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Les mensonges de l'Histoire


Les orgies romaines, débauche d'alcool et de sexe

Faux ! Voici la définition que donne le dictionnaire Le Petit Robert (édition 1990) au mot « orgie » : nom féminin (XV°-XVI° siècles, du latin orgia). 1. Antiquité (pluriel). Fêtes solennelles en l'honneur de Dionysos à Athènes, de Bacchus à Rome. 2. Moderne. Partie de débauche, où les excès de table, de boisson, s'accompagnent de plaisirs grossièrement licencieux.

Si ce mot, aujourd'hui, est bien employé pour désigner une débauche d'alcool et de sexe, à l'origine, il ne décrivait que les fêtes organisées lors de certaines cultes religieux.

Les Romains de la décadence, par Thomas Couture, XIX° siècle.

 

Les fêtes orgiaques, à l'époque de la Grèce classique[1], constituaient déjà une tradition vieille de plusieurs siècle, qui à l'origine célébrait le printemps et le cycle de la vie.

A Athènes, les orgies étaient associées au culte de Dionysos. Cette divinité, considérée par les Grecs comme étrangère (parfois représentée portant un bonnet phrygien, elle était peut-être d'origine Indienne ou Mésopotamienne[2]), était associée aux cycles de régénération et à la vigne.

Dionysos, satires et ménades, représentation figurant sur un vase grec du IV° siècle avant Jésus Christ, musée du Louvre, Paris.

Selon certaines traditions, Dionysos était le fils de Zeus et de Perséphone, déesse des Enfers. Héra, jalouse des infidélités de son mari, envoya alors des Titans à la rencontre du jeune homme, ces derniers étant chargés de le tuer. Dionysos, incapable de s'enfuir, fut alors dépecé par ses agresseurs, qui mangèrent sa chair crue.  

Au mois d'avril étaient fêtées les Dionysies, à Athènes comme dans de nombreuses cités de la Grèce antique, célébrant l'arrivée du printemps[3]. Cependant, outre ce culte public, il existait aussi un culte privé, consacré à Dionysos. Ce dernier, à l'origine exclusivement composé exclusivement de femmes, les Ménades, se déroulait souvent de nuit. Les participantes, consommant une boisson alcoolisée à laquelle était ajoutée du lierre et des champignons hallucinogènes, étaient alors prises de transes. Les auteurs antiques racontent que les Ménades, commémorant la mort de Dionysos, dépeçaient des chèvres à mains nues, voire les malheureux visiteurs de passage.

La mort d'Orphée, par Louis BOUQUET, vers 1939, musée des années 1930, Paris.

 

A l'époque romaine, le culte de Dionysos fut importé en Italie, donnant naissance au dieu Bacchus[4]. Comme en Grèce, ce culte fut très populaire, les Romains organisant deux fêtes en l'honneur de cette divinité : les grandes dionysiaques, à l'arrivée du printemps, et les petites dionysiaques, à l'automne.

A noter qu'il existait à Rome un culte privé en l'honneur de Bacchus, célébré par les Bacchanales et les Bacchants. Ce culte à mystère, qui selon les auteurs antiques, s'achevait souvent dans une débauche de sexe et d'alcool, provoqua une vague d'indignation dans la capitale. Suite au scandale des Bacchanales, en 186 avant Jésus Christ, le culte de Bacchus fut interdit en Italie.

Malgré cette interdiction sénatoriale, les célébrations en l'honneur de cette divinité ne disparurent pas, restant vivaces dans les régions du sud de l'Italie, où la tradition grecque était encore présente[5].

 

Toutefois, si l'on exclut la pratique de ces cultes à mystères, les Romains avaient-ils des mœurs légères, ou bien étaient-ils garants d'un rigoureux ordre moral ?

De prime abord, il convient de noter que de nombreux comportements antiques diffèrent de ceux que l'on connait aujourd'hui : ainsi, la prostitution était légale ; les peintures érotiques étaient prisées par les familles respectables ; il n'existait pas de dichotomie entre hétérosexualité et homosexualité, les relations entre hommes étant tolérées, à condition que le citoyen mâle tienne le rôle actif et n'aie pas un comportement efféminé (côté féminin, les relations lesbiennes sont aujourd'hui mal connues en raison d'un manque de sources).    

