1° Nuit du 1° au 2 décembre 1851 –
Au soir du 1er décembre 1851, Bonaparte convoqua Morny, son
demi-frère ; le général de Saint Arnaud, ministre de la Guerre ; et
Charlemagne Émile de Maupas, préfet de Paris.
Charlemagne de Maupas, préfet de Paris.
Il
leur présenta alors son projet de coup d’Etat, une opération nommée
Rubicon. Les conspirateurs n’avaient pas le droit à l’échec ; s’ils
échouaient, ils seraient fusillés par leurs ennemis.
Ainsi, dans la nuit du 1er au 2 décembre, des centaines
d’affiches furent placardées sur tous les murs de Paris. Le président de la
république y proclamait la dissolution de l’assemblée, le rétablissement du
suffrage universel, la mise en place de nouvelles élections législatives, et
la ratification du coup d’Etat par plébiscite.
La proclamation du 2 décembre 1851.
Plus tard, à l’aube, la police arrêta 18 députés et une soixantaine de
meneurs capables de prendre la tête d’un soulèvement.
L'arrestation des meneurs et députés, à l'aube du 2 décembre 1851.
Les prévenus, surpris en plein sommeil, tentèrent d’haranguer la troupe,
mais, simplement vêtus d’une chemise de nuit et d’un bonnet de coton, ils ne
provoquèrent que l’hilarité des forces de l’ordre.
2° Le 2 décembre 1851 – Malgré la présence de l’armée
dans les rues de la capitale, la grande majorité des Parisiens ne
s’offusquèrent pas au petit matin de constater la prise de pouvoir du
président de la république. Ainsi, même s’ils n’étaient pas de fervents partisans de
Bonaparte, les Parisiens n’aimaient guère cette république liberticide, qui
avait censuré la presse, limité le droit de vote, et maté dans le sang
l’insurrection de juin 1848.
Les Parisiens apprennent le coup d'Etat
de Bonaparte, au matin du 2 décembre 1851.
L’armée ayant occupé les points stratégiques de la capitale (Invalides,
Champs Elysées, Hôtel de ville, l’île de la Cité, etc.), Bonaparte et ses
proches décidèrent alors de quitter le palais de l’Elysée afin de constater
les résultats du coup d’Etat.
Au
final, si les cris de ralliement n’étaient pas aussi nombreux qu’espérés, la
vie parisienne reprenait son cours. Ainsi, les boutiques ouvraient leurs
devantures, les omnibus roulaient, et les habitants de la capitale vaquaient
à leurs occupations.
Finalement, dans cette matinée du 2 décembre 1851, seuls les députés
restaient actifs.
Si
une poignée d’entre eux avaient été arrêtés dans la nuit, 220 parlementaires
avaient décidé de se réunir dans la mairie du 10° arrondissement (le Palais
Bourbon, siège de l’assemblée, étant alors occupée par l’armée.).
Les députés (en majorité membres du parti de l’ordre.) proclamèrent alors la
déchéance de Louis Napoléon Bonaparte, ce dernier étant accusé d’avoir violé
la constitution en prononçant la dissolution de l’assemblée.
Toutefois, les forces de l’ordre arrivèrent bientôt à la mairie du 10°
arrondissement, et les parlementaires furent tous arrêtés et incarcérés.
L'arrestation des députés réfugiés dans la mairie du 10° arrondissement,
le 2 décembre 1851.
Dans la soirée du 2 décembre, quelques manifestants défilèrent de la
Bastille à la porte Saint Denis, ce qui entraîna de nombreuses arrestations.
3° Le 3 décembre 1851 – Si l’opposition avait été pris de
cours le 2 décembre, elle tenta de se rattraper dans la journée du 3. Ainsi,
une dizaine de députés de gauche, quelques journalistes et une poignée
d’ouvriers décidèrent d’ériger deux barricades dans la rue du faubourg Saint
Antoine.
Mais les émeutiers, mal équipés, furent rapidement chassés par les forces de
l’ordre.
Dans la journée, d’autres barricades s’érigèrent entre l’Hôtel de ville et
les boulevards. Rue Beaubourg, où la situation était plus grave, une
centaine d’émeutiers réfugiés derrière les pavés furent pris à revers par
les forces de l’ordre et fusillés sur place.
4° Le 4 décembre 1851 – Au petit matin du 4 décembre,
Bonaparte et ses proches pouvaient constater que le nombre d’insurgés était
bien inférieur par rapport aux révolutions de 1830 ou de 1848.
Toutefois, le quartier de Montmartre était hérissé de 77 barricades, dont
une bonne partie avait poussée pendant la nuit. L’artillerie tira à boulets
et à obus, ce qui causa d’importantes pertes dans les rangs des rebelles.
Une charge à la baïonnette acheva de briser la résistance ennemie. Une fois
de plus, les hommes pris les armes à la main ou les mains noires de poudre,
furent fusillés sur place.
Dans l’après midi du 4 décembre, l’émeute était matée. Toutefois, se joua
vers 15 heures de l’après midi un drame sanglant que Bonaparte regretta
jusqu’à la fin de ses jours.
Ainsi, alors que la foule des curieux assistaient au défilé des forces
armées sur le boulevard de la Madeleine, un coup de feu claqua, parti d’on
ne sait où.
Instinctivement, les soldats firent face au trottoir, et fusillèrent les
passants qui se trouvaient là.
Affiche publicitaire illustrant le roman
Histoire d'un crime, publié par Victor Hugo, relatant les évènements de
décembre 1851, 1878, musée de Montmartre, Paris.
5° L’insurrection s’étend sporadiquement en province
(mi-décembre 1851) – Le 5 décembre 1851, les troupes circulaient encore
dans Paris, mais ces dernières ne rencontrèrent plus d’opposition.
Toutefois, si Louis Napoléon Bonaparte était désormais maître de la
capitale, certaines villes de province s’insurgèrent à l’annonce du coup
d’Etat (Marseille, Bordeaux, Toulouse ou Dijon.). Les cités du nord de la
France, au contraire, ne réagirent pas.
Finalement, ce furent les villes du sud-est qui réprouvèrent le plus la
chute de la république, et certains conseils municipaux proclamèrent la
déchéance de Louis Napoléon Bonaparte. Digne, seule ville de France ou la
garnison capitula face à l’insurrection républicaine, fut rapidement matée
par l’armée.
La
répression, jusqu’à la fin décembre, s’abattit ensuite sur les Basses-Alpes,
le Var, la Drôme, et même jusqu’à l’Hérault ou Béziers s’était révoltée.
6° Bilan du coup d’Etat – A Paris, les combats de
décembre 1851 firent près de 400 victimes civiles. Toutefois, si l’on y
retrouvait deux tiers d’ouvriers, l’on y retrouvait aussi une centaine
d’innocents, principalement fauchés par erreur le 4 décembre après midi.
Du
côté de l’armée, par contre, l’on ne comptait qu’une trentaine de décès pour
environ 180 blessés.
En
province, par contre, plus de 25 000 personnes furent arrêtées
(principalement originaires du sud-est.). Ainsi, 15 000 d’entre elles furent
punies de peines de prison, 9 500 furent condamnées à la déportation en
Algérie, et environ 200 furent incarcérées au bagne de Cayenne.
Toutefois, Bonaparte décida de faire jouer la grâce présidentielle,
bouleversé par la centaine d’innocents tués lors des journées de décembre.
Ainsi, plusieurs milliers d’insurgés furent amnistiés par le président de la
république.
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