Aujourd'hui, nous connaissons tous plus ou moins
les personnages de Lénine et Staline, qui régnèrent sur la
Russie entre 1917 et 1953.
Cependant, s'il est aujourd'hui communément admis que le second fut l'un des
pires dictateurs de l'Histoire, le premier a su conserver une aura plutôt
bienveillante, du moins en Europe occidentale.
Ainsi, qu'en est-il en réalité ? Staline eut-il l'apanage des exactions et
des atrocités commises contre les populations civiles ? Ou bien Lénine
fut-il lui aussi un personnage bien moins respectable qu'on ne pourrait le
croire
?
Discours de Lénine en 1917.
- La Russie en 1917 : En 1917, la Russie se trouvait dans une
situation particulièrement difficile. La Première Guerre mon
diale[1],
qui avait débuté en août 1914, n'avait pas évolué en faveur des Russes :
pendant l'été, les Allemands franchirent la frontière russe ; en 1915,
l'armée allemande progressa de 150 kilomètres en territoire ennemi, dans le
cadre de l'offensive
Gorlice-Tarnow ; en 1916, les
Russes parvinrent à enfoncer la ligne de front à la frontière autrichienne,
progressant d'une centaine de kilomètres, mais au prix de lourdes pertes[2]
(d'autant qu'ils restèrent bloqués face à l'armée allemande).
Cette incapacité à lutter efficacement contre l'Allemagne avait
plongé l’armée russe dans une crise profonde, d'autant que d'autant
que les
« boches » étaient contraints de lutter sur deux fronts (à l'ouest
et à l'est), subissant aussi un important blocus économique organisé
par la marine anglaise.
Faisant face à de très importantes pertes (un million
de morts pour six millions de blessés), de nombreux soldats
décidèrent de se mutiner ou de déserter en début d’année 1917.
D’un point de vue économique, la situation n’était guère plus
brillante. Ainsi, bien que doté d’un important taux de croissance
avant guerre, le pays était coupé du marché européen depuis le
déclenchement du premier conflit mondial. Par ailleurs, à cause
d’une perturbation des voies commerciales et d’un hiver rude,
plusieurs pénuries alimentaires furent constatées en début d’année
1917.
- La révolution de Février (mars 1917), la constitution du
gouvernement provisoire : La capitale russe, Petrograd[3],
fut agitée par plusieurs grèves à la mi-février 1917. Puis, le 5
mars, alors que les autorités annonçaient la mise en place d’un
système de rationnement, l’usine d’armement Poutilov(la
plus grande entreprise de la ville), en rupture d’approvisionnement,
fut contrainte de licencier plusieurs milliers d’ouvriers.
Quelques jours plus tard, le 8 mars 1917, plusieurs
cortèges féminins, à l’occasion de lajournée
internationale de la femme[4],
manifestèrent dans le centre-ville de Petrograd afin de réclamer du
pain.
Mouvement spontané à l’origine, le cortège fut bientôt rejoint par
les ouvriers en colère, qui aux cris contre la guerre ajoutèrent des
« vive la république ! »
Le 9 et le 10, de nouvelles manifestations se déroulèrent,
rassemblant près de 150 000 ouvriers en colère. Ces derniers, se
faisant plus radicaux, proclamèrent la grève générale.
Manifestation
à Petrograd, mars 1917.
Au soir du 10 mars, le tsar Nicolas II[5]
ayant été averti de la situation, décida de mater l’émeute par la
force, refusant tout compromis.
Ainsi, lors de la manifestation du 11 mars, l’armée reçut l’ordre de
tirer sur la foule, ce qui causa la mort de 150 personnes. L’émeute
semblait être brisée, cependant, une partie des militaires
commencèrent à fraterniser avec les manifestants (certains soldats
firent feu sur la police).
Nicolas II, acculé, décida dans la soirée de
proclamer l’état de siège, renvoyant laDouma[6]et
nommant uncomité
provisoire.
Cependant, dans la nuit du 11 au 12 mars 1917, deux nouveaux
régiments se mutinèrent, distribuant au petit matin des fusils à la
foule en colère. Les militaires, occupant les points stratégiques de
la ville, étaient désormais en position de force.
Dans la journée du 12 mars, il fut décidé d’organiser
unsoviet[7],
réunissant une cinquantaine de militants de tendances diverses (bolcheviks[8],mencheviks[9],
etsocialistes-révolutionnaires[10]).
C’est ainsi que fut organisé uncomité
exécutif des députés ouvriers, ainsi que la création d’un
journal, les
Izvestia[11](à
noter que l’annonce des évènements de Petrograd entraîna la mise en
place d’un soviet à Moscou quelques jours plus tard).
Le soviet de
Petrograd, mars 1917.
Cependant, parallèlement à la création du soviet, un groupe de
députés de la Douma décida de former uncomité
provisoire pour le rétablissement de l’ordre gouvernemental et
public. Pour ces élus, la priorité était le rétablissement de
l’autorité et le retour des soldats dans leurs baraquements.
Dès lors, de nombreuses négociations eurent lieu
entre les deux comités provisoires, aboutissant finalement à un
compromis à la mi-mars 1917 : le soviet acceptait de reconnaitre,
dans l’attente de la mise en place d’uneassemblée
constituante[12],
ungouvernement
provisoireà tendance
libérale (ce dernier fut majoritairement composé de membres duParti
constitutionnel-démocratique, formé en octobre 1905[13]).
En contrepartie, ce gouvernement provisoire était chargé d’instaurer
plusieurs réformes démocratiques, telles que la garantie de la
liberté d’expression, l’adoption du suffrage universel, la
suppression de la police (remplacée par des milices populaires.),
l’abolition des discriminations (sur les religions, classes ou
nationalités.), et l’amnistie des prisonniers politiques.
