guerres et les travaux de construction de Domitien (il fit néanmoins achever
la construction du futur forum de Nerva.).
Le forum de Nerva.
Pour ce faire, il supprima
un temps les jeux et les distributions de blé gratuites, mais les rétablit
peu après.
Par la suite, l’Empereur décida d’aider les couches les moins favorisées de
la population : dans le domaine agricole, il divisa des grands domaines en
de nombreuses parcelles distribuées aux plébéiens ; il constitua un fonds
afin de subvenir aux funérailles des pauvres ; créa l’institution
alimentaire afin que les enfants des indigents soient nourris aux frais de
l’État ; etc.
b)
L’adoption de Trajan : à l’automne 97, selon les ordres de Nerva,
Casperius Aelianus remplaça Petronius Secondus au poste de préfet du
prétoire.
Cependant, les prétoriens, bien qu’ayant été rétribués par Nerva lors de son
accession au trône, désiraient toujours que les responsables de la mort de
Domitien soient punis. Casperius Aelianus insista auprès de Nerva, qui finit
alors par céder. Les prétoriens assassinèrent alors leur ancien chef,
Petronius Secondus.
Par la suite, ils obligèrent Nerva à faire un discours en public afin qu’il
les remercient de cette initiative.
La
situation dans laquelle se trouvait alors Nerva était dangereuse. En effet,
il était déjà arrivé que des prétoriens mécontents assassinent l’Empereur
(Caligula, Galba, etc.).
En
octobre 97, afin de couper court à toute tentative de coup d’État, Nerva
décida d’adopter Trajan. Ce dernier était un général réputé, et se
trouvait à l’époque à la tête de l’armée du Rhin, en qualité de légat de
Germanie supérieure.
Le
sénat approuva cette décision, et conféra à Trajan le titre de César, l’imperium
et la puissance tribunicienne.
Les prétoriens durent alors s’incliner, sachant qu’ils ne pouvaient
s’opposer aux légions romaines.
Cette même année, Trajan remporta une victoire en Germanie, et prit le
surnom de Germanicus, qu’il partagea avec Nerva (ce dernier se rebaptisa
alors Imperator Nerva Caesar Augustus Germanicus.).
En
janvier 98, Nerva et Trajan prirent conjointement la charge de consul.
Cependant, l’Empereur mourut quelques semaines après.
Nerva fut alors divinisé par le sénat. A sa mort, sa titulature était la
suivante : Imperator Nerva Caesar Augustus Germanicus, Pontifex Maximus,
Tribuniciae Potestatis II, Imperator II, Pater Patriae.
2° Trajan (98 à 117) – Trajan (de son vrai nom Marcus
Ulpius Traianus.) naquit à Italica, en Bétique (une cité qui se trouvait
près de l’actuelle Séville, en Andalousie.) en septembre 53.
Buste de Trajan, vers 100 après Jésus
Christ, musée du Louvre, Paris.
Issu d’une famille de militaires (ses ancêtres s’étaient installés en
Hispanie suite à la seconde guerre punique[2].),
Trajan fut tribun militaire en Syrie, questeur en 78, préteur en 84. Lors de
la tentative d’usurpation de 89, Trajan, à la tête de l’armée d’Hispanie,
fut chargé d’aller mettre fin à l’insurrection[3].
Loyal à Domitien, ce dernier le nomma consul en 91.
Buste à l'effigie
de Marcus Ulpius Trajanus, père de Trajan, vers 110 après Jésus Christ,
musée du Louvre, Paris.
Puis, en 97, Trajan fut nommé légat de Germanie supérieure. C’est alors que
Nerva décida d’en faire son fils adoptif (Trajan prit alors le nom de
Caesar Divi Nervae Filius Nerva Traianus Germanicus.).
En
janvier 98, Nerva mourut, et Trajan monta alors sur le trône (il reçut alors
le nom d’Imperator Caesar Divi Nervae Filius Nerva Traianus Augustus
Germanicus.). Il fut le premier Empereur à ne pas être Italien.
a)
Les guerres sous Trajan : Trajan fut le dernier Empereur à se lancer
dans des guerres de conquêtes. En effet, ses successeurs se contentèrent de
mettre en place des politiques défensives, afin de protéger les possessions
romaines.
L'Empire romain à la fin du règne de
Trajan, en 117 (vous pouvez faire
un "clic droit" sur la carte afin de faire un zoom).
Trajan commença par s’attaquer à la Dacie (le conflit dura de 101 à 102.). A
cette époque, les Romains payaient un tribu aux Daces, afin que ces derniers
ne les attaquent pas (en effet, en 89, les légions romaines avaient du
quitter la Dacie précipitamment à cause de la tentative d’usurpation
organisée en Germanie.).
Décébale, le chef des Daces, fut vaincu à la bataille de Tapae, en 101.
Néanmoins, il conserva son statut de roi client de Rome. Les Daces
s’engagèrent alors à fournir des soldats, des machines de guerre, et à raser
leurs fortifications. Trajan, quant à lui, reçut le titre d’Imperator
Caesar Divi Nervae Filius Nerva Traianus Augustus Germanicus Dacicus.
Cependant, Décébale ne respecta pas ses engagements, et une nouvelle guerre
éclata (de 105 à 106). Les Daces furent vaincus, et Décébale, acculé, décida
de se suicider plutôt que de se rendre. La Dacie devint alors une province
impériale.
A
Rome, l’on éleva la Colonne trajane, commémorant les victoires de
Trajan en Germanie et en Dacie.
La colonne Trajane (à noter que la statue
de Trajan, qui se trouvait à l'origine au sommet de l'édifice, fut remplacée
au XVI° siècle par une statue représentant Saint Pierre.), Rome.
En
105 et 106, Rome intervint aussi en Orient, contre les Nabatéens. Ces
derniers vivaient au nord ouest du Sinaï, et leur cité la plus renommée
était Petra (la fameuse cité troglodyte avait été fondée au I° siècle
avant Jésus Christ.).
Aulus Cornelius Palma Frontonianus, légat de Syrie, fut chargé de
marcher contre les Nabatéens. La guerre fut de courte durée, et se solda par
la victoire des légions romaines.
C’est ainsi que fut créée la province romaine d’Arabie. Une légion placée
dans Bostra, la capitale, s’assura de la protection de la frontière
orientale.
Soldat romain de l'époque de Trajan, II° siècle après Jésus Christ, Neues
museum, Berlin.
