Car un pays sans passé est un pays sans avenir...

 
Mythologie
 
 

 

 

adblocktest

 

Les mensonges de l'Histoire


Le Stakhanovisme

Aujourd'hui, nous savons tous ce qu'est le stakhanovisme, inspiré du nom du mineur russe Alekseï Stakhanov, qui en 1935 parvint à dépasser largement le quota imposé à chaque travailleur des mines de charbon. Par la suite, l'effort de Stakhanov fut mis en exergue par la propagande soviétique, et présenté comme un exemple de volontarisme exacerbé.

Mais cette méthode de travail, incitant les travailleurs à dépasser leurs limites, est-elle fondée sur un fait réel ? Anton Stakhanov parvint-il vraiment à dépasser les quotas en l'espace d'une nuit ? Ou bien le stakhanovisme n'est-il qu'une vaste escroquerie ?

Affiche de propagande soviétique.

 

Voici la définition que nous donne le Petit Robert (édition 1990) au mot stakhanovisme : nom masculin. (1936, du nom du mineur russe Stakhanov). En URSS, Méthode d'augmentation du rendement du travail par des initiatives des travailleurs.

 

Stakhanov naquit en janvier 1906 à Lugovaya, dans la région d'Orel[1]. Agé d'une vingtaine d'années, il commença à travailler à la mine de Tsentralnaïa-Irmino, près de la cité de Kadievka, dans la région de Luhansk (aujourd'hui territoire ukrainien).

Ce dernier, affecté à l'équipe des perforateurs en 1933, accomplit un premier exploit en août 1935, parvenant à extraire 102 tonnes de charbon en l'espace de presque six heures (soit quatorze fois le quota demandé à un mineur). Puis, en septembre de la même année, il pulvérisa son record, extrayant cette fois 227 tonnes de charbon en l'espace d'une journée.

Stakhanov à la mine.

L'exploit de Stakhanov fut rapidement récupéré par la propagande communiste, qui alimenta la presse russe des exploits de ce mineur soviétique. En l'espace de quelques semaines, de nombreux Russes (ouvriers, agriculteurs, bucherons, cordonniers, tisserands, etc.), animés par un esprit d'émulation, tentèrent à leur tour d'égaler l'exploit de Stakhanov[2]. A noter que ce récit s'exporta aussi à l'étranger, et Stakhanov fit même la « Une » de l'hebdomadaire américain Time en décembre 1935.

Stakhanov à la « Une » de l'hebdomadaire Time, décembre 1935.

La méthode stakhanoviste, rencontrant un grand succès, se propagea dans tout l'URSS à compter de 1936, étant vantée par le gouvernement soviétique à grands renforts de propagande (c'est ainsi que les usines furent invitées à organiser des compétitions stakhanovistes). Ce mouvement entraîna une grosse augmentation de la productivité en URSS, qui augmenta de 82 % en 1937. Pendant la Seconde Guerre mondiale, les stakhanovistes imposèrent des rythmes de travail démesurés, tels que le dvukhsotnik (200 % des quotas journaliers) ou le tysyachniki (1000 % des quotas journaliers). 

Stakhanov, quant à lui, partit faire des études à Moscou en 1936, avant d'être nommé directeur de la mine N° 31 à Karaganda, au Kazakhstan (entre 1941 et 1942). Puis, il fut employé au ministère de l'Industrie du charbon de l'URSS, entre 1943 et 1957. Pendant sa carrière, Stakhanov fut décoré de l'Ordre de Lénine (qui récompensait entre-autres les civils ayant œuvré pour l'Etat), de l'Ordre du Drapeau Rouge du Travail (récompensant les actes de bravoure et de performance au travail), et reçut plusieurs autres médailles. A sa mort, en 1978, la cité de Kadievka fut rebaptisée Stakhanov en son honneur.

 

Cependant, dès les années 1980, le stakhanovisme commença à être battu en brèche en URSS, considéré comme un instrument de la propagande stalinienne. En 1988, le quotidien Komsomolskaya Pravda (ou « Vérité du Komsomol » en français[3]) annonça que si Stakhanov avait bien procédé tout seul à l'extraction du charbon, deux de ses camarades avaient travaillé aux travaux de consolidation des parois de la galerie.

A noter toutefois qu'à cette date, l'URSS n'avait pas encore disparu, et les journalistes du Komsomolskaya Pravda n'osèrent pas critiquer trop vivement le défunt, encore auréolé par sa légende. Cependant, l'on sait aujourd'hui que « l'exploit » de Stakhanov avait été organisé en amont par le Parti communiste de la mine de Tsentralnaïa-Irmino, qui à l'époque possédait un matériel de mauvaise qualité, ne disposait pas de travailleurs qualifiés, et ne remplissait donc pas ses quotas. C'est ainsi que Stakhanov fut mis en avant, équipé du meilleur matériel possible, et assisté dans sa tâche par de nombreux ouvriers, chargés non seulement de consolider les parois de la mine, mais aussi d'extraire le charbon et de le ramener à la surface.

Cependant, le mouvement stakhanoviste eut aussi des effets pervers, provoquant la détérioration rapide des équipements à cause des cadences forcées, mais aussi une baisse de la qualité de la production. En outre, la hausse démesurée des objectifs à atteindre entraîna une dégradation du niveau de vie du peuple russe : multiplication des sanctions contre les « mauvais ouvriers », lutte contre l'absentéisme et les retardataires, augmentation du temps de travail, peines de prison pour les travailleurs récalcitrants, etc. 

___________________________________________________________________________________________

comments powered by Disqus

 


[1] A noter que Stakhanov fut baptisé par erreur Alekseï par la presse soviétique. En réalité, il s'appelait vraisemblablement Andreï ou Aleksandr.

[2] C'est ainsi qu'en 1936, un dénommé Nikita Izotiv aurait réussi à extraire 607 tonnes de charbon en une seule journée de travail.

[3] Le Komsomol (Kommunisticheskii Soyuz Molodyozhi en russe), ou Union des jeunesses léninistes communistes, était un organisme auquel pouvaient adhérer les jeunes russes âgés de 15 à 18 ans. Le Komosomol, fondé en 1918, comptait 40 millions de membres en 1981, et possédait un journal officiel, le Komsomolskaya Pravda.

Publicités
 
Partenaires

  Rois & PrésidentsEgypte-Ancienne

Rois et Reines Historia Nostra

Egypte

 

 Histoire Généalogie