Au même moment, l’Etat-major russe fit pression sur Nicolas II afin
que ce dernier abandonne son trône. Le tsar décida alors d’abdiquer
le 15 mars, au profit de son frèreMikhaïl
Alexandrovitch(cependant, ce dernier abdiqua à son tour dès le
lendemain).
- Les difficultés du gouvernement provisoire (mars à août 1917)
:
Dans un premier temps, le gouvernement provisoire fit preuve de
bonne volonté, fit appliquer les réformes exigées par le soviet
(abolition de la peine de mort, libération des prisonniers
politiques, proclamation de la liberté de presse, de réunion et de
conscience).
Mais ce dernier se retrouva vite dans une position difficile,
faisant face au mécontentement de la rue, qui réclamait la fin de la
guerre avec l'Allemagne (
de
nouvelles manifestations furent organisées début mai 1917).
Cependant,
seule la Douma pouvait ratifier les questions
d'ordre territoriales
ou concernant les Affaires étrangères ; cependant, cette dernière ne
pouvait être réunie car les millions d’hommes combattant sur le
front ne pouvaient pas voter, retardant de ce fait l’organisation
d’élections législatives.
En outre, pendant le mois de juillet 1917, une contre-attaque
autrichienne (renforcée par des unités allemandes) parvint à
percer la ligne de front russe, progressant de 250 kilomètres vers
l'est. Cette offensive, particulièrement meurtrière (400 000 tués et
blessés, sans compter les déserteurs), ne fit que fragiliser un peu
plus le gouvernement provisoire. C
et
échec fut alors récupéré par les bolcheviks, partisans d’une paix
immédiate.
Ces derniers, qui au printemps 1917 étaient minoritaires au soviet,
malgré leur nom (qui signifie
« majorité»),
parvinrent à gagner de l’influence au cours de l'été.
Vladimir Ilitch Oulianov[14],
plus connu sous le nom deLénine[15],
fit son retour en Russie au printemps 1917, suite à l’amnistie
proclamée par le gouvernement provisoire (ce dernier rentra de
Suisse en passant par l’Allemagne, le gouvernement allemand ayant
financé le voyage de Lénine, accordant au convoi une immunité
diplomatique[16]).
Suite à son arrivée en Russie, Lénine décida alors de
diffuser sesthèses
d’avril dans le journal bolchevik laPravda[17]: aucun soutien au gouvernement provisoire,
transfert de tous les pouvoirs au soviet, confiscation de toutes les
terres des propriétaires fonciers, fusion de toutes les banques du
pays en une banque unique sous le contrôle du soviet, et création
d’uneTroisième
Internationale[18].
Mais à la mi-juillet 1917, de nouvelles manifestations éclatèrent à
Petrograd, les soldats en garnison dans la capitale refusant de
partir au front. Les bolcheviks, craignant de perdre toute influence
s’ils ne soutenaient pas les manifestants, participèrent donc au
mouvement.
Cependant, le gouvernement provisoire accusa les bolcheviks d'être
financés par l'Allemagne, et de fomenter volontairement des troubles
en Russie : ainsi, de nouvelles troupes furent envoyées en renfort à
Petrograd (les régiments mutins furent dissous et envoyés au
front.), la peine de mort fut rétablie, les civils furent désarmés,
la Pravda fut interdite, Lénine s’exila en Finlande, et de nombreux
bolcheviks furent arrêtés.
Répression des
manifestations de juillet 1917 à
Petrograd.
Au mois d'août, le gouvernement
provisoire décida de confier la charge de
commandant en chef des armées au général
Lavr Gueorguievitch Kornilov[19].
Le général Kornilov.
Ce dernier, à la tête d’une armée en pleine déliquescence, décida
alors de mettre en place une discipline de fer (les déserteurs
seraient fusillés et leurs cadavres exposés), menaçant de lourdes
sanctions les paysans s’attaquant aux domaines seigneuriaux.
Aux yeux des aristocrates et de la bourgeoisie, Kornilov devint
rapidement l’instrument de la vengeance. Ainsi, à la fin du mois
d’août 1917, il envoya par train trois régiments de cavalerie à
Petrograd, dans le but d’écraser le soviet et les syndicats appelant
à la grève.
Le gouvernement provisoire, pris entre deux feux,
décida toutefois de proclamer hors-la-loi les troupes de Kornilov.
Les bolcheviks, quant à eux, assurèrent la défense de Petrograd en
s’appuyant sur laGarde
rouge[20],
faisant creuser des tranchées autour de la ville, et détournant les
trains transportant les troupes contre-révolutionnaires.
Patrouille de la Garde rouge à Petrograd,
octobre 1917.
Finalement, le coup d’Etat fit long feu, mais les conséquences de ce
putsch raté furent importantes : la population de Petrograd fut
réarmée, et les bolcheviks refirent surface (sortant de prison ou
rentrant d’exil.).
Par ailleurs, le gouvernement provisoire était désormais à l’agonie.
En effet, s’étant attaqué à l’armée, il s’était aliéné la droite ;
ayant fait tirer sur la foule en juillet, il était détesté par la
gauche.
- La Révolution d'octobre (novembre 1917), la prise de pouvoir
des bolcheviks :
Suite à l’affaire Kornilov, les bolcheviks ne
cessèrent de gagner en influence. A la mi-septembre 1917, ces
derniers furent majoritaires au soviet de Petrograd ; à la
mi-octobre,Lev
Davidovitch Bronstein[21](surnomméTrotsky)fut
élu à sa présidence.
Par ailleurs, les élections municipales de Moscou, organisées
pendant l’été, démontrèrent la perte de vitesse des partis
« compromis » avec le gouvernement provisoire. Ainsi, les
socialistes-révolutionnaires reçurent 54 000 voix (contre 375 000 au
précédent scrutin), les mencheviks 16 000 (contre 76 000), les KD
101 000 (contre 109 000).
