II: La plaine des Asphodèles, le
Tartare, les Champs Elysées
1° La plaine des
Asphodèles – Ce lieu était peuplé
par les âmes des mortels qui avaient mené sur terre une vie apathique.
N’ayant rien accompli de leur vivant, en bien ou en mal ; ayant mené une
existence dénuée de sens ; les âmes de ces défunts étaient condamnés à
demeurer éternellement sur la plaine des Asphodèles.
2° Le Tartare
– C’était un endroit réservé aux humains
qui avaient commis de grands crimes au cours de leur vie terrestre.
Emprisonnés en ce lieu pour l’éternité, ils devaient y endurer d’atroces
souffrances. Ces criminels devaient chacun accomplir un supplice.
- Tantale :
il avait servi aux dieux, au cours d’un repas, les restes de son fils, et
fut condamné à la faim et à la soif éternelle. Les fruits et l’eau qu’il
cherchait à atteindre étaient sans cesse retirés devant lui.
- Sisyphe : aussi rusé que son fil Ulysse[1], ce dernier avait été puni
pour avoir échappé à la mort à plusieurs reprises. En effet, il avait déjoué
Thanatos, la personnification de la mort, en l'enchaînant ; puis
trompa Hadès qui l'avait emmené aux Enfers (en effet, comme la femme de
Sisyphe n'avait pas organisé les funérailles de son mari, ce dernier fut
autorisé à repartir, mais une fois de retour à la surface, il refusa de
retourner dans le monde des morts). Finalement ramené de force aux Enfers
par Thanatos et condamné au Tartare, son supplice était de monter
un énorme rocher en haut d’une montagne, mais à chaque fois que la tâche de
Sisyphe semblait accomplie, le rocher retombait tout en bas de la pente.
Sisyphe, par Jules DESBOIS, 1925, musée
d'Orsay, Paris.
- Ixion : il avait cherché à séduire
Héra, et bien mal lui en avait prit. Son supplice était terrible, tournant
éternellement sur une roue enflammée.
- Les Danaïdes : au nombre de 50, elles
avaient tué leurs époux au cours de la nuit de noces. Elles étaient
condamnées à remplir d’eau un tonneau qui se perçait sans cesse.
3° Les Champs Elysées –
Les Champs Elysées étaient un lieu très
agréable, réservé aux grands héros qui avaient plu aux dieux. L’on y
trouvait le palais du dieu des Enfers, Hadès.
Le dieu était assisté dans sa tâche par les
trois juges des Enfers, dont la fonction était de recevoir les morts et de
leur assigner leur lieu de séjour : Minos, Rhadamanthe et Eaque.
Minos était le roi de Crête[2],
et fut placé à ce poste à sa mort. Il s’occupa des morts qui avaient été
faussement accusés.
Rhadamanthe était le frère de ce dernier, et
décida de s’exiler en Béotie lorsque Minos reçut le trône de Crète des mains
de leur père Astérion. Il y rencontra Alcmène, veuve d’Amphitryon, qui lui
donna deux fils (Erythros et Gorthys.). A sa mort, il devint
juge des Enfers.
Le dernier, Eaque, était le fils de Zeus et de
la mortelle Egine. Le dieu avait prit forme d’aigle et amené la jeune
femme vers l’île d’Oenone. Eaque fut ensuite abandonné par sa mère en ce
lieu désert, et en appela à son père. Zeus décida alors de créer le peuple
des Myrmidons en se servant des fourmis de l’île, et Eaque devint leur roi.
S’unissant à Endeis, il en eut deux fils, Pélée (père d’Achille.)
et Télamon (père d’Ajax.). Juge des Enfers à sa mort, il garde
les clefs de ce lieu selon certaines traditions.
Hadès était accompagné, mais seulement trois
mois par année, par son épouse, Perséphone : un jour, Hadès, qui cherchait
une épouse, avait fait enlever une jeune femme du nom de Coré.
L'enlèvement de Proserpine, par Pierre BREBIETTE, vers 1625, musée du Louvre, Paris.
L'enlèvement de Proserpine par Pluton,
par François GIRARDON, 1692, musée du Louvre, Paris (à noter que ce bronze
n'est que l'esquisse d'une œuvre finale en marbre, datant de 1699.).
