Car un pays sans passé est un pays sans avenir...

 
Mythologie
 
 

 

 

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Les Bourbons (XVI° - XIX° siècle)

 

CHAPITRE PREMIER : Henri IV

 

II : La huitième guerre de religion sous le règne d’Henri IV

           

            1° Henri de Navarre devient Henri IV (1589 à 1594) – Avec la mort d’Henri III, survenue le 2 août 1589, Henri de Navarre devenait de fait le roi de France Henri IV. Toutefois, les réalités du terrain étaient alors bien différentes. En effet, les ligueurs refusaient de reconnaitre un souverain protestant ; les huguenots, quant à eux, se méfiaient du nouveau roi, qui avait déjà abjuré le protestantisme à plusieurs reprises[1].

Henri IV, par François II POURBUS, château de Versailles, Versailles.

 

Le 4, Henri IV déclara qu’il s’engageait à protéger la religion catholique, et que le culte protestant serait toléré. Refusant d’abjurer, la décision alambiquée du roi de France ne satisfit personne, ni les réformés intransigeants, ni les catholiques qui refusaient un souverain huguenot. 

Le royaume de France en 1589.

 

a) Nouveau roi, nouvelles zones de guerre (août 1589) : de nombreux soldats et seigneurs désertant l’armée royale, Henri IV fut contraint d’abandonner le siège de Paris.

Le nouveau souverain décida alors de réorganiser l’armée royale, mettant en place trois fronts de guerre distincts. Henri I° d’Orléans, duc de Longueville, reçut le commandement en Picardie ; Jean VI d’Aumont[2], baron d’Estrabonne, fut envoyé en Champagne ; le roi de France lui-même se rendit en Normandie (chaque armée comptait moins de 5 000 hommes.).

Attendant les renforts promis par la reine d’Angleterre Elizabeth I°, Henri IV s’installa à Dieppe à la fin du mois d’août 1589.

Elizabeth I°, gravure issue de l'ouvrage Cassell's history of England, Angleterre, 1902.

 

Les ligueurs, quant à eux, ne perdirent pas de temps. Dans un premier temps, ils décidèrent de proclamer roi, sous le nom de Charles X, le cardinal Charles I°, duc de Bourbon (comme nous l’avons vu précédemment, ce dernier était l’oncle d’Henri IV.).

Charles X, cardinal de Bourbon, par Philippe REGNAULT, vers 1590, musée du Louvre, Paris.

En outre, étant fortement implantés dans le nord de la France, les ligueurs parvinrent à recruter une importante armée, qu’ils confièrent à Charles de Mayenne en Picardie (rappelons qu’il avait été nommé lieutenant général du royaume par le Parlement de Paris en janvier 1589.). Ce dernier marcha alors sur la Normandie à la tête d’une armée de 20 000 hommes, se faisant de nouveau menaçant.

Portrait de Charles de Lorraine, duc de Mayenne.

 

b) La bataille d’Arques (septembre 1589) : Henri IV, apprenant que son adversaire se dirigeait vers Dieppe, préféra abandonner la cité. Il se réfugia alors à Arques, un village plus aisément défendable. En effet, le roi de France ordonna l’érection de fortifications, en vue d’un prochain affrontement contre les armées de la ligue.

La bataille d'Arques, par Paul LEHUGEUR, XIX° siècle.

 

Charles de Mayenne, ayant l’avantage du nombre (près de quatre contre un.), lança l’offensive à la mi-septembre 1589. La bataille d’Arques fut particulièrement sanglante, mais les ligueurs, bien que perdant plus d’hommes qu’Henri IV, restaient toutefois en position de force grâce à leur avantage numérique.

La bataille d'Arques, anonyme, château de Versailles, Versailles.

Cependant, à la fin du mois de septembre, des renforts venus d’Angleterre débarquèrent à Arques. Dès lors, Charles de Mayenne décida de se retirer vers la Picardie.

 

c) La bataille d’Ivry (mars 1590) : le roi de France, fort de son succès, décida alors de compliquer la retraite de Mayenne. En effet, il ordonna aux gouverneurs de Compiègne, Senlis et Pontoise de détruire les ponts de l’Oise afin de retarder le retour de Mayenne vers la capitale.