Ainsi, les bolcheviks sortaient vainqueurs de ces élections, ayant
presque triplé leur précédent score, avec 198 000 voix (contre
75 000 autrefois).
Fin août, les SR et les mencheviks ayant décidé de se rapprocher des
bolcheviks, le soviet de Petrograd et les 126 soviets de province
votèrent une résolution en faveur d’un transfert de pouvoir intégral
aux soviets.
Dans les campagnes, les paysans refusèrent d’attendre plus longtemps
la réforme agraire, et se soulevèrent contre les propriétaires
terriens. Si cette révolte ne se fit pas toujours dans la violence,
les propriétés de certains aristocrates furent incendiées, et leurs
propriétaires assassinés.
En outre, apprenant que le partage des terres avait commencé, de
nombreux soldats russes décidèrent de déserter afin de participer au
redécoupage territorial.
L’armée russe, alors en grande difficulté, était désormais
immobilisée et incapable de lutter contre les austro-allemands.
Ainsi, les Allemands parvinrent à prendre Riga le 1erseptembre,
la garnison ayant préféré fuir plutôt que combattre.
A l’automne, de longs débats se déroulèrent au sein
du parti bolchevique, quant au bien fondé d’une insurrection armée
dirigée contre le gouvernement provisoire. Malgré les protestations
de plusieurs membres (qui
estimaient qu’une action hors-la-loi les isoleraient sur la scène
internationale), Lénine et Trotsky parvinrent
à l’emporter, fixant la date de l’insurrection au 7 novembre 1917[22],
jour de réunion duDeuxième
congrès des soviets[23].
Puis, fin octobre, uncomité
militaire révolutionnairefut
instauré, présidé par Trotsky.
Cet organe, composé d’ouvriers armés, de soldats et de marins, fut
chargé de préparer le coup d’Etat du 7 novembre (ralliement de la
garnison de Petrograd, repérage des points stratégiques, etc.).
A noter que le futur putsch n’était pas ignoré les membres du
gouvernement provisoire, ces derniers souhaitant l’affrontement afin
de pouvoir se débarrasser des bolcheviks une bonne fois pour toutes.
Dans la nuit du 6 au 7 novembre 1917, à la date prévue,
l’insurrection éclata. Plusieurs milliers d’affiches, diffusées par
le comité militaire révolutionnaire, furent collées sur les murs de
la ville. La déposition du gouvernement provisoire était proclamée,
ainsi que le transfert du pouvoir entre les mains du soviet de
Petrograd.
LaRévolution
d’octobrese fit
presque sans effusion de sang. Ainsi, la Garde rouge s’empara des
points stratégiques (ponts, gares, banques, etc.), afin de lancer un
assaut final sur lepalais
d’Hiver, siège du gouvernement provisoire[24].
L'assaut sur le palais d'hiver, 7
novembre 1917.
Rencontrant peu de résistance (la majorité des régiments accueillit
avec bienveillance l’insurrection, la rejoignant ou restant
neutres), les bolcheviks se rendirent maitres de Petrograd au petit
matin du 7 novembre.
Le même jour, Trotsky annonça la dissolution du gouvernement
provisoire, et l’ouverture du Deuxième congrès des soviets.
Cependant, une cinquantaine de participants, membres du SR ou
mencheviks, préférèrent quitter la salle, estimant que les
bolcheviks avaient pris le pouvoir illégalement. Ils créèrent alors
lecomité de salut de
la patrie et de la révolution.
Trotsky, dénonçant les démissionnaires comme des traitres à la
révolution, fit ratifier par le congrès des soviets la constitution
d’unconseil des
commissaires des peuples, faisant office de nouveau gouvernement
(ce dernier étant exclusivement composé de bolcheviks.).
Lénine, président duSovnarkom[25],
promulgua alors une série de mesures en l’espace de quelques
heures : abolition de la peine de mort, nationalisation des banques,
création d’une milice ouvrière, suppression des privilèges, etc.
Cependant, ce coup de force ne fut pas du goût de tous
: à Moscou, le maire socialiste-révolutionnaire fit ouvrir le feu sur
les bolcheviks tentant de prendre le Kremlin ; à Petrograd, les fonctionnaires se mirent en grève afin de
protester ; enfin, plusieurs journaux dénoncèrent ouvertement les
bolcheviks, accusés d’être desagents
du Kaiser[26].
Ainsi, malgré la promesse de garantir la liberté de presse ou
d’expression, Lénine fit interdire plusieurs journaux dans la
capitale, et de nombreux KDfurent
incarcérés.
Par ailleurs, le comité militaire révolutionnaire, créé en octobre
1917 et présidé par Trotsky fut dissous le 19 décembre, et remplacé
dès le lendemain par laTchéka[27].
Cette police secrète, sans aucune base légale ou judiciaire, avait
comme tâche de lutter contre les ennemis du régime. Cette
organisation fut un des principaux instruments de laTerreur
rouge[28],
qui fit plusieurs milliers de victimes à compter de l’automne 1918.
Cependant, cette oligarchie bolchevique fut rapidement contestée par les
membres du Deuxième congrès des soviets, qui réclamèrent l’ouverture du
gouvernement aux représentants d’autres partis.
Lénine, mis en minorité, fut donc contraint de
transiger : bien que refusant une coalition unissant tous les
socialistes, il accepta de faire rentrer au gouvernement plusieurssocialistes-révolutionnaires
de gauche[29].
Puis, en décembre 1917, l’assemblée constituante tant attendue fut
finalement élue. Cependant, contrairement à ce que pensait Lénine,
les bolcheviks s’y trouvaient en minorité, soit 175 élus sur 707
députés. En effet, les campagnes avaient massivement voté en faveur
des socialistes-révolutionnaires, plus proches de la paysannerie que
les bolcheviks.