Une autre expédition menée par Trajan eut lieu entre 114 et 116, et l’opposa
aux Parthes Arsacides (qui contrôlaient alors la Perse.).
En
110, Axidares, souverain d’Arménie, mourut. Le roi de Perse Arsace
XXIV Pacorus I, son père, décida alors de mettre un autre de ses fils
sur le trône, Parthamasieris. Puis, en 115, Arsace XXIV mourut, et ce
fut un autre de ses fils, Arsace XXV Chosroes, qui monta sur le
trône. Aujourd’hui, l’on ne sait pas exactement quel fut le prétexte
qu’invoquèrent les Romains pour intervenir en Perse, et les premiers mois de
l’expédition de Trajan restent d’ailleurs assez flous.
Dans un premier temps, l’expédition de Trajan fut une réussite. En effet,
les Romains s’emparèrent de l’Arménie et de la Mésopotamie, descendant
jusqu’au golfe persique.
Cependant, les Parthes parvinrent à se réorganiser et se firent plus
menaçants. En 116, Trajan, qui rêvait d’imiter Alexandre le Grand et de
progresser jusqu’à l’Indus, dut mettre un terme à ses ambitions. En outre,
il dut renoncer à son projet d’annexion de la Mésopotamie. Il plaça alors le
frère d’Arsace XXIV Chosroes sur le trône de Perse, qui prit le nom d’Arsace
XXVI Parthamasieris (c’est lui qui avait été nommé roi d’Arménie en
110.).
L’Arménie et la Mésopotamie furent les conquêtes les plus éphémères que
l’Empire romain connut, car elles ne survécurent pas à Trajan (ce dernier,
suite à cette campagne, prit le nom d’Imperator Caesar Divi Nervae Filius
Nerva Traianus Augustus Germanicus Dacicus Parthicus.).
b)
Politique intérieure sous Trajan : Trajan est aujourd’hui considéré
comme le meilleur Empereur que connut Rome (d’ailleurs, les sénateurs lui
accordèrent en 114 le titre d’optimus princeps, ce qui signifie ‘le
meilleur des princes’.).
En
outre, si cet Empereur laissa un agréable souvenir dans les mémoires, l’une
des raisons est que Trajan protégea de nombreux auteurs (Pline le Jeune,
Tacite, Plutarque, Dion Chrysostome, etc.), dont certains firent plus tard
le récit élogieux de sa vie.
Trajan allégea les impôts et refondit les monnaies, les Romains ayant mis la
main sur de nombreuses mines d’or de Dacie ; il mit en place un aide
financière vis-à-vis des familles pauvres de Rome, l’Alimenta (il
s’agissait d’une allocation financée par les intérêts des prêts faits aux
propriétaires terriens.) ; incita les vétérans à fonder des colonies,
favorisant ainsi la romanisation de l’Empire ; et permit aux cités de faire
évoluer leur statut plus facilement[4].
L’Empereur décida de couvrir Rome de monuments prestigieux, comme la
colonne Trajane et le forum de Trajan (construits suite aux
guerres contre les Daces.), les marchés de Trajan, et les thermes
de Trajan. Il érigea aussi l’arc de Bénévent en Italie ; le
kiosque de Trajan à Philae en Égypte ; et fit construire plusieurs
ponts, sur le Danube, le Tigre et le Tage.
Copie en plâtre de la colonne trajane,
Victoria & Albert Museum, Londres.
Les marchés de Trajan (à noter que cet
édifice fut utilisé comme forteresse au cours du Moyen âge.).
Cependant, c’est sous son règne qu’eut lieu la troisième persécution à
l’encontre des chrétiens.
c)
La mort de Trajan : en 117, Trajan mena sa dernière expédition
militaire. Cette fois ci, il s’agissait de mater les juifs d’Orient se
révoltant contre Rome. Cependant, l’Empereur n’eut pas le temps de mener
cette expédition à bien, car il mourut peu de temps après, en août 117,
alors qu’il se trouvait en Cilicie (au sud de l’actuelle Turquie.).
A
sa mort, Trajan fut divinisé par le sénat. Sa titulature était alors la
suivante : Imperator Caesar Divi Nervae Filius Nerva Traianus Optimus
Augustus Germanicus Dacicus Parthicus, Pontifex Maximus, Tribuniciae
Potestatis XXI, Imperator XIII, Consul VI, Pater Patriae.
3° Hadrien (117 à 138) – Hadrien (de son vrai nom
Publius Aelius Hadrianus.) naquit en janvier 76 à Italica, en Bétique
(dans l’actuelle Andalousie.). Les ancêtres d’Hadrien étaient originaires de
la cité d’Hadria, en Italie (c’est de là que provenait leur cognomen.).
Alors qu’il était âgé d’une dizaine d’année, son compatriote Trajan décida
de devenir son tuteur. Hadrien passa son enfance à Athènes, où il se prit de
passion pour l’antiquité grecque.
Une fois adulte, il entreprit le cursus honorum : il fut tribun,
questeur, préteur, légat, puis consul.
Par la suite, Hadrien épousa une petite nièce de l’Empereur, Vibia Sabina.
Ce mariage avait été arrangé par Pompeia Plotina (francisé en
Plotine.), l’épouse de Trajan, afin de faciliter l’accession d’Hadrien
au pouvoir.
Buste de Vibia Sabina, vers 130, Altes
museum, Berlin (à gauche) ; buste de Plotine, 129 après Jésus
Christ, musée du Vatican, Rome (à droite).
Cependant, l’Empereur n’ayant pas eu d’enfants, ce n’est que sur
son lit de mort, en 117, qu’il décida finalement d’adopter Hadrien et d’en
faire son successeur.
Buste d'Hadrien, vers 127 après Jésus
Christ, musée du Louvre, Paris.
Le
nouvel Empereur, qui avait déjà plus de quarante ans, reçut la titulature
suivante : Imperator Caesar Traianus Hadrianus Augustus.
a)
Politique extérieure d’Hadrien : bien que Trajan ait adopté Hadrien
principalement pour sa valeur militaire, ce dernier ne poursuivit pas la
politique de son prédécesseur. A partir d’Hadrien, Rome ne fit plus aucune
conquête, se contentant de protéger et conserver les provinces déjà
conquises. C’est ainsi qu’il abandonna les provinces d’Arménie et de
Mésopotamie, dont Trajan s’était emparé en 116 (il conserva néanmoins la
Dacie et l’Arabie, deux provinces annexées par Rome en 106.).