Henri IV, quant à lui, décida alors de marcher vers Paris. S’emparant de Mantes et Saint Cloud sans difficultés, il attaqua fin octobre les fortifications protégeant les faubourgs de la capitale (Paris était alors entourée par deux lignes de fortifications. La première était constituée d’un fossé et d’un remblai ; la seconde, bien plus solide, avait été érigée par le roi de France Charles V.). Le maréchal Armand de Gontaud-Biron, qui avait rejoint les troupes du roi de France, parvint à l’emporter sur ses adversaires.

Combats dans les faubourgs de Paris, par Paul LEHUGEUR, XIX° siècle.

A noter toutefois qu’au même moment, Mayenne parvint à pénétrer dans Paris.

 

Henri IV resta quelques semaines devant les remparts de la ville, les Parisiens refusant obstinément de lui ouvrir les portes. En outre, les ligueurs préféraient éviter de livrer bataille à leur ennemi, soucieux d’économiser leurs forces.

Le roi de France, constatant à regret qu’il ne pourrait s’emparer de la cité, décida alors de marcher sur Etampes (début novembre 1589.). Par la suite, il décida de conquérir la Touraine et le Maine, s’emparant sans trop de difficultés de plusieurs importantes cités de la région (Tours, Le Mans, Alençon, etc.).

 

En février 1590, le roi de France ayant réussi à atteindre ses objectifs en Touraine, il décida de marcher sur la Normandie, s’emparant d’Honfleur.

Toutefois, alors qu’au même moment le maréchal de Gontaud-Biron parvenait à prendre Evreux et plusieurs villes avoisinantes, Mayenne décida de sortir de son inaction.

Armand de Gontaud, baron de Biron, XIX° siècle, château de Versailles, Versailles.

Début mars, alors qu’Henri IV assiégeait Dreux, le duc de Mayenne décida de porter secours à la cité assiégée.

Le roi de France, apprenant que l’armée de la ligue approchait, décida de se replier afin de disposer ses troupes en prévision du combat.

 

Mayenne arrivant à la nuit tombée, l’affrontement fut reporté au lendemain. Au petit matin du 14 mars 1590, les deux belligérants s’affrontèrent lors de la bataille d’Ivry.

Charles de Lorraine, bien que disposant d’un avantage numérique certain (son armée comptait près de 15 000 hommes, soit environ 5 000 de plus que son adversaire.), ne parvint pas à l’emporter. En effet, l’affrontement dégénéra rapidement en mêlée générale, au cours de laquelle Henri IV manqua de perdre la vie à plusieurs reprises (c’est à cette occasion que le roi de France prononça ses mots célèbres, s’adressant à ses soldats : ralliez vous à mon panache blanc !).

La bataille d'Ivry, par Paul LEHUGEUR, XIX° siècle.

La bataille fut un échec sanglant pour les ligueurs. En effet, si Mayenne parvint à s’enfuir, l’armée de la ligue, déjà éprouvée par la bataille d’Arques, était quant à elle complètement anéantie.

 

d) Du siège de Paris au siège de Rouen (1590 à 1591) : suite à cette brillante victoire, Henri IV rentra dans Mantes, où il fut bien accueilli. Le roi de France songeait déjà à assiéger Paris ; toutefois, sans machines de siège, Henri IV savait que toute tentative serait vouée à l’échec.

Ainsi, plutôt que de foncer tête baissée, le nouveau souverain décida de couper le ravitaillement de la capitale afin d’affamer les Parisiens. Les travaux d’encerclement de la capitale se poursuivirent pendant tout le printemps 1590.

A Paris, alors que les ligueurs multipliaient les processions ouvertement hostiles à Henri IV, le cardinal Charles de Bourbon, reconnu roi de France par la ligue, mourut (mai 1590.).

Procession de la ligue en 1590, école hollandaise, fin du XVI° siècle, musée Carnavalet, Paris.