C'est alors que la Garde rouge proclama la dissolution de la
constituante, suite à la
première réunion de cette assemblée, le 19 janvier 1918. Ce coup de force anti-démocratique ne fut pas sans
conséquences, et plusieurs milliers de manifestants se rassemblèrent
afin de protester contre cet évènement. Cependant, Lénine n’hésita
pas à réprimer cette émeute, et une vingtaine de manifestants furent
tués.
- Le traité de Brest-Litovsk (mars 1918) :
Une des premières décisions du conseil des commissaires des peuples,
dès novembre 1917, fut de mettre en place des pourparlers avec le
gouvernement allemand.
Ainsi, un armistice fut signé avec l’Allemagne dès le 15 décembre,
suivi le 22 par l’ouverture des pourparlers entre les deux
belligérants (à noter que la France et l'Angleterre, pourtant alliés
de la Russie, ne furent pas invités à la table des négociations).
La délégation russe, présidée par Trotsky, pensait pouvoir obtenir unepaix sans annexion
ni indemnités, malgré les nombreux revers subis par l'armée
russe pendant le conflit (les bolcheviks pensaient que le gouvernement allemand,
trop heureux de mettre un terme au conflit sur le front est,
négocierait une paix magnanime).
Cependant, les conditions de paix exigées par l’Allemagne, sortant grand
vainqueur du conflit, étaient lourdes : indépendance de la Lituanie
et de la Pologne russe, c'est-à-dire les territoires occupés par
l'armée allemande (à noter que l’objectif du gouvernement allemand n’était pas d’annexer
ces deux Etats, mais d’en faire des pays satellites dépendants de
l’Allemagne).
La délégation russe, outrée par les exigences allemandes, refusa de signer le traité, pensant que la révolution se propagerait
rapidement en Allemagne. Cependant, les Allemands profitèrent de ces
quelques semaines de répit pour occuper les pays baltes et l’Ukraine
en février 1918, l’armée russe n’existant plus.
F
inalement, poussée par Lénine qui réclamait la paix, la délégation
russe fut contrainte de signer le traité de Brest-Litovsk[30]le
3 mars 1918.
Signature du traité de Brest-Litovk, mars
1918.
Le traité de paix était encore plus sévère que lors des
pourparlers : ainsi, la Russie abandonnait l’Estonie, la Lettonie,
la Lituanie, la Pologne russe et l’Ukraine ; et devait payer à
l’Allemagne une indemnité de 94 tonnes d’or.
La Russie perdait ainsi le quart de sa population, 27 % de sa surface
cultivée, et 75 % de sa production d'acier et de fer.
A noter que cette paix séparée ne fut pas au goût de Paris et
Londres, car la fin de la guerre sur le front est permit à l’Etat-major allemand
de transférer plusieurs dizaines de milliers de soldats en France,
redonnant ainsi une nouvelle impulsion au conflit sur le front
ouest.
- Les bolcheviks menacés instaurent une dictature (1918) :
Les bolcheviks, accusés d'avoir signé une paix
honteuse, furent alors contraints de faire face à une nouvelle
menace, les forces tsaristes
(surnommées lesBlancs)
tentant de reprendre le pouvoir en Russie. Ces derniers furent
d'ailleurs financés par plusieurs pays européens à compter de l'été
1918.
Lénine, à la tête duSovnarkom,
se retrouvait dans une situation délicate, contesté par les
puissances étrangères, mais aussi par plusieurs partis politiques
russes (lesmencheviks,
SR et SR de gauche décidèrent de rompre leur relations avec les
bolcheviks suite à la signature du traité de Brest-Litovsk).
Décidant de transférer le gouvernement à Moscou en janvier 1918[31],
Lénine transforma la Garde rouge enArmée
rouge(février
1918) ; en avril, 500 anarchistes moscovites furent incarcérés, la
censure fut rétablie et les peines contre les délits de presse
renforcées ; entre mai et juin 1918, plusieurs soviets de Russie,
dominés par les SR ou les mencheviks, furent fermés par la Tchéka ;
plusieurs manifestations ouvrières et insurrections paysannes,
éclatant pendant l’été 1918, furent sévèrement réprimées ; en
juillet 1918, le tsarNicolas
IIet sa famille
furent assassinés par les bolcheviks ; laTerreur
rougefut
proclamée en septembre 1918 (plus de 10 000 bourgeois emprisonnés
furent passés par les armes[32]) ;
en novembre 1918, il fut décidé d’ouvrir plusieurscamps
de concentration, destinés à accueillir les« ennemis
de classe[33]» ;
enfin, les effectifs de la Tchéka furent considérablement augmentés
(l’on comptait mille tchékistes en avril 1918, contre 37 000 en
janvier 1919).
Quant à
Trotsky,
nommé à la tête de l’Armée rouge, il fit tout son possible pour
redresser la situation.
En mai 1918, le service militaire fut rendu obligatoire de 18 à 40
ans (les effectifs augmentèrent rapidement, passant d’un million à
cinq millions entre 1918 et 1920) ; par ailleurs, afin de pallier à
l’inexpérience de ces nouvelles troupes, d’anciens officiers
tsaristes furent invités à rejoindre les rangs de l’Armée rouge (ils
furent près de 300 000 à l’été 1920[34]).
A l’été 1918, les bolcheviks étaient en état d’infériorité, ne
contrôlant plus que la région de Moscou. Lénine proclama donc
l’adoption du« communisme
de guerre»
à l’été
1918. Ainsi, toutes les usines de plus de dix salariés furent
nationalisées, ainsi que les cinémas, théâtres et ateliers de
photographie ; les ouvriers furent soumis à une discipline de fer
(une grève était considérée comme une désertion, et la désertion en
temps de guerre était passible de la peine de mort.) ; abandonnant
lecalendrier julien
au
profit ducalendrier
grégorien[35],
les bolcheviks multiplièrent les exactions contre le clergé orthodoxe, allié
traditionnel de la monarchie.