Cette
dernière était la fille de Déméter, la déesse des récoltes. Constatant que
sa fille avait disparu, elle décida de parcourir le monde à sa recherche,
refusant d’accomplir la tâche qui lui était échue. Pendant des mois, les
fruits de la terre cessèrent de pousser, provocant une grave famine. Puis,
elle apprit que sa fille était détenue par Hadès. Déméter réclama le retour
de Coré, argumentant que sa fille n’avait aucun lien avec le monde
souterrain (elle n’avait rien mangé pendant sa détention.). Cependant, le
dieu des Enfers refusa de libérer Coré, car il avait remarqué que cette
dernière avait mangé sept pépins de grenade. Hadès prétextait qu’ainsi, elle
ne pouvait plus partir. Déméter et Hadès trouvèrent cependant un accord :
Coré était libre de rejoindre sa mère, mais devait cependant séjourner aux
Enfers trois mois par an, sous le nom de Perséphone (au cours de ces trois
mois, Déméter ne fertilisait plus la terre. C’est ainsi que les Grecs
expliquaient le passage de l’été à l’hiver.).
Cérès et Proserpine (il s'agit des noms romains
de Déméter et Perséphone), par Ludwig SCHWANTHALER, 1843, Alte
Nationalgalerie, Berlin.
Résidaient aussi aux Enfers trois vieilles
femmes, appelées les Moires[3].
La première, Clotho ‘la fileuse’, fabriquait le fil de la vie (le
passé.) ; la deuxième, Lachésis ‘la réparatrice’, le déroulait (le
présent.) ; la troisième, Atropos ‘l’implacable’, le coupait (le
futur.).
Les Parques (l'équivalent
romain des Moires), par Claude DALBANNE, vers 1906-1907, musée des
beaux-arts de Lyon, Lyon.
Orphée, comme nous l’avons dit plus haut, fut
un des rares humains à revenir vivant des Enfers. Fils de la muse Calliope,
il savait jouer de la lyre divinement, parvenant à charmer les animaux
sauvages.
Orphée participa d’abord à l’expédition des
Argonautes, sous la direction de Jason, à la recherche de la Toison d’or. A
la fin de son voyage, il rentra chez lui, en Thrace.
C’est alors que sa femme, Eurydice,
refusant les avances d’un berger nommé Aristée, fut mordue par un
serpent alors qu’elle s’enfuyait.
Aristée poursuivant Eurydice, par Maître des
Cassoni Campana, début du XVI° siècle, musée des Arts décoratifs, Paris.
Après sa mort, ivre de douleur, Orphée
décida de descendre aux Enfers.
Orphée aux Enfers, XV° siècle, musée du Louvre, Paris.
Orphée, après avoir convaincu Charon de le
laisser traverser le Styx, se trouva face à Cerbère, le monstrueux chien
tricéphale, gardien des Enfers. Grâce à sa musique, le jeune homme parvint à
endormir la bête, et se rendit aux Champs Elysées, demandant une audience à
Hadès.
Orphée devant Pluton et Proserpine, par François PERRIER, vers
1650, musée du Louvre, Paris (Hadès et Perséphone furent baptisés Pluton et
Proserpine par les Romains.).
Orphée joua si bien de la lyre, qu’il parvint à émouvoir Hadès, qui accepta
de lui rendre Eurydice. Seulement, il ajouta une condition : la jeune fille
le suivrait à condition qu’Orphée ne se retourne pas, jusqu’à ce qu’ils
soient de retour dans le monde des vivants.
Orphée descendu aux Enfers pour demander Eurydice ou La
musique, par Jean RESTOUT, 1763, musée du Louvre, Paris.
Le jeune homme accepta, et prit le chemin du
retour. Seulement, Orphée ne sentait pas la présence d’Eurydice derrière
lui. Il avançait sans cesse, se demandant si Hadès ne s’était pas joué de
lui. Finalement, n’y tenant plus, il finit par se retourner : il constata
alors qu’Eurydice était bien présente, mais cette dernière disparut
subitement. Orphée avait perdu sa bien aimée pour toujours.
Orphée remonta ensuite à la surface, dépité, et
ne s’intéressa dès lors plus aux femmes, mais aux garçons. Par la suite, il
fut tué par des ménades[4]
en transe.
La mort d'Orphée, par Louis BOUQUET, vers 1939,
musée des années 1930, Paris.
[1]
Nous reviendrons plus en détail sur le personnage d'Ulysse sur
cette page.
[2]
Nous parlerons du roi Minos plus en détail dans la section V,
chapitre troisième, mythologie grecque.
[3]
Ces trois Moires ressemblent beaucoup aux trois Nornes de la
mythologie scandinave, qui gardaient le puits d’Urda : la première,
Urda, voyait le passé ; la seconde, Verdandi, voyait le présent ; la
troisième, Skuld, voyait le futur. Pour plus de détails sur la
mythologie scandinave, voir le chapitre deuxième, la mythologie
scandinave, partie MYTHOLOGIE.
[4]
Nous avons vu ce qu’étaient les ménades en 13, section II, chapitre
premier, mythologie grecque.