1° La
jeunesse de Robert II (972 à 996) – Fils d’Hugues Capet et d’Adélaïde,
Robert II naquit vers 972. Son père, vraisemblablement analphabète, fut
cependant soucieux de donner à son héritier une bonne éducation. Ainsi,
Robert étudia dans l’école-cathédrale de Reims, auprès de l’écolâtre Gerbert
d’Aurillac.
En fin d’année 987, Hugues
Capet insista auprès d’Adalbéron, archevêque de Reims, pour que son fils
soit associé au trône. Ce dernier, proche de la Cour de Germanie, refusa,
car il était hostile à une perpétuation de la dynastie capétienne.
Toutefois, Adalbéron finit
par céder, grâce à l’insistance de Gerbert d’Aurillac.
Ainsi, Robert II fut sacré
par
l’archevêque de Reims, le
25 décembre 987 à Orléans.
Pendant deux siècles, les
Capétiens prirent coutume de faire couronner de leur vivant leur fils aîné.
Ainsi, grâce à cet usage, la royauté qui était élective à l’avènement
des Capétiens, devint héréditaire, comme sous la dynastie
mérovingienne et carolingienne.
L’année suivante, Hugues Capet
n’ayant pas réussi à marier son fils à une princesse byzantine, il lui fit
épouser Rozala, fille de Bérenger II, roi d’Italie.
Cette dernière, veuve d’Arnoul II, comte de Flandre, apportait en dot
Montreuil et le comté de Ponthieu.
Toutefois, Rozala ayant vingt
ans de plus que son époux, le couple ne s’entendit pas, et le divorce fut
prononcé vers 991 (mais Robert II conserva la dot).
2° Robert II
le Pieux et Berthe de Bourgogne (996 à 1003) – Robert, réputé proche des
évêques, fut surnommé le Pieux. Toutefois, il décida d’épouser
Berthe de Bourgogne, veuve d’Eudes de Blois, en dépit de l’hostilité de
l’Eglise.
a) Le mariage avec Berthe
de Bourgogne (996) : Hugues Capet ayant été hostile au mariage de son
vivant (Blois étant un comté ennemi), le mariage fut célébré après sa mort,
en novembre 996.
Toutefois, le mariage fut
qualifié d’incestueux par l’Eglise, à une époque où ce terme était plus
élargi qu’aujourd’hui
(les deux époux étaient cousins au troisième degré ; en outre, Robert était
le parrain de Thibaud II, l’ainé de Berthe).
Ainsi, le pape Grégoire V
condamna cette union, convoquant deux conciles afin de faire condamner le
couple royal. Robert II fut alors menacé d’excommunication, mais le pape
n’appliqua pas la sentence car il mourut en 999.
Gerbert d’Aurillac, élu pape
sous le nom de Sylvestre II à la mort de Grégoire V, fut plus
conciliant avec son ancien élève, mais condamna néanmoins ce mariage.
L'excommunication de Robert II, par Jean-Paul LAURENS, XIXe siècle,
musée d'Orsay, Paris (à noter que l'excommunication contre Robert II ne fut
en réalité jamais prononcée).
N’ayant pas eu d’enfants
avec Berthe, Robert II fut contraint de répudier son épouse en 1003.
b) Le mariage avec
Constance d’Arles (1003) : suite au renvoi de Berthe, Robert II décida
d’épouser Constance d’Arles, fille de Guillaume I°, comte de
Provence. Ce dernier s’était rendu célèbre pour avoir chassé les musulmans
qui s’étaient installés dans le massif des Maures.
En
outre, les comtes de Provence étaient apparentés à la famille d’Anjou, ce
qui permit à Robert II de rétablir l’alliance avec Foulques III.
Constance d'Arles, école française du XIII° siècle, château de
Versailles, Versailles.
Constance, fière et
impérieuse, n’appréciait pas la piété de son époux, et emmena avec elle à la
Cour les mœurs du Midi (les provençaux ne portaient pas la barbe ou la
moustache, et avaient la tête rasée).
Femme à poigne, vivement
critiquée par les chroniqueurs en raison de son caractère, Constance donna
plusieurs enfants à son époux : Alix (née vers 1003), Hugues
(né vers 1007), Henri (vers 1008), Robert (vers 1011) et
Eudes (vers 1013).
Robert le Pieux et son épouse, scandalisée par la vie quasi-monacale
du roi, par Paul Lehugeur, XIX° siècle.
3° La guerre
de Bourgogne (1002 à 1016) – En octobre 1002, Henri, duc de Bourgogne,
mourut sans laisser d’héritiers légitimes. Fils d’Hugues le Grand, le défunt
était l’oncle de Robert II, qui avait donc des droits sur le duché.
Toutefois, cet héritage fut
réclamé par Otte-Guillaume, comte de Bourgogne,
dont la mère, Gerberge, avait épousé Henri en secondes noces.
a) Les offensives contre
Auxerre (1003 et 1005) : en 1003, bénéficiant du soutien de Richard
II, duc de Normandie, Robert II fit marcher ses troupes vers la
Bourgogne, en direction d’Auxerre.
Toutefois, l’expédition fut
un échec, et le roi de Francie lança une nouvelle offensive en 1005.
Cette fois-ci, les Francs
parvinrent à prendre Auxerre et Avallon, ce qui incita le comte de Bourgogne
à mettre en place des pourparlers.
Ce dernier accepta de céder
le duché de Bourgogne à Robert II, à l’exception de Dijon, entre les mains
de Brun de Roucy, évêque de Langres résolument hostile aux Capétiens.
b) La mort de Bouchard le
Vénérable (1007) : en parallèle de la guerre de Bourgogne, Bouchard le
Vénérable, comte de Vendôme et ami d’Hugues Capet, mourut en 1007.
