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Mythologie
 
 

 

 

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Les mensonges de l'Histoire


L'Enfer

L'Enfer tel que nous l'imaginons aujourd'hui est un lieu de perdition, baigné de flammes ardentes, où les âmes impures sont punies par Satan et ses démons.

Toutefois, cette conception de l'Enfer semble quelque peu illogique : en effet, si le diable est une créature mauvaise, pourquoi punirait-il les défunts ayant vécu dans le pêché ? Ne devrait-il pas au contraire féliciter et remercier les « méchants » qui arrivent en Enfer ? Ou alors cela signifie t-il que Satan punit les pêcheurs car il n'est qu'une créature aux ordres de Dieu ?

 

L'Enfer tel que nous le concevons aujourd'hui est une invention récente à l'échelle de l'histoire de l'humanité, tout comme l'antagonisme entre le bien (Dieu) et le mal (Satan).

Au cours de l'Antiquité, à l'époque ou le polythéisme était la norme, il n'existait pas de divinités « gentilles » ou de divinités « méchantes. » A l'instar des humains, les dieux étaient capable de faire le bien, mais aussi le mal : l'on peut citer Zeus, roi des dieux de l'Olympe, qui se transformait en animal pour violer ses conquêtes féminines ; Loki, dans la mythologie scandinave, qui contribua au meurtre de Balder, mais qui aida son frère Thor à retrouver son marteau, volé par des géants de glace[1] ; et la déesse égyptienne Sekhmet, dotée du pouvoir de guérison, qui massacra toutefois une partie de l'humanité aux ordres de .

 

L'outre-monde, dans de nombreuses mythologies, était donc aussi complexe que ces divinités à visage humain. 

Dans la mythologie égyptienne, le périple jusqu’à Osiris[2], souverain du royaume des morts, n’était pas de tout repos. Le chemin étant parsemé d’embuches, le ka (c'est-à-dire le double spirituel du défunt) pouvait s’aider du livre des morts, un papyrus contenant de nombreuses formules magiques, acheté à prix d'or auprès du clergé égyptien (l'ouvrage était alors placé dans le sarcophage du défunt). Voyageant dans un monde où les notions d’espace et de temps disparaissent, le ka pouvait avoir recours à des transformations afin de survivre à ces distorsions de la réalité. Arrivé devant Osiris, le ka était jugé pour ses actions commises sur Terre : si son cœur, placé sur une balance, était plus lourd qu'une plume, le défunt était dévoré par une créature monstrueuse ; toutefois, si le cœur et la plume étaient en équilibre, le ka pouvait ainsi se rendre aux champs d’Ialou, où les âmes pures pouvaient passer l’éternité en paix.

Du côté des Egyptiens comme des Grecs, les Enfers n'avaient pas de réelle connotation négative, étant un endroit où toutes les âmes se rendaient après leur mort. Dans la mythologie grecque, ce lieu était baigné par le Styx, un fleuve qui ne pouvait être traversé qu'à l'aide d'un passeur nommé Charon, qui réclamait une pièce pour chaque passage (les défunts étaient donc ensevelis avec une pièce dans la bouche). A noter que sur les berges du Styx erraient les âmes qui n’avaient pas été ensevelies. Les Enfers, dont l'entrée était protégée par le chien à trois têtes Cerbère, étaient divisés en trois parties : la plaine des Asphodèles (peuplée par les âmes qui avaient mené une vie apathique, n’ayant rien accompli de leur vivant, en bien ou en mal) ; le Tartare (réservé à ceux qui avaient commis de grands crimes au cours de leur vie terrestre, ces derniers étaient condamnés à y endurer d’atroces souffrances) ; et les champs Elysées[3] (un lieu très agréable, réservé aux grands héros qui avaient plu aux dieux). Les Enfers étaient gouvernés par Hadès (ou Pluton, dans la mythologie romaine), une divinité non maléfique.

A noter que la mythologie scandinave est la seule où l'on retrouve un Enfer comportant une connotation négative : Helheim, le monde des morts, domaine Hel[4], déesse de la mort. Il s'agit d'un lieu sombre et glacial, où résidaient les défunts, souffrant éternellement de froid et de faim[5] (à noter toutefois que les guerriers morts les armes à la main pouvaient pénétrer au Walhalla, le palais d'Odin).

 

Au fil des siècles, les Romains reprirent de nombreux éléments de la mythologie grecque, qui firent l'objet d'un syncrétisme suite à l'arrivée du christianisme.