Hadrien fut le premier à consolider véritablement le limes, désireux
de garantir l’intégrité des frontières de l’Empire. L’Empereur fit
construire de longs murs de protection, le long du Rhin ; des forteresses et
des retranchements, le long du Danube ; ainsi que le mur Hadrien (vallum
hadriani.), en Bretagne, afin de se protéger des attaques des
Calédoniens (qui vivaient dans l’actuelle Ecosse.).
Sesterce à l'effigie d'Hadrien, vers 130, Deutsches historisches museum,
Berlin.
Le
règne d’Hadrien fut agité par une seule guerre, qui eut lieu en Judée. En
132, l’Empereur décida d’ériger un temple dédié à Jupiter à l’emplacement de
l’ancien temple de Jérusalem (détruit en 70 lors de l’expédition de Titus[5].).
Les juifs, outrés, décidèrent alors de se révolter, menés par Simon Bar
Kokhba (‘fils de l’étoile’, en araméen.). Son père Hizkiya étant
considéré comme un descendant de David, de nombreux sages virent Bar Kokhba
comme étant le Messie.
En
132, la Judée s’insurgea, malgré l’opposition d’une partie du clergé (qui
devait sans doute se souvenir de la violence de la conquête romaine de 70.).
Les légions romaines présentes dans cette province furent prises au
dépourvu, et ne surent mettre un terme à cette flambée de violence.
Hadrien répliqua fermement, envoyant douze légions en Judée, soit plus du
tiers de l’armée romaine. Bar Kokhba at ses partisans ne purent rivaliser bien longtemps
contre les Romains, et se retrouvèrent encerclés dans la forteresse de
Betar, au sud ouest de Jérusalem.
Suite à un long siège, la forteresse fut prise par les légions romaines, et
tous les insurgés qui s’y trouvaient furent massacrés (Bar Kokhba y
compris.).
L’Empereur fut sans pitié envers les insurgés : Jérusalem fut rebaptisée
Aelia Capitolina, et devint une colonie romaine interdite aux
juifs (cette situation dura jusqu’au IV° siècle.) ; la province de Judée fut
rebaptisée Palestine (du nom des Philistins, un peuple ennemi
des juifs, disparus à l’époque du roi David.). Outre les milliers de juifs
qui perdirent la vie lors de la guerre, des milliers d’autres quittèrent la
Judée, provocant ainsi la diaspora (dispersion des juifs à travers le
monde.).
En
rentrant à Rome, Hadrien refusa de célébrer son triomphe dans les rues de
Rome.
b)
Réformes administratives sous Hadrien : Hadrien, une fois monté sur
le trône, décida de réformer l’administration et le droit.
Jusqu’à son règne, les ministères étaient entre les mains des affranchis.
L’Empereur décida alors de confier cette tâche à la classe des chevaliers,
qui se rapprochèrent ainsi de l’Etat et du pouvoir.
En
outre, Hadrien réorganisa le consilium principis (le conseil privé
qui assistait l’Empereur.), y faisant rentrer de nombreux jurisconsultes
(ces derniers étaient des patriciens, spécialisés en droit romain.).
Il
fit aussi publier l’Édit perpétuel (Edictum perpetuum praetoris.)
par Salvius Iulianus, une compilation de tous les édits promulgués
par les préteurs. Il s’agissait de la première remise en ordre du corpus
juridique romain.
Buste d'Hadrien, vers 120-130, Neues
museum, Berlin.
c)
Hadrien, un Empereur voyageur : Hadrien passa les deux tiers de son
règne à visiter son Empire, se rendant en Hispanie, Gaule, Bretagne,
Germanie, Grèce, Asie mineure, Syrie, Égypte, Afrique, etc.
Accompagné dans ses déplacements par de nombreux architectes, il fit bâtir
de nombreux monuments dans les provinces qu’il visita. C'est ainsi que fut
achevée la construction du gigantesque temple de Jupiter olympien (à ne pas
confondre avec le temple de Zeus olympien situé à Olympie.), dont les
travaux, débutés sous Pisistrate[6],
étaient restés inachevés pendant près de 700 ans ; furent aussi érigés les
termes d'Hadrien à Leptis
Magna, en Afrique proconsulaire.
Temple de Jupiter olympien, Athènes, août
2011.
Rome ne fut cependant pas en reste, Hadrien y faisant construire le temple
de Vénus et de Rome, le mausolée d’Hadrien (aujourd’hui château Saint
Ange.), le pons aelianus (aujourd’hui pont Saint Ange.), et le
Panthéon[7].
Temple de Vénus et de Rome (érigé vers
137 après Jésus Christ.), Rome.
Maquette du mausolée d'Hadrien (à noter
que nous ne savons pas aujourd'hui à quoi ressemblait le mausolée à
l'origine), musée du château Saint Ange, Rome.
Le château
Saint Ange, Rome, été 2009.
Le Panthéon, Rome (la coupole de
l'édifice resta une des plus grande au monde jusqu'à la fin du XV° siècle.).
A
Tibur (aujourd’hui Tivoli.), Hadrien fit construire le palais Hadrien,
dont il reste encore quelques traces de nos jours. Cette gigantesque
habitation représente une sorte de condensé des souvenirs de voyages de
l’Empereur.
Vues du Palais Hadrien.
d)
Vie privée, succession et mort d’Hadrien : Hadrien, de par son
éducation à Athènes, était passionné par la civilisation grecque. Adoptant
le port de la barbe, qui était encore d’usage en Grèce, il lança bientôt une
mode, reprise par de nombreux Romains.
Outre ses compétences militaires (très vite remarquées par
Trajan.), Hadrien était quelqu'un de très cultivé, doué en mathématiques, chant et
littérature. D’ailleurs, il composa de nombreux vers, en latin ou en grec,
dont nous avons conservé quelques fragments.
Enfin, selon les auteurs antiques, Hadrien était doté d’une excellente
mémoire, pouvant restituer de mémoire le contenu d’un livre qu’il venait de
lire, ou faire plusieurs choses en même temps (comme dicter, écrire et
discuter.).
L’Empereur, dont le mariage avec Vibia Sabina fut infructueux, jeta son
dévolu sur le jeune Antinoos (ce dernier était né en Bithynie vers
110 après Jésus Christ.). Hadrien le rencontra probablement vers 120, lors
de son voyage dans la province d’Asie.
