Faux ! Aujourd'hui, il est difficile d'imaginer qu'un conflit aussi long ait
pu avoir lieu, opposant la France et l'Angleterre. D'ailleurs, les deux
belligérants se sont-ils affrontés non-stop pendant aussi longtemps ? Et la
guerre de Cent Ans, a-t-elle vraiment duré un siècle pile ?
Le roi de France Philippe IV mourut en novembre 1314, suite à un
accident de chasse, laissant trois fils derrière lui : Louis X,
qui régna de 1314 à 1316 ; Philippe V, qui régna de 1316 à 1322,
et Charles IV, qui régna de 1322 à 1328.
Toutefois, aucun des enfants de Philippe IV ne parvint à concevoir un
héritier mâle capable de prendre la succession. Ainsi, Louis X laissait
une fille, Jeanne, et un fils, Jean I° (surnommé le
Posthume, car il naquit quelques mois après la mort de son père),
qui mourut à l'âge de cinq jours ; Philippe V avait eu quatre filles et
un fils, Philippe, décédé en 1317 ; quant à Charles IV, il avait
lui aussi eu quatre filles.
En 1328, la question de la succession restait ouverte. Conformément à la
loi salique, qui avait été invoquée en 1317 pour légitimer la
prise de pouvoir de Philippe V, les femmes furent écartées de la
succession (c'est à dire
Isabelle de France, fille de Philippe IV,
ainsi que les filles des trois rois défunts).
Cependant, si les femmes ne pouvaient devenir
reines, pouvaient elles cependant transmettre l’héritage royal ? Si oui, de
nouveaux postulants pouvaient apparaitre, parmi lesquels Edouard
III, roi d'Angleterre, et petit-fils de Philippe IV par sa mère Isabelle
de France ; ou Philippe d’Evreux, prince de sang[1],
qui avait épousé Jeanne, fille de Louis X.
Cependant, les grands du royaume ne pouvaient se résoudre à
mettre un souverain anglais sur le trône de France, d'autant que la reconnaissance d’Edouard III comme
roi de France aurait entrainé des contestations de la part des filles de
Louis X, Philippe V et Charles IV, qui elles aussi avaient mis au monde des
héritiers mâles. Ainsi, le trône de France fut cédé au plus proche héritier
mâle : Philippe
VI, fils de Charles de Valois, frère cadet de Philippe IV.
Le sacre de Philippe VI, enluminure issue
de l'ouvrage Grandes chroniques de France, France, XIV° siècle.
La guerre de Cent
Ans éclata en octobre 1337, après une décennie de conflit lattent
entre la France et l'Angleterre. A cette date, Philippe VI décida de
confisquer la Guyenne à Edouard III, qui était son vassal[2],
pour cause de félonie.
Dans
l'historiographie française, l'on a coutume de diviser la guerre de
Cent Ans en fonction des règnes des rois de France : Philippe VI et
Jean II (1337 à 1364), Charles V (1364 à 1380),
Charles VI le Fou (1380 à 1422), et Charles VII (1422 à
1453).
Côté britannique,
l'historiographie traditionnelle retient un découpage en trois
partie, plus rationnel : la guerre edwardienne (menée par
Edouard III, de 1337 à 1360), la guerre caroline (menée par
Charles V et ses frères, de 1369 à 1389), la guerre lancastrienne
(menée par le roi d'Angleterre Henri V, de 1415 à 1429), puis
la victoire française (de 1429 à 1453).
Royaume de France et royaume d'Angleterre
en 1337.
Le première
offensive d'importance fut lancée en juin 1340, lorsque qu'Edouard
III remporta la bataille de l'Ecluse, parvenant à débarquer
sur le continent. Mais, bloqué devant Tournai, le roi d'Angleterre
signa une trêve avec son suzerain, acceptant de rentrer en
Angleterre en échange de la rétrocession de la Guyenne.
La bataille de l'Ecluse, par
Jean Froissart, enluminure issue de l'ouvrage Chroniques,
Paris, France, XV°siècle.