Les premiers chrétiens présentaient l'Enfer comme un lieu souterrain, où les âmes des défunts s'endormaient afin d'y mener une vie léthargique. Dans la traduction grecque de l'Ancien Testament, cet endroit est baptisé Hadès ; dans la traduction Louis Second de 1910, il est nommé séjour des morts, mauvaise traduction du mot hébreu « sheol. » 

En effet, le christianisme primitif s'inspirait grandement des traditions juives (cette nouvelle religion étant considérée comme une « secte juive » par les autorités romaines des premiers siècles de notre ère[6]). Ainsi, dans la Torah, le sheol est présenté comme un lieu sombre et silencieux, où viennent se coucher l'âme des défunts. Il s'agit d'un endroit « égalitaire », dans lequel tous les morts se rendent, qu'ils soient justes ou impies, riches ou pauvres, pieux ou impies. A noter enfin qu'il n'existe pas de rétribution des âmes au sheol, ce dernier n'étant dirigé par aucune divinité.

Toutefois, la mythologie juive évolua au fil des siècles, principalement au contact du monde grec, qui prêchait alors l'immortalité de l'âme. Ainsi, dans le livre d'Enoch (attribué à un ancêtre de Noé mais datant en réalité de la fin du IV° siècle), l'auteur décrit un sheol divisé en quatre parties : le premier est peuplé par les justes qui attendent le Jour du Jugement ; le second par les défunts plutôt bons ; le troisième, la Géhenne (de l'hébreu Guei Hinnom ou « vallée de Hinnom », une décharge où étaient incinérés les détritus et les corps des criminels), où les pêcheurs étaient punis en attendant leur jugement ; et enfin un quatrième lieu dans lequel l'on trouvait les impurs indignes de la résurrection.

Aujourd'hui, selon la religion judaïque, la Géhenne n'est pas forcément un lieu de souffrance physique, mais plutôt de honte (en raison des mauvaises actions commises sur Terre). Cet enfer n'est pas définitif, et chacun peut retourner au sheol.

 

Au fil des siècles, l'Eglise catholique s'éloigna des concepts de l'après-vie judaïque, pour donner naissance à une conception duelle du monde : le paradis (du grec paradeisos, désignant un parc entouré de murs, faisant référence à l'origine au Jardin d'Eden), régi par Dieu ; et l'Enfer, sur lequel règne Satan et ses sbires. Dans la mythologie catholique, la Géhenne est donc un endroit où souffrent pour l'éternité les défunt ayant mené une vie pécheresse sur Terre.

A noter cependant que deux autres concepts vinrent se greffer aux deux précédents : le purgatoire (du latin purgare, ce qui signifie « se purger, purifier »), un lieu proche de l'Enfer où les âmes pouvant être sauvées expirent leur pêchés pendant une période plus ou moins longue, avant d'accéder au paradis (le purgatoire, qui n'est pas mentionné dans la Bible, n'est donc pas reconnu par les chrétiens orthodoxes et les protestants[7]) ; et les limbes (du latin limbus, ou « frange, marge »), où évoluaient l'âme des enfants décédés avant d'avoir reçu le baptême (à noter que ce concept fut officiellement condamné par l'Eglise catholique en 2007).

 

Comme nous pouvons le constater, l'Enfer que nous nous représentons aujourd'hui est donc une construction inspirée du judaïsme et de la mythologie gréco-romaine, elle-même probablement inspirée des traditions égyptiennes.

C'est cet Enfer baigné de flammes, que l'on retrouve aussi dans de nombreuses religions orientales, qui fit dire à Victor Hugo : Enfer chrétien : du feu. Enfer païen : du feu. Enfer mahométan : du feu. Enfer hindou : des flammes. A en croire les religions, Dieu est un rôtisseur

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[1] Vous trouverez le récit de la mort de Balder en 9, section I, chapitre deuxième, mythologie scandinave. Concernant la légende du marteau de Thor, voir le 2, section II, chapitre premier, mythologie scandinave.

[2] Pour en savoir plus sur le mythe d'Osiris, voir le 3, section II, chapitre second, mythologie égyptienne.

[3] A noter que les champs Elysées de la mythologie grecque furent sans doute inspirés par les que les champs d'Ialou, que nous avons présenté plus tôt.

[4] Qui a donné son nom au mot anglais Hell, ou « enfer. »

[5] A noter qu'en raison de la mise à l'écrit des mythes scandinaves entre le X° et le XIII° siècle, ces derniers ont pu être « corrompus » par les traditions chrétiennes, déjà présentes dans le nord de l'Europe à cette époque. Ainsi, la présence du chien Garm, un monstre doté de quatre yeux, chargé de protéger l'entrée de Helheim, rappelle grandement le mythe de Cerbère.

[6] Pour en savoir plus sur le développement du christianisme dans l'Empire romain, cliquez ici.

[7] A noter que Martin Luther, fondateur du protestantisme, rejetait l'idée d'un Enfer où les impurs souffraient dans les flammes. Au contraire, ce dernier avança l'idée du sommeil éternel, très proche du sheol judaïque. 

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