Statue de Vibia Sabina, vers 126 après
Jésus Christ, musée du Louvre, Paris (en 1875, un navire rapportant en
France la tête de la statue sombra suite à un incendie. Ce n'est qu'en 1995
que cet élément, noirci par le feu, fut finalement retrouvée dans la rade de
Toulon. Toutefois, rendue fragile à cause de l'incendie, la tête fut
remplacée sur la statue par une copie en plâtre).
Cependant, Antinoos se noya dans le Nil, en 130. Hadrien, attristé par la
mort de son favori, décida alors d’ériger une ville en son honneur,
Antinoupolis. En 131, Hadrien organisa les Antinoeia, des jeux
réservés aux éphèbes[8],
mêlant épreuves physiques et musicales. Cette cérémonie fut bien accueillie
en Grèce, mais mit plus de temps à s’implanter à Rome. De nos jours, nous
avons retrouvé beaucoup de statues représentant Antinoos, commandées par
l’Empereur.
Buste d'Antinoos d'inspiration
égyptienne.
Hadrien, vieillissant, décida de choisir son successeur, en 136. N’ayant pas
d’enfants, il décida d’adopter Lucius Aelius Verus. Ce dernier, âgé
déjà de 35 ans, était de santé fragile, et n’avait pas l’expérience du
pouvoir.
Statue de Lucius Aelius Verus
,
II° siècle après
Jésus Christ, musée du Louvre, Paris.
La
même année, il fit exécuter Lucius Iulius Ursus Servianus, un
sénateur qui avait été consul à trois reprises. Ce dernier était suspecté de
vouloir mettre son propre fils au pouvoir, Gnaeus Pedanius Fuscus.
Cependant, Aelius Verus mourut en janvier 138, et Hadrien dut trouver un
autre successeur. Son choix se porta alors sur Antonin, qui fut
forcé d’adopter Marc Aurèle, ainsi que Lucius Verus, le fils
du défunt Aelius Verus.
Hadrien, souffrant d’arthrose depuis des années, finit par s’éteindre en
juillet 138. A sa mort, sa titulature était la suivante : Imperator
Caesar Traianus Hadrianus Augustus, Pontifex Maximus, Tribuniciae Potestatis
XXII, Imperator II, Consul III, Pater Patriae.
A
la fin de sa vie, ses rapports avec le sénat étaient devenus exécrables, et
l’Empereur ne fut pas divinisé. Antonin dut contraindre les sénateurs à
effectuer la cérémonie de l’Apothéose[9],
qui finalement eut lieu six mois après la mort d’Hadrien.
Buste d'Hadrien âgé, vers 140 après Jésus
Christ, musée du Louvre, Paris.
4° Antonin le Pieux (138 à 161) – Antonin
(de son vrai nom Titus Aurelius Fulvius Boionus Arrius Antoninus.)
naquit en septembre 86 dans le Latium.
Buste d'Antonin (copie d'après
l'antique), fin du XV° siècle, musée du Louvre, Paris.
Sa famille était cependant originaire
de Nemausus (l’actuelle Nîmes.), en Gaule narbonnaise. L’enfant fut
élevé dans la campagne romaine, surveillé par ses deux grands parents, qui
avaient été consuls à plusieurs reprises.
Antonin perdit son père alors qu’il était enfant, et sa mère, Arria
Fadilla, épousa en secondes noces un ancien consul du nom de Julius
Lupus.
Grâce à la fortune de ses aïeuls, Antonin détenait de grandes propriétés
agricoles. En outre, il faisait des prêts à bas taux aux petits exploitants,
grâce à l’argent que lui rapportaient ses briqueteries[10].
De sa jeunesse, Antonin conserva toujours cet attrait pour la campagne et
son amour pour la vie de famille.
En
112, Antonin épousa Faustine, une nièce de Vibia Sabina (l’épouse
d’Hadrien.), et fille du sénateur Marcus Annius Verus (le grand père
de Marc Aurèle.).
Buste de Faustine, fin du II° siècle
après Jésus Christ, musée du Louvre, Paris.
Issu d’une famille aristocratique, Antonin commença alors le cursus
honorum : il fut successivement questeur, préteur et consul. Hadrien,
qui avait remarqué le jeune homme, décida alors de lui confier la charge de
juge administrateur en Ombrie et en Étrurie. Antonin fut par la suite
proconsul d’Asie.
A
son retour d’Asie, Hadrien accueillit alors Antonin au sein du consilium
principis, le conseil impérial.
En
138, à la mort de Verus, son successeur, Hadrien décida de faire d’Antonin
son héritier (Antonin prit alors le nom d’Imperator Titus Aelius Caesar
Antoninus.). Cependant, l’Empereur obligea son successeur à adopter Marc
Aurèle, ainsi que Lucius Verus, le fils d’Aelius Verus.
Buste de Marc Aurèle enfant, par
Massimiliano SOLDANI BENZI, XVIII° siècle, Bode museum, Berlin (à gauche) ;
Buste de Verus enfant (à droite).
Hadrien mourut en juillet 138, et Antonin monta sur le trône (il prit alors
le nom d’Imperator Caesar Titus Aelius Hadrianus Augustus.), alors
âgé de plus de cinquante ans.
Si
Trajan reçut le titre d’optimusprinceps (‘le meilleur des
princes’.), certains historiens considèrent que c’est sous Antonin que
l’Empire romain connut son apogée.
En
139, soit un an après son accession au pouvoir, Antonin reçut son surnom de
Pius (‘pieux’.). En effet, ce dernier refusa de signer des
condamnations, afin de ne pas inaugurer son règne par un mauvais présage.
a)
Les finances sous Antonin : Antonin fut un très bon Empereur. Il
proscrit les délateurs, et condamna fermement les fonctionnaires provinciaux
soupçonnés de malversations. Par contre, ceux qui s’acquittaient de leur
charge avec honnêteté étaient reconduits dans leurs fonctions pendant
plusieurs années.
Toujours en ce qui concerne les finances de l’Empire, Antonin supprima de
nombreux emplois inutiles, et réduisit considérablement le train de vie de
la cour impériale.
Cet argent ainsi économisé servit à construire de nombreux édifices, ou à
réparer les cités touchées par des catastrophes (tremblements de terre,
incendies, etc.). Il termina ainsi la construction du mausolée d’Hadrien, et
fit ériger le temple d’Antonin et Faustine (en l’honneur de son épouse,
morte en 140.). En outre, il fit restaurer le phare d’Alexandrie, qui avait
été bâti en 280 avant Jésus Christ[11].