Toutefois, le
conflit fut relancé dès l'année suivante, lorsque éclata une
querelle successorale en Bretagne.
En effet, le duc
Jean III
était mort en avril 1341, sans laisser de descendance mâle. Deux
prétendants rivalisaient alors : Charles
de Blois,
époux de Jeanne
de Penthièvre,
nièce du défunt ; etJean
de Montfort, demi-frère
de Jean III. Ces derniers demandèrent alors un arbitrage auprès du
roi de France, qui préféra favoriser Charles de Blois, qui était son
neveu (sa mère, Marguerite
de Valois, était la
sœur de Philippe VI).
Jean de Montfort, débouté et accusé d'entente avec l'Angleterre, fut
privé de ses fiefs. Ainsi, une armée commandée par
Charles de Blois et Jean, duc de Normandie(c'est
à dire le futurJean
II), pénétra
en Bretagne et se dirigea vers Nantes, où Jean de Montfort avait
trouvé refuge. Ce dernier fut capturé suite à la prise de la ville,
mais les Anglais ne tardèrent pas à intervenir, débarquant à Hennebont,
où se trouvaitJeanne
de Flandre, l’épouse de Jean de Montfort.
En janvier 1343, une nouvelle trêve fut signée,
Edouard III prenant le contrôle de Brest et des places fortes
bretonnes restées fidèles à Jean de Montfort ; Charles de Blois fut reconnu
comme duc dans le reste de la région.
Quelques années plus tard, en 1346, Edouard III décida d'organiser
une chevauchée sur le sol français, manquant de moyens pour y
établir une armée permanente (rappelons que l'Angleterre ne comptait
alors que quatre millions d'habitants, contre 17 en France). Les
Anglais, partis de Normandie, prirent Caen,
pillèrent le Cotentin, et se dirigèrent ensuite vers la Flandre.
Toutefois, Edouard III ayant appris que Philippe VI était à sa
poursuite, il décida de s'installer sur une colline située non loin
de Crécy, le 25 août au soir.
le 26 août au matin, les Français arrivèrent finalement sur le lieu
de la bataille. Ces derniers bénéficiaient d'une nette supériorité
numérique (30 000 contre 15 000), mais les troupes étaient
indisciplinées. Philippe VI, qui préférait remettre
la bataille au lendemain, afin de pouvoir reconnaitre le terrain et
se préparer au mieux à l’affrontement, fut confronté à la
désobéissance de ses soldats, qui voulurent attaquer malgré tout.
La
bataille de Crécy
fut un désastre pour Philippe VI, car la cavalerie, fer de lance de
l'armée française, fut décimée par les flèches des archers anglais[3]
(d'autant qu'à l’époque, les montures
n’étaient que peu ou pas protégées). Les assauts se poursuivirent
jusqu’à tard dans la nuit, mais les Anglais restèrent maîtres du
terrain.
La bataille de Crécy, par Jean Froissart, enluminure issue de l'ouvrage Chroniques, Paris, France, XV°siècle.
Suite à cette victoire, Edouard III partit assiéger Calais, qui ouvrit
ses portes à l'ennemi en août 1347[4].
Toutefois, la peste noire, qui frappa la France et l'Angleterre, de 1347
à 1350, mit un terme provisoire aux combats. Les deux pays versèrent un
lourd tribut à cette épidémie, perdant respectivement 40 % et 60 % de
leur population, ce qui entraîna une nette diminution des effectifs
militaires pour le reste de la guerre. Philippe VI lui-même mourut en
août 1350, peut-être victime de la peste.
Diffusion de la peste noire en Europe.
Edouard III, n'étant pas parvenu à empêcher le couronnement de Jean II,
faute de moyens, recommença à organiser des chevauchées depuis la
Guyenne, afin de récolter du butin. Au printemps 1356, Edouard,
l'aîné du roi d'Angleterre (surnommé le Prince Noir en raison de
la couleur de son armure), pilla le Poitou, mais fut intercepté par
l'armée française près de Poitiers, alors qu'il avançait vers Bordeaux.