Robert II profita de cette
occasion pour récupérer le comté de Melun et le comté de Dreux.
c) La guerre contre le
comté de Sens (1012 à 1015) : en 1012, Robert II répondit à l’appel de
l’archevêque Léotheric, qui dénonçait la politique défensive de
Rainard, comte de Sens. Ainsi, ce dernier avait érigé des fortifications
dans sa cité, alors que le comté ouvrait la route vers le duché de
Bourgogne.
Robert II décida
d’intervenir, non seulement parce que ces constructions étaient menaçantes,
mais en outre parce que la prise de Sens permettrait de couper en deux les
Etats d’Eudes II, comte de Blois.
En 1015, Rainard fut
excommunié, et Robert II lança une offensive qui lui permit de prendre Sens.
Le vaincu décida alors de
négocier avec le roi des Francs, lui proposant de rester à la tête du
comté ; à sa mort, le territoire reviendrait à la couronne.
Robert II accepta, puis il se rendit à Dijon, ou Brun de Roucy venait de
mourir.
Rentrant dans la ville en
janvier 1016, le Capétien récupéra enfin la totalité du duché de Bourgogne.
Son fils aîné Hugues étant
l’héritier de la couronne, il céda le duché à Henri ; puis, à la mort
d’Hugues, en 1025, Robert II céda le duché à Robert.
4° L’hérésie
d’Orléans (1022) – Pendant les fêtes de Noël de l’an 1022, une dizaine
de clercs de la cathédrale Sainte Croix d’Orléans furent accusés d’hérésie.
Parmi les accusés, l’on
retrouvait Lisoie, chantre
de la cathédrale, et Etienne, confesseur de la reine Constance.
Robert II décida de réagir
rapidement, car Orléans était sa ville de résidence ; en outre, le scandale
avait éclaboussé Thierry, évêque de la cité, nommé à ce poste par le
roi des Francs.
Ainsi, le Capétien convoqua
un concile composé uniquement d’évêques, chargé de juger les accusés. A
noter que l’assemblée ne fut pas présidée par Thierry, évêque d’Orléans,
mais par son adversaire, Oury, soutenu par Eudes II de Blois (ce
dernier avait des vues sur la cité, qui lui permettait de réaliser la
continuité territoriale de ses Etats).
Les accusés, interrogés par
les membres du concile, exposèrent leur doctrine (à noter que cette dernière
est aujourd’hui difficile à saisir en raison du manque d’impartialité des
sources d’époque).
Ces derniers avaient pour
principe que les sacrements ecclésiastiques ne permettraient pas d’obtenir
le salut. La grâce ne pouvait donc pas être obtenue par l’intermédiaire des
prêtres et des évêques, mais par une hygiène de vie rigoureuse (refus de
manger toute nourriture animale, refus du mariage, chasteté, etc.).
L’Eglise n’ayant aucune
valeur aux yeux des accusés, ces derniers rejetaient l’autorité épiscopale,
la théorie de la transsubstantiation (c'est-à-dire la transformation,
du pain et du vin, lors de l’eucharistie, en chair et sang du Christ), les
sacrements, l’investiture des prêtres, etc.
Le concile rendit rapidement
son verdict, condamnant à mort tous les coupables. Le 28 décembre, les
clercs furent enfermés dans une cabane de bois qui fut incendiée.
Suite à ces évènements,
Oury, candidat d’Eudes II de Blois, fut nommé évêque d’Orléans.
Aujourd’hui, de nombreux
historiens s’interrogent sur la rapidité du procès. Certains pensent que
Robert II aurait agi ainsi afin que la famille royale ne soit pas
éclaboussée par le scandale ; d’autres affirment qu’il aurait agi ainsi afin
de se rapprocher de son rival, Eudes II de Blois (en 1023, Robert céda a
Eudes II le comté de Troyes).
5° Dernières
années de règne de Robert II (1027 à 1031) – En 1017, Robert II avait
associé au trône Hugues, son aîné. Toutefois, ce dernier mourut en 1025,
alors qu’il n’avait pas encore vingt ans.
a) Le couronnement
d’Henri I° (1027) : ainsi, le roi des Francs décida de faire couronner
son second fils, Henri.
Toutefois, Constance
s’opposa au sacre, souhaitant privilégier son troisième fils, Robert. La
reine fut soutenue par plusieurs membres de la Cour, qui jugeaient qu’Henri
était trop efféminé pour être roi.
Mais Robert II, soutenu par
Eudes II de Blois, et par Odilon, abbé de Cluny, ne céda pas aux
exigences de son épouse. Au printemps 1027, il fit couronner Henri à Reims
par l’archevêque Ebles de Roucy.
b) La fin de règne de
Robert II (1027 à 1031) : suite au couronnement d’Henri, Eudes II
s’associa avec le jeune homme pour lutter contre Foulques III
(l’affrontement se soldat sur un statu quo en 1028).
Puis, vers 1030, Constance
et Robert se révoltèrent. Ces derniers furent alors contraints de se
réfugier à la Cour de Renaud I°, comte de Nevers, qui avait épousé
Alix, fille aîné de Robert II.
Robert II, pris d’une forte
fièvre, mourut à Melun en juillet 1031. Il fut inhumé dans la basilique
Saint Denis, à Paris.
Gisant de Robert II, réalisé à la demande de
Saint Louis, vers 1263-1264, basilique Saint Denis, Paris.
|