VII : Les souverains de la XXXI°
dynastie, la deuxième domination perse
(IV° siècle avant Jésus Christ)
La chute de Nectanebo II marqua un
tournant dans l’histoire de l’Egypte. En effet, ce souverain fut le dernier
autochtone à régner sur le pays. Par la suite, plus aucun Egyptien ne
s’empara du pouvoir.
Les souverains perses qui s’emparèrent du trône en 343 avant Jésus Christ
furent considérés par certains égyptologues comme faisant partie de la XXXI°
dynastie. A noter toutefois que ces souverains faisaient partie de la lignée
des Achéménides, à l’instar des rois perses de la XXVII° dynastie.
C’est pour cette raison que certains égyptologues préfèrent parler de
seconde domination perse plutôt que de XXXI° dynastie.
1° Artaxerxès III (vers 343 à 338 avant Jésus
Christ) – Suite à sa victoire contre Nectanebo II, Artaxerxès III fit à
nouveau de l’Egypte une simple satrapie du royaume perse.
Faisant détruire les murailles des cités, ce souverain pilla aussi de
nombreuses villes, ramenant le butin en Perse.
Toutefois, comme nous l’avons évoqué au point précédent, si ce souverain
parvint à s’emparer du delta du Nil, vers 343 avant Jésus Christ, la Haute
Egypte résista encore pendant plusieurs années.
Toutefois, Artaxerxès III ne vécut peu être pas suffisamment longtemps pour
voir la complète soumission de l’Egypte, car il mourut en 338 avant Jésus
Christ (les sources divergent quant à son décès, mort naturelle pour
certains, empoisonnement par l’eunuque égyptien Bagoas pour
d’autres.).
Tombe d'Artaxerxès III.
2° Artaxerxès IV (vers 338 à 336 avant Jésus
Christ) – A la mort d’Artaxerxès III, ce fut son fils cadet,
Artaxerxès IV, qui monta sur le trône (à noter que ce dernier est
parfois appelé Arsès.).
En
effet, l’eunuque Bagoas, après avoir éliminé Artaxerxès III, aurait aussi
fait tuer presque tous les fils du défunt souverain.
Selon certaines sources, ce fut Bagoas (probable assassin d’Artaxerxès III.)
qui eut réellement le pouvoir, et non le jeune souverain.
A
cette époque, la situation politique était encore critique. En effet,
l’autorité perse n’était toujours pas reconnue en Haute Egypte ; en outre,
Philippe II, roi de Macédoine[1],
préparait un projet d’invasion de la Perse[2].
Buste en ivoire de Philippe
II de Macédoine, IV° siècle avant Jésus Christ, retrouvé dans sa tombe à
Vergina, conservé au musée archéologique de Thessalonique.
C’est ainsi qu’Artaxerxès IV, mécontent et peut être influencé par
l’aristocratie de la cour, décida de se débarrasser de Bagoas.
Toutefois, l’eunuque fut le plus rapide. En effet, ayant été averti des
projets du jeune roi, il décida d’empoisonner ce dernier (336 avant Jésus
Christ.).
3° Darius III et Alexandre III (336 à 323 avant
Jésus Christ) – Suite à la disparition d’Artaxerxès IV, Bagoas décida
de placer Darius III sur le trône, ce dernier étant un des cousins du
défunt souverain[3].
a)
Prise de pouvoir et premiers mois de règne : peu de temps après son
accession au pouvoir, Bagoas se rendit compte que le nouveau souverain était
moins facile à manipuler que prévu. De ce fait, l’eunuque décida donc
d’empoisonner ce dangereux rival, comme il l’avait déjà fait à de multiples
reprises.
Toutefois, Darius III eut vent des projets de Bagoas. Ce dernier lui
apportant une coupe de vin empoisonnée, le roi de Perse obligea alors
l’eunuque à la boire, qui mourut aussitôt.
Darius III avait été satrape d’Arménie avant d’accéder au trône, mais avait
peu d’expérience politique[4].
Il
parvint toutefois à faire de la Phénicie une satrapie, et parvint à établir
la domination perse sur la Haute Egypte.
b)
Première phase de l’invasion macédonienne, la bataille du Granique (334
avant Jésus Christ) : débarrassé de Philippe II en 336 avant Jésus
Christ[5]
et de la menace d’une invasion de la Perse par les Macédoniens, Darius III
fut marri d’apprendre qu’Alexandre III, fils du défunt, avait décidé
de reprendre à son compte les projets de son père.
Le
nouveau roi de Macédoine, qui fut surnommé Alexandre le Grand par la
postérité, décida de s’embarquer pour l’Asie mineure dès 334 avant Jésus
Christ (il s’était auparavant assuré de la soumission des cités grecques.).