Jean II, à la tête d'une armée bénéficiant, une fois encore, d'une nette
supériorité numérique, refusa de négocier avec son adversaire, préférant
faire un exemple.
Toutefois, l'armée française fut une nouvelle fois battue, dans les
mêmes conditions qu'à Crécy, les cavalier français étant décimés par les
archers anglais. En outre, la bataille de Poitiers fut d'autant
plus désastreuse que Jean II fut capturé par l'ennemi et emprisonné en
Angleterre.
Jean II lors de la bataille de Poitiers, par Eugène DELACROIX,
1830, musée du Louvre, Paris.
Le jeune Charles V, devant faire face à la menace anglaise, mais aussi à
d'importants troubles dans la capitale (les marchands étaient lassés par
cette guerre qui n'en finissait pas), refusa de signer le traité de
Londres, en mars 1359, qui stipulait que toute terre ayant autrefois
appartenu à l'Angleterre devait être rétrocédée à Edouard III (c'est à
dire plus de la moitié du royaume de France).
Le roi d'Angleterre, faisant face à l'obstination du Dauphin[5],
organisa une nouvelle expédition contre la France, en fin d'année
1359. Cependant, Charles V avait tiré les conséquences des défaites de
Crécy et Poitiers, et avait décidé d'appliquer la stratégie de la terre
déserte. Edouard III, ne rencontrant pas âme qui vive, progressa jusqu'à
Paris, mais quitta rapidement le pays, n'étant pas équipé d'armes de
siège et de provisions suffisantes. Toutefois, les Français restèrent
pas inactifs,
tendant des embuscades à l’encontre des éclaireurs ou des retardataires
de l’armée anglaise.
Suite à cette chevauchée ratée, un nouvel
accord fut négocié entre Edouard III et Jean II le Bon, letraité
de Brétigny. Les possessions du roi d’Angleterre à Calais et en
Guyenne était confirmées ; en outre, ce dernier devait recevoir le
Poitou, le Périgord, le Rouergue, la Gascogne et le Béarn (en gros
la totalité du sud ouest de la France, soit un tiers du royaume). En
revanche, Edouard III abandonnait ses prétentions sur la Normandie,
et renonçait au titre de roi de France.
Royaume de France et royaume
d'Angleterre en 1360, suite au traité de Brétigny.
Cette première période de paix dura de 1360 à 1369, période pendant
laquelle Jean II et son fils tentèrent de remettre de l'ordre dans le
royaume. Toutefois, le roi de France ayant décidé en janvier 1364 de
rentrer en Angleterre[6]
(peut-être pour y retrouver une maîtresse ?), Charles V se considéra
donc dispensé d'appliquer le traité de Brétigny.
Le texte du traité stipulait que
l'Angleterre s'engageait à ne plus porter les armes contre la France
(dans le cas contraire, le traité de paix était automatiquement annulé).
Cependant, la suzeraineté du roi
d’Angleterre sur ses nouvelles possessions ne devait être effective
qu’après la remise de celles-ci par Charles V. Hors, le roi de France
n'eu de cesse de retarder le transfert des territoires, afin de
reconstituer des troupes, et les Anglais ne purent prendre les armes
afin d'accélérer le processus.
En janvier 1368, le prince
Edouard, dans l'incapacité de payer ses troupes, leva un fouage[7]
en Aquitaine. Charles V rappela alors au roi d’Angleterre que le
transfert de suzeraineté ne s’effectuerait que lors de la remise des
territoires par le roi de France, ce qui n’avait pas encore été
effectué. Le Prince Noir avait donc commis une faute en levant un
impôt sur en Aquitaine, une terre qui ne lui appartenait pas encore.
Edouard III, s’apercevant du plan de Charles V, décida alors de se
proclamer roi de France en juin 1368 ; le Valois, de son côté,
confisqua l’Aquitaine.
