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La seconde république (1848 - 1852)

CHAPITRE CINQUIEME : Louis Napoléon Bonaparte président de la seconde république (décembre 1848 à décembre 1852)

 

IV : Le coup d’Etat du 2 décembre 1851

           

            1° Nuit du 1° au 2 décembre 1851 – Au soir du 1er décembre 1851, Bonaparte convoqua Morny, son demi-frère ; le général de Saint Arnaud, ministre de la Guerre ; et Charlemagne Émile de Maupas, préfet de Paris.

Charlemagne de Maupas, préfet de Paris.

Il leur présenta alors son projet de coup d’Etat, une opération nommée Rubicon. Les conspirateurs n’avaient pas le droit à l’échec ; s’ils échouaient, ils seraient fusillés par leurs ennemis.

 

Ainsi, dans la nuit du 1er au 2 décembre, des centaines d’affiches furent placardées sur tous les murs de Paris. Le président de la république y proclamait la dissolution de l’assemblée, le rétablissement du suffrage universel, la mise en place de nouvelles élections législatives, et la ratification du coup d’Etat par plébiscite.

La proclamation du 2 décembre 1851.

Plus tard, à l’aube, la police arrêta 18 députés et une soixantaine de meneurs capables de prendre la tête d’un soulèvement.

L'arrestation des meneurs et députés, à l'aube du 2 décembre 1851.

Les prévenus, surpris en plein sommeil, tentèrent d’haranguer la troupe, mais, simplement vêtus d’une chemise de nuit et d’un bonnet de coton, ils ne provoquèrent que l’hilarité des forces de l’ordre.

 

            2° Le 2 décembre 1851 – Malgré la présence de l’armée dans les rues de la capitale, la grande majorité des Parisiens ne s’offusquèrent pas au petit matin de constater la prise de pouvoir du président de la république. Ainsi, même s’ils n’étaient pas de fervents partisans de Bonaparte, les Parisiens n’aimaient guère cette république liberticide, qui avait censuré la presse, limité le droit de vote, et maté dans le sang l’insurrection de juin 1848.

Les Parisiens apprennent le coup d'Etat de Bonaparte, au matin du 2 décembre 1851.

 

L’armée ayant occupé les points stratégiques de la capitale (Invalides, Champs Elysées, Hôtel de ville, l’île de la Cité, etc.), Bonaparte et ses proches décidèrent alors de quitter le palais de l’Elysée afin de constater les résultats du coup d’Etat.

Au final, si les cris de ralliement n’étaient pas aussi nombreux qu’espérés, la vie parisienne reprenait son cours. Ainsi, les boutiques ouvraient leurs devantures, les omnibus roulaient, et les habitants de la capitale vaquaient à leurs occupations.

 

Finalement, dans cette matinée du 2 décembre 1851, seuls les députés restaient actifs.

Si une poignée d’entre eux avaient été arrêtés dans la nuit, 220 parlementaires avaient décidé de se réunir dans la mairie du 10° arrondissement (le Palais Bourbon, siège de l’assemblée, étant alors occupée par l’armée.).

Les députés (en majorité membres du parti de l’ordre.) proclamèrent alors la déchéance de Louis Napoléon Bonaparte, ce dernier étant accusé d’avoir violé la constitution en prononçant la dissolution de l’assemblée[1].

Toutefois, les forces de l’ordre arrivèrent bientôt à la mairie du 10° arrondissement, et les parlementaires furent tous arrêtés et incarcérés.

L'arrestation des députés réfugiés dans la mairie du 10° arrondissement, le 2 décembre 1851.

 

Dans la soirée du 2 décembre, quelques manifestants défilèrent de la Bastille à la porte Saint Denis, ce qui entraîna de nombreuses arrestations.

 

            3° Le 3 décembre 1851 – Si l’opposition avait été pris de cours le 2 décembre, elle tenta de se rattraper dans la journée du 3. Ainsi, une dizaine de députés de gauche, quelques journalistes et une poignée d’ouvriers décidèrent d’ériger deux barricades dans la rue du faubourg Saint Antoine.

