1° La France renoue avec les
relations internationales le temps d’une trêve (1570 à 1572) –
Suite à la Paix de Saint Germain, Charles IX et Catherine de Médicis,
débarrassés pour un temps des conflits religieux, décidèrent alors de
relancer la machine diplomatique française.
Ainsi, en novembre 1570, le roi de France épousa Elisabeth d’Autriche.
Charles IX, XVI° siècle, château de Chantilly, Chantilly (à
gauche) ; Elisabeth d'Autriche, par François CLOUET, XVI° siècle, musée
du Louvre, Paris (à droite).
La jeune mariée était la fille de l’Empereur germanique
Maximilien II, fils de Ferdinand I°
(le frère de Charles Quint.).
Médaille à l'effigie de Maximilien II, vers 1575, musée d'art métropolitain, New
York.
Charles IX et son épouse firent leur entrée à Paris en mars 1571. Peu de
temps après, en 1572, la reine accoucha d’une fille (Elizabeth d’Angleterre
fut la marraine de l’enfant.). Toutefois, la jeune Marie Elisabeth
mourut dès 1578.
Un
projet de mariage entre Henri, duc d’Anjou et la reine d’Angleterre
Elizabeth fut mis en place, mais il n’eut pas de suites.
Au
cours de l’année 1571, Coligny parvint à prendre de l’influence à la Cour,
bien que de nombreux seigneurs catholiques détestaient ce personnage.
Portrait de Gaspard II de Coligny.
Son objectif était de secourir les protestants des Pays Bas, afin de
contrecarrer les plans du roi d’Espagne Philippe II. Il se rapprocha donc
des insurgés et leur proposa d’offrir la couronne des Pays Bas à Charles IX.
Le
jeune roi fut intéressé par la proposition de Coligny, mais la reine-mère,
apprenant la nouvelle, décida de chasser ce dernier (printemps 1571.).
Toutefois, Coligny fut rappelé au cours du mois de septembre.
A
noter toutefois que cette idée d’intervention contre l’Espagne au Pays Bas
porta ses fruits, car le roi de France envoya quelques troupes en Flandres,
au cours du mois de mai 1572. La reine-mère, affolée à l’idée que Philippe
II déclare la guerre à la France, fit de vives remontrances à son fils (les
troupes françaises se replièrent alors, et il fallut toute l’habileté
diplomatique de Catherine de Médicis pour rassurer l’ambassadeur
d’Espagne.).
Ce
n’est toutefois qu’en juin 1572 que Charles IX et le conseil royal se
déclarèrent opposés à une intervention aux Pays Bas contre l’Espagne.
En
octobre 1571 eut lieu la bataille de Lépante, combat naval opposant
la flotte de Don Juan d’Autriche, demi-frère de Philippe II,
à celle du sultan ottoman Ali Pacha Muezin (l’affrontement se déroula
non loin des côtes grecques.).
La bataille de Lépante.
La flotte catholique, plus maniable que celle
des Turcs, remporta ce jour là une grande victoire. Toutefois, cette
dernière consacra moins l'hégémonie de l'Espagne que le début de la
décadence de la Turquie ottomane.
En
France, Charles IX refusa de s’engager aux côtés de son homologue espagnol,
malgré l’avis contraire de son frère Henri.
En
avril 1572, Catherine de Médicis se rapprocha de son homologue la reine
d’Angleterre, mettant en place un traité d’alliance. Le pacte, purement
défensif, avait comme objectif de garantir la liberté de commerce entre les
deux pays.
S’étant assurée de la neutralité de la France, Elizabeth I° négocia aussi
avec les Pays Bas, assurant les rebelles du soutien que leur apporterait
l’Angleterre.
2° Le déclenchement de la quatrième guerre de religion, le
massacre de la Saint Barthelemy (août 1572) – En août 1572,
d’importantes festivités eurent lieu dans Paris, afin de célébrer le mariage
d’Henri de Bourbon avec Marguerite de Valois.
a)
Un mariage à risque : cette union, qui semblait être le gage d’une
réconciliation entre les deux camps, ne fit qu’attiser les tensions. En
effet, le pape ne valida pas ce mariage (le roi d’Espagne Philippe II et les
catholiques les plus intransigeants considéraient cette union comme une
véritable trahison.). Marguerite de Valois, comme nous l’avons vu, n’était
guère réjouie par cette union ;
son futur époux, le roi de Navarre, déclara à cette occasion :
ils ne me gagneront jamais !
