III : L’élection impériale, l’origine de la querelle
Valois/Habsbourg (1519)
1° L’élection impériale (1519) –
En janvier 1519, l’Empereur germanique Maximilien I° mourut. Toutefois, il
est important de préciser que la couronne impériale n’était pas héréditaire
mais élective. En effet, le choix du nouveau monarque découlait des votes
d’une poignée d’aristocrates allemands, les princes électeurs (précisons que
la loi fixant les modalités de l’élection impériale datait du XIV° siècle[1].).
Portrait de Maximilien âgé.
Les princes électeurs (appelés aussi les Kurfürsten.), étaient au nombre de sept :
l’archevêque de Mayence, l’archevêque de Trèves, l’archevêque de Cologne, le
roi de Bohême, le comte palatin, le duc de Saxe, et le margrave de
Brandebourg[2].
Le margraviat de Brandebourg en 1525.
A
noter enfin que le titre d’Empereur n’apportait aucun contrôle territorial.
D’une part, les princes électeurs vivaient de manière quasi-indépendante
vis-à-vis de l’Empereur ; en outre les possessions de Maximilien revenaient
à son petit fils Charles (comme nous le verrons plus tard dans cette
section.).
La
charge d’Empereur étant particulièrement prestigieuse, plusieurs souverains
décidèrent d’annoncer leur candidature (à noter que la plupart des prétendants se
firent connaitre du vivant de Maximilien…).
Les candidats, au nombre de quatre, furent Frédéric, duc de Saxe ;
Henri VIII, roi d’Angleterre ; Charles, seigneur des Pays Bas Bourguignons et
roi d’Espagne[3] ;
François I°, roi de France.
François I°, château de
Fontainebleau, Fontainebleau.
En
réalité, l’élection se transforma vite en un duel François contre Charles
(en effet, Frédéric de Saxe se rendit vite compte qu'il ne pouvait pas
rivaliser contre ces deux souverains ; Henri VIII comprit que la position
insulaire de l'Angleterre serait un handicap.).
Le roi de France insista sur le fait qu’il était l’hériter direct du grand
Charlemagne, que la France et l’Empire germanique étaient deux Etats frères,
et qu’il irait reprendre Constantinople dès son élection. Il ajouta en outre
que les possessions de son rival étaient éclatées, et que son autorité en
Espagne était particulièrement fragile.
Charles répliqua en faisant prévaloir son lignage (en effet, il était le
fils du défunt Philippe le Beau, et donc petit fils de Maximilien
I°.), arguant que François I° n’était qu’un étranger.
Toutefois, les princes électeurs ne résonnaient pas de cette manière. Cette
élection impériale, gigantesque charivari, n’était pour eux qu’une belle
occasion de se remplir les poches. Ainsi, afin de s’assurer le soutien des
Kurfürsten, les deux candidats furent contraints de leur verser
d’importantes sommes d’argent.
Toutefois, Charles parvint à prendre l’avantage sur son rival le roi de
France. D’une part, il s’allia avec le richissime banquier d’Augsbourg
Jacob Fugger ; d’autre part il s’engagea à ne verser les sommes promises
qu’après l’élection (et évidemment en cas de victoire.). François I° fit
l’erreur de payer avant l’élection et en argent comptant.
La ville d'Augsbourg en
hiver, par Jörg BREU, vers 1531-1550, Deutsches historisches museum, Berlin.
Ainsi, en juin 1519, Charles fut finalement élu Empereur. Le sacre eut lieu
quelques mois après, en octobre 1520, à Aix la Chapelle.
Charles Quint, par Peter
Paul RUBENS, vers 1603, Deutsches historisches museum, Berlin.
Le
jeune Charles, âgé d’une vingtaine d’années, était roi d’Espagne et des
Amériques sous le nom de Charles I°, roi de Sicile et de Naples sous le nom
de Charles IV, et enfin archiduc d'Autriche et Empereur germanique sous le nom de Charles V (c’est
ainsi qu’en France, il resta dans les mémoires sous le nom de Charles
Quint.).
Ce
souverain, issu de la lignée des Habsbourg, se retrouvait à la tête d’un
immense Empire, sur lequel le soleil ne se couche jamais. Son
objectif, dès son arrivée au pouvoir, fut de mettre en place une hégémonie
carolingienne, en rétablissant l’Empire de Charlemagne[4].
L'Autriche sous le règne de Charles Quint
(1519)
Toutefois, les idéaux de ce souverain se heurtèrent, à maintes reprises, à
l’hétérogénéité de ses possessions territoriales.
2° Les suites de l’élection impériale, l’entrevue du Camp du
Drap d’Or (1520) – François I°, vaincu, se rendit rapidement compte de
la menace que représentait Charles Quint. Ainsi, le roi de France décida de
consolider son réseau diplomatique, se rapprochant de l’Angleterre.
Ainsi, en juin 1520, François I° reçut son homologue Henri VIII au Camp
du Drap d’Or, en Flandre[5].
Anglais accostant sur le continent afin de se rendre au
Camp du Drap d'Or.
Le
roi de France, soucieux de négocier une alliance avec le souverain anglais,
décida de marier son jeune fils François avec Marie Tudor, veuve de
Louis XII.
Français et Anglais festoyant lors de l'entrevue du Camp du Drap d'Or,
gravure issue de l'ouvrage
Histoire de France, par François GUIZOT, France, 1875.
Toutefois, le cardinal Thomas Wolsey, qui était un des conseillers
d’Henri VIII, parvint à convaincre son souverain de ne pas passer d’alliance
avec François I°.
En
effet, Charles Quint (il était le neveu de Catherine d’Aragon, reine
d’Angleterre[6].)
s’était allié au cardinal Wolsey, promettant à ce dernier la tiare papale.
Au
final, l’entrevue du Camp du Drap d’Or fut un échec, et Henri VIII préféra
s’allier avec Charles Quint (novembre 1521.).