La principauté d'Antioche et les autres États
de Terre Sainte.
2° Histoire politique d’Antioche
– Bohémond de Tarente fut donc le premier prince d’Antioche. Lors de sa
captivité, de 1100 à 1103, son cousin Tancrède régna comme régent.
C’est au cours de cette période que la
principauté s’étendit vers la Cilicie, Alep (en Syrie musulmane.), et vers
la côte (avec l’occupation du port de Laodicée.).
Comme dans la plupart des Etats latins, la
succession pouvait se faire par les femmes. En 1188, à la mort de Raymond
III, le comté de Tripoli fut rattaché à la principauté d’Antioche par
Bohémond III.
L’association dura jusqu’à l’arrivée en Terre
Sainte des mamelouks d’Egypte. Ces derniers s’emparèrent d’Antioche en 1268,
puis de Tripoli en 1289.
La principauté d’Antioche s’associa
avec le royaume arménien de Cilicie, bien que leurs rapports furent parfois
conflictuels (l’alliance prit de l’ampleur au XII° siècle, face aux
revendications byzantines.).
Après la disparition de l’Empire byzantin de la
scène politique, une longue crise éclata entre les deux Etats. Tout d’abord,
le roi d’Arménie Lewon II restaura son petit neveu Raymond Roubene
sur le trône d’Antioche (il régna de 1216 à 1219.). En effet, ce dernier
avait été chassé par son oncle, Bohémond IV. En outre, Lewon II disputait
aux templiers des forteresses marquant la frontière entre la principauté
d’Antioche et la Cilicie.
Enfin, lorsque Bohémond VI épousa une princesse
cilicienne, la principauté d’Antioche-Tripoli devint un satellite du royaume
arménien. La lutte contre les mamelouks continua, et une alliance avec les
Mongols fut conclue.
Quant aux relations avec Byzance,
elle n’étaient pas des plus cordiales. Les Comnènes réclamaient depuis 1098
qu’on leur rende la ville, qui était une de leurs ancienne possessions. Le
prince Bohémond I°, qui fut battu dans les Balkans en 1108, confirma le
traité passé avec l’Empereur en 1097.
Les Byzantins menèrent deux campagnes contre
Antioche : l’une de 1137 à 1138, sous l’Empereur Jean II, sans résultat
durable ; l’autre eut lieu de 1158 à 1159 sous Manuel Comnène. Cette fois
ci, l’Empereur parvint à établir durablement la suzeraineté grecque sur les
Etats latins d’Orient (c’est ainsi que fut crée une ligue chrétienne,
rassemblant Grecs, Latins et Arméniens.).
Cette association prit fin en 1176, lorsque les
Turcs battirent les Byzantins.
3° Les
institutions de la principauté d’Antioche – A Antioche, le prince
partageait son pouvoir avec la cour des barons et la cour des bourgeois.
La législation féodale, très
contraignante ici pour les vassaux et arrière-vassaux, était consignée dans
les assises d’Antioche. Dans cette principauté, les arrière-vassaux
devaient prêter l’hommage direct au prince, ce qui ne faisait généralement
pas ailleurs.
Le connétable, qui
s’occupait des armées, était ici assisté par deux maréchaux (ces postes
furent doublés lors de l’acquisition du comté de Tripoli.). L’armée étant
peu nombreuse (500 chevaliers, 5 000 cavaliers légers, 5 000 fantassins
indigènes.), la défense de la principauté était aussi confiée aux templier,
qui défendaient le nord, les hospitaliers défendaient le sud.
Mais Antioche gardait encore à
cette époque son héritage grec. Par exemple, les ducs byzantins, à la tête
des districts urbains, conservaient leur titre (On les appelaient djabala
à Laodicée.). Ces Grecs étaient des fonctionnaires civils mais non des
militaires (ils détenaient la charge de chef de l’administration urbaine ou
de chef de la justice bourgeoise.).
4° La société
d’Antioche – De nombreux Francs vivaient à Antioche, où ils étaient en
position dominante. Ils étaient majoritairement en provenance de Normandie
ou d’Italie, ou alors du sud de la Loire.
La bourgeoisie intégrait en son
sein de nombreux Arméniens et Syriaques, à condition que ces derniers aient
reçu un statut personnel de la part des Francs (ces indigènes étaient alors
considérés comme des Latins.).
Au début du XIII° siècle apparut
la commune d’Antioche (influencée par ses homologues italiennes.), dirigée
par un collège de consuls et présidée par un maire (cette dernière ne fut
pas un frein au roi mais un point d’appui.).
Les Grecs présent
dans la principautés d’Antioche étaient principalement des melkites,
considérés comme schismatiques mais non comme hérétiques. Les évêques
orthodoxes, à cette époque, furent de plus en plus remplacés par des évêques
latins.
Quelquefois, lorsque les
musulmans se faisaient plus menaçants, le roi d’Antioche accepta de
favoriser les ecclésiastiques orthodoxes, afin de s’attirer les bonnes
grâces des Byzantins.
Mais d’autres
communautés vivaient à Antioche.
Les jacobites constituaient la
classe urbaine la plus modeste, fournissant l’essentiel du peuplement rural.
Les Arméniens étaient quelquefois
à la tête de seigneuries (mais le phénomène était plus rare qu’à Edesse.).
Ces dernières étaient les vestiges de la colonisation arménienne mise en
œuvre par les Byzantins lors de la Reconquête de 950 – 1031.
Les musulmans étaient peu
nombreux, surtout après le XII° siècle, quand la principauté d’Antioche
perdit ses territoires de l’est.