Le sacre de Charles V, enluminure issue
de l'ouvrage Grandes Chroniques de France, Paris, France, XIV°siècle.
Cette nouvelle phase du conflit, la guerre caroline, fut un
véritable succès pour les troupes françaises. En effet, les Anglais
ne parvenaient pas à combattre l'ennemi en bataille rangée, et les
hommes du roi de France suivaient une stratégie de guérilla,
attaquant les éclaireurs, les retardataires, et les places fortes
anglaises les moins bien protégées.
En juin 1377, le prince Edouard mourut, emporté par la maladie,
suivit quelques jours après par le roi d'Angleterre. Le trône fut
alors confié à Richard II, le fils du Prince Noir, un enfant
incapable de résister à la reconquête française.
Charles V décéda à son tour quelques années plus tard, en juin 1380,
ayant réussi, en l'espace d'une décennie, à reprendre aux Anglais
tous les territoires dont ils s'étaient emparés, à l'exception de
Calais et de la Guyenne.
A sa mort, le roi de France laissait derrière lui un enfant en bas
âge, Charles VI. Une régence fut donc mise en place par les frères
du défunt, Philippe de Bourgogne et Jean de Berry. En
1388, âgé de vingt ans, le jeune homme fut déclaré majeur, et décida
de se rapprocher des Marmousets, les conseillers de son père,
souhaitant échapper à la mauvaise influence de ses oncles.
De son côté, Richard II se trouvait lui aussi dans une situation
difficile, devant faire face à plusieurs émeutes populaires et à
l'hostilité des barons. N'étant pas un belliciste, le roi
d'Angleterre refusa de prendre les armes contre la France, les deux
belligérants connaissant une seconde période de paix entre 1389 et
1415.
En mars 1396, Richard II décida de
signer une paix de 28 ans avec la
France, épousant Isabelle de Valois,
fille de Charles VI. En outre, ce dernier vendit Brest à Jean IV[8],
duc de Bretagne, en décembre de la même année.
Mais en 1399, alors que le roi d'Angleterre se trouvait en Irlande,
son cousin Henri (ce dernier était l'aîné de Jean de Gand,
un des fils d'Edouard III) débarqua en Angleterre, recevant
rapidement le soutien de la population et de la noblesse. Richard
II, vaincu en juillet 1399, fut alors contraint d'abdiquer en faveur
de son cousin, qui devint roi sous le nom de Henri IV[9].
Henri IV, gravure issue de l'ouvrage Cassell's history of
England, Angleterre, 1902.
Toutefois, alors que Charles VI sombrait dans la folie, et que la
France était menacée de guerre civile (affrontement entre les
Bourguignons, menés par Jean sans peur, fils de Philippe
de Bourgogne ; et les Armagnacs, partisans de Louis
d'Orléans, frère cadet de Charles VI, assassiné par les
Bourguignons en novembre 1407), Henri IV ne put intervenir sur le
continent, devant lui même faire face à plusieurs révoltes en
Angleterre.
Portrait de Jean sans Peur, XV°
siècle (à gauche) ; l'assassinat du duc d'Orléans, par Paul Lehugeur, XIX° siècle
(à droite).
A la mort d'Henri IV, en mars 1413, son fils Henri V monta
alors sur le trône. Ce dernier, âgé d'une vingtaine d'années,
décida alors d'en découdre avec la France, donnant naissance à la
période de guerre lancastrienne.
Henri V, gravure issue de l'ouvrage Cassell's history of
England, Angleterre, 1902.
Le nouveau roi d'Angleterre, profitant des dissensions entre
Armagnacs et Bourguignons, débarqua en Normandie en août 1415. Henri
V marcha alors sur Harfleur, qui ouvrit ses portes aux Anglais au
mois de septembre, puis se dirigea en direction de Calais.