Darius III, quant à lui, confia la défense du territoire aux satrapes locaux
et à Memnon de Rhodes, un mercenaire grec. Ce dernier, connaissant
les points faibles de l’armée ennemie, proposa de se lancer dans une
politique de terre brûlée (l’approvisionnement étant la plus grande
faiblesse des Grecs.). Cependant, les satrapesrefusèrent de suivre cette idée et décidèrent d’affronter les
Macédoniens au cours de la bataille du Granique.
Le
Granique était un fleuve traversable à gué toute l’année, doté d’une rive
droite escarpée. Les Perses décidèrent de s’y installer, ce qui leur
procurait un avantage indéniable.
Les satrapes alignaient alors 18 000 fantassins et 20 000 cavaliers, plus
les 10 000 hoplites grecs sous les ordres de Memnon de Rhodes. Alexandre
III, quant à lui, pouvait compter sur 30 000 soldats et 5 000
cavaliers.
Toutefois, le roi de Macédoine comprit que les Perses, installés en position
défensive, ne comptaient pas attaquer. Alexandre III décida alors de donner
l’assaut au cours de l’après midi, à un moment ou les Perses avaient le
soleil dans les yeux.
Le passage du Granique, par Charles LE BRUN, 1665, musée du Louvre, Paris.
Alexandre III, voyant la cavalerie perse isolée, décida de les attaquer
(l’infanterie perse ne pouvait leur venir en aide, sans quoi elle perdait
l’avantage que lui conférait sa position.). Les Macédoniens franchirent
alors le fleuve et se jetèrent sur leurs ennemis.
La
cavalerie perse, se voyant ainsi attaquée, décida de fuir le combat. De leur
côté, les hoplites de Darius ne bougèrent pas, n’ayant pas reçu d’ordres.
Au
final, la bataille du Granique fut un franc succès pour Alexandre III, les
Perses accusant de graves pertes dans leurs rangs (plus de 10 000 morts
selon les sources.). De leur côté, les Macédoniens n’auraient perdu que 145
hommes, un chiffre qui paraît largement sous estimé…
c)
Seconde phase de l’invasion macédonienne, la perte de l’Asie mineure et
la bataille d’Issos (334 à 333 avant Jésus Christ) : suite à la défaite
du Granique, les adversaires de Darius III parvinrent à s’emparer de
nombreuses cités côtières d’Asie mineure, telles que Sardes, Ephèse, Milet,
ou Halicarnasse (334 avant Jésus Christ.).
L’année suivante, les satrapes n’ayant rien tenté pour contrer les
Macédoniens, Alexandre III marcha dans l’intérieur des terres, s’emparant de
la Lycie, de la Pamphylie, de la Pisidie et de la Phrygie (333 avant Jésus
Christ.).
Alexandre en Asie mineure,
334 avant Jésus Christ
(vous pouvez faire un "clic droit" sur la carte afin de faire un zoom).
Au printemps 333 avant Jésus Christ, Alexandre
devait faire un choix. Soit il considérait que l’objectif visé par son père
(à savoir s’emparer de l’Asie mineure.) était atteint, soit il continuait à
lutter jusqu’à la destruction de l’Empire perse.
Toutefois, les Perses n’avaient pas dit leur
dernier mot. En effet, Memnon parvint à s’emparer de l’île de Chios,
assiégea Mytilène, et exacerba le sentiment anti-macédonien en Grèce (les
cités grecques s’étaient révoltées suite à la mort de Philippe II, mais
avaient été matées par Alexandre III suite à son accession au pouvoir.).
Toutefois, Memnon mourut au cours de l’été 333
avant Jésus Christ, et ses successeurs, Pharnabaze et
Autophradatès, reprirent Mytilène, Milet et Halicarnasse (à noter que
Pharnabaze décida de négocier une alliance contre les Macédoniens avec
Agis III, le roi de Sparte.).
Profitant de cette situation favorable, Darius III
décida de marcher sur la Cilicie, et le jeune roi de Macédoine décida de l’y
rejoindre (à noter que Ptolémée, un des généraux d’Alexandre III,
conquit la Carie et Halicarnasse, Myndos et Cos faisant soumission.).
Darius III arriva finalement en Cilicie, désirant
couper les arrières d’Alexandre III qui s’était aventuré en Syrie. En
rentrant dans la cité d’Issos, le roi de Perse fit tuer les blessés et
malades qu’Alexandre avait dû laisser là, puis décida d’installer son armée
le long de la rivière Pinarus, attendant l’arrivée de son rival.
En novembre 333 avant Jésus Christ, 100 000 Perses
faisaient face à 30 000 Macédoniens, selon les sources de l’époque.