Au cours du mois de juin, le nouveau souverain lança plusieurs appels aux Parisiens, les invitant à se rendre. Ses derniers refusant, Henri IV fit alors bombarder la cité.

En juillet 1590, la famine se faisant de plus en plus terrible, le roi de France décida de lancer un assaut contre les murs de la ville. Les derniers faubourgs tombèrent, mais l’armée royale ne parvint pas à pénétrer l’enceinte principale.

Les ligueurs décidèrent alors de négocier, au début du mois d’août 1590, dans le seul objectif de gagner du temps. En effet, Mayenne avait quitté la cité afin de se diriger vers les Pays Bas, dans l’objectif d’y quérir l’aide des Espagnols.

 

Ainsi, au début du mois de septembre, Henri IV apprit l’arrivée d’Alexandre Farnèse, duc de Parme et de Plaisance, gouverneur des Pays Bas espagnols. Ce dernier parvint alors à mettre fin au blocus de Paris, rouvrant les voies d’eau vers la capitale.

Alexandre Farnèse, gravure issue de l'ouvrage Histoire de France, par François GUIZOT, France, 1875.

Farnèse ayant atteint ses objectifs, il décida alors de retourner en Flandre (novembre 1590.).

 

En ce début d’année 1591, la situation d’Henri IV restait précaire. Ce dernier, bien qu’ayant réussi à vaincre à deux reprises les troupes de la ligue, n’avait toujours pas réussi à s’emparer de la capitale.

Les ligueurs, quant à eux, bien que privés d’un souverain légitime à leurs yeux suite à la mort du cardinal de Bourbon, restaient toutefois les maîtres de Paris.

C’est ainsi qu’Henri IV, vraisemblablement influencé par sa maitresse Gabrielle d’Estrées, décida d’assiéger Chartres (François d’Escoubleau de Sourdis, oncle de la jeune femme, avait en effet été évincé du gouvernement de Chartres par les ligueurs.). Le siège de la cité, entamé en février, ne s’acheva qu’en avril 1591.

Gabrielle d'Estrées, gravure issue de l'ouvrage Histoire de France, par François GUIZOT, France, 1875.

En juillet, toujours influencé par Gabrielle, Henri IV décidé d’assiéger Noyon (l’objectif étant de donner une compensation à Antoine d’Estrées, père de la maitresse du roi, chassé du gouvernement de La Fère.).   

A noter que les amours du roi de France entrainèrent le mécontentement de plusieurs de ses proches. En effet, Henri IV perdait beaucoup de temps à compter fleurette, à une époque où la guerre était encore loin d’être gagnée.

 

Ce n’est qu’en novembre 1591 que le roi de France accepta finalement de mettre le siège devant Rouen[3].

Toutefois, les assiégés avaient su mettre à profit la longue inaction d’Henri IV, préparant minutieusement la défense de la cité (accumulation de vivres et de munitions, expulsion des partisans du roi, etc.).

Toutefois, en février 1592, les assiégés apprirent l’arrivée d’Alexandre Farnèse, venu secourir Rouen comme il avait secouru Paris l’année précédente. Henri IV, blessé lors d’un combat contre les troupes du duc de Parme, dut alors abandonner le siège de la cité.

Farnèse parvint à mettre fin au blocus de Rouen, mais dut toutefois rentrer précipitamment en Flandre, ayant reçu une blessure lors d’une escarmouche.

L’année 1591 se terminait mal pour le roi de France, d’autant plus que l’armée royale échoua aussi en Bretagne face aux troupes du duc de Mercoeur (mai 1592.).

Portrait de Philippe Emmanuel de Lorraine, duc de Mercoeur.

 

e) La conversion d’Henri IV et ses conséquences (1593 à 1594) : en janvier 1593, Mayenne décida de convoquer les Etats Généraux à Paris. L’objectif était de trouver un nouveau souverain à la France, le cardinal de Bourbon étant décédé depuis mai 1590. L’idée des ligueurs était de choisir un prince de sang élevé dans la religion catholique.

Procession de la ligue dans l'île de la Cité, par François II BUNEL, fin du XVI° siècle, musée Carnavalet, Paris.