A l'annonce de la nouvelle du débarquement anglais, l'armée
française fut envoyée à la rencontre de l'ennemi, parvenant à
l'intercepter en Picardie. Les Français, commandés par Jean de Berry
et Charles d'Orléans (fils du défunt Louis d'Orléans),
étaient en nette supériorité numérique. Toutefois, comme à Crécy et
Poitiers, les cavaliers français furent mis en déroute par les
archers anglais, lors de la bataille d'Azincourt.
Suite à l'affrontement, Henri V rentra en Angleterre, organisant une
nouvelle offensive deux années plus tard, en 1417. Ce dernier
assiégea Caen, qui fit soumission en septembre,
puis Rouen, en juillet 1418, menaçant directement Paris. Le roi
d'Angleterre, profitant de la guerre civile qui battait son plein,
prenait pied petit à petit sur le royaume de France.
En mai 1420, Henri V, bénéficiant du soutien de Philippe le Bon
(fils de Jean sans peur, assassiné par le Dauphin Charles en
septembre 1419), parvint à imposer le traité de Troyes à
Charles VI : Charles, désormais traité de
soi disant Dauphin, était considéré comme un bâtard ; le roi
d'Angleterre devenait héritier de la couronne[10],
recevant régence, la Normandie et la Champagne, ainsi que la main de
Catherine de Valois (une des filles de Charles VI).
Après s’être emparé de Melun, en juillet
1420, Henri V et Philippe le Bon firent une entrée triomphale dans
Paris, en décembre de la même année. En effet, les Parisiens, lassés
par les incessants conflits qui ravageaient le pays depuis plusieurs
décennies, désiraient avant tout vivre en paix.
Les Bourguignons entrent dans Paris, par Martial d'Auvergne, enluminure issue de l'ouvrage
Vigiles de Charles VII,
Paris, France, XV°siècle.
Toutefois, Henri V ne profita guère de la
victoire. Souffrant de dysenterie, il mourut à Vincennes en août
1422. Ce dernier laissait derrière lui un enfant âge de dix mois,
Henri VI, et une régence fut donc mise en place par Jean,
duc de Bedford, frère cadet du défunt.
A noter que Charles VI ne tarda pas lui
non plus à rejoindre son gendre dans la tombe, mourant en octobre
1422.
Charles VII, qui avait banni, déclaré
criminel (suite au meurtre de Jean sans peur) et inhabile à toute
succession, se proclama alors roi de France. Toutefois, à cette
date, ce dernier se trouvait dans une situation particulièrement
compliquée : ainsi, les Anglais occupaient la Guyenne, la Normandie
et la Champagne ; le duché de Bourgogne, s'étendant vers les
Flandres, était quasiment indépendant ; le royaume de France étant
réduit à une portion congrue, partant du Languedoc jusqu'à la Loire.
Royaume de France, royaume
d'Angleterre et duché de Bourgogne en 1429.
Dans l'incapacité de l'emporter contre les Anglais, Charles VII
consentit à signer une trêve avec la Bourgogne.
En 1429, la situation devenait dangereuse,
car l'armée anglaise, qui assiégeait Orléans, menaçait désormais
Bourges, où résidait Charles VII. Le Valois, préférant se réfugier à
Chinon, y rencontra alors Jeanne d’Arc, une jeune
femme de 17 ans qui lui annonça avoir reçu l'ordre de Dieu de
chasser les Anglais hors de France.
Jeanne d'Arc au sacre du roi
Charles VII, par Jean Auguste Dominique
INGRES, 1854, musée du Louvre, Paris.
Contre toute attente, Jeanne fut placée à la tête
d'une armée de 4 000 hommes, se dirigeant sur Orléans.
Passant par Blois, la jeune femme fut immédiatement
rejointe par de nombreux petits chevaliers et hommes d’armes,
subjugués par le courage de la Pucelle.
Les Français, à l'issue d'une semaine de combats, parvinrent à
repousser les Anglais, qui abandonnèrent le siège de la ville.
