Les Capétiens
CHAPITRE CINQUIÈME : Louis
IX (1226 à 1270)
I : Régence de Blanche de Castille
(1226 à 1235) |
1° Troubles
sous la régence – Louis VIII était mort prématurément en 1226,
après seulement trois années de règne.
Le défunt avait eu douze
enfants avec son épouse Blanche de Castille, dont plusieurs étaient
décédés. Survécurent jusqu’à l’âge adulte Louis IX, Robert,
Alphonse et
Charles.
La naissance de Louis IX,
enluminure issue de l'ouvrage Grandes Chroniques de France,
Paris, France, XIV°siècle.
La couronne revenait à
Louis, l’aîné, mais ce dernier étant trop jeune pour régner. Ainsi, la
régence fut confiée à sa mère.
Saint Louis enseigné par sa mère, par Alexandre CABANEL, 1874, le Panthéon, Paris.
Cette dernière, pressentant
une fronde, fit sacrer le jeune roi à Reims dès novembre 1226, ce dernier
recevant la sainte onction des mains de Jacques de Bazoches, évêque
de Soissons .
a) Première révolte
(janvier 1227) : mais, malgré cette cérémonie, les grands feudataires ne
désarmèrent pas. Ces derniers, n’appréciant guère qu’une femme
estrange
soit à la tête du royaume, s’inquiétaient de la montée en puissance de
la royauté.
Parmi les conjurés, l’on
trouvait un descendant de Louis VI le Gros, Pierre dit
Mauclerc,
régent de Bretagne (il était surnommé « mauvais clerc » car il avait
abandonné la carrière ecclésiastique afin d’épouser le métier des armes) ;
Thibaud IV, comte de Champagne ; et Hugues X de Lusignan,
comte de la Marche et d’Angoulême (encouragé par sa femme Isabelle,
veuve de
Jean sans Terre).
Le roi d’Angleterre Henri III, quant à lui, ne participa pas en
personne à la révolte, mais envoya des troupes en France.
En janvier 1227, alors que
les conjurés s’étaient réunis à Thouars, dans le Poitou, Blanche de Castille
convoqua l’ ost
et marcha vers Chinon.
Toutefois, la régente
préférait négocier plutôt que combattre. Elle reçut alors la soumission de
Thibaud IV, qui, cédant aux charmes de la reine, abandonna la coalition.
Buste de Blanche de Castille, château de Fontainebleau, Fontainebleau.
La reine, en guise de bonne
foi, recula vers Tours, puis vers Vendôme.
Pierre Mauclerc et Hugues de
Lusignan renoncèrent alors à la lutte, signant un accord de paix avec
Blanche en mars 1226. Les conjurés, en échange de l’hommage à Louis IX,
reçurent de petites compensations territoriales ou financières.
b) Deuxième révolte
(novembre 1227) : mais, en fin d’année 1227, Pierre Mauclerc et Hugues X
recommencèrent à comploter, prévoyant d’enlever le jeune Louis IX.
Ces derniers, réunis à
Corbeil, décidèrent alors d’intercepter le cortège royal lorsqu’il
quitterait Orléans.
Toutefois, le complot fut
éventé, et Louis IX s’enferma dans la forteresse de Montlhéry. Blanche,
restée à Paris, n’avait pas de troupes régulières à qui faire appel. Elle se
tourna alors vers les milices communales et les habitants de la capitale,
qui, se dirigeant vers Montlhéry, fournirent une escorte au jeune roi.
Le retour vers Paris fut un
véritable triomphe, Louis IX étant chaudement acclamé par ses sujets.
Les conjurés, voyant à quel
point le jeune roi était populaire, n’osèrent rien tenter.
c) Troisième révolte
(janvier 1229) : alors que la reine participait à la
conférence de
Meaux,
Pierre Mauclerc et Hugues X reçurent le soutien de Philippe Hurepel,
comte de Clermont et de Boulogne, second fils de Philippe Auguste.
En janvier 1229, le régent
de Bretagne fut convoqué à Melun par la reine, car il avait entreprit de
fortifier Bellême, une cité qui lui avait été confiée lors du traité de
Vendôme, en 1226.
Pierre Mauclerc ne s’étant
pas présenté, Blanche de Castille décida de convoquer l’ost, mais les
seigneurs n’amenèrent avec eux qu’un minimum de troupes.
Malgré un manque
d’effectifs, la régente décida d’assiéger Bellême. Mais la situation évolua
considérablement lorsque Thibaud IV de Champagne rejoignit l’ost à la tête
d’un fort contingent.
La garnison installée à
Bellême, refusant de combattre, décida alors de faire soumission.
c) Quatrième révolte
(1231) : la trêve entre la France et l’Angleterre touchant à sa fin à
l’été 1229, Henri III annonça sa volonté d’intervenir sur le continent.
Pour se faire, il se
rapprocha de Pierre Mauclerc, qui lui prêta hommage, violant ainsi les
droits régaliens du jeune Louis IX.
En mars 1230, ayant appris
la perfidie du régent de Bretagne, Blanche de Castille convoqua l’ost à
Angers. Cette dernière reçut le soutien de nombreux seigneurs, et Hugues X
lui-même préféra rester neutre dans le conflit.
Alors qu’Henri III et Pierre
Mauclerc se trouvaient à Nantes, Louis IX accusa le régent de Bretagne de
félonie, déliant ses vassaux de leur serment.
Toutefois, constant que son
rival n’était guère dangereux, le jeune roi recula vers Angers à la mi-juin,
puis rentra à Paris ; Henri III, de son côté, fit un aller-retour entre
Nantes et Bordeaux, alors que ses troupes profitaient de l’expédition pour
festoyer.
Finalement, le roi
d’Angleterre rentra dans son île en septembre 1230.
L’année suivante, Louis IX
lança une nouvelle campagne contre la Bretagne, dirigée cette fois non
contre Henri III mais contre Pierre Mauclerc.
Toutefois, l’expédition
débuta mal, car le convoi de machines de sièges du roi fut détruit par les
Bretons, sur la route de Fougères.
Finalement, des pourparlers
furent mis en place par l’intermédiaire du pape Grégoire IX.
Ainsi, en juillet 1231,
Louis IX conclut une trêve de trois ans avec Henri III et Pierre Mauclerc.
d) Cinquième révolte
(1234) : une dernière offensive fut dirigée contre Pierre Mauclerc
pendant l’été 1234. Louis IX, progressant le long de la Loire, avança en
direction de la Bretagne, menaçant Nantes et Rennes.
Magnanime, le roi de
France accorda une trêve de trois mois à son rival ; toutefois, si ce
dernier ne recevait pas d’aide d’Henri III, il devrait se soumettre.
En fin d’année 1234, Pierre
Mauclerc n’ayant pas reçu de renforts, il fut contraint de se soumettre. Ce
dernier fut alors contraint de céder à Louis IX les places fortes dont les
Français s’étaient emparés pendant la campagne (Oudon, Champtoceaux et
Châteaubriand), mais aussi verser une indemnité de guerre.
Le roi d’Angleterre, quant à
lui, qui avait préféré ne pas intervenir, signa une trêve de six ans avec la
France.
e) Sixième révolte
(1236) : à noter qu’en 1236, Pierre Mauclerc proposa à Thibaud IV, de
conclure une alliance matrimoniale. Ainsi, Jean, fils du régent de
Bretagne, devait épouser Blanche, fille unique du comte de Champagne .
Louis IX, qui ne s’aperçut
pas du danger, ne s’opposa pas au mariage, qui fut célébré la même année.
Blanche de Castille, au
contraire, morigéna sévèrement Thibaud IV, car ce mariage pouvait entrainer
à terme l’union de la Bretagne et de la Champagne.
Louis IX, convoquant l’ost,
avança vers la Champagne. Thibaud IV fit alors soumission auprès de la
reine, acceptant de participer à la croisade et de céder en gage trois
citadelles à la couronne.
2°
Acquisitions sous la régence – Blanche de Castille, non contente de
défendre le royaume de France contre les attaques des grands feudataires, en
accrut considérablement les limites.
a) Querelle de succession
de Champagne (1233) : nous avons vu précédemment qu’Henri II,
comte de Champagne, avait été nommé roi de Jérusalem en 1192, à l’issue de
la troisième croisade .
Le nouveau souverain décida
alors que s’il ne quittait pas la Terre Sainte, le comté de Champagne devait
revenir à Thibaud III, son cadet. Ce dernier, décédé prématurément en
1201, céda alors le comté à son fils Thibaud IV.
Mais les filles d’Henri II
n’apprécièrent guère les clauses de ce testament, et réclamèrent la
Champagne. Alix, l’aînée, décida alors de rentrer en France,
bénéficiant de l’appui de plusieurs seigneurs révoltés contre la régente.
Cependant, Alix n’arriva à
Troyes qu’en 1233, à une époque où Blanche de Castille avait mis fin aux
troubles. La fille d’Henri II accepta alors de céder le comté à Thibaud IV,
en échange d’un paiement de 40 000 livres et d’un domaine fournissant un
revenu de 2 000 livres annuelles.
Mais Thibaud IV, qui n’avait
pas les moyens de payer les sommes dues à sa cousine, fut contraint de
négocier un près auprès de Blanche de Castille. Cette dernière accepta,
recevant en retour les comtés de Blois, de Chartres, de Sancerre, ainsi que
la vicomté de Châteaudun.
Une fois satisfaite, Alix
rentra en Terre Sainte.
A noter que Thibaud IV, en
1234, reçut le royaume de Navarre, à la mort du roi Sanche VII, son
oncle maternel, décédé sans héritiers.
b) Le comté de Mâcon
(1239) : de même, le comté de Mâcon fut acheté à Alix, qui
n’avait pas eu d’enfants avec son époux Jean de Brienne, mort en
Terre Sainte en 1239.
c) Alliances
matrimoniales : enfin, la reine sut aussi forger d’habiles alliances
matrimoniales.
En 1229, par le
traité de
Paris,
consacra l’union de son fils Alphonse avec Jeanne, fille unique de
Raymond VII, comte de Toulouse. Ainsi, ce territoire reviendrait à la
couronne suite à la mort du beau-père d’Alphonse.
Puis, en mai 1234, Louis IX
fut marié avec Marguerite, fille aînée de Raymond Bérenger IV,
comte de Provence. Ce dernier n’ayant que des filles, cette union
permettrait vraisemblablement à la couronne de récupérer la Provence à la
mort de Raymond Bérenger.
Enfin,
en 1245, Blanche négocia le mariage de son cadet, Charles, avec Béatrix,
cadette de Raymond Bérenger IV et désignée comme héritière du comté de
Provence.
|
|