La chute de Constantinople a entraîné l'apparition de la
Renaissance
Nous l'avons tous appris à l'école : suite à la
prise de Constantinople par les Turcs, en 1453[1],
les savants grecs, contraints à l'exil, se réfugièrent en Italie. Ces
derniers, emmenant avec eux leurs connaissances, diffusèrent peu à peu leur
savoir dans la péninsule italique, ce qui favorisa l'apparition de la
Renaissance. Par la suite, ce mouvement intellectuel se répandit dans
les autres pays d'Europe.
Mais une fois encore, il semblerait que la réalité soit bien différente des
idées reçues...
La prise de Constantinople
par les Turcs, par Jean Chartier, enluminure issue de l'ouvrage Chronique,
Belgique, XV°siècle.
Dans un premier temps, il convient de préciser que
le terme de
« Renaissance » (Rinascimento en italien)
désignait à l'origine un renouveau des arts et des lettres, et non pas une
époque comme ce fut le cas à compter du XIX° siècle.
Les frontières temporelles de cette période,
marquant traditionnellement le passage du Moyen-âge à l'époque moderne, sont
difficiles à déterminer, d'autant que l'Europe avait déjà connu plusieurs
mouvements de Pré-Renaissance auparavant : Renaissance
carolingienne[2]
(VIII°-IX° siècles), Renaissance othonienne (X° siècle[3]),
et pré-Renaissance du XII° siècle[4].
Par ailleurs,
si le mythe des savants grecs exilés venus répandre leur savoir dans
l'Italie du XV° siècle est très répandu, il reste erroné. Ainsi, la
Renaissance débuta dès le XIV° siècle dans la péninsule italique (soit 150
ans avant la chute de Constantinople), s'appuyant sur les avancées
intellectuelles héritées du XII° siècle (à noter qu'à cette époque, le nord
de l'Italie était composée de républiques marchandes, ce qui favorisa les
échanges économiques et culturels).
Toutefois, si les savants grecs ne furent pas à l'origine de la Renaissance,
ils y contribuèrent très tôt, bien avant la chute de Constantinople. La
période de pré-Renaissance avait permis à l'Occident de découvrir les
ouvrages des auteurs grecs (traduits en arabe puis en latin), qui furent
utilisés par les écoles chrétiennes pour l'enseignement des sciences, des
mathématiques et de la philosophie. Toutefois, à compter du XIV° siècle,
l'intérêt se porta sur les textes antiques consacrés à la littérature,
l'Histoire, la théologie et la rhétorique.
Toutefois, l'évènement qui fit la différence avec les autres mouvements de
pré-Renaissance fut l'apparition de l'imprimerie[5],
permettant de diffuser les connaissances auprès d'un plus large public
(alors qu'autrefois, seuls les ecclésiastiques avaient accès au savoir).
La Renaissance se diffusa en Europe pendant trois siècles, baptisés
Trecento (XIV° siècle), Quatrocento (XV° siècle) et
Quintocento (XVI° siècle) en Italie. Cependant, comme il n'existe pas de
date fixant le début de la Renaissance, il n'existe par non plus de date de
fin. En France, la tradition retient la date de 1610, année du décès d'Henri
IV[6],
mais il existe d'autres datations, plus marquantes, mettant fin à cette
période : 1600, date à laquelle l'astronome Giordano Bruno
fut brûlé vif par l'Eglise, pour avoir entre-autres affirmé que
l'univers était vraisemblablement infini ; ou 1633, date à laquelle
Galilée
fut contraint d'abjurer sa théorie de
l'héliocentrisme[7].
A noter qu'au XIX° siècle, la Renaissance fut présentée comme une période
brillante, mettant fin à un Moyen-âge jugé crasseux et obscurantiste.
Toutefois, comme nous avons pu le voir, il n'y eut pas de "cassure" entre
les deux périodes, la Renaissance ayant bénéficié des avancées
intellectuelles des siècles précédents. En outre, l'époque moderne ne fut
pas moins intolérante que le Moyen-âge, étant agitée par la peste noire
(qui tua près de la moitié de la population européenne à compter de 1350),
les guerres de religion (qui ensanglantèrent l'Italie du XV° au XVI°
siècle[8]),
la seconde Inquisition[9],
etc
[1]
Pour en savoir plus à ce sujet, voir le b), 7, chapitre quatrième,
l'Empire byzantin.
[2]
La Renaissance carolingienne (ou renovatio en latin) se
déroula sous le règne de Charlemagne. Ce dernier, constatant
que les écoles avaient fermé suite à la chute de l'Empire romain,
décida
que chaque évêché et chaque monastère
devait ouvrir une double école ; l’une intérieure (réservée
aux clercs et aux moines)l’autre
extérieure
(gratuite et ouverte à tous). Pour en savoir plus à ce sujet,
cliquez ici.
[3]
Initié sous le règne d'Othon I°, Empereur de
Germanie, ce mouvement fut inspiré par la Renaissance carolingienne.
En effet, les Othoniens, bien que ne faisant pas partie de la
dynastie carolingienne, se considéraient comme successeurs de
Charlemagne. Pour en savoir plus
sur cette période,
cliquez ici.
[4]
Ce mouvement fit son apparition à l'époque des
croisades, lorsque que les œuvres des anciens philosophes
grecs furent diffusées en Occident (ces dernières, traduites en arabe,
furent ensuite traduites en latin).
Pour sur les conflits au Proche-Orient au cours du Moyen-âge, cliquez ici.
[5]
L'imprimerie fut inventée par Johannes Gutenberg, un inventeur allemand
né au début du XV° siècle. Ce dernier, imprimant et diffusant plusieurs
exemplaires de la Bible à compter de 1452, n'eut toutefois pas le succès
escompté. Ainsi, son invention ne se répandit en Europe qu'après sa mort.
[7]
Ce dernier affirmait que la Terre tournait
autour du soleil, qui était le centre de l'univers. Au contraire,
l'Eglise défendait la théorie du géocentrisme, faisant de la
Terre le centre de l'univers.
[8]
La première guerre d'Italie éclata en 1494, lorsque Charles VIII
se lança à l'assaut de Naples, ville qu'il considérait comme faisant partie de
son héritage (cliquez
ici). Cependant, cette expédition s'acheva sur un échec. A la
mort de son cousin, Louis XII décida de reprendre à son compte les
prétentions du défunt (voir
ici). Mais au fil des années, les guerres d'Italie se muèrent
progressivement en un théâtre des rivalités opposant la France au Saint
Empire romain germanique (cliquez
ici).