Par la suite, l'armée royale organisa une chevauchée vers Reims, en
plein territoire ennemi, alors que Jeanne d'Arc avait émis le
souhait que Charles VII soit officiellement sacré roi de France.
Parvenant à repousser les troupes rivales rencontrées sur le chemin,
le Valois reçut la Sainte onction en juillet 1429.
Le sacre de Charles VII,
par Jules Eugène LENEPVEU, 1874, le Panthéon, Paris.
Charles VII, désormais considéré comme l'officiel représentant de
Dieu sur terre, comme le voulait la tradition, reçut rapidement
l'allégeance de nombreuses cités : Laon, Sens, Soissons, Crécy, etc.
Par ailleurs, le roi de France signa une nouvelle trêve avec la
Philippe le Bon.
Au mois de septembre, Jeanne partit assiéger Paris, alors entre les
mains des Bourguignons. Toutefois, l'offensive fut un échec, et
Charles VII, soucieux de respecter la trêve, décida de se retirer
sur la Loire et de licencier son armée.
La turbulente Jeanne d'Arc, quant à elle, fut faite prisonnière à
Compiègne, alors que la ville était assiégée par les Bourguignons.
Vendue aux Anglais, elle fut condamnée au bûcher en mai 1431.
Jeanne d'Arc sur le bûcher,
par Jules Eugène LENEPVEU, 1874, le Panthéon, Paris.
Malgré les récents coups de force de l'armée française, Charles VII
restait dans une situation difficile. Toutefois, ce dernier
bénéficia du soutien des Normands, qui se révoltèrent contre
l'Angleterre en 1434 ; puis il signa le traité d'Arras en
1435, mettant un terme définitif à la guerre contre la Bourgogne
(Philippe le Bon récupérait plusieurs territoires dans l'est de la
France, obtenant une indépendance de facto). Cet accord fut
bien accueilli à Paris, qui décida d'ouvrir ses portes à l'armée
royale.
La prise de Paris, par Martial
d'Auvergne, enluminure issue de l'ouvrage Vigiles de Charles
VII,
Paris, France, XV°siècle.
Charles VII, bénéficiant d'un atout de taille, les canons des frères
Jean et Gaspard Bureau, parvint à s'emparer de
Pontoise, en septembre 1441, puis s'empara de plusieurs territoires
dans le sud ouest, à l'été 1442. Toutefois, en avril 1444, Charles
VII et Henri VI signèrent une trêve d'au moins deux ans.
En 1449, le roi de France repartit à l'assaut, marchant vers la
Normandie, une région hostile à l'occupation anglaise. Bénéficiant
d'une puissante artillerie, les Français parvinrent à prendre Rouen
et plusieurs places fortes, parvenant à chasser l'ennemi de la
région à compter de 1450. A cette date, les Anglais ne conservaient
plus que Calais dans le nord de la France.
Charles VII en Normandie, par
Martial d'Auvergne, enluminure issue de l'ouvrage Vigiles de Charles
VII, Paris, France, XV°siècle.
Puis, en 1451, Charles VII décida de s'attaquer à la Guyenne,
remportant une fois encore une série de succès. Suite à la chute de
Bordeaux, en juin, les principales villes de la région décidèrent
d'ouvrir leurs portes, mettant un terme à la présence anglaise dans
cette région.
Le dernier affrontement de la guerre de Cent Ans fut livré lors de
la bataille de Castillon, ultime tentative anglaise de
reprendre pied dans le sud ouest ; toutefois, les Français,
bénéficiant d'une importante artillerie, contraignirent l'ennemi à
la retraite.
Royaume de France et royaume d'Angleterre
à la fin de la guerre de Cent Ans (1453).
La bataille de Castillon étant le dernier affrontement de la guerre
de Cent Ans, l'historiographie traditionnelle considèrent que la
guerre de Cent Ans s'acheva en 1453. Toutefois, à cette date, les
deux belligérants ne signèrent pas de traité de paix, et, comme nous
l'avons vu plus tôt, l'Angleterre conservait Calais.