Fresque érotique de l'époque romaine.

Toutefois, contrairement à ce que l'on pourrait imaginer aujourd'hui, les Romains étaient détenteurs d'un code moral strict. La société romaine étant basée sur un schéma patriarcal, le citoyen devait apprendre l'autodiscipline, afin d'atteindre la virtus[6], qualité masculine mélangeant force morale et énergie. La femme, quant à elle, devait faire preuve de pudicitia (d'où dérive le mot « pudeur »), qualité mélangeant l'autodiscipline et la retenue. Ainsi, pour les deux sexes, les trop fortes passions et le manque de maîtrise étaient vivement critiquées, mais le divorce était autorisé.

Par ailleurs, dans le droit romain, le stuprum (qui a donné le mot « stupre ») punissait divers crimes sexuels : l'adultère, le viol, le raptus (l'enlèvement), et l'incestum (composé des termes in, « non », et castum, « chaste »), désignant les actes violant la pureté religieuse (violation du vœu de chasteté, travestissement, inceste, etc.). La pédophilie était passible de la peine de mort, car les enfants des deux sexes étaient porteurs de la toge prétexte (un habit brodé de pourpre, porté aussi par les magistrats), qui garantissait l'inviolabilité[7]

Enfin, contrairement à la coutume en usage dans le grec, la nudité publique était considérée comme infamante par les Romains (en règle générale, la nudité était réservée aux prisonniers ou aux esclaves, présentés nus lors de leur vente). Néanmoins, les thermes étaient le seul endroit où la nudité était tolérée (quoique mal acceptée au III° siècle avant notre ère, elle se démocratisa au fil des siècles).

 

Si aujourd'hui les sources archéologiques mentionnent des scènes de sexe à trois ou quatre participants, nous avons pu voir que la morale romaine n'était pas tournée vers la débauche et la luxure. D'où nous vient donc cette vision que nous avons des Romains ?

Fresque romaine représentant une scène de sexe à trois.

En réalité, cette critique de la société romaine provient des chrétiens des premiers siècles de notre ère. Ainsi, ces derniers déployèrent une intense activité de prosélytisme, afin de réprouver les mœurs et coutumes des Romains, jugés peu catholiques. C'est ainsi qu'apparut peu à peu une morale chrétienne, qui en l'espace de quelques siècles parvint à faire interdire interdisant l'homosexualité, les thermes, l'érotisme et la nudité.

Aujourd'hui, alors que le tabou du sexe est en passe de disparaître, et que le mariage homosexuel a été adopté, sommes-nous en train d'opérer un retour aux vieilles traditions romaines ? 

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[1] L'on appelle époque classique cette période de la Grèce antique qui se prolongea du V° au IV° siècle avant Jésus Christ. Pour en savoir plus à ce sujet, cliquez ici.

[2] A noter que Dionysos était une divinité très ancienne, étant déjà célébrée à l'époque mycénienne (c'est à dire au XV° siècle avant Jésus Christ, soit mille ans avant l'époque classique). Pour en savoir plus sur cette période, cliquez ici.

[3] L'on peut noter la ressemblance entre le culte de Dionysos et celui de Déméter. Cette déesse était la mère de Coré, qui fut enlevée par Hadès, dieu des Enfers. Déméter, partant à la recherche de sa fille, cessa de fertiliser la terre, causant une importante famine. Finalement, Zeus décida que Coré (rebaptisée Perséphone) était libre de rejoindre sa mère, mais devait passer chaque année trois mois sous terre en compagnie d'Hadès (c'est ainsi que les Grecs expliquaient le passage de l'été à l'hiver). Pour en savoir plus sur les Enfers, cliquez ici.

[4] A l'origine, le terme bacchus (qui signifie « vin, vigne » en latin), était un épithète accordé par les Romains à Dionysos. Cette divinité fut donc rebaptisée Bacchus lors de son introduction à Rome.

[5] A noter que le sud de l'Italie était autrefois appelée Grande Grèce, car les Grecs y avaient implanté de nombreuses colonies.

[6] A noter que vir signifie  « homme », en latin.

[7] A noter toutefois que cette protection ne concernait pas les enfants d'esclaves ou de prisonniers de guerre.

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