Mais les émeutiers, mal équipés, furent rapidement chassés par les forces de l’ordre.

 

Dans la journée, d’autres barricades s’érigèrent entre l’Hôtel de ville et les boulevards. Rue Beaubourg, où la situation était plus grave, une centaine d’émeutiers réfugiés derrière les pavés furent pris à revers par les forces de l’ordre et fusillés sur place.

 

            4° Le 4 décembre 1851 – Au petit matin du 4 décembre, Bonaparte et ses proches pouvaient constater que le nombre d’insurgés était bien inférieur par rapport aux révolutions de 1830 ou de 1848.

 

Toutefois, le quartier de Montmartre était hérissé de 77 barricades, dont une bonne partie avait poussée pendant la nuit. L’artillerie tira à boulets et à obus, ce qui causa d’importantes pertes dans les rangs des rebelles.

Une charge à la baïonnette acheva de briser la résistance ennemie. Une fois de plus, les hommes pris les armes à la main ou les mains noires de poudre, furent fusillés sur place.

 

Dans l’après midi du 4 décembre, l’émeute était matée. Toutefois, se joua vers 15 heures de l’après midi un drame sanglant que Bonaparte regretta jusqu’à la fin de ses jours.

Ainsi, alors que la foule des curieux assistaient au défilé des forces armées sur le boulevard de la Madeleine, un coup de feu claqua, parti d’on ne sait où.

Instinctivement, les soldats firent face au trottoir, et fusillèrent les passants qui se trouvaient là.

Affiche publicitaire illustrant le roman Histoire d'un crime, publié par Victor Hugo, relatant les évènements de décembre 1851, 1878, musée de Montmartre, Paris.

 

            5° L’insurrection s’étend sporadiquement en province (mi-décembre 1851) – Le 5 décembre 1851, les troupes circulaient encore dans Paris, mais ces dernières ne rencontrèrent plus d’opposition.

Toutefois, si Louis Napoléon Bonaparte était désormais maître de la capitale, certaines villes de province s’insurgèrent à l’annonce du coup d’Etat (Marseille, Bordeaux, Toulouse ou Dijon.). Les cités du nord de la France, au contraire, ne réagirent pas.

 

Finalement, ce furent les villes du sud-est qui réprouvèrent le plus la chute de la république, et certains conseils municipaux proclamèrent la déchéance de Louis Napoléon Bonaparte. Digne, seule ville de France ou la garnison capitula face à l’insurrection républicaine, fut rapidement matée par l’armée.

La répression, jusqu’à la fin décembre, s’abattit ensuite sur les Basses-Alpes[2], le Var, la Drôme, et même jusqu’à l’Hérault ou Béziers s’était révoltée.

 

            6° Bilan du coup d’Etat – A Paris, les combats de décembre 1851 firent près de 400 victimes civiles. Toutefois, si l’on y retrouvait deux tiers d’ouvriers, l’on y retrouvait aussi une centaine d’innocents, principalement fauchés par erreur le 4 décembre après midi.

Du côté de l’armée, par contre, l’on ne comptait qu’une trentaine de décès pour environ 180 blessés.

 

En province, par contre, plus de 25 000 personnes furent arrêtées (principalement originaires du sud-est.). Ainsi, 15 000 d’entre elles furent punies de peines de prison, 9 500 furent condamnées à la déportation en Algérie, et environ 200 furent incarcérées au bagne de Cayenne.

Toutefois, Bonaparte décida de faire jouer la grâce présidentielle, bouleversé par la centaine d’innocents tués lors des journées de décembre. Ainsi, plusieurs milliers d’insurgés furent amnistiés par le président de la république.

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[1] Rappelons que, contrairement à la V° république où le président à le droit de dissoudre l’assemblée, le chef de l’Etat de la II° république ne possédait pas ce pouvoir.

[2] Le département des Basses-Alpes fut rebaptisé Alpes de Haute Provence en 1970, cette nouvelle appellation étant jugée plus touristique.

 
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