Alexandre III, arrivant devant le fleuve, se
rendit compte que les soldats perses composant l’aile droite du front
étaient protégés par des archers. Le jeune souverain en déduisit qu’ils
étaient donc inexpérimentés.
Les Macédoniens engagèrent alors le combat, et
Alexandre III (à la tête de la cavalerie.) fit en sorte d’ouvrir une brèche
sur l'aile droite ennemie. Les fantassins macédoniens, quant
à eux, parvinrent à résister tant bien que mal aux Perses. Alexandre III
parvint finalement à réaliser son objectif, lançant une attaque sur Darius
III (ce dernier n’était plus protégé.).
La bataille d'Issos, fresque du I° siècle avant Jésus Christ
retrouvée à Pompéi, conservée au musée national de Naples (précisons
toutefois qu'aujourd'hui, l'on ne sait toujours pas avec certitude si cette
fresque représente la bataille d'Issos ou celle de Gaugamèles.).
Le souverain perse, se rendant compte du danger,
décida alors de battre en retraite, abandonnant ses troupes, ses attributs
royaux (arc, bouclier et manteau.), ainsi que ses femmes et ses enfants. Dès
lors, le reste de l’armée se débanda, poursuivie par les Macédoniens.
Les sources grecques nous informent que les Perses
perdirent beaucoup d’hommes suite à la bataille d’Issos,
contrairement aux Macédoniens qui n’en perdirent que très peu. A noter une
fois de plus que de tels chiffres sont à prendre au conditionnel.
La fuite de Darius III, par Quinte Curce (traduction de Vasque de Lucène), enluminure issue de l'ouvrage
Histoire d'Alexandre le Grand, Flandre, XV° siècle.
d)
Troisième phase de l’invasion macédonienne, la perte de la Syrie et de
l’Egypte (333 à 331 avant Jésus Christ) : Darius III, non content
d’avoir été
vaincu par les Macédoniens, s’était en outre couvert de honte en
abandonnant précipitamment ses attributs royaux ses proches. Souverain au
pouvoir vacillant, Darius III décida finalement de reculer dans ses
satrapies orientales afin de mettre sur pied une nouvelle armée.
Dès lors, Alexandre III avait les mains libres pour mener ses plans à bien.
L’annonce de la victoire d’Issos contre Darius III fut acclamée en Grèce, et
les cités se calmèrent pendant un temps (à l’exception de Sparte, qui tenta
de soulever la Crète.).
Alexandre III, quant à lui, désirait s’emparer de la Phénicie afin de s’en
servir comme d’une base arrière (il ne chercha pas à poursuivre Darius
III.).
La
Phénicie, à cette époque, vivait sous la domination des Perses, qui n’était
toutefois pas étouffante. Les cités étaient relativement autonomes,
fournissant régulièrement leurs navires aux Achéménides (à noter que la
flotte phénicienne avait joué un grand rôle au cours des guerres médiques.).
Mais ces cités étaient divisées, et n’avaient pas établi de position commune
vis-à-vis de la menace macédonienne. Alexandre III sut jouer de ces
rivalités, et commença par s’emparer de quelques villes sur la côte
phénicienne (Byblos, Sidon, etc.).
Cependant, la cité de Tyr souhaitait rester neutre dans ce conflit.
Alexandre III ne l’entendit pas de cette oreille, sachant que cette ville
était la plus importante de la région. Au final, la soumission de la
Phénicie n’avait pas d’importance pour Alexandre III, tant que Tyr restait
hors de contrôle. Il décida donc, à la fin de l’année 333 avant Jésus
Christ, de faire le siège de la cité.
Le
siège dura longtemps, la cité de Tyr étant construite sur une île, et
Alexandre III ne disposant pas de flotte. Cependant, les rois des cités
prises par le souverain macédonien parvinrent à s’emparer des navires
phéniciens de la flotte perse, lors du retour de ces derniers dans leurs
ports d’attache (Sidon, Chypre, etc.). Au bout de quelques mois, Alexandre
III put aligner une flotte d’une centaine de navires sous les murs de Tyr.
En
août 332 avant Jésus Christ, la ville fut prise, et ses habitants furent
tués ou vendus comme esclaves (certains parvinrent à s’enfuir vers
Carthage.).
Après la conquête de la Phénicie, Alexandre III décida de marcher sur
l’Égypte. Il refusa par ailleurs des propositions de paix envoyées par
Darius III, pourtant très avantageuses pour les Macédoniens.
En
descendant vers l’Égypte, Alexandre III ne rencontra pas de résistances,
sauf à Gaza, qu’il décida d’assiéger. Une fois la ville prise, ses habitants
furent tués ou réduits à l’esclavage.