Des monuments datant de cette époque ont été retrouvés dans la plupart des
provinces romaines du II° siècle après Jésus Christ.
b)
La législation sous Antonin : Antonin poursuivit l’œuvre législative
de son père adoptif, publiant le Digeste (il s’agit d’un recueil de
lois promulguées par l’Empereur, et préparées en collaboration avec
d’éminents jurisconsultes.). La protection des esclaves fut accrue (le
maître qui tuait son esclave était coupable d’homicide.), et le statut de la
femme évolua (le mari infidèle n’avait plus le droit d’accuser sa femme
d’adultère ; des fondations charitables furent mises en places des jeunes
filles pauvres, les jeunes faustiniennes.), ainsi que celui de
l’enfant (l’adopté recevant obligatoirement au moins une part des biens de
l’adoptant.).
c)
Lettres, religion, jeux : Antonin prit un soin tout particulier à
restaurer la religion romaine. Il fit ainsi en sorte de respecter le culte,
et de remettre la pratique religieuse au goût du jour. Antonin le Pieux fut
ainsi considéré par beaucoup de ses concitoyens comme un nouveau Numa
Pompilius[12].
Vis-à-vis des chrétiens, l’Empereur fut tolérant, et il n’y eut pas de
persécutions sous son règne.
Antonin, qui était un véritable humaniste, favorisa l’essor des lettres.
C’est sous son règne que de nombreux écrivains se firent connaître, comme
Appien, Apulée, Aulu-Gelle, Pausanias, etc.
En
147, il fit célébrer avec faste les jeux séculaires (reprenant la datation
de l’Empereur Claude, qui les avait célébrés en 47 après Jésus Christ.).
d)
Les guerres sous Antonin : bien que l’Empereur adopta la politique
strictement défensive de son père adoptif, Rome dut néanmoins ramener
l’ordre dans certaines provinces (Germanie, Dacie, Numidie, Egypte.).
Antonin parvint en outre à contenir les Parthes, qui avaient des vues sur
l’Empire romain. L’Empereur protégea aussi les cités grecques implantées sur
la côte du Pont Euxin (l’actuelle mer noire.) contre les attaques des
Scythes.
Antonin le Pieux, II° siècle après Jésus
Christ, Petit Palais, Paris.
L’expédition militaire la plus importante eut néanmoins lieu en Bretagne,
menée par Quintus Lollius Urbicus. Ce dernier était un africain
numide romanisé, et avait suivi un cursus honorum plus qu’honorable (tribun
en Germanie, questeur à Rome, légat en Asie, tribun de la plèbe, préteur.).
Remarqué par l’Empereur Hadrien, Lollius Urbicus fut alors nommé légat en
Pannonie, puis participa à la répression de la révolte de Bar Kohkba. Suite
à cette campagne victorieuse, il fut fait consul, gouverneur de Germanie
inférieure, puis gouverneur de Bretagne.
Lollius Urbicus lança alors une expédition contre les Brigantes,
vivant à la frontière séparant la Bretagne de la Calédonie (entre
l’Angleterre et l’Ecosse.).
Cette expédition fut un succès, et les Romains entreprirent la construction
du mur d’Antonin, situé plus au nord que le mur d’Hadrien[13].
e)
Mort d’Antonin : Antonin le Pieux mourut en mars 161, alors qu’il se
trouvait dans une de ses maisons de campagne.
De
son mariage avec Faustine, il avait eu deux fils morts en bas âge, et deux
filles, Aurelia Fadilla et Faustine la Jeune (cette dernière
épousa d’ailleurs Marc Aurèle.). L’Empereur ne s’était pas remarié, mais
avait prit comme concubine Galeria Lysistrata, une affranchie de
Faustine.
N’ayant donc pas d’héritiers mâles, l’Empire échut donc aux deux fils
adoptifs d’Antonin, Marc Aurèle et Lucius Verus.
A
sa mort, la titulature d’Antonin était la suivante : Imperator Caesar
Titus Aelius Hadrianus Antoninus Pius, Pontifex Maximus, Tribuniciae
Potestatis XXIV, Imperator II, Consul IV, Pater Patriae.
Temple d'Antonin et de Faustine, Rome (à
noter que l'édifice a réussi à survivre aux ravages du temps car il fut
converti en église.).
5° Marc Aurèle (161 à 180) – À la mort d’Antonin, ce fut
son fils adoptif Marc Aurèle qui monta sur le trône.
Buste de Marc Aurèle, vers 161 après
Jésus Christ, musée du Louvre, Paris.
De
son vrai nom Marcus Annius Catilius Severus, Marc Aurèle naquit à
Rome en avril 121. Ses ancêtres, originaires de la province Romaine de
Bétique, en Hispanie (l’actuelle Andalousie.), furent des hommes illustres.
Son arrière grand père était de rang prétorien, son grand père avait été
consul et préfet de Rome (il était le père de Faustine, l’épouse de
l’Empereur Antonin.), son père fut préteur.
Cependant, le père de Marc Aurèle mourut jeune, et l’enfant fut donc adopté
et élevé par son grand père (le jeune homme reçut alors le nom de Marcus
Annius Verus.). Elevé à proximité de la cour d’Hadrien, l’Empereur ne
tarda pas à remarquer le caractère de Marc Aurèle.
Hadrien, peu de temps avant sa mort, désigna Lucius Aelius Verus comme son
fils adoptif. Puis l’Empereur fiança Marc Aurèle avec la fille de son
successeur.
Cependant, Aelius Verus mourut avant Hadrien, et ce dernier décida alors
d’adopter Antonin, obligeant néanmoins ce dernier à prendre comme héritiers
Marc Aurèle (qui prit le nom de Marcus Aelius Aurelius Verus.) et
Lucius Verus (le fils d’Aelius Verus.).
Marc Aurèle, alors adolescent, porta un vif intérêt à la philosophie, et
plus particulièrement au stoïcisme[14].
Cet attrait pour cette matière influença Marc Aurèle jusqu’à sa mort.
Par la suite, Marc Aurèle épousa Faustine la Jeune, la fille d’Antonin.
Buste de Faustine la Jeune, vers 160,
Altes museum, Berlin (à noter que le buste et le piédestal ont été réalisés
au XVIII° siècle).
En
147, investi de la puissance tribunicienne, il fut associé à l’Empire par
son père adoptif.