La situation devenait dangereuse pour Henri IV. Si un nouveau souverain était élu, s’il était reconnu par le pape, par l’Espagne, et par les cités encore entre les mains de la ligue, le Navarrais risquait de perdre sa couronne à jamais.

Pressé par ses proches, Gabrielle d’Estrées en tête, Henri IV décida de se convertir au catholicisme, abjurant une fois de plus (le roi de France se convertit officiellement dans l’église Saint Denis en juillet 1593[4].).

L'abjuration d'Henri IV, gravure issue de l'ouvrage Histoire de France, par François GUIZOT, France, 1875.

 

En août, des pourparlers eurent lieu avec les ligueurs restés maîtres de Paris, et une trêve de cinq mois fut signée. Les Etats Généraux refusèrent de reconnaitre Henri IV comme légitime roi de France ; toutefois, de nombreux députés décidèrent officieusement de se rallier à ce dernier.

En France, l’annonce de la conversion du roi lui attira de nombreuses sympathies, et plusieurs cités ouvrirent leurs portes (Aix en Provence, Lyon, Meaux, etc.). Jusqu’à la fin de l’année 1593, les défections se multiplièrent dans le camp des ligueurs. En effet, de nombreux gouverneurs ne voyaient plus l’intérêt de se battre contre Henri IV, maintenant qu’il était officiellement catholique.

 

Toutefois, la France entière ne s’était pas ralliée au roi de France. Quelques villes faisaient toujours de la résistance, telles que Reims ou Paris (c’est ainsi qu’Henri IV dut se faire couronner à Chartres, le 27 février 1594.).

 

Henri IV, soucieux de s’emparer de Paris, s’installa sous les murs de la capitale en mars 1594. A cette époque, le duc de Mayenne s’était réfugié à Soissons, et les ligueurs étaient moins virulents qu’auparavant.

Ainsi, le gouverneur de la ville décida de négocier avec le roi de France. Le 22 mars, Henri IV parvint finalement à pénétrer dans la capitale, bien accueilli par le peuple. Bien que quelques incidents eurent lieu, un grand nombre de Parisiens s’avérèrent las de la tyrannie exercée par la ligue.

Entrée de Henri IV dans Paris, par François GERARD, XIX° siècle, château de Versailles, Versailles.

 

Au cours du printemps 1594, de nouvelles villes chassèrent les ligueurs et firent soumission au roi de France, dont Rouen, Péronne, Troyes et Sens.

Le duc de Mayenne, assistés par des mercenaires en provenance des Pays Bas, décida de s’enfermer à Laon. Henri IV, apprenant la nouvelle, décida alors d’assiéger la cité (mai 1594.).

Toutefois, le siège fut difficile pour les troupes royales, la ville étant située sur un piton. Mayenne finit cependant par déposer les armes, au début du mois d’août 1594.

A noter que pendant l’été, de nouvelles villes se rallièrent à Henri IV, comme Poitiers, Agen, Amiens, Beauvais, etc.

 

Toutefois, Henri IV, s’il avait réussi à gagner le cœur des Parisiens, n’avait pas conquis la France entière. Ainsi, afin de s’attirer les faveurs des villes et des gouverneurs des provinces, le roi de France multiplia cadeaux et largesses.

En contrepartie, il dut augmenter les impôts drastiquement, ce qui entraîna la jacquerie des croquants. Cette insurrection d’ordre économique, partie du Limousin, toucha aussi la Guyenne et le Périgord.

La révolte fut toutefois écrasée en septembre 1594.

 

            2° La guerre contre l’Espagne (1595 à 1598) – Toutefois, bien qu’ayant réussi à rassembler autour de lui une majorité de Français, certains d’entre eux refusaient de se soumettre à un souverain excommunié par Rome.

Ainsi, en fin d’année 1594, les ligueurs décidèrent de riposter. Le duc de Mayenne, situé en Bourgogne, appela à l’aide les Espagnols de Franche-Comté ; Mercoeur restait maître de la Bretagne ; et plusieurs insurrections éclatèrent dans le sud de la France.

