Les croisades (1095 -
1270) et la colonisation franque en Orient
CHAPITRE
PREMIER :
Les croisades
VI :
Sixième croisade (1228 – 1229)
1° La fausse croisade (1227) –
Frédéric II, Empereur
d’Allemagne, avait prit la croix de sa propre initiative lorsqu’il avait été
couronné roi de Germanie, en 1216. Mais plus de dix ans après, Rome ne
voyait aucune expédition se monter en direction de la Terre Sainte. Le pape
Honorius III, un vieillard, avait été le tuteur de Frédéric II, et,
magnanime, ne voulut jamais se fâcher avec lui.
En outre, en 1225, Frédéric II épousa
Yolande, fille du roi de Jérusalem, Jean de Brienne. Ce dernier n’était
sur le trône qu’en tant que tuteur de sa fille, depuis le décès de son
épouse. Frédéric II rappela ce détail à son beau père, qui ne fut pas
enchanté de se faire dépouiller de la sorte. Cela mécontenta aussi
grandement le roi de France Philippe II, qui voyait dans ce mariage la
dénationalisation de la Syrie franque[1]
(en effet, cette région était en majorité peuplé d’habitants venant de
France.).
L’Empereur vivait en Sicile,
ayant confié le royaume de Germanie à son fils aîné, Henri. Cette île, qui
avait été longtemps sous domination musulmane, en gardait encore des traces.
Frédéric II, disaient ses détracteurs, était à moitié musulman. En effet, il
connaissait bien l’islam, et entretenait de bonnes relations avec sultans
Ayyubides d’Egypte (politiques et commerciales.). S’entretenant avec eux, il
leur confiait qu’il préférait leur système de califat, les califes ayant un
lien sanguin avec Mahomet, que le système de la papauté, dans lequel les
souverains pontifes n’avaient rien en commun avec le Christ.
Le pape Honorius III mourut en
1227, et fut remplacé par Grégoire IX. Le nouveau souverain pontife,
bien que lui aussi d’âge mûr, était néanmoins animé d’une volonté
implacable.
Le nouveau pape rappela alors à
l’Empereur la promesse qu’il avait faite en 1216, et le somma alors de faire
son devoir, s’il ne voulait pas s’exposer aux foudres de l’Eglise.
Frédéric II comprit alors que le
temps des mauvaises excuses était fini. Ses retards avaient été funestes
pour la Terre Sainte, car ils avaient paralysé une multitude de dévouements
et amené l’échec de la V° croisade (en effet , les croisés avaient attendu
des mois à Damiette que Frédéric II les rejoigne.).
Peu de temps auparavant, le
sultan El Kâmil régnait en Egypte, El Mouazzam régnait à
Damas, et El Achraf régnait en Mésopotamie. A cette époque, le sultan
d’Egypte était attaqué par son frère, le sultan de Damas. Ce dernier avait
fait appel au Turc Djélal el Dîn, qui avait été chassé du pays de Khiva par
les Mongols de Gengis Khan, et s’était réfugié en Perse et en
Arménie. En 1227, Djélal el Dîn avait dévasté les Etats de El Kâmil,
qui en appela à son ami Frédéric II.
L’Empereur commencer par envoyer
à Saint Jean d’Acre un contingent de quelques milliers de soldats allemands.
Puis il s’embarqua à Brindes en septembre 1227, accompagné d’une
petite armée.
C’est alors que l’on apprit que
Frédéric II, après trois jours de navigation, sous prétexte de maladie,
avait repris terre en Italie. Ce dernier envoya des explications au pape,
qui ne voulut rien entendre et l’excommunia, en septembre 1227.
2° La VI° croisade (1228 – 1229)
– Enjuin 1228, l’Empereur, frappé d’un triple anathème[2],
décida finalement de partir pour la Terre Sainte, .
Cependant, Frédéric II avait trop
tardé. En effet, El Mouazzam était mort, et son fils, en Nâsir Dâoud,
était monté sur le trône. Ce dernier n’était pas dangereux pour El Kâmil,
qui n’avait plus besoin de l’aide de l’Empereur.
Frédéric II commença par
débarquer à Chypre, où il tenta de se débarrasser du dirigeant de l’île,
Jean Ibelin. L’Empereur opposait une théorie de droit romain à son
adversaire, qui opposait une théorie de droit féodal. Finalement, Jean
Ibelin accepta de reconnaître Frédéric II comme suzerain du roi, mais sans
lui accorder l’hommage direct.
Au même moment, apprenant la
présence de l’Empereur, le roi de Chypre et d’Antioche, Bohémond IV, se
rendit sur l’île. Là, voyant le comportement de Frédéric II, il simula la
folie (criant « Ah ! Ah ! Ah ! » en pleine rue.) afin de pouvoir regagner
son royaume.
L’Empereur débarqua peu de temps
après à Saint Jean d’Acre, où il fut reconnu par la noblesse de la ville
(Frédéric II déclara vouloir assurer la régence pour son fils, Conrad IV.).
Voyant que la situation avait changé radicalement, il songea d’abord à
assiéger Damas, afin de l’échanger plus tard contre Jérusalem. Mais il
apprit que les troupes de El Kâmil et de son frère, El Achraf, étaient déjà
en train de faire le siège de la ville (cette dernière fut prise en juillet
1229.).
Frédéric II décida alors de
partir pour Jaffa, où il entreprit, en novembre 1228, de consolider les
fortifications de la ville. Peu de temps après, il apprit que le Saint Siège
était en train de s’emparer de ses possessions en Italie du sud.
Le sultan el Kâmil accepta de
signer avec lui les accords de Ramlah. Ce dernier rendait à Frédéric II la
ville de Jérusalem, Bethléem, Nazareth, la seigneurie de Toron, et une partie
du territoire de Sidon. De leur côté, les musulmans conservaient la Galilée
orientale, le sud de la Philistie, la Samarie, et une partie de la Judée. En
outre, ces derniers conservaient le libre exercice de leur culte en tous
lieux. Enfin, une trêve de dix ans fut signée.
Cet accord ne plut cependant pas
aux templiers. En effet, les musulmans conservaient à Jérusalem la mosquée
el Aqsa, qui avait été le premier quartier général des moines soldats,
lorsqu’ils arrivèrent en Terre Sainte au XI° siècle. Par la suite, ils
jetèrent l’interdit sur la ville. Les hospitaliers et les Ibelins de Chypre
restèrent eux aussi hostiles à Frédéric II.
L’Empereur, qui avait établi une
sorte de condominium islamo chrétien sur Jérusalem, se fit proclamer roi, en
mars 1229. Comme ce dernier était excommunié, et que l’interdit frappait la
ville, son couronnement fut civil. Personne ne voulant toucher la tête de
Frédéric II, il dût se couronner lui même.
Peu de temps après, l’Empereur
rentra en Sicile.
Mais cette prise de pouvoir par
Frédéric II ne plut pas à beaucoup d’habitants de la Syrie franque. Le légat
de l’Empire, Riccardo Filangieri, à la tête de l’armée impériale,
aidé par les chevaliers teutoniques, luttèrent contre les Ibelins à Beyrouth
et à Acre. De plus, Jérusalem ne reconnut pas l’autorité de Conrad IV
lorsque celui-ci fut déclaré majeur (ce fut la reine de Chypre, Alice,
qui reçut la régence de la ville.).
Au final, les acquis fait pas
Frédéric II suite au traité de Jaffa n’étaient pas bien solides, vu que
territoire franc n’était pas défendable. Toutefois, les musulmans
respectèrent la trêve, puis la ville fut reprise en 1244.