A
la mort d’Antonin, Marc Aurèle devint Empereur, recevant le titre d’Imperator
Caesar Marcus Aurelius Antoninus Augustus. En outre, il associa à
l’Empire son frère adoptif, Lucius Verus.
Lucius Verus, quant à lui, naquit à Rome en décembre 130 (son premier nom
était Lucius Ceionus Commodus.). Il était le fils de Lucius Aelius
Verus, qu’Hadrien avait dans un premier temps désigné comme son successeur.
Cependant, Aelius Verus mourut en janvier 138, et Hadrien dut trouver un
autre successeur. Son choix se porta alors sur Antonin, qui fut alors forcé
d’adopter Lucius Verus (qui fut alors baptisé Lucius Aelius Aurelius
Commodus.) et Marc Aurèle.
Buste de Lucius Verus.
Lorsqu’Antonin mourut, l’Empire échut à Marc Aurèle. Néanmoins, le nouvel
Empereur partagea son trône avec son frère adoptif, qui reçut alors le nom
d’Imperator Caesar Lucius Aurelius Verus Augustus.
a)
Politique intérieure sous Marc Aurèle : Marc Aurèle et son frère
passèrent le plus clair de leur temps à tenter de protéger l’Empire des
invasions. Il est pour cela difficile de porter un jugement objectif sur le
règne de ces souverains, d’autant plus que les sources concernant cette
période sont lacunaires.
Marc Aurèle fonda des établissements éducatifs et alimentaires (les
puella Faustinianae.), à destination des jeunes filles pauvres. En
outre, il annula les dettes envers le trésor impérial.
Cependant, un des faits marquants du règne de Marc
Aurèle fut la persécution contre les chrétiens (c’est sous son règne que
furent martyrisés Blandine et l’évêque Pothin.). En effet, l’Empereur
n’acceptait pas l’attachement que les chrétiens avaient pour le Christ,
considérant qu’ils étaient une menace pour la cohésion de l’Empire.
Respectueux à l’égard du sénat, les Romains eurent
néanmoins du mal à cerner Marc Aurèle, Empereur philosophe. En effet, lors
des jeux du cirque, ce dernier lisait ou donnait des audiences, et
n’appréciait pas de voir le sang couler (par exemple, il n’assista pas aux
persécutions contre les chrétiens.).
Cependant, la philosophie de Marc Aurèle lui fut
d’un faible secours sur le champ de bataille.
b)
La guerre contre les Parthes (161 à 166) : C’est à partir du règne de
Marc Aurèle que l’Empire commença à être attaqué par des ennemis de plus en
plus nombreux et de plus en plus vindicatifs.
En
161, les Parthes, menés par le roi Arsace XXVIII Vologes III,
envahirent la province romaine de Syrie, écrasant les troupes du légat
Caius Sedatius Severianus. Lucius Verus se rendit alors dans cette
province, afin d’en découdre avec les envahisseurs (il emmena avec lui une
partie de l’armée du Rhin.).
Cependant, l’Empereur préférant profiter des beautés de l’Orient, décida de
laisser la direction des opérations à deux de ses généraux, Statius
Priscus et Caius Avidius Cassius.
Statius Priscus avait commencé sa carrière sous Hadrien, lors de la
répression de la révolte de Bar Kokhba, en 132[15].
Par la suite, il mena d’autres opérations militaires en Mésie et en Dacie,
avant d’être nommé gouverneur de Cappadoce.
Les opérations furent un franc succès : en 165, alors que Statius Priscus
prenait Artaxata et restaurait Sohaemus, un protégé de Rome, sur le
trône d’Arménie, son confrère Avidius Cassius battait les Parthes, et
s’emparait de Séleucie du Tigre et de Ctésiphon (la capitale du royaume.).
Arsace XXVIII Vologes III dut alors négocier avec les Romains en 166, leur
cédant la Mésopotamie.
En
166, les deux Empereurs célébrèrent leur triomphe à Rome. Marc Aurèle prit
alors le nom d’Imperator Caesar Marcus Aurelius Antoninus Augustus
Armeniacus Medicus Parthicus Maximus, et Lucius Verus se baptisa
Imperator Caesar Lucius Aurelius Verus Augustus Armeniacus Parthicus Maximus
Medicus (en outre ce dernier épousa Annia Lucilla, la fille de
Marc Aurèle.).
Buste d'Annia Lucilla.
Cependant, lorsque les armées d’Orient rentrèrent en Italie, elles amenèrent
avec elle la terrible peste antonine, qui frappa le pays entre 165 et
190[16].
c)
La guerre contre les barbares du Danube (166 à 180) : cependant, à
peine la guerre contre les Parthes était elle terminée qu’une nouvelle
menace apparut, cette fois ci sur la frontière du Danube. En effet, en 166,
de nombreuses tribus barbares (principalement Marcomans et Quades,
mais aussi Alains et Sarmates.) décidèrent de passer la
frontière. Ils envahirent alors la Pannonie, puis pénétrèrent en Italie.
En
167, les deux Empereurs décidèrent alors de marcher contre les barbares.
Concentrant leur attaque sur les Alpes, ils parvinrent à obtenir le retrait
des Quades en 168.
Les deux Empereurs passèrent alors l’hiver à Aquilée, une cité située sur la
côte adriatique. C’est alors que Lucius Verus mourut en janvier 169,
affaibli par sa vie de débauches et frappé par la peste. Marc Aurèle
regretta peu son frère adoptif, qui menait une vie dissolue et avec lequel
il devait partager le pouvoir, mais le fit néanmoins déifier par le sénat (à
sa mort, sa titulature était alors la suivante : Imperator Caesar Lucius
Aurelius Verus Augustus Armeniacus Parthicus Maximus Medicus, Tribuniciae
Potestatis IX, Imperator V, Consul III, Pater Patriae.).
La
guerre contre les barbares était cependant loin d’être terminée.
Les Marcomans n’avaient pas abandonné la lutte, et les Romains partirent se
battre sur les rives du Danube. Marc Aurèle concentra dans cette zone la
moitié des légions de l’Empire, en créa deux nouvelles, et recruta de
nombreux soldats (gladiateurs, esclaves, etc.). Afin de mener cette guerre à
bien, l’Empereur s’appuya sur deux proches, Tiberius Claudius Pompeianus
et Publius Helvius Pertinax.