Henri IV, malgré la conversion, le sacre et les nombreux ralliements, constata amèrement qu’il n’était toujours pas maître du pays.

Armure dite d'Henri IV, vers 1600, musée des Invalides, Paris.

 

a) Le début de la guerre contre l’Espagne : Henri IV, bien que quelque peu découragé par ces récentes insurrections, décida en premier lieu de déclarer la guerre à l’Espagne (janvier 1595.). En effet, son homologue Philippe II ne cessait de soutenir les ennemis de la monarchie depuis maintenant plusieurs décennies.

Philippe II âgé, vers 1597, Deutsches  historisches museum, Berlin.

Rappelons qu’à cette date, le roi d’Espagne était un souverain particulièrement puissant, bénéficiant d’un Empire s’étendant d’Europe jusqu’en Amérique.

 

Henri IV ne perdit pas de temps et lança une offensive sur plusieurs fronts. Il envoya une armée afin de lutter contre les Espagnols venus de Franche-Comté ; Charles I°[5], duc de Guise, récemment rallié au roi de France, fut envoyé en Provence ; Henri I°, seigneur de Damville (et duc de Montmorency depuis la mort de son frère François en 1579.), se dirigea vers le Lyonnais.

Le connétable Henri de Montmorency, attribué à Hubert LE SUEUR, début du XVII° siècle, musée du Louvre, Paris (à noter que la tête provient vraisemblablement d'une statue équestre du duc, détruite sous la révolution.).

En mai, Henri IV décida de se rendre en Bourgogne, non sans avoir précédemment accentué la vénalité des charges[6] (l’objectif était alors de trouver des subsides afin de financer la guerre, sans toutefois lever d’impopulaires impôts.).

 

b) La bataille de Fontaine Française (juin 1595) : en juin 1595, Juan Fernandez de Velasco, gouverneur de Milan, franchit les Alpes à la tête d’une armée de 10 000 hommes. A Besançon, il fit jonction avec les troupes du duc de Mayenne, un des principaux membres de la ligue. Les deux hommes se dirigèrent ensuite vers Dijon, dans le but d’assiéger une des plus importantes cités de Bourgogne.

Henri IV, apprenant la nouvelle, décida de se porter au devant de ses adversaires. Ce dernier se hâta alors de prendre position au sommet d’une colline.

 

Le roi de France, à la tête d’à peine 3 000 hommes, lança l’assaut contre l’ennemi, chargeant aux côtés de ses soldats.

Armure d'un fantassin de la fin du XVI° siècle (à noter que si le plastron et le casque proviennent de France ou d'Italie, la protection des bras et des jambes provient d'Allemagne.), musée de l'Infanterie, Montpellier.

Velasco, repoussé suite à cette première attaque, craignit que les forces d’Henri IV ne soient que l’avant-garde de l’armée royale. Ainsi, pensant être en nette infériorité numérique, l’Espagnol décida donc de faire rebrousse chemin.

 

La bataille de Fontaine Française entraina une importante panique au sein de l’armée espagnole, si bien que ces derniers n’empêchèrent pas Henri IV de pénétrer en Franche-Comté (été 1595.).

 

c) Coups de force français et espagnols (1595 à 1597) : toutefois, alors que l’armée royale mettait à sac la Franche-Comté, les affaires d’Henri IV connaissaient ailleurs d’importants revers contre les Espagnols.

En effet, les armées de Philippe II parvinrent à vaincre les troupes françaises en Picardie ; en Provence, Charles I° ne parvint pas à s’opposer efficacement aux ligueurs (ces derniers parvinrent ainsi à s’emparer de Toulon.), qui s’allièrent au duc de Savoie ; en Bretagne, Mercoeur restait invaincu.

 

Henri I° de Montmorency, par contre, menait une brillante campagne dans la région de Lyon (Henri IV put ainsi faire son entrée dans la ville en septembre 1595.).

A la même date, le pape Clément VIII, longtemps hostile à Henri IV, décida finalement d’abolir l’excommunication qui frappait le roi de France (les ligueurs perdaient ainsi leur dernier prétexte à continuer la lutte contre le Navarrais.).

