1° La mise en place du nouveau
gouvernement (décembre 1848) – Le lendemain de l’élection
présidentielle, Louis Napoléon Bonaparte décida de confier à
Odilon Barrot la charge de constituer un nouveau gouvernement.
Portrait d'Odilon Barrot.
Le
nouveau président du conseil, né en juillet 1791, avait été nommé préfet de
la Seine en 1830. Toutefois, son inactivité lors des émeutes de février 1831
lui couta son poste.
Plus tard, toujours sous la monarchie de juillet, il fut le leader de l’opposition
dynastique, mouvement politique de gauche mais néanmoins favorable à la
monarchie constitutionnelle.
Ainsi, outre Odilon Barrot, président du conseil et ministre de la Justice,
l’on retrouvait Léon Faucher
au ministère de l’Intérieur ; Édouard
Drouyn de Lhuys
aux Affaires étrangères ; le portefeuille des Finances fut cédé à
Hippolyte Passy ;
Bertrand de Lacrosse
eut les Travaux Publics ; Louis Buffet
reçut le ministère de l’Agriculture ; l’Instruction publique fut cédée au
comte Alfred de Falloux ;
le général Joseph Marcellin Rulhières
fut nommé ministre de la Guerre ; enfin, Alexandre César Charles
Victor Destutt, marquis de Tracy,
reçut le portefeuille de la Marine et des Colonies.
Léon Faucher, Edouard Drouyn de Lhuys, Louis Buffet et Alfred de
Falloux.
Le
nouveau gouvernement était très différent de ceux qui s’étaient formés au
cours de l’année 1848. En effet, Louis Napoléon Bonaparte avait cédé de
nombreux portefeuilles aux membres du parti de l’ordre, avec lequel il avait
fait alliance avant l’élection présidentielle.
Ainsi, les ministres étaient en grande majorité des monarchistes
orléanistes, hormis Falloux (légitimiste.) et Lacrosse (bonapartiste.).
2° La constitution de 1848 – La nouvelle constitution,
dont les premiers débats avait commencé à la fin mai 1848, avait été
finalement adoptée par l’assemblée le 4 novembre 1848.
Fête de la constitution, sur la place de la Concorde, le 12
novembre 1848, par Jean Jacques CHAMPIN, XIX° siècle, musée
CARNAVALET, Paris.
Le
pouvoir législatif était basé sur un système
monocaméral,
l’assemblée étant composée de 750 membres d’au moins 25 ans, élus au
suffrage universel direct. Les députés étaient élus pour trois ans,
rééligibles immédiatement.
L’assemblée agissait en complète autonomie, se réunissant à son bon vouloir.
Les députés avaient le pouvoir de déclarer la guerre et de négocier les
traités.
L’assemblée pouvait aussi voter des lois à son initiative, et ne pouvait
être dissoute par le président de la république.
Le
président de la république, quant à lui, était élu pour quatre ans au
suffrage universel direct (il devait avoir au moins 30 ans.) Toutefois,
contrairement aux députés qui étaient rééligibles immédiatement, le
président ne pouvait se représenter qu’au bout de quatre ans après la fin de
son mandat.
Nommant et révoquant les ministres, il pouvait proposer des lois à
l’assemblée et les promulguer. Le président disposait aussi du pouvoir de
nommer les fonctionnaires et disposait du droit de grâce.
A
noter que le président, en cas de malversations, pouvait être déféré devant
les tribunaux et mis en accusation.
Les deux pouvoirs étaient forts et équilibrés, même si le législatif
conservait un léger avantage sur l’exécutif.
A
noter que les députés avaient prévu un système de lois organiques,
chargées de compléter la constitution de 1848 (système similaire aux
amendements américains.), mais la durée de vie éphémère de la seconde
république rendit impossible toute modification de ce régime.
3° Parti de l’ordre contre républicains de la veille
(décembre 1848 à mars 1849) – Louis Napoléon Bonaparte, suite à sa
nomination comme président de la république, décida de s’installer au palais
de l’Elysée
(bien que ce bâtiment soit passablement délabré.) plutôt qu’aux Tuileries
(l’endroit étant jugé trop associé à l’Empire et à la monarchie.).
Louis Napoléon Bonaparte, président de la république,
musée des Invalides, Paris.
Adoptant comme tenue officielle l’uniforme de général en chef de la Garde
nationale, le chef de l’Etat ne tarda guère à rencontrer Charles Auguste
de Morny, son demi-frère adultérin dont il ignorait l’existence
jusqu’alors.
Charles Auguste de Morny, gravure publiée
dans Le journal illustré,
1865.
Le
parti de l’ordre, pensant avoir les mains libres depuis l’élection
présidentielle, constata que la frange gauche de l’assemblée n’avait pas
baissé les bras. Ainsi, Alexandre
Ledru-Rollin
contesta fin décembre 1848 le double commandement du général Changarnier,
qui avait été nommé commandant de la Garde nationale et de la division
militaire de Paris suite aux élections ; en outre, l’assemblée vota peu de
temps après l’abrogation de l’impôt sur le sel dans les régions d’élevage,
contre l’avis du gouvernement.
Alexandre Auguste
Ledru-Rollin, par Angélique MONGEZ, XIX° siècle, musée Carnavalet,
Paris.
Les conservateurs, face à l’opposition de l’assemblée, décidèrent alors de
riposter en janvier 1849. Ainsi, le comte de Falloux, ministre de
l’Instruction publique, mit un terme à la commission chargée de réformer
l’enseignement mise en place par son prédécesseur, et nomma
Adolphe Thiers
à la tête d’une nouvelle commission ; Léon Faucher, ministre de l’Intérieur,
décida de réduire de moitié les bataillons de la garde nationale mobile,
jugée trop sensible à la propagande de la gauche républicaine
; enfin, le gouvernement confia la tâche au général Changarnier de faire
pression sur l’assemblée pour que cette dernière accepte de voter la date
des prochaines élections législatives (qui furent finalement fixées à la
date du 13 mai 1849.).
Le général Changarnier.
Au
même moment, préfets et sous préfets d’obédience républicaine furent
remplacés par des conservateurs ou des bonapartistes ; enfin, en mars 1849,
les clubs politiques furent fermés.
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