Le
premier était un chevalier originaire de Syrie. Faisant preuve de sa
bravoure au combat, il avait rapidement gravi les échelons, et Marc Aurèle
lui accorda la main de sa fille, veuve de Lucius Verus. Pertinax, quant à
lui, était né à Albe, d’origine modeste (son père était un ancien
affranchi.). Professeur de grammaire, il décida de changer de métier et
s’engagea dans l’armée. Par la suite, il se distingua lors de l’expédition
contre les Parthes, ainsi qu’en Bretagne et sur le Danube. Il fut par la
suite procurateur en Dacie et en Italie. Lors de la guerre contre les
barbares, il fut appelé par Claudius Pompeianus.
Alors que Marc Aurèle combattait en Pannonie, Pertinax chassait les
envahisseurs de Rhétie et de Norique.
Vers 175, les Romains avaient pris l’avantage sur leurs ennemis quand éclata
la révolte d’Avidius Cassius en Asie (victorieux, Marc Aurèle prit le nom d’Imperator
Caesar Marcus Aurelius Antoninus Augustus Armeniacus Medicus Parthicus
Maximus Germanicus Sarmaticus.).
Colonne de Marc Aurèle, Rome (cette œuvre
commémore la victoire de l'Empereur sur les Germains.).
d)
La révolte d’Avidius Cassius (175) : en 175, le général Avidius Cassius,
qui avait brillamment servi Marc Aurèle au cours de la guerre contre les
Parthes, décida de profiter de la rumeur de la mort de Marc Aurèle pour se
révolter (cependant, l’on ne sait pas aujourd’hui si Avidius crut
honnêtement à cette rumeur, ou bien si cette dernière ne fut pour lui qu’un
prétexte.).
Soutenu par les légions d’Egypte et une bonne partie de l’Orient, Avidius
Cassius fut néanmoins contré par Martius Verus, gouverneur de
Cappadoce, qui décida de marcher contre lui. Cependant, Avidius Cassius fut
rapidement assassiné, en juillet 175. Ses assassins envoyèrent alors sa tête
à Marc Aurèle, qui refusa de la voir et demanda à ce qu’elle soit enterrée.
Marc Aurèle décida alors de se rendre en Orient, soucieux de mettre à mal la
rumeur comme quoi il était décédé. L’Empereur était alors accompagné de son
fils Commode et de son épouse Faustine, qui mourut en chemin.
Buste de Commode enfant.
Il
traversa la Cilicie, la Syrie, l’Égypte et la Grèce. A Athènes, Marc Aurèle
et son fils furent initiés aux mystères d’Éleusis. En outre, l’Empereur y
rencontra de nombreux philosophes.
En
rentrant à Rome, en novembre 176, Marc Aurèle fit célébrer son triomphe pour
sa victoire sur les tribus barbares du Danube. Cependant, cette victoire fut
de courte durée, car les barbares franchirent à nouveau le Danube en 177.
Statue équestre de Marc Aurèle, Rome (il
semblerait que la survie de cette œuvre soit due au fait qu'elle fut
confondue avec une statue de Constantin, premier Empereur chrétien.).
e)
La fin de règne (177 à 180) : Marc Aurèle continua à lutter contre
les Barbares jusqu’à sa mort, en 180. Il mourut probablement frappé par la
peste, à Vindobona, en Pannonie (aujourd’hui Vienne, en Autriche.).
Marc Aurèle, contrairement à ses prédécesseurs, avait eu de nombreux enfants
de son épouse Faustine, bien que ses fils moururent presque tous en bas âge.
Il désigna donc comme successeur celui qui était encore vivant, Commode (qui
était alors âgé d’une vingtaine d’années.).
A
sa mort, Marc Aurèle reçut la titulature suivante : d’Imperator Caesar
Marcus Aurelius Antoninus Augustus Armeniacus Medicus Parthicus Maximus
Germanicus Sarmaticus, Tribuniciae Potestatis XXIV, Imperator X, Consul III,
Pater Patriae.
Marc Aurèle laissa de lui un ouvrage, véritable condensé de sa philosophie
stoïcienne : Pensées pour moi-même. Ces textes, que l’Empereur
écrivait chaque soir lors de ses campagnes contre les barbares, nous sont
parvenus en intégralité.
6° Commode (180 à 192) – Commode (de son vrai nom
Lucius Aurelius Commodus.) naquit en août 161. Il était de fait fils
unique, sachant que son jumeau Antoninus Geminus, ainsi que son frère
cadet étaient morts en bas âge.
Buste d'Antoninus Geminus,
vers 170 après Jésus Christ (à gauche) ; buste de Commode, vers 178 après
Jésus Christ (à droite), musée du Louvre, Paris.
Certaines sources affirment que Commode n’aurait pas été le fils de Marc
Aurèle, mais qu’il aurait été le fruit de l’union entre l’impératrice
Faustine et un gladiateur. Les infidélités de l’épouse de Marc Aurèle
n’étaient un secret pour personne, mais la thèse affirmant que Commode ne
serait pas son fils semble néanmoins peu crédible (quoi qu’il en soit elle
est aujourd’hui invérifiable.).
En
166 déjà, suite à la guerre contre les Parthes, Marc Aurèle avait associé
son fils au pouvoir (Commode prit alors le nom de Lucius Aurelius
Commodus Caesar.). Puis, suite à la guerre contre les barbares du Danube
(où le jeune homme avait prit les surnoms de Germanicus et Sarmaticus.), il
fut associé à l’Empire, en 177 (Commode prit alors le nom d’Imperator
Caesar Lucius Aurelius Commodus Augustus Germanicus Sarmaticus.).
Quoi qu’il en soit, c’est avec l’arrivée de Commode au pouvoir (ce dernier
prit à cette occasion le nom d’Imperator Caesar Aurelius Commodus
Augustus Germanicus Sarmaticus.), en 180, que se clôt l’ère des Cinq
bons Empereurs (Nerva, Trajan, Hadrien, Antonin et Marc Aurèle.).
Buste à l'effigie de Commode, vers 196
après Jésus Christ, musée du Louvre, Paris.
Commode inaugura son règne en traitant avec les barbares, et fit la paix en
livrant les places fortes romaines à ses ennemis. L’Empereur, grisé par le
pouvoir, comme Caligula l’avait été avant lui, laissa l’Empire entre les
mains de Perennis, le préfet du prétoire. Assassiné par ses soldats,
ce fut un affranchi, Cléandre, qui occupa ce poste à partir de 185.