Ainsi, le seul texte ressemblant à un accord de paix, signé entre la
France et l'Angleterre, fut le traité de Picquigny, signé en
août 1475 par Louis XI (fils de Charles VII) et Edouard IV
(qui avait détrôné Henri VI en mars 1461).
Le roi d'Angleterre, recevant 75 000 écus ainsi qu’une pension
annuelle de 50 000 écus, renonçait à ses possessions continentales
et à la couronne de France. Par ailleurs, les deux souverains
signaient une trêve de neuf ans.
Il convient de préciser que le terme
« guerre de Cent Ans » fit son apparition tardivement, vers la
fin du XV° siècle, à une époque où cet épisode était déjà ancien.
Toutefois, comme nous avons pu le voir plus tôt, cet affrontement
entre la France et l'Angleterre ne fut évidemment pas continu,
alternant entre phases de guerre et phases de trêves d'une durée
plus ou moins longue. Ainsi, si 1337 marque indéniablement le début
du conflit, c'est la date de 1453 qui fut retenue pour marquer la
fin de la guerre.
Ainsi, la guerre de Cent Ans ne dura pas un siècle mais 116 ans, ce
qui fait de ce conflit l'un des plus longs de l'histoire de
l'humanité
.
Par ailleurs, si l'on retient la date de 1475 pour marquer la fin de
la guerre, le conflit n'aurait pas duré 100 ou 116 ans, mais bien
138 années.
A noter que la guerre de Cent Ans n'est
pas une exception européenne, l'Histoire ayant gardé la trace de
plusieurs conflits étalés sur plusieurs décennies : la
guerre de Quatre-vingt Ans,
opposant l'Espagne aux Provinces-Unies, de 1568 à 1648 ; la
Guerre froide,
opposant les pays occidentaux au bloc soviétique, de 1945 à 1991 ;
la
guerre de Trente Ans,
qui opposa le Saint Empire romain germanique au Danemark, à la Suède
et à la France, de 1618 à 1648 ; la
guerre d'Algérie,
opposant la France aux mouvements indépendantistes algériens, de
1945 à 1962 ; etc.
[1]
L'appellation de
« prince de sang
» date du XV° siècle. Elle est employée pour désigner les
aristocrates issus de la lignée mâle de
Saint Louis.
[2]
Rappelons que l'Angleterre avait été conquise en 1066 par
Guillaume le Conquérant,
duc de Normandie et vassal du roi de France. Ainsi, si le souverain
anglais était
de facto
aussi puissant que son homologue français, les liens de vassalité
avaient été conservés depuis l'expédition de Guillaume. Ainsi, le
roi de France pouvait confisquer les territoires appartenant
de jure
à la couronne.
Pour en savoir plus sur la conquête de 1066,
cliquez ici.
[3]
Chaque archer anglais, équipé de son arc long (longbowen
anglais), pouvait lancer entre 6 et 12 flèches à la minute. Les
archers anglais étant près de 6 000, ils envoyaient donc environ
50 000 flèches par minute sur les hommes de Philippe VI, ce qui
explique les très importantes pertes du côté français.
[4]
Calais resta entre les mains des Anglais jusqu'en 1558.
[5]
C'est ainsi qu'était surnommé l'héritier du roi de France, titulaire
du Dauphiné.
[6]
Il y mourut peu de temps après, en avril 1364.
[7]Le fouage était un impôt sur les feux. En
effet, chaque famille se réunissant autour d’un même foyer
(étymologiquement le lieu où brûle un feu) devait alors payer le
fouage.
[8]
Ce dernier était le fils de Jean de Montfort, que nous avons évoqué
plus tôt.
[9]
A noter que Richard II mourut peu de temps après, en février 1400,
vraisemblablement assassiné.
[10]
C’est ainsi que les souverains anglais portèrent le titreroi
de France et d’Angleterrejusqu’en
1802, date à laquelle Napoléon mit fin à cette coutume.