Apprenant la nouvelle, plusieurs chefs de la ligue décidèrent de se soumettre au roi de France, tels que Charles de Mayenne et le cardinal François de Joyeuse[7] (janvier 1596.).

Henri IV et Charles de Mayenne, XIX° siècle, château de Fontainebleau, Fontainebleau.

 

Toutefois, en début d’année 1596, les Espagnols ne cessaient de progresser. En octobre 1595, ils s’étaient emparés de Cambrai ; en février 1596, assistés par Charles Emmanuel I°, duc de Savoie[8], ils s’attaquaient à la Provence avec l’espoir de s’emparer de Marseille.

Toutefois, la cité préféra ouvrir ses portes au duc de Guise (représentant de l’autorité royale.), et les Espagnols furent ainsi contraints de reculer (le duc de Savoie décida alors de s’attaquer au Dauphiné.).

Malgré ce revers, les troupes de Philippe II parvinrent à prendre Amiens par la ruse en mars 1597 (en les Espagnols se déguisèrent en paysans afin de pouvoir pénétrer dans la cité.).

La prise d'Amiens par les Espagnols, par Paul LEHUGEUR, XIX° siècle.

Henri IV s’empressa alors de mettre le siège devant la ville, mais ne parvint pas à s’en emparer. En outre, en août 1597, les Espagnols envoyèrent des renforts au duc de Mercoeur, qui détenait toujours la Bretagne.

 

Alors que l’armée royale était devant Amiens, une troupe espagnole venue des Pays Bas tenta de porter secours aux assiégés. Henri IV, prudent, préféra ne pas commettre l’erreur qui lui avait coûté la perte de Paris et Rouen.

Les Espagnols chargèrent alors les Français, mais furent repoussés (septembre 1597.). Les assiégés, constatant l’échec de l’armée de secours, décidèrent alors de se rendre.

 

d) La prise de la Bretagne, l’édit de Nantes et le traité de Vervins : en ce début d’année 1598, seul une partie de la Bretagne, alors entre les mains du duc de Mercoeur, résistait encore au roi de France.

En février, les troupes royales s’emparèrent de Dinan, et Henri IV put dès lors contraindre Mercoeur à négocier (les deux hommes signèrent finalement un traité de paix en mars 1598.).

 

Après avoir soumis la Bretagne, dernier obstacle à l’union du royaume, Henri IV se rendit à Nantes en avril 1598. Il y promulgua alors l’édit de Nantes, mettant ainsi un terme aux guerres de religion, qui ensanglantaient le pays depuis près d’un demi-siècle.

Le roi de France accordait ainsi la liberté de conscience et de culte à tous les Français.

Par ailleurs, Henri IV accorda aux protestants de nombreuses places de sûreté (près d’une centaine.), afin de garantir l’application de ces libertés[9].

Ainsi, dans la plupart des villes de France, catholiques et protestants furent à nouveau libres de pratiquer leur culte, bien que dans certaines cités, temples (Paris, Lyon, Rouen.) ou églises (La Rochelle, Montpellier.) furent fermées.

De nos jours, l’on considère l’édit de Nantes comme un texte ayant fait l’unanimité de par sa grande tolérance. Au contraire, beaucoup de catholiques n’apprécièrent guère l’idée de mettre catholicisme et protestantisme sur le même pied d’égalité (c’est ainsi que l’édit de Nantes ne fut enregistré par le Parlement de Paris qu’en février 1599 ; les Parlements de province mettant aussi beaucoup de temps à accepter ce texte.) ; les huguenots, quant à eux, n’y virent qu’une étape avant la conversion de tous les catholiques au protestantisme.

A noter toutefois qu’en 1598, après 50 années de guerres, le nombre de protestants avait particulièrement chuté[10].

 

Du côté espagnol, Philippe II était las de cette guerre qui n’aboutissait à rien. Ainsi, en mai 1598, Français et Espagnols, épuisés par la guerre, décidèrent de faire la paix. En signant le traité de Vervins, l’Espagne et la France s’engageaient à restituer les territoires pris lors de la guerre ; Henri IV devait abandonner ses prétentions sur la Flandre et l’Artois[11].

Toutefois, le roi de France refusa de reconnaitre l’annexion du sud de la Navarre par l’Espagne[12].

Au final, cette paix consacra un certain statu quo entre la France et l’Espagne, instauré lors de la signature du traité de Cateau-Cambrésis, en avril 1559[13].

 

En mai 1598, débarrassé des derniers ligueurs et de l’Espagne, Henri IV était vraiment roi de France.

Portrait d'Henri IV en Hercule terrassant l'hydre de Lerne, entourage de Toussaint DUBREUIL, vers 1600, musée du Louvre, Paris.

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[1] Alors qu’il était enfant, son père le contraignit à rejoindre le catholicisme ; suite à la Saint Barthelemy, il abjura une nouvelle fois sous la pression de la famille royale.

[2] Jean VI, né en 1522, avait participé à la bataille de saint Quentin aux côtés de l’armée royale (lors de la onzième guerre d’Italie.), et combattu les huguenots lors des guerres de religion.

[3] Rouen était alors la seconde ville de France.

[4] La légende veut qu’Henri IV, en abjurant, aurait dit Paris vaut bien une messe. Toutefois, il semblerait que le roi de France n’ait jamais prononcé ses mots. Aujourd’hui encore, les historiens ne savent pas si ce souverain décida de se convertir avec sincérité ou par pur calcul politique.

[5] Charles I° de Guise était le fils d’Henri I° de Guise, surnommé le Balafré, assassiné par Henri III en décembre 1588. Le jeune homme fut dans un premier temps un des chefs de la ligue catholique, mais ce dernier décida peu après de faire soumission au roi de France.

[6] A l’origine, les hauts fonctionnaires de l’Etat étaient choisis par le souverain ; avec le système de la vénalité des charges (instauré par François I°.), ces postes purent être obtenus en versant d’importantes sommes d’argent à la couronne. Cette pratique, favorable sur le court terme grâce aux rentrées d’argent qu’elle occasionnait, fut toutefois dramatique sur le long terme (d’autant plus que le phénomène ne cessa de s’accroitre au fil des siècles.). En effet, les hauts fonctionnaires furent plus riches que compétents, et affaiblirent grandement l’administration royale.

[7] Anne de Joyeuse, le frère du cardinal, était décédé lors de la bataille de Courtras, livrée contre Henri IV en octobre 1585 (pour en savoir plus à ce sujet, voir le 3, section V, chapitre cinquième, les Valois-Angoulême.).

[8] Ce dernier était le fils d’Emmanuel Philibert de Savoie, qui avait combattu contre la France aux cours des guerres d’Italie.

[9] Ces places de sûreté créèrent aboutirent toutefois à la création d’un véritable Etat dans l’Etat, problème auquel Louis XIII fut confronté au cours de son règne.

[10] Suite à la signature de l’édit de Nantes, les huguenots ne posèrent plus de problèmes. Le roi de France Louis XIII fut toutefois confronté à quelques révoltes dans le sud et dans le Midi ; Louis XIV, révoquant l’édit de Nantes en 1685, s’attaqua à des protestants au nombre déjà très réduit.

[11] La Flandre et l’Artois étaient des régions réclamées par la France et l’Espagne depuis la mort de Charles le Téméraire (pour en savoir plus à ce sujet, cliquez ici.).

[12] Au début du XVI° siècle, le royaume de Navarre s’étendait des deux côtés des Pyrénées. Toutefois, en 1514, le roi d’Espagne Ferdinand II d’Aragon parvint à s’emparer de la moitié sud du pays (Le roi de France Louis XII, mis à mal par la quatrième guerre d’Italie, ne put s’y opposer.). Les souverains français tentèrent à plusieurs reprises de mettre la main sur la moitié sud de la Navarre, en vain.

[13] Le traité de Cateau-Cambrésis avait été signé par le roi de France Henri II et son homologue espagnols Philippe II (pour en savoir plus, voir le 4, section V, chapitre deuxième, les Valois-Angoulême.).

 
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