Toutefois, si la majorité des Russes n’étaient pas favorables aux
bolcheviks, les Blancs, trop intransigeants, ne parvinrent pas à faire l’unanimité. Ainsi,
les tsaristes prônaient un retour à la monarchie ; souhaitaient
rendre les terres aux grands propriétaires terriens ;
étaient ouvertement antisémites ; enfin, ils n’acceptaient pas
l’idée d’un Pologne indépendante, bien que le pays fut hostile à la
menace bolchevique.
Par ailleurs, au contraire de l’Armée rouge qui était unie, les
armées blanches étaient divisées. Ainsi, l’on retrouvait le généralAnton
Ivanovitch Dénikine[36] en
Crimée, à la tête de l’armée du sud ;
le généralNikolaï
Nikolaïevitch Ioudenitch[37] au
nord-ouest, installé dans les pays baltes ; et l’amiral Alexandre
Vassilievitch Koltchak[38],
en Sibérie.
Le général Anton Ivanovitch Dénikine et l'amiral Alexandre Vassilievitch
Koltchak.
A noter par ailleurs qu’outre les Rouges (les
bolcheviks) et les Blancs, l’on
retrouvait lesVerts,
une petite force dirigée par les SR,
composée de paysans (l’on y trouvait aussi des déserteurs issus des
deux grandes armées). Ces derniers étaient hostiles à la
conscription, aux réquisitions forcées, et à la politique des
bolcheviks qui favorisait les ouvriers des grandes villes.
Ces armées vertes, combattant aussi bien les Rouges que les Blancs,
furent toutefois écrasées au cours de l’été 1921.
- La guerre civile russe (été 1918 à novembre 1921) :
Les armées sibériennes de Koltchak furent les premières à attaquer,
massivement ravitaillées par les puissances européennes (fusils,
mitrailleuses, munitions, vêtements, etc.). Partant de Sibérie, ces
dernières parvinrent à progresser jusqu'à Kazan, à 800 kilomètres à
l'est de Moscou (mars 1919).
Au même moment, Dénikine, parti de Crimée à la tête de 200 000
hommes, se rapprochait peu à peu de la capitale, rendant possible
une jonction avec les troupes de Koltchak. Toutefois, ce dernier fut
stoppé par les bolcheviks à Orel, à 350 kilomètres au sud de Moscou.
La guerre civile russe.
Au printemps 1919, l’Armée rouge décida de contre-attaquer, marchant
en direction de l'armée du général Koltchak. Ce dernier, abandonné par les Britanniques qui
voyaient d’un mauvais œil l’antisémitisme des Blancs, fut contraint
de reculer de mille kilomètres vers l'est, pendant l’été 1919.
Au même moment, Ioudenitch se mit en marche vers Petrograd ;
toutefois, arrivé à une trentaine de kilomètres de l’ancienne
capitale, il fut repoussé par l’Armée rouge. Les troupes
d’Ioudenitch, se réfugiant en Estonie, furent alors évacuée par la
marine britannique (novembre 1919).
Quant à Dénikine, toujours bloqué à Orel, il fut contraint de reculer vers la
Crimée.
Koltchak, miné par la maladie, ne put empêcher la progression de l’Armée rouge,
et fut contraint de traverser la Sibérie en
plein hiver afin d’échapper aux représailles des bolcheviks. Ce
dernier s'installa alors à Irkoutsk, sur les rives du lac Baïkal.
Cependant, les élus de la cité, préférant faire soumission à Moscou, firent
arrêter l’amiral Koltchak, qui fut jugé et exécuté en février 1920.
Suite à l’élimination d’Ioudenitch et de Koltchak, les bolcheviks
s’attaquèrent aux armées blanches de Crimée, commandées par le
généralPiotr
Nikolaïevitch Wrangel[39] (qui avait remplacé Dénikine en avril 1920).
Le général Piotr Nikolaïevitch Wrangel.
Malgré une nette inférioté numérique, Wrangel parvint à contenir les
Rouges pendant un temps ; toutefois, il décida de faire évacuer ses
partisans (soit 70 000 soldats et 80 000 civils.) en novembre 1920,
via les ports de la mer Noire. Ces exilés s’installèrent alors en
France, en Grèce, en Turquie ou en Yougoslavie.
-
En parallèle de la guerre civile russe, la guerre contre la Pologne
et l'Ukraine (1920)
: Comme
nous l'avons vu plus tôt, le traité de Brest-Litovsk avait entraîné
l'indépendance de la Pologne et de l'Ukraine[40].
A l'ouest, le gouvernement polonais avait récupéré la Posnanie et la
moitié ouest de la Prusse orientale (conformément aux clauses du
traité de Versailles, signé en juin 1919) ; à l'est, la
frontière était établie sur l'ancienne ligne de front
russo-allemande de 1918.
Toutefois,
le généralJozef
Klemens Pilsudski[41],
président de laDeuxième
République de Pologne[42],
n’était guère satisfait de cette
frontière est, pas plus que Lénine qui considérait la Pologne comme
territoire russe.
Jozef Klemens Pilsudski.
Ainsi,
profitant de la guerre civile russe,
Pilsudski décida de lancer une
grande offensive en mars 1919, parvenant à déplacer la frontière
d'une centaine de kilomètres vers l'est.
Par la suite, ce dernier
parvint à s’allier avecSimon
Petlioura[43],
président de laRépublique
populaire ukrainienne (à noter qu'en février 1919, les
bolcheviks s'étaient emparés de Kiev) ; toutefois,
les pays baltes
(qui eux aussi avaient obtenu leur indépendance en 1918),
préférèrent faire la paix avec Moscou.
L'année suivante, alors que les
Blancs étaient en position d'infériorité (
Pilsudski
avaient refusé de s'allier avec eux en raison de leur
intransigance), l'armée polonaise lança une grande offensive en
direction de Kiev, capitale de l'Ukraine, alors entre les mains des
Rouges.