Par ailleurs, les cérémonies du mariage furent particulièrement agitées par
les Parisiens. Ces derniers, majoritairement catholiques, acceptèrent mal la
présence des chefs protestants dans Paris (à noter qu’une première émeute
antiprotestante avait éclaté en décembre 1571.). Ainsi, des rixes entre
catholiques et protestants éclatèrent tous les jours. Par ailleurs, les
récoltes avaient été mauvaises, et le faste déployé lors de la cérémonie ne
fit qu’attiser la rancœur des Parisiens.
b)
L’attentat contre Gaspard II de Coligny : c’est dans ce climat déjà
tendu qu’un attentat contre Gaspard II de Coligny fut perpétré.
Ce dernier, vivant, fut toutefois blessé à l’épaule par agresseur.
Les chefs protestants réunis à Paris, outrés, réclamèrent vengeance. Ils se
rendirent alors au Louvre (lieu de résidence de la famille royale.), afin de
signifier leur mécontentement au roi.
Charles IX décida donc de jouer la carte de l’apaisement, se rendant au
chevet de Coligny. Toutefois, Henri I° de Guise, outré par le comportement
du roi, décida de quitter la ville avec ses hommes, laissant la famille
royale face aux huguenots.
Catherine de Médicis, qui avait perdu toute confiance vis-à-vis des protestants
depuis la conjuration d’Amboise (février 1560.)
et la surprise de Meaux (septembre 1567.),
demanda au roi de réunir un conseil au soir du 23 août.
Charles IX et Catherine de Médicis (à noter que l'historiographie du XIX°
siècle fit de la
reine-mère une matrone machiavélique, et du jeune roi un tyran
sanguinaire.), gravure issue de l'ouvrage
Histoire de France, par François GUIZOT, France, 1875.
Par mesure de prudence, il fut décidé d’éliminer tous les chefs protestants,
à l’exception des deux princes de sang, Henri de Bourbon, roi de Navarre, et
son cousin Henri de Bourbon, prince de Condé.
c)
Le massacre de la Saint Barthelemy : peu après minuit, la cloche de
l’église Saint Germain l’Auxerrois (paroisse des rois de France.) sonna le
signal du massacre de la Saint Barthelemy (24 août 1572.).
L'église Saint Germain l'Auxerrois, Paris.
Les principaux chefs protestants, chassés du Louvre, furent exécutés dans
les rues de Paris. Coligny, achevé dans son lit par un serviteur d'Henri de
Guise, fut alors défenestré.
Henri I° de Guise contemplant le cadavre de Coligny, gravure issue de
l'ouvrage
Histoire de France, par François GUIZOT, France, 1875.
Toutefois, les Parisiens ne se contentèrent pas de s’attaquer aux huguenots.
Ainsi, au massacre s’ajouta le pillage des marchands de la cité (de
nombreux orfèvres périrent au cours de cette nuit.).
La Saint Barthelemy, par Paul Lehugeur, XIX° siècle.
Les tueries continuèrent toutefois pendant plusieurs jours, malgré les
appels au calme lancés par Charles IX dès le matin du 24 août.
Le massacre de la Saint Barthelemy, par François DUBOIS, XVI° siècle.
Scènes du massacre de la Saint Barthelemy, par Joseph-Nicolas ROBERT-FLEURY,
1833, musée du Louvre, Paris.
Au
final, le massacre de la Saint Barthelemy est aujourd’hui particulièrement
difficile à chiffrer. Selon certaines sources, il y aurait eut 100 000
morts, selon d’autres, seulement 2 000. Il semblerait donc que les tueries
auraient fait à Paris aux environs de 3 000 victimes.
Seuls survécurent les chefs protestants qui avaient décidé de loger en
dehors des murs de la ville, où ceux qui parvinrent à se réfugier chez des
catholiques.