En
arrivant en Égypte, en décembre 332 avant Jésus Christ, Alexandre III fut
bien accueilli par les habitants du pays (ces derniers n’appréciaient pas la
domination perse, et s’étaient déjà révoltés contre eux à plusieurs
reprises.).
En
331 avant Jésus Christ, il se fit proclamer pharaon à Memphis, l’ancienne
capitale du pays. Alexandre III prit alors le nom d’Horus de Mekkemet
(ce qui signifie « protecteur de l’Egypte. »). Par la suite, il fit un
sacrifice au dieu Apis, voulant montrer qu’il respectait les traditions
égyptiennes.
Taureau
Apis, I° ou II° siècle après Jésus Christ, musée du Louvre, Paris.
Le nom d'Alexandre en hiéroglyphes, vers 330 avant Jésus Christ,
musée du Louvre, Paris.
Puis, il fonda Alexandrie (au cours de sa vie, il fonda 34 villes
portant ce nom.), qui ne fut achevée que sous le règne de Ptolémée I°.
Après avoir rencontré l’oracle d’Amon-Zeus, qui déclara qu’Alexandre III
était le fils de Zeus, le jeune roi retourna à Memphis, où il se fit
couronner par les prêtres de la ville.
A
noter que les Egyptiens, soucieux de mettre en place une continuité
dynastique, expliquèrent les origines d’Alexandre III de façon originale :
Nectanebo II, dernier souverain de la XXX° dynastie[6],
aurait fuit en Macédoine suite à l’invasion perse, et non pas en Nubie.
Profitant d’une absence de Philippe II, le pharaon déchu aurait alors couché
avec Olympias (épouse du souverain de macédoine.), cette dernière donnant naissance peu après à Alexandre
III.
Représentation d'Olympias sur une médaille du III° siècle avant Jésus
Christ, conservée au musée archéologique de Thessalonique.
Le
jeune roi de Macédoine, au printemps 331 avant Jésus Christ, décida alors de
quitter l’Égypte, se remettant à la poursuite de Darius III.
Il
apprit alors que ses amiraux avaient mis la flotte perse en déroute, et
étaient parvenus à capturer le remuant Pharnabaze. Ainsi, Antipater,
régent de Macédoine, eut les mains libres pour lutter contre Agis III, le
roi de Sparte.
d)
Quatrième phase de l’invasion macédonienne, la bataille de Gaugamèles, la
perte de Babylone, la mort de Darius III (331 à 330 avant Jésus Christ)
: au cours de l’été 331 avant Jésus Christ, l’armée macédonienne se dirigea
vers Babylone, capitale de l’Empire perse. Après avoir franchi l’Euphrate,
Alexandre apprit que Darius III ne se trouvait pas dans la capitale, mais
plus au nord. Les Macédoniens franchirent alors le Tigre, se dirigeant vers
des Perses qui les attendaient dans la plaine de Gaugamèles, près de la cité
d’Arbèles.
En
octobre 331 avant Jésus Christ, les deux armées se retrouvaient une nouvelle
fois face à face. Cette fois, Darius III avait choisi le terrain, avait
enlevé tous les cailloux de la plaine afin de ne pas casser les roues de ses
chars, et avait rassemblé auprès de lui de très nombreux soldats. Enfin, il
avait déployé son armée sur l’ensemble de la plaine, afin de ne pas
commettre la même erreur qu’à Issos.
Darius III comptait en ses rangs près de 100 000 hommes (dont 200 chars à
faux[7]et 15 éléphants de guerre.), alors qu’Alexandre III n’avait sous ses
ordres que 50 000 soldats (dont 7 000 cavaliers.). En outre, le roi de Perse
était entouré des Immortels, sa garde d’élite, composée de 1 000
hommes[8].
Cependant, cette gigantesque armée était, comme souvent, peu entraînée à
faire la guerre, et constituée de troupes disparates, ne sachant pas très
bien communiquer entre elles.
A
la tête de la cavalerie, Alexandre III décida d’attaquer le flanc droit de
l’armée perse, afin de repousser celui-ci dans un terrain accidenté. Darius
III décida de ne pas se laisser faire, et attaqua les Macédoniens. Ces
derniers tenaient bon, alors qu’Alexandre III et ses compagnons
progressaient jusqu’au l’endroit où le roi de Perse se trouvait. Le roi de
Macédoine savait qu’il ne pouvait compter que sur la fuite ou la mort de
Darius III pour vaincre. C’est alors que ce dernier, voyant arriver
Alexandre III et ses cavaliers devant les Immortels, décida de prendre la
fuite une nouvelle fois.
La bataille d'Arbelles, par Charles LE BRUN, 1669, musée du Louvre, Paris.
Mais, alors que le roi de Macédoine comptait poursuivre Darius III, il fut
rappelé par Philotas, un de ses généraux. Ce dernier l’avertit
que son père Parménion, général en chef de l’infanterie macédonienne,
était en difficulté.
Alexandre III dut ainsi aider ses compatriotes, laissant fuir Darius III.
Suite à la bataille de Gaugamèles, Darius III partit se réfugier en Médie.
De son côté, Alexandre reçut la soumission de Babylone (ce dernier s’engagea
à respecter les institutions de la cité.).
Entrée d'Alexandre dans
Babyloneou Le Triomphe d'Alexandre, par Charles LE BRUN, 1665, musée du Louvre, Paris.
Toutefois, bien que vaincu et affaibli, Darius III tentait de récolter des
fonds afin de lever une nouvelle armée contre Alexandre III. Ce dernier
décida donc, en novembre 331 avant Jésus Christ, de se diriger vers Suse (la
ville disposant d’un important trésor, estimé à 50 000 talents, une somme
colossale pour l’époque.). Suse décida de ne pas s’opposer aux Macédoniens
et lui ouvrit ses portes (par la suite, une partie de cet argent fut envoyé
à Antipater, afin de soutenir sa lutte contre Sparte.).
D’ailleurs, à cette même époque, le régent de Macédoine luttait toujours
contre Agis III et les pirates crétois (hormis le Péloponnèse, le reste de
la Grèce restait cependant fidèle à Alexandre III.). A l’automne 331 avant
Jésus Christ, Antipater parvint à vaincre Sparte suite à la bataille de
Mégalopolis, au cours de laquelle Agis III trouva la mort.
Cependant, les relations entre Antipater et Olympias, la mère d’Alexandre
III, étaient exécrables. Cette dernière, à la mort de son frère Alexandre
le Molosse, assura la régence d’Epire au nom de son petit fils, né de
l’union de sa fille Cléopâtre et du défunt roi (elle s’attira ainsi
les foudres d’Antipater.).
Alexandre III, quant à lui, décida de marcher sur Persépolis, au début de
l’année 330 avant Jésus Christ. Ce dernier ne rencontra pas d’opposition
importante au cours de sa marche, et parvint sous les murs de la cité en mai
330 avant Jésus Christ.
Il
livra ensuite Persépolis au pillage, et incendia les palais de la ville
.Aujourd’hui, l’on ne connaît pas avec exactitude les raisons
d’Alexandre III : était il saoul et souhaitait il se venger des affronts que
les Grecs subirent lors des guerres médiques ? Désirait-il envoyer un
message fort aux cités grecques ? Quoi qu’il en soit, son geste fut très mal
accepté par les Perses, et Alexandre III s’en repentit bien vite.
Mais la tenue de si grandes possessions ne se fit pas sans poser quelques
problèmes. Afin de gérer aux mieux ses Etats, le roi de Macédoine mit des
hommes de confiance à la tête de satrapies de la région, afin qu’ils mettent
fin aux petites insurrections locales.
Peu après, au cours de l’été 330 avant Jésus Christ, le roi de Macédoine
décida de poursuivre Darius III, qui s’était réfugié en Médie. Avec l’aide
de ses généraux, Parménion et Cratère, le roi de Macédoine parvint à
rejoindre le convoi du roi de Perse. C’est alors qu’il apprit que Darius III
avait été assassiné par un satrape nommé Bessos, assisté par deux de
ses compagnons, Barsaentès et Satibarzane (à noter que Bessos
tenta de prendre le pouvoir en Perse, sous le nom d’Artaxerxés V, mais ce
fut un échec.).
Le
roi de Macédoine se montra généreux envers les fidèles de Darius III,
organisa des funérailles nationales en l’honneur du roi défunt, jouant le
rôle du justicier désireux de punir les assassins.
La
XXXI° dynastie égyptienne prit fin avec la disparition de Darius III.
Alexandre III ayant été couronné pharaon à Memphis, il était dès lors
considéré comme le souverain légitime. Toutefois, le roi de Macédoine ne fut
pas le fondateur d’une hypothétique XXXII° dynastie[9].
L'Empire d'Alexandre
(vous pouvez faire un "clic droit" sur la carte afin de faire un zoom).
e)
Cinquième phase de l’invasion macédonienne, la perte des satrapies
orientales (330 à 327 avant Jésus Christ) :
cependant, avant de partir à la poursuite de Bessos et de ses hommes,
Alexandre III décida de soumettre l’Hyrcanie, et aussi d’intégrer à son
armée les soldats grecs qui avaient lutté aux côtés de Darius III.
A l’automne 330 avant Jésus Christ, le roi de
Macédoine, à la recherche de Bessos et de ses amis, apprit que ces derniers
s’étaient séparés peu de temps auparavant : Bessos s’était réfugié en
Bactriane, Barsaentès en Drangiane, Satibarzane en Arie.
Dans un premier temps, Alexandre III marcha sur
l’Arie, et accepta de laisser Satibarzane à la tête de la région. Toutefois,
alors que le roi de Macédoine se dirigeait vers la Bactriane, Satibarzane se
révolta, tuant les Macédoniens restés sur ses terres. Alexandre III, après
avoir vaincu Barsaentès (il lui fut livré par les populations locales et mis
à mort.), se retourna contre Satibarzane, et le vainquit, en novembre 330
avant Jésus Christ (Alexandre III fut alors aidé par les anciens fidèles de
Darius.). Il fonda alors une nouvelle ville, Alexandrie d’Arie.
Après avoir soumis l’Arie une nouvelle fois,
Alexandre III repartit à la poursuite de Bessos, en direction de la
Bactriane, au printemps 329 avant Jésus Christ (en passant par l’Arachosie,
il fonda Alexandrie d’Arachosie.).
Lieu où fut fondée
Alexandrie d'Arachosie, situé à proximité de Kandahar, Afghanistan.
Puis, les Macédoniens traversèrent
les monts Hindû-Kûsh, s’emparèrent de la cité de Bactres, franchirent
l’Oxus, et enfin arrivèrent en Sogdiane.
Alexandre en Sogdiane, par Quinte-Curce,
enluminure issue de l'ouvrage Histoire d'Alexandre le Grand (traduction de Vasque de Lucène),
Belgique, Flandre, XV° siècle.
C’est alors que Spitaménès et Oxyartès,
des dirigeants locaux, décidèrent de s’emparer de Bessos et le livrèrent à
Alexandre III. Ce dernier eut les oreilles et le nez coupé, selon les
coutumes perses, puis fut renvoyé à Ecbatane, où il fut exécuté.
Cependant, la mort de Bessos ne mit pas fin à la
guerre. En effet, Alexandre III dut lutter pendant deux ans en Bactriane et
en Sogdiane contre des satrapes révoltés (dont Spitaménès, qui avait livré
Bessos à Alexandre.).
Finalement, au cours du printemps 327 avant Jésus
Christ, Alexandre III et Cratère mirent fin à la rébellion des satrapes,
incendiant les campagnes et imposant la terreur afin de mettre fin à la
guérilla (Spitaménès, quant à lui, était mort au cours de l’hiver 328.). Le
conquérant épousa alors Roxane, la fille d’Oxyartès, satrape de
Bactriane, puis fonda Alexandrie Eschate.
f)
Sixième phase de l’invasion macédonienne, la route vers l’Inde, la
bataille de l’Hydapse (327 à 326 avant Jésus Christ) :
l’Inde, à cette époque, était un
territoire situé sur les franges du royaume perse. La vallée de l’Indus
était sous la domination théorique du grand roi, ce dernier incorporant
parfois des éléphants de guerre au sein de son armée (Comme ce fut le cas à
la bataille de Gaugamèles[10].).
Aujourd’hui, l’on ne sait pas les raisons qui poussèrent Alexandre III à
intervenir en Inde. Voulait-il s’avancer encore plus vers l’est ? Fut-il
influencé par les satrapes locaux, qui étaient menacés par le roi indien
Pôrôs ?
Quoi qu’il en soit, au cours de l’été 327 avant Jésus Christ, Alexandre III
et ses hommes marchèrent vers l’Indus. Les soldats, dont beaucoup
d’asiatiques, étaient environ 50 000, et avaient reçu des éléphants de
guerre, offerts par les satrapes locaux. A cette même époque, il demanda à
ses généraux Héphaïstion et à Perdiccas de soumettre les
habitants de cette région.
Alexandre III, après avoir battu des indigènes qui s’étaient opposés à lui,
rejoignit ses deux généraux sur les rives de l’Indus, au printemps 326 avant
Jésus Christ.
Peu après, les Macédoniens furent confrontés à Pôrôs et ses hommes,
stationnés sur le fleuve Hydaspe.
Pôrôs avait établi son armée sur la rive droite du fleuve, et bloquait ainsi
celle d’Alexandre III (en effet, l’Hydapse était difficilement
franchissable.). Cependant, Alexandre fit mine d’abandonner (cette
information arriva bien vite aux oreilles du roi indien.), mais en réalité
franchit le fleuve plus au nord, dans le plus grand secret. Pôrôs, ayant eu
vent de ce mouvement, mais voyant le gros de l’armée d’Alexandre sur l’autre
rive, commandée par Cratère, décida d’envoyer un bataillon vers le nord,
commandé par son fils. Alexandre et ses hommes anéantirent ce détachement,
et le fils de Pôrôs mourut au cours de l’affrontement.
Peu après eut lieu la bataille de l’Hydapse à proprement parler, dans
une zone boisée à quelques kilomètres du fleuve. Les deux forces en présence
étaient à priori équivalentes, si l’on omet de compter les éléphants de
guerre de Pôrôs, au nombre de 200.
Comme à chaque fois, Alexandre III avait l’intention de couper les lignes
ennemies et de se précipiter dans l’ouverture avec sa cavalerie. Mais ce
dernier ne put mettre cette tactique en place ce jour ci, les chevaux
macédoniens étant effrayés par les très nombreux éléphants de guerre de
Pôrôs.
Les chevaliers contre les
éléphants,
enluminure issue de la Vraye Histoire du Bon Roy Alixandre, XV°
siècle.
Les indiens avaient mis leurs éléphants en avant, l’infanterie derrière, et
la cavalerie sur les flancs. Alexandre III décida d’attaquer le flanc gauche
de l’armée, et Pôrôs dut transférer les cavaliers du flanc droit vers le
flanc gauche, afin de renforcer ce dernier. Hélas pour lui, sa cavalerie fut
détruite par les Macédoniens.
Au
même moment, les soldats parvinrent à stopper la charge des éléphants de
Pôrôs, mais ils subirent néanmoins de lourdes pertes.
Au
final, Pôrôs, après avoir perdu un bon nombre de ses éléphants, et blessé au
cours du combat, décida de se rendre.
Alexandre et Porus, par Charles LE BRUN, 1665, musée du Louvre, Paris.
Au
final, la bataille de l’Hydapse, si elle fut une victoire, fut une des plus
sanglantes pour Alexandre III. Les indiens perdirent l’essentiel de leur
cavalerie, ainsi que la moitié de leurs éléphants ; Le roi de Macédoine,
quant à lui, eut à déplorer plusieurs milliers de morts au sein de son
infanterie.
Suite à cet affrontement, par la suite, Alexandre III traita Pôrôs en roi,
lui demandant de régner en son nom (il souhaitait vraisemblablement écarter
tout risque de révolte.).
En
commémoration de la bataille, le Macédonien fonda Alexandrie Nicée (Niké
signifie ‘victoire’.), ainsi qu’Alexandrie Bucéphale, en hommage à
son cheval, mort au cours de la bataille.
L'enterrement de Bucéphale, enluminure issue de la Vraye Histoire du Bon
Roy Alixandre, XV° siècle.
C’est alors qu’une révolte éclata sur les arrières, dont Alexandre III dut
s’occuper. Par la suite, recevant la soumission des peuples de la région, le
roi macédonien poursuivit son chemin ver l’est. A l’automne 326 avant Jésus
Christ, il se rendit sur les rives du fleuve Hyphase, qu’il souhaitait
traverser.
C’est alors que ses soldats refusèrent d’aller plus loin. Alexandre ne
parvint pas à les convaincre, et, finalement, il décida de rebrousser
chemin. Pour marquer son territoire, il fit ériger douze stèles (en
l’honneur des douze divinités du panthéon grec.), portant l’inscription
ici s’est arrêté Alexandre.
Par la suite, le conquérant décida de soumettre toute la vallée de l’Indus,
avant d’entamer son voyage de retour vers l’ouest.
Une flotte fut alors construite à cet effet, placée sous le commandement de
Néarque. Puis, Alexandre III et ses hommes descendirent vers le sud.
Jusqu’à la fin de l’année, les Macédoniens luttèrent contre des indigènes
qui ne voulaient pas se soumettre.
A
la fin de l’année 326 avant Jésus Christ, Alexandre III et ses hommes
arrivèrent à Pattala.
g)
Le difficile retour, la fin de règne d’Alexandre III (326 à 323 avant
Jésus Christ) : en juillet 325 avant Jésus Christ, Alexandre III, pour
retourner vers l’ouest, décida de divisa son armée en trois groupes.
Tout d’abord, Cratère devait passer par la Dangriane, et rejoindre Alexandre
III en Carmanie. Le roi de Macédoine, quant à lui, devait passer par le
désert de Gédrosie. Enfin, le troisième groupe, commandé par Néarque, devait
emprunter la voie maritime (partant plus tard, en octobre 325, il longea
l’Indus jusqu’à l’océan, traversa le golfe persique, et se dirigea vers
l’embouchure de l’Euphrate.
Le désert de Gédrosie.
Toutefois, si Néarque et Cratère ne rencontrèrent pas de difficultés lors du
chemin du retour, ce ne fut pas le cas pour Alexandre III. En effet, faute
d’eau et de nourriture en quantités suffisantes, plusieurs dizaines de
milliers de soldats moururent lors de ce voyage.
A
noter qu’aujourd’hui encore, l’on ne sait pas exactement pourquoi le roi de
Macédoine décida il d’emprunter ce chemin difficile. Peut être pour
connaître les littoraux de son Empire ? Ou bien Alexandre III voulut il se
débarrasser à dessein des éléments les plus encombrants de son armée ?
Finalement, le roi de Macédoine et ses hommes parvinrent tant bien que mal à
rejoindre Cratère en Carmanie.
Au
début de l’année 324, Alexandre III arriva à Persépolis. Il apprit alors que
certains satrapes locaux avaient été particulièrement agités au cours de son
absence, et décida donc de les punir. En outre, il restaura le tombeau du
roi Cyrus, endommagé lors de l’incendie de 330 avant Jésus Christ.
Par la suite, Alexandre III et ses hommes remontèrent jusqu’à Suse. C’est
alors que furent célébrées les noces de Suse, au cours desquelles, le roi de
Macédoine, voulant mélanger les peuples de Grèce et d’Asie, fit célébrer
10 000 mariages. Il montra l’exemple en épousant Statira, fille de
Darius III, ainsi que Parisatide, fille d'Artaxerxès III.
Ces mariages, célébrés à la persane, ne plurent pas aux Macédoniens, qui
considéraient qu’Alexandre abandonnait les coutumes de ses ancêtres. En
outre, ces derniers acceptaient mal de voir arriver des Perses au sein de
l’armée. C’est alors qu’éclata la révolte des vétérans, qu’Alexandre
réprima violemment.
Au
cours de l’été 324, quelques dizaines de milliers de vétérans furent
libérés, et rentrèrent en Macédoine, sous le commandement de Cratère. Ce
dernier devait remplacer Antipater (toujours en conflit avec Olympias.), qui
devait apporter à Alexandre III de nouvelles recrues.
Au
cours de l’hiver 324, le roi de Macédoine se dirigea vers Ectabane,
plusieurs tribus s’étant révoltées. Toutefois, l’insurrection fut rapidement
matée, et Alexandre III se dirigea alors vers Babylone.
Au
cours des dernières semaines de sa vie, Alexandre, restant fidèle à
l'hellénisme, fit en sorte de le répandre partout en Orient (il fit
construire des routes, des canaux, des ports, imposa une monnaie unique,
etc.). Voulant aussi connaître les frontières maritimes de son Empire, il
envoya ses navires explorer les côtes (en mer Caspienne, dans le golfe
persique, etc.).
Alexandre, dans les derniers jours de sa vie, prévoyait peut être une
expédition en Méditerrané, sans doute vers Carthage.
Toutefois, au mois de mai 323 avant Jésus Christ, Alexandre fut prit de
fièvres (il s’agissait sans doute de la malaria ou du paludisme, le roi
ayant passé les dernières semaines de sa vie à arpenter les marais humides
de la région de Babylone.). Puis, peu à peu, son état s’aggrava, sans que
les médecins du roi ne puissent faire quoi que ce soit (Alexandre était en
outre affaibli par ses blessures, ses beuveries et ses années de marches.).
Finalement, le 13 juin 323 avant Jésus Christ, le conquérant finit par s’éteindre, alors âgé de
33 ans.
[1]
A cette époque, Philippe II avait tenté de faire de la Grèce un Etat
uni et fort, et non plus un pays morcelé en une myriade de petites
cités farouches. Pour en savoir plus sur ce souverain,
cliquez ici !
[2]
Philippe II déclara la guerre à la Perse en 337 avant Jésus Christ,
y envoyant un contingent militaire peu de temps après. Toutefois,
l’assassinat du roi de Macédoine, en 336 avant Jésus Christ, mit un
terme à l’expédition.
[3]
Darius III était l’arrière petit fils de Darius II Nothos, souverain
que vous retrouverez en 7, section III, chapitre neuvième,
Histoire de l’Egypte antique.
[4]
Certaines sources grecques affirment que Darius III avait été
l’esclave de Bagoas.
[5]
Certaines sources grecques affirment que c’est Darius III qui
commandita l’assassinat de Philippe II de Mécédoine.
[6]
Pour en savoir plus sur Nectanebo II, voir le 3, section VI,
chapitre neuvième, histoire de l’Egypte antique.
[7]
Un char à faux était un char sur les roues duquel on avait soudé des
lames de fer tranchantes.
[8]
Ils étaient appelés les Immortels car lorsque l’un d’eux tombait sur
le champ de bataille, un soldat de l’armée était incorporé dans
cette garde d’élite.
[9]
Bien qu’il existât une dynastie ne comportant qu’un seul membre, la
XXVIII°.
[10]
Pour en savoir plus sur la bataille de Gaugamèles, voir le d), 3,
section VII, chapitre neuvième, Histoire de l’Egypte antique.