En
outre, en 183, il répudia son épouse, Bruttia Crispina, sous prétexte
d’adultère, l’exila et la fit assassiner.
Buste de Bruttia Crispina, vers 180,
Altes museum, Berlin.
Néanmoins, Commode, s’il s’attira rapidement les foudres du sénat, sut
s’appuyer sur l’armée et le peuple. L’Empereur mit en place nombre de
mesures purement démagogiques (donations, distributions gratuites de blé,
lynchage par la foule du préfet du prétoire Cléandre lors de la disette de
189, etc.).
Ce
qui est cependant resté dans les mémoires, ce sont ces spectaculaires jeux
que donna l’Empereur, au cours de son règne. Les sources racontent que les
combats étaient parfois si nombreux que le sable du Colisée était gorgé de
sang.
Spectateurs sur les gradins du Colisée,
musée du Colisée, Rome.
Commode, quant à lui, fasciné par la perfection physique, descendit dans
l’arène de nombreuses fois. Il y affronta des animaux sauvages (gazelles,
fauves, éléphants, etc.), ainsi que de nombreux gladiateurs. Il aimait aussi
rejouer des grandes scènes de la mythologie, déguisant des handicapés en
dragons ou en géants (qu’il tuait sous les yeux des Romains.). Les sources
affirment que Commode, invaincu, aurait remporté plus de 1 000 victoires
dans l’arène.
Ce
dernier se fit alors ériger de nombreuses statues le représentant en costume
d’Hercule.
Commode Hercule (copie d'après l'antique),
par Nicolas COUSTOU, 1683, musée du Louvre, Paris.
Il
ne persécuta cependant pas les chrétiens, sans doute grâce à l’influence de
Marcia, sa favorite.
Empereur mégalomane, Commode décida de renommer les institutions et les mois
du calendrier en son nom. Il décida en outre de renommer Rome, la capitale
de l’Empire, en Colonia Lucia Annia Commodiana (Colonie
Commodienne en français.).
La
folie de l’Empereur entraîna un certain nombre de complots, dont beaucoup
échouèrent (l’un d’entre eux impliqua en 182 Annia Lucilla, la propre sœur
de Commode, ainsi que de nombreux sénateurs. Les conspirateurs furent alors
tous exécutés.).
Finalement, en décembre 192, Marcia, la favorite de Commode, parvint
à l’empoisonner. Cependant, comme l’effet était trop lent, ce fut un esclave
nommé Narcisse (avec lequel l’Empereur s’entraînait au combat.) qui
l’étrangla dans son bain.
Commode ne fut pas divinisé à sa mort[17].
En outre, il reçut la damnatio memoriae, comme Néron et Domitien
avant lui.
La
titulature de Commode, quant à elle, reflète bien la mégalomanie du
personnage. Entre 182 et 185, il ajouta successivement les surnoms Pius,
Germanicus Maximus, Britannicus et Felix à sa titulature (il se nommait
alors Imperator Caesar Marcus Aurelius Commodus Augustus Pius Felix
Sarmaticus Germanicus Maximus Britannicus.). En 191, il décida de
changer de nom, se baptisant désormais Imperator Caesar Lucius Aelius
Aurelius Commodus Augustus Pius Felix Sarmaticus Germanicus Maximus
Britannicus.
A
sa mort, en 192, sa titulature était Imperator Caesar Lucius Aelius
Aurelius Commodus Augustus Pius Felix Sarmaticus Germanicus Maximus
Britannicus, Hercules Romanus, Pontifex Maximus, Tribuniciae Potestatis
XVIII, Imperator VIII, Consul VII, Pater Patriae.
Suite à la mort de Commode, l’Empire romain devint le jouet de l’ambition de
quelques généraux, désireux de s’emparer du pouvoir.
[1]
Pour en savoir plus sur la conjuration de Pison, voir le b), 4,
section II, chapitre quatrième, histoire de la Rome antique.
[2]
Pour en savoir plus sur la seconde guerre punique, voir le 6,
section II, chapitre troisième, histoire de la Rome antique.
[3]
Pour en savoir plus sur l’usurpation de 89, reportez vous au c),
section III, chapitre quatrième, histoire de la Rome antique.
[4]
Pour en savoir plus sur l’évolution du statut des cités, voir la
section V, chapitre deuxième, histoire de la Rome antique.
[5]
Pour en savoir plus sur l’expédition de Titus en Judée, voir le 2,
section IV, chapitre quatrième, histoire de la Rome antique.
[6]
Pour en savoir plus sur le tyran Pisistrate, voir le 3, section II,
chapitre deuxième, histoire de la Grèce antique.
[7]
Ce monument avait été érigé par Agrippa, le compagnon d’Auguste, en
27 avant Jésus Christ. Gravement endommagé par l’incendie de 80,
Domitien l’avait fait restaurer. Cependant, il fut à nouveau détruit
par un nouvel incendie, en 110. Hadrien fit donc construire un
nouveau Panthéon sur les ruines de l’ancien.
[8]
On appelait éphèbes les adolescents qui venaient de quitter
l’enfance, mais n’étaient pas encore rentrés dans le monde des
adultes.,
[9]
L’Apothéose était la cérémonie au cours de laquelle le défunt était
divinisé.
[10]
Les briqueteries étaient des industries où l’on fabriquait des
briques.
[11]
Pour en savoir plus, voir le dossier Les sept merveilles du monde,
dans lequel une page est consacrée au phare d’Alexandrie.
[12]
Pour en savoir plus sur Numa Pompilius, le second roi de Rome, voir
le au 2, section III, chapitre premier, histoire de la Rome
antique.
[13]
Le mur d’Antonin étant cependant moins solide que le mur Hadrien, il
fut progressivement abandonné au cours des siècles suivants.
[14]
La théorie des stoïciens était que l’être humain devait vivre en
harmonie avec la nature et la raison afin de pouvoir atteindre la
sagesse et le bonheur (c’est de cette philosophie que provient le
mot stoïque, désignant une personne affrontant avec courage et
indifférence les difficultés de l’existence.).
[15]
Pour en savoir plus sur la révolte de Bar Kokhba, voir le a), 3,
section V, chapitre quatrième, histoire de la Rome antique.
[16]
On qualifie cette maladie de peste, mais il s’agissait sans doute
d’une épidémie de variole.
[17]
Il fut néanmoins divinisé quelques années plus tard à l’instigation
de Septime Sévère.