Toutefois, les massacres qui s’étaient déroulés à Paris reçurent un écho
favorable dans les cités avoisinant Paris, qui se lancèrent elles aussi dans
de nouvelles tueries contre les réformés. Ainsi, entre août et septembre
1572, le massacre de la Saint Barthelemy « s’exporta » dans de nombreuses
villes et régions de France : à Meaux, Orléans, Blois, Tours, en Provence,
en Normandie, en Champagne, en Guyenne, etc. (ces nouvelles exactions firent
vraisemblablement près de 10 000 victimes.).
Massacre de protestants, gravure issue de l'ouvrage
Histoire de France, par François GUIZOT, France, 1875.
Les gouverneurs des villes de France furent partagés quant à ces massacres,
les uns y étant favorables, les autres tentant de s’y opposer (comme ce fut
le cas par exemple à Nantes.).
Le
pape Grégoire XIII et Philippe II, quant à eux, ne cachèrent pas leur
satisfaction.
Le pape Grégoire XIII, par Taddeo LANDINI, vers 1580, Bode museum, Berlin.
d)
La Saint Barthelemy face à l’Histoire : depuis le XVI° siècle, le
massacre de la Saint Barthelemy excita l’imaginaire collectif. Les
protestants vilipendèrent la famille royale, responsable du massacre à leurs
yeux ; alors que les catholiques, quant à eux, expliquèrent qu’il s’agissait
là d’un « massacre préventif », destiné à empêcher les huguenots de tenter
une action contre le roi.
Aujourd’hui, les historiens restent divisés quant à la responsabilité de la
famille royale.
La
thèse traditionnelle consiste à penser que Catherine de Médicis,
commanditaire de l’attentat contre Coligny, avait peur d’être découverte.
Ainsi, elle aurait forcé la main à Charles IX, souverain jugé mou, afin de
faire massacrer les chefs protestants.
D’autres historiens considèrent au contraire que le massacre fut organisé à
l’instigation des Guise, soulignant le climat quasi-insurrectionnel qui
régnait à Paris lors des noces. Charles IX aurait alors été contraint de
s’en prendre aux protestants afin d’éviter une émeute dans la capitale.
La
thèse la plus vraisemblable avance l’idée selon laquelle Charles IX aurait
choisi d’éliminer les principaux chefs protestants, mais que certains
membres de la Cour (les Guise et le duc d’Anjou.) aurait profité de cet
événement afin d’éliminer les huguenots vivant à Paris.
3° La quatrième guerre de religion (1573 à 1574) – Suite
à la Saint Barthelemy, les deux camps reprirent les armes une fois de plus.
Les protestants se réfugièrent principalement dans le Midi, ainsi qu’à La
Rochelle et à Sancerre. L’armée royale décida donc rapidement d’assiéger ces
deux cités.
Toutefois, le manque d’argent et le siège de La Rochelle contraignirent le
roi à mettre un terme aux opérations militaires. En juin 1573, l’édit de
Poitiers fut promulgué. Ce dernier reprenait les clauses de l’édit
d’Amboise, datant de mars 1563. Ainsi, le libre exercice du culte protestant
n’était accordé à la noblesse qu’en ses châteaux, et pour le reste des
fidèles dans une ville par baillage ou sénéchaussée. Cependant, La Rochelle,
Nîmes et Montauban furent exemptées de garnisons royales.
Les protestants du Midi, quant à eux, rejetèrent cet édit et préférèrent
continuer la lutte. La Saint Barthelemy, vécue comme un véritable
traumatisme, entraîna de leur part une vive défiance à l’égard du roi.
A
partir de 1574, les huguenots du Midi commencèrent à former un véritable
Etat dans l’Etat, levant leurs propres impôts, et possédant sa propre
organisation militaire. Le prince de Condé fut ainsi nommé gouverneur
général du Midi par les Réformés.
Le
duc d’Anjou, quant à lui, fut rappelé à la Cour suite à l’échec du siège de
La Rochelle. Il apprit alors qu’il avait été élu roi de Pologne, grâce aux
intrigues de Catherine de Médicis. Désagréablement surpris, Henri se rendit
toutefois dans son nouveau royaume en décembre 1573 (il arriva à Varsovie en
février 1574.).
Charles IX, soucieux de se débarrasser de son second frère François,
duc d’Alençon, proposa à Elizabeth I° d’épouser ce dernier. Toutefois, cette
dernière préféra refuser.
Portrait de François d'Alençon enfant,
par François CLOUET, XVI° siècle, musée du Louvre, Paris.
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