La Pologne en juin 1920.
Ces derniers furent contraints de
reculer au mois de mai 1920, mais l'offensive fit long feu. Ainsi,
dès le mois de juin, les bolchevik lancèrent une grande offensive
contre la Pologne, parvenant à progresser de 250 kilomètres vers
l'ouest, effaçant ainsi les conquêtes polonaises du printemps 1919,
et menaçant désormains Varsovie.
La Pologne en août 1920.
Cependant, bénéficiant du
soutien de la France,
Pilsudski parvint à repousser l'ennemi hors de Varsovie, puis
parvint à percer le front russe, contraignant les Rouges à reculer
dans le désordre.
A la mi-octobre 1920, Lénine accepta de mettre en place des
pourparlers avec la Pologne, le gouvernement n’étant plus en mesure
de poursuivre la lutte.
C’est ainsi que fut signée lapaix
de Rigaen mars 1921,
la Russie étant contrainte de céder une partie des territoires occupés
lors de l'offensive polonaise du printemps 1919.
Toutefois, le gouvernement polonais
signait une paix séparée, abandonnant l’Ukraine entre les mains des
Rouges.
A noter toutefois que si la Pologne restait indépendante, furent
conquis la Biélorussie[44] (1918),
l’Ukraine (1920), l’Azerbaïdjan (1920), la république montagnarde
du Nord-Caucase (janvier 1921), la Géorgie (février 1921), et
l’Arménie (avril 1921).
Ces Etats furent intégrés à l’Union des républiques socialistes
soviétiques[45],
proclamée en décembre 1922.
-
Le bilan de la guerre civile russe
:
Alors que la guerre civile russe
et la guerre contre la Pologne s'achevaient, en fin d’année 1921, la Russie
soviétique se retrouvait dans une situation catastrophique.
Ainsi, la guerre civile avait fait entre 2.5 et 4.5 millions de
morts[46] ; la famine de 1920-1921 et les épidémies de typhus firent
près de dix millions de victimes ; Moscou et Petrograd avaient perdu
la moitié de leur population (arrestations, exils, famine, maladies,
etc.) ; la production industrielle était au plus bas ; la monnaie,
complètement dévaluée, avait cédé sa place au troc.
Faisant face à une importante crise économique, Lénine décida de
rétablir un capitalisme provisoire, la NEP[47] (Nouvelle
Politique Economique.).
Cette mesure permit de rétablir un retour limité à la propriété
privée, les paysans russes pouvant désormais détenir une parcelle de
terrain d’un hectare (à noter que la NEP ne fit pas l'unanimité au
sein des bolcheviks ; ainsi, Lénine fit interdire les mouvements
contestataires au sein du Parti communiste).
Toutefois, le gouvernement ne soutenant pas l’industrialisation du
pays, les usines vendirent leurs produits à des prix plus élevés
afin de conserver des revenus stables, ce qui entraina une
importante inflation.
A noter que ce n’est qu’à partir de 1930 que la Russie retrouva ses
niveaux de production agricoles et industriels d’avant guerre.
- Les dernières années de Lénine (1922 à 1924), bilan de son règne :
Lénine, quant à lui, commença à montrer des signes de fatigue à
compter de 1921. En mai 1922, il fut victime d'un accident
vasculaire cérébral, qui laissa d'importantes séquelles (difficultés
d'élocution et paralysie de la moitié droite du corps).
En fin d'année, alors que sa santé s'améliorait, lui permettant à
nouveau de travailler, il fit plusieurs malaises, contraignant ses médecins
à lui prescrire une période de repos forcée. Lénine, faisant face à
la montée en puissance de Staline[48]
(un surnom dérivé du russe stal, qui signifie « acier », tenta de se rapprocher de Trotsky, afin de préparer sa succession.
Mais en mars 1923, Lénine fit une nouvelle attaque, qui le laissa paralysé
et dans l'incapacité de parler. Transporté dans le manoir de Gorki,
en périphérie de Moscou, l'ancien dirigeant de l'URSS se retrouva
dès lors mis à l'écart, en raison de sa maladie.
Ce dernier mourut le 21 janvier 1924, à la suite d'un nouveau
malaise.
Au final, alors que Staline est
considéré comme un abominable dictateur, depuis la vague de
déstalinisation opérée en URSS à compter du milieu des années
1950, le personnage de Lénine, au contraire, a su conserver une
image plutôt positive.
Cependant, comme nous avons pu le
voir, force est de constater que Staline n'eut pas l'apanage du
totalitarisme, Lénine ayant violé tous les engagements pour lesquels
il avait combattu le régime tsariste : suppression des libertés
individuelles ; création d'une police secrète
sans aucune base légale ou judiciaire ; rétablissement de la peine
de mort ; instauration de la Terreur rouge (qui
fit trois fois plus de victimes en deux semaines que le régime
tsariste en un siècle) ; dissolution de
l'assemblée constituante qui lui était hostile ; instauration d'un
véritable dictature ; ouverture de camps de concentration ;
interdiction du droit de grève ; instauration d'un parti unique ;
etc.
Au final, comme nous l'avons vu plus tôt, la guerre
civile russe fit entre 2.5 et 4.5 millions de
morts, sans compter dix millions de victimes causées par la famine
de 1920-1921. Soit un bilan humain approchant les quinze millions de
morts.
A l'aune de ces informations et de ces chiffres, force est de
constater que Lénine ne fut pas un leader
« dépassé » par les méthodes violentes de Staline, pris
« involontairement » dans l'engrenage de la violence, ou encore
moins contraint de se « salir les mains » à contrecoeur à cause d'un
contexte géopolitique difficile.
Aujourd'hui, le premier dirigeant de l'URSS doit être considéré
comme ce qu'il fut, c'est-à-dire
« l'inventeur »
de la première dictature totalitaire du XX° siècle, sa
responsabilité dans les atrocités commises au cours de son règne ne
pouvant pas être écartée.
[1]
Pour en savoir plus sur la Première Guerre mondiale,
cliquez ici.
[2]
Environ 500 000 tués, blessés et disparus côté russe, contre 1.5
millions (dont 400 000 prisonniers) en Autriche.
[3]
Saint-Pétersbourg, alors capitale de la Russie, avait été baptisée
Petrograd au début de la Première Guerre mondiale (car le nom
originel de la ville avait une consonance jugée trop germanique).
Cette journée de la femme avait été instaurée en 1910 lors d’une
conférence de l’Internationale
socialiste des femmes(un
mouvement apparenté à laDeuxième
internationale.).
Pour en savoir plus à ce sujet, voir le a), 12, section III,
chapitre troisième,la
troisième république.
[5]
Nicolas II, né en mai 1868, était monté sur le trône de Russie en 1894. Ce
dernier reprit à son compte la politique de ses prédecesseurs, qui s'étaient
rapprochés des puissances occidentales (France et Angleterre principalement)
afin de faire de la Russie un pays moderne. A noter toutefois que le pays étant
resté très conservateur, d'importantes manifestations se déroulèrent en octobre
1905.
[6]
La Douma est le nom de la chambre basse du parlement en Russie (l’équivalent de
notre actuelle Assemblée nationale). A noter que le terme « Douma » provient du
russeдумать,
ce qui signifie « penser. »
[8]
A l’origine, le terme
« bolchevik
»
provient du russeбольшенство,
ce qui signifie « majorité. » En effet, les bolcheviks étaient au début du
XX° siècle la fraction majoritaire duParti
ouvrier social-démocrate de Russie,
fondé en mars 1898.
[9]
Les mencheviks, à l’opposé des bolcheviks, étaient la fraction minoritaire du
Parti ouvrier social-démocrate de Russie (en russe,меньшевикsignifiant
« minorité. »). Contrairement aux bolcheviks qui prônaient l’établissement d’une
dictature, les mencheviks étaient partisans d’une alliance avec la bourgeoisie,
afin de mettre en place une démocratie socialiste.
LeParti
socialiste-révolutionnairenaquit
à Berlin en 1901. Ce dernier, majoritairement paysan, s’opposait aux
bolcheviks qui prônaient la mise en place d’une révolution ouvrière. A noter
que le PSR n’était pas hostile à l’utilisation de méthodes terroristes
(assassinats, attentats, etc.).
[12]
On appelle ainsi une assemblée chargée de rédiger une constitution.
[13]A
noter que leKD(en
russeКонституционная
Демократическая партия)
était un parti proche de la bourgeoisie.
[14]Né
en avril 1870, Lénine était le fils d’un fonctionnaire russe anobli
par le tsarAlexandre
III.
Suite à des études de droit, il devint avocat à Saint-Pétersbourg,
où il fréquenta les milieux révolutionnaires et marxistes.
Cependant, il fut arrêté en décembre 1895, et condamné à trois
années d’exil en Sibérie. Rentré d’exil en 1900, Lénine adhéra au
Parti ouvrier social-démocrate, prenant la tête de la fraction
bolchevik. Préférant quitter le pays en 1908, il voyagea à travers
l’Europe jusqu’à son retour en 1917.
[15] A
noter que nous ne connaissons pas avec exactitude l'origine de ce
surnom. Ainsi, certains historiens pensent qu'ils proviendrait du
nom du fleuve Léna, en Sibérie centrale.
[16]A
noter que le gouvernement allemand finança et organisa à dessein le
retour de plusieurs centaines de révolutionnaires en exil, dans le
but de déséquilibrer le régime tsariste.
[17]La
Pravda (« vérité » en russe), diffusé à partir de 1913, était un
organe de la fraction bolchevique. Cette revue, anti-tsariste, fut
interdite suite à l’entrée en guerre de la Russie, mais continua
d’être publiée illégalement. La Pravda rouvrit officiellement suite
à la révolution de février.
[18]La
Seconde Internationale,
constituée à Paris en 1889, était morte à ses yeux, de par son
adhésion à la Grande guerre.
[19]Kornilov,
né en août 1870, était originaire du Kazakhstan. Rejoignant l’armée,
il fut envoyé en Afghanistan et en Perse, participa à la guerrerusso-japonaisede
1905, puis servit en Chine jusqu’en 1911.
[20]La
Garde rouge était une milice ouvrière née suite à la révolution de
février, mais sous contrôle des bolcheviks depuis avril 1917.
[21]Trotsky
naquit en novembre 1879, en Ukraine, au sein d’une famille de
propriétaires terriens de confession juive. Rejoignant les
organisations révolutionnaires à la fin du XX° siècle, Trotsky fut
incarcéré puis déporté entre 1898 et 1902. A cette date, il parvint
à s’évader, émigrant vers l’Angleterre. Rencontrant Lénine en exil,
il adhéra au Parti ouvrier social-démocrate. Rentrant en Russie en
1905, il fut cependant arrêté à nouveau, et condamné à la
déportation en Sibérie. S’évadant une fois encore, il repartit en
exil, s’installant en France, en Espagne, puis aux Etats-Unis.
Trotsky ne rentra en Russie qu’après la révolution de février
1917.
[22]25
octobre du calendrier julien, ce qui explique l’appellation
« révolution d’octobre. »
[23]Le
congrès des soviets était une assemblée réunie une fois par an,
constituée de représentants des soviets de toute la Russie.
[24]Cet
édifice avait été érigé entre 1754 et 1762, à la demande de
la tsarineElisabeth
I°.
[25]Abréviation
deSoviet
Narodnykh Kommissarov(oucовет
народных комиссаров),
nom russe du conseil des commissaires des peuples.
[26]Rappelons
que le voyage de Lénine en Russie suite à la révolution de
février 1917 avait été organisé et financé par l’Allemagne.
[27]De
son vrai nomcommission
extraordinaire panrusse pour la répression de la
contre-révolution et du sabotage, ouВсероссийская
чрезвычайная комиссия по борьбе с контрреволюцией и
саботажемen
russe.
[28]La
terreur rouge renvoyait à la terreur jacobine lors de la
Révolution française,
qui avait fait plusieurs milliers de victimes entre 1793 et
1794. Pour en savoir plus à ce sujet,cliquez
ici.
[29]Les
SR de gauche avaient fait scission avec le parti
socialiste-révolutionnaire en septembre 1917.
[31]Moscou
redevint ainsi la capitale de la Russie à compter de
mars 1918, au détriment de Petrograd. A noter que
l’objectif de Lénine était de se mettre à l’abri d’une
nouvelle manifestation qui aurait pu porter atteinte au
gouvernement.
[32] Aujourd'hui,
l'on estime que
la Terreur rouge fit trois fois plus de victimes en deux
semaines que le régime tsariste en un siècle.
[33]C'est-à-dire
tous les Russes n’étant pas des prolétaires :
aristocrates, bourgeois, professions libérales,
enseignants, etc.
[34]A
noter que ces ralliements furent vivement critiqués par
certains bolcheviks. Cependant,
il était coutume de prendre en otage la famille des
officiers ralliés, par
« mesure
de précaution.»
[35]Le
calendrier grégorien avait été instauré en 1582 par
le papeGrégoire
XIII.
Son objectif était de corriger le décalage
qu’entrainait le calendrier julien (adopté à Rome
lors du règne de Jules César, d’où son nom). Il
existait un décalage de quelques jours entre les
deux calendriers, c'est ainsi que la révolution de
Février (calendrier julien) se déroula en mars
(calendrier grégorien).
[36]Dénikine,
né en décembre 1872, épousa très tôt la carrière
militaire. Participant à la Première Guerre
mondiale, il décida de créer l’armée
des volontairesen
novembre 1917, suite à la prise de pouvoir des
bolcheviks.
[37]Ioudenitch,
né en juillet 1862, participa à la Première Guerre
mondiale. Destitué suite au putsch des bolcheviks,
il décida de constituer une armée dans la Baltique,
grâce à l’aide de l’Angleterre.
[38]Koltchak,
né en novembre 1874, participa à la Première Guerre
mondiale. A l’automne 1918, il fut nommé ministre de
la guerre au sein d’un contre-gouvernement constitué
en Sibérie. Mais en décembre, un coup d’Etat
renversa le gouvernement, et Koltchak accepta de
prendre le pouvoir (il consentit toutefois à nommer
Dénikine comme chef des armées blanches). A noter
que Koltchak était soutenu par une légion tchèque et
par les Français dubataillon
colonial sibérien.
[39]Wrangel,
né en août 1878, participa à la Première Guerre
mondiale. Arrêté par les bolcheviks peu après la
Révolution d’octobre, il parvint toutefois à
s’échapper, et rejoignit le général Dénikine en
Crimée.
[40] A
noter que l'indépendance de la Pologne fut reconnue
par le
traité de Versailles,
mettant fin à la Première Guerre mondiale, signé en
juin 1919 ;
mais pas celle de l'Ukraine.
[41]Pilsudski
naquit en décembre 1867, au sein d’une famille
polonaise de Lituanie. Militant dans des
associations révolutionnaires pendant son
adolescence, il fut condamné à cinq ans de
travaux forcés en 1887. De retour d’exil,
Pilsudski reprit ses études de droit, tout en
militant en faveur de l’indépendance de la
Pologne. Adhérant auParti
socialiste polonais(ou
PPS),
il créa lePPS-Fraction
révolutionnaire,
ne supportant pas l’immobilisme des socialistes.
Pendant la Première Guerre mondiale, Pilsudski
s’engagea au sein de l’armée austro-hongroise,
soucieux de chasser les Russes de Pologne ;
toutefois, il fut arrêté par les autorités
autrichiennes en juillet 1917, ayant refusé de
prêter allégeance à l’Empereur. Libéré en
novembre 1918, Pilsudski fut accueilli
triomphalement lors de son arrivée à Varsovie.
En raison de son prestige, il fut nommé
président de la Deuxième république de Pologne
en fin d’année.
[42]Cette
appellation faisait référence à laPremière
République de Pologne,
en vigueur de 1562 à 1795 (date du partage de la
Pologne entre l'Autriche, la Prusse et la
Russie).
[43]Petlioura
était un journaliste né en mai 1879. Participant
à l’indépendance de l’Ukraine, il fut nommé
ministre de la Guerre en novembre 1918. En
février 1919, Petlioura fut nommé président de
la république.
[44]La
Biélorussie était un petit pays qui avait
proclamé son indépendance en mars 1918, se
situant à l’est de la Pologne.
[45]URSS,
ouСоюз
Советских Социалистических Республикen
russe (CCCP.). Il s’agissait de l’union des
républiques soviétiques de Russie, d’Ukraine, de
Biélorussie et de Transcaucasie (Arménie,
Géorgie, Azerbaïdjan, Nord-Caucase).
[46] A
noter que la Première Guerre mondiale, côté
russe, fit 3.3 millions de victimes (dont 1.8
millions de victimes civiles).
[48] De
son vrai nom
Joseph Vissarionovitch Djougachvili.
Né en décembre 1878 en Géorgie, Staline
adhéra auparti
ouvrier social-démocrate de Russiedès
1898. Se tournant vers le banditisme, il fut
plusieurs fois déporté en Sibérie par les
autorités tsaristes. Se rapprochant des
bolcheviks, il participa à la Révolution
d'octobre 1917, puis à la guerre civile
russe.
Depuis 1922, il occupait la fonction de
secrétaire général du Parti communiste, la
plus haute charge de l'Etat.