Le royaume de Chypre et les autres États de
Terre Sainte.
2° Le royaume
de Chypre, de 1192 à 1489 – Au XIII° siècle, les souverains de l’île
furent parfois aussi rois de Jérusalem. Mais comme cette ville avait été
prise par les musulmans, leur capitale était Saint Jean d’Acre (à la chute
d’Acre, en 1291, les rois de Jérusalem vinrent se réfugier à Chypre.).
Jusqu’en 1267, l’île fut sous la
domination des Lusignan. A cette date, le roi Hugues II mourut sans
héritiers, et ce fut son oncle, le prince d’Antioche, qui lui succéda. C’est
ainsi qu’apparut la dynastie des Antioche Lusignan.
Les Lusignan, originaires du
Poitou, conclurent de nombreuses alliances avec des maisons latines et
italiennes : au XIV° siècle, afin de contrecarrer la puissance de Gênes, le
roi Pierre II épousa une Visconti, originaire de la maison des ducs de
Milan. Autre alliance, au XV° siècle, le roi Jacques II épousa Catherine
Cornaro de Venise.
Mais les rois de Chypre firent
aussi des alliances avec Byzance : au XV° siècle, Jean II épousa une
princesse byzantine, Hélène Paléologue.
Chypre s’allia aussi avec les
Arméniens de Cilicie : au XIII° siècle, la fille d’Amaury de Lusignan épousa
le roi arménien Lewon II le Magnifique (ce qui fait qu’au XIV°
siècle, deux Lusignan devinrent rois de Cilicie.).
La monarchie de Chypre, bien que
féodale, était néanmoins forte. Guy de Lusignan, lorsqu’il vint s’installer
sur l’île en 1192, distribua des fiefs. Le roi de Chypre étant aussi roi de
Jérusalem, il devait théoriquement obéir à la cour de barons.
Mais ce contrôle se fit de moins important au fil des années (il disparut en
1291.).
Le roi de Chypre, en tant que roi
de Jérusalem, avait droit au double couronnement. Il était couronné roi de
Chypre à Nicosie, et roi de Jérusalem à Famagouste.
Notons aussi le rôle du grand
turcoplier, qui avait comme tâche de s’occuper des ouvriers indigènes.
Au XIII° siècle,
alors que les Etats francs existaient encore, Chypre était relativement unie
à la Terre Sainte. Plusieurs fois, les rois de l’île tentèrent de libérer
Jérusalem.
Le roi Hugues IV (1324 – 1348.)
créa la sainte union (entre Chypre, le pape, les chevaliers de Rhodes et
Venise.), voulant en découdre avec les musulmans. Cependant, cette ligue ne
s’attaqua pas à la Terre Sainte mais à l’Asie mineure.
Effigie priante d'un prince de la maison de Chypre, musée du Louvre, Paris.
Pierre II (1358 – 1369.), voulut
mettre en place une grande croisade, partant en Europe recruter des
troupes. Il débarqua ensuite en méditerranée orientale, passant par l’Asie
mineure, la Syrie et l’Egypte, et parvint à prendre Alexandrie en 1365. Cela
provoqua le mécontentement des mamelouks d’Egypte, mais aussi des
républiques maritimes italiennes, Venise et Gênes (qui n’appréciaient pas
que quelqu’un trouble leur commerce avec les musulmans.).
La dernière phase de l’existence
du royaume de Chypre, oscilla entre la menace mamelouke et la tutelle des
républiques italiennes.
De 1373 à 1464, les génois
établirent leur emprise politique et leur tutelle économique sur l’île. Puis
ce fut au tour de Venise de faire main basse sur Chypre, suite au mariage du
roi Jacques II et de Catherine Cornaro, une vénitienne. En 1474, le roi
mourut. En 1489, la veuve fut obligée d’abdiquer en faveur de Venise.
3° Guerre et
commerce à Chypre – La haute noblesse de l’île était Française,
originaire de Terre Sainte (famille Ibelin.), de France (famille Porcelet.),
du Poitou (famille Morf.), de Picardie (famille Picquigny.). D’ailleurs, à
Chypre, les habitants parlaient majoritairement en français.
Au fil des siècles et des
alliances politiques, de nouvelles familles apparurent : d’abord arrivèrent
les italien (familles Dampierre et Novare.), puis les Aragonais, les
Siciliens et les Grecs.
Après la chute des Etats latins
d’orient, l’esprit de croisade diminua au sein de la noblesse,
préférant se passionner pour les intrigues de cour, et profitant de leur
agréable vie de château.
Les bourgeois, quant
à eux, constituaient une classe inférieure à celle des nobles. Mais le roi
les protégeait néanmoins contre les aristocrates et les marchands italiens
ou orientaux. Ces bourgeois étaient eux aussi Français pour la plupart.
Prospères, ils étaient au service du roi, qui leur donnait accès à la garde
royale ou à la charge de vicomte de Famagouste.
A côté de ces bourgeois, l’on
pouvait trouver des colonies italiennes ou espagnoles. Les Vénitiens, les
Génois, les Pisans disposaient à Famagouste de quartiers entiers auto
administrés sous l’autorité d’un consul général (un bayle pour le
Vénitiens (l’équivalent d’un bailli.), un podestat pour les Génois.).
Les villes de Montpellier et de Barcelone, qui appartenaient au roi
d’Aragon, jouaient un grand rôle dans le commerce avec Chypre.
En 1291, le rôle économique de
Chypre augmenta, les mamelouks ayant pris les ports francs de Syrie et de
Palestine. Les habitants de l’île menèrent à cette époque une vie fastueuse,
imitant les seigneurs et les marchands.
Les indigènes, à
Chypre, étaient de deux sortes.
Les premiers étaient les
marchands venus de Syrie, qui pouvaient être nestoriens, orthodoxes, au
autre. Les plus actifs d’entre eux étaient arabophones et francophones, et
jouaient le rôle de banquiers.
Les Grecs, quant à eux,
résidaient dans l’île. L’on pouvait distinguer trois catégories précises :
les parèques (presque des esclaves.), les perpiriens (sorte de
classe moyenne.), les clefthères (ils étaient des affranchis des
campagnes, et pouvaient s’introduire dans les rangs de la bourgeoisie. Ils
pouvaient aussi devenir nobles s’ils étaient militaires.). A noter qu’il n’y
eut pas de révolte de la population grecque à Chypre, contrairement à l’île
de Crète.
4° La religion à
Chypre – Pour les Grecs orthodoxes, le point le plus important était la
religion. Les Lusignan refusèrent cependant de convertir de force les
populations non catholiques de l’île (en 1359, le légat Pierre Thomas fut
expulsé pour prosélytisme.). D’ailleurs, les rois ne firent rien non plus
pour stopper le développement de la foi orthodoxe (à partir de 1441, ne
nombreux monastères furent construits sur l’île.).