Faux !
Car contrairement à ce que l'on pourrait penser, Attila, roi des
Huns, était bien moins sauvage qu'on ne pourrait le croire.
Le manque de sources
au sujet de ce personnage constitue la première difficulté à
laquelle sont confrontés les historiens. Ainsi, nous ne disposons
que de textes latins ou grecs, hostiles à Attila, mais pas de textes
hunniques[1].
Attila et son frère
Bleda montèrent conjointement sur le trône en 434, à la mort
de leur oncle Ruga. Les deux hommes poursuivirent la
politique du défunt, et s'attaquèrent à l'Empire d'Orient[2]
(Ruga, présenté comme arien[3]
par certaines sources, avait peut être combattu Constantinople pour
des questions religieuses).
Après avoir contraint Théodose II,
Empereur d'Orient, à signer un traité de paix défavorable (ce dernier devait doubler le
tribut annuel versé aux Huns,700 livres d'or, et ne plus s’allier
avec des peuplades germaniques), Attila élimina son frère Bléda en 445.
Buste de l'Empereur d'Orient Théodose II,
musée du Louvre, Paris.
En 450, Alors qu'Attila faisait face à un Empereur d'Orient plus hostile
qu'autrefois (Marcien, successeur de Théodose II, refusait de payer
le tribut aux Huns), il reçut une bague de la part d'Honoria, sœur de
Valentinien III, Empereur d'Occident.
Pièces de monnaie à l'effigie de Marcien (à gauche), et de Valentinien III
(à droite).
Le roi des Huns considéra l’appel comme une demande en
mariage, et réclama alors la moitié de l’Empire d’Occident en dot.
Cependant, Valentinien III refusa de se soumettre et la guerre fut déclarée.
En 451, Attila traversa la Germanie,
se dirigeant vers la Gaule. Pendant cette expédition, les envahisseurs commirent d'importantes déprédations sur leur passage,
pillant Cologne, Mayence, Worms, Metz, Trèves, Reims,
etc[4].
Les Huns se dirigèrent ensuite vers la Loire, où ils rencontrèrent
les troupes du général romain Aetius[5].
Ce dernier était à la tête d'une armée coalisée, regroupant Romains et
Barbares (Francs, Alains, Burgondes, Saxons, Wisigoths, etc.).
La
bataille des champs catalauniques, livrée en juin 451 près de Troyes,
accorda finalement la victoire à Aetius, et Attila, vaincu, fut contraint de
sonner la retraite, reculant jusqu'au Rhin[6].
Les Huns à la bataille des Champs
catalauniques.
Le personnage
d'Attila fut rapidement noirci par les auteurs antiques, qui le
baptisèrent le fléau de Dieu. En outre, les nombreuses
déprédations commises lors de l'expédition de 451 contribuèrent à
faire des Huns des nomades barbares, à l'opposé du monde romain,
sédentaire et civilisé.
Mais il convient
toutefois de préciser que les Huns n'étaient pas des sauvages
sanguinaires, subitement sortis des neuf cercles de l'Enfer. En
effet, ces derniers avaient fait leur apparition sur les rives du
Danube vers 370, rentrant rapidement en contact avec les Romains.
C'est ainsi qu'une alliance entre les deux peuples fut nouée sous le
règne de Ruga, en 401. Ainsi, les Huns étaient employés comme
mercenaires par les Romains, qui récompensaient leurs alliés par le
versement d'une indemnité financière.
Par ailleurs,
l'Empire des Huns, s'étendant des frontières romaines jusqu'à
l'actuel Kazakhstan, ne formait pas un ensemble uni. Ainsi, l'on
retrouvait une constellation de petits royaumes, plus ou moins
soumis à l'autorité hunnique : peuples assimilés ; peuples soumis
mais conservant leur roi[7] ; peuples seulement tributaires ;
peuples reconnaissant la suzeraineté des Huns mais conservant leur
indépendance ; etc.
Contrairement à une
idée reçue, ce n'est pas sous le règne d'Attila que les Huns firent
le plus de conquêtes, au contraire. Leur territoire évolua très peu
à cette époque, d'autant que c'est sous le règne de ce souverain que
les Huns commencèrent à se sédentariser. Ainsi, Attila fit
construire une capitale dont l'emplacement nous est aujourd'hui
inconnu[8].
La cour d'Attila, par Olaj
VASZON, 1870, musée de Budapest.
Enfin, notons
qu'Attila n'était pas un barbare inculte, ce dernier ayant
été élevé à Ravenne, à la cour d'Honorius[9],
Empereur d'Occident (il avait été envoyé là en tant qu’otage.). Il
savait donc parler latin et Grec (cette langue étant l'apanage de la
noblesse), connaissant parfaitement les mœurs et coutumes des
Romains (à noter que selon
certaines sources, Attila aurait aussi été envoyé à Constantinople
en tant qu'otage).
[1]
Les Huns, à l'instar des Gaulois d'avant
la conquête romaine, transmettaient leur savoir par voie orale.
[2]
Rappelons qu'en 396, l'Empereur Théodose avait divisé l'Empire
romain entre ses deux fils. Arcadius, l'aîné, reçut l'Orient ; son cadet
Honorius eut l'Occident. A noter que la division de l'Empire romain ne fit
que précipiter sa chute.
[3]
Le
concile de Nicée,
réuni en 325, avait établi que le Christ était de la même nature
divine que Dieu. Mais les ariens (suivant la doctrine de l’évêqueArius),
considéraient que Jésus, de par sa nature humaine, ne pouvait pas
être l’égal de Dieu. A ne pas confondre avec le terme employé par la
propagande du
troisième Reich.
[4]
Selon les sources chrétiennes, Paris
aurait été épargnée grâce à l’intervention de Sainte Geneviève,
qui déconseilla aux habitants de fuir.
[5]
Aetius, pendant sa jeunesse, avait été envoyé comme otage à la Cour
d'Alaric,
roi des Wisigoths, et de Ruga, roi des Huns.
[6]
En 452,
Attila marcha sur Rome, mais il fut contraint de rebrousser
chemin précipitamment car il apprit que les Huns installés en Pannonie
(actuelle Hongrie) étaient attaqués par Marcien. Attila mourut peu de temps
après, en 453. En raison des querelles de succession, mais aussi des
velléités d'indépendance des peuples tributaires, l’Empire hunnique se
désagrégea en l'espace de quelques années, donnant naissance à une multitude
de petits territoires indépendants.
[7]
Comme ce fut les cas des Alains, des Ostrogoths, des Gépides, des Skires, etc.
[8]
La capitale d'Attila se trouvait vraisemblablement en Hongrie, bien
que nous ne